Adolphe Thiers

1797-1877

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Portrait d'Adolphe Thiers. Source : SHD terre

 

Adolphe Thiers à la fois historien et homme d'État est emblématique de la Troisième République naissante, "bourreau de la Commune" et fondateur de la République.

Marie-Louis-Joseph-Adolphe Thiers est né à Marseille dans une famille bourgeoise. Desservi par la conduite dispendieuse de son père, le jeune Adolphe effectue une brillante scolarité en tant que boursier. Après des études de droit à Aix-en-Provence, il s'installe à Paris en 1821, fréquente les milieux libéraux, et entame une carrière de journaliste au Constitutionnel avant de fonder Le National le 3 janvier 1830 avec Auguste Mignet et Armand Carrel, combattant dans ses articles la royauté de Charles X. Dès 1824, avec son ami Auguste Mignet, il entreprend un récit historique de la Révolution de 1789. Par la suite, Thiers se consacre à Napoléon et fournit le premier une relation complète, bien que partisane, de son parcours dans L'Histoire du Consulat et de l'Empire, publiée de 1845 à 1862 - il proposera d'ailleurs en 1836 et 1840 le retour des cendres de Napoléon. Ses travaux lui valent d'être élu à l'Académie française en décembre 1834.

Politiquement, Thiers est un "libéral", un homme de progrès, attaché au principe de la souveraineté nationale exprimée par des élections libres et par des représentants contrôlant l'exécutif.

Il joue un rôle actif dans la révolution de Juillet en organisant la résistance des journalistes menacés par les "Quatre Ordonnances" (textes visant à "museler" la presse), allant jusqu'à soutenir Louis-Philippe lors de sa prise de pouvoir. Ce dernier l'appelle au gouvernement aux fonctions de sous-secrétaire d'Etat aux Finances, ministre de l'Intérieur puis ministre de l'Agriculture et du Commerce. Il est alors en opposition permanente avec les légitimistes, les républicains et les bonapartistes. Pendant la Seconde République (1848-1851) Thiers compose avec un régime qu'il jugera "décevant" car trop conservateur. Parlementaire, Thiers met à bas les thèses socialistes de Proudhon, écrivant à l'occasion un petit traité grand public sur La Propriété, il soutient la loi Falloux et l'expédition de Rome. Il ira même jusqu'à soutenir le candidat Louis-Napoléon Bonaparte lors des élections présidentielles mais refusera le coup d'Etat du 2 décembre 1851, position qui lui vaudra l'exil en Angleterre, en Italie puis en Suisse.

Thiers s'efface ainsi de la scène politique dans les premières année de pouvoir de Napoléon III. Il revient en politique en opposant de gauche sous l'Empire libéral (1860-1870). "Thiers encore catalogué "orléaniste" en raison de son passé de 1830-48, est en fait le leader de la poignée de royalistes restés fidèles au libéralisme." (M. Aguhlon). Il accepte l'expédition de Crimée mais reste très critique à l'égard de la politique étrangère de Napoléon III qu'il juge trop libérale et mal appropriée dans la péninsule italienne et en Allemagne . il exigera la liquidation de l'expédition du Mexique.

À la chute du Second Empire Thiers, élu lors des dernières élections de l'Empire en 1869, participe au gouvernement de la Défense nationale, dont il finit par prendre la direction, ayant contribué activement, à partir du 10 septembre 1870, à la préparation de la paix : Jules Favre, ministre des Affaires étrangères, le sollicite au nom du gouvernement afin qu'il modère les politiques offensives des puissances européennes, notamment les ambitions de Bismarck - de 1873 à 1875 Thiers effectuera un long périple dans toutes les capitales européennes. L'armistice signé le 28 janvier 1871, Thiers est élu à la tête du nouveau gouvernement lors des élections du 8 février 1871. En chef du pouvoir exécutif, il met fin dans un bain de sang, au printemps de 1871, au mouvement communard . il est le "bourreau de la Commune". La répression de l'insurrection parisienne, mouvement des "Fédérés", est menée par Thiers avec l'armée des "Versaillais", le gouvernement étant alors installé à Versailles, qui, à la tête de 63500 hommes renforcés par les 130000 prisonniers de guerre français libérés et appuyés par Bismarck, réinvestit Paris et les communes voisines entre mars et juin 1871.

Les combats feront environ trente mille morts dans le rang des Fédérés. Quatre tribunaux d'exception jugeront les "Communards" jusqu'en 1874 : 13804 condamnations seront prononcés dont nombre d'entre elles pour les bagnes de Guyane ou de Nouvelle-Calédonie - ils ne seront amnistiés qu'en juillet 1880.

Le 24 mai 1873, la droite parlementaire qui l'a porté au pouvoir, hostile à l'orientation républicaine que Thiers donne au Gouvernement, obtient sa démission et le remplace par Mac Mahon.

Adolphe Thiers décède le 3 septembre 1877. Un cortège funèbre et 384 couronnes suivi par Gambetta et Hugo, en dépit du refus de sa famille de procéder à des obsèques officielles, donneront une dimension nationale au dernier voyage de cet homme d'État aux multiples facettes.

 

Sources : Aguhlon (Maurice), "Adolphe Thiers", dans : Célébrations nationales 1997, Paris, Direction des Archives de France. Mourre (Michel), Dictionnaire encyclopédique d'histoire, Paris, Bordas, 1996 (1978)
Sources complémentaires : Guiral (Pierre), "Thiers (Adolphe)", dans : Tulard (Jean), Dictionnaire du Second Empire, Paris Fayard, 1995

Gaston Monnerville

1897-1991

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Portrait de Gaston Monnerville.
Source : www.senat.fr

(2 janvier 1897 : Cayenne, Guyane française - 7 novembre 1991 : Paris)

 

Petit-fils d'esclave, Gaston Monnerville naît à Cayenne en 1897. Elève brillant, il est reçu, en 1912, au concours des bourses métropolitaines et vient à Toulouse pour y achever, au lycée Pierre de Fermat (Hôtel Bernuy), ses études secondaires comme boursier avant d'intégrer les Facultés de lettres et de droit de Toulouse.

En 1921 il devient docteur en droit après avoir soutenu une thèse sur "L'enrichissement sans cause" qui est honorée d'une souscription du ministère de l'instruction publique et primée. La même année, il est reçu au concours des secrétaires de la Conférence, il obtient la médaille d'or "Alexandre Fourtanier" qui récompense l'un des meilleurs secrétaires, puis quitte Toulouse et s'inscrit au Barreau de Paris. Il entre bientôt au cabinet d'un célèbre avocat et homme d'État, César Campinchi, dont il sera, pendant huit ans, le principal collaborateur.

En 1923, Gaston Monnerville est reçu au concours des secrétaires de la Conférence des Avocats, à la Cour d'appel de Paris. En 1927, il est élu président de l'Union des jeunes avocats et s'illustre dans plusieurs grands procès comme l'affaire "Galmot" en 1931. Inculpés après l'émeute provoquée en 1928 par la fraude électorale et par la mort suspecte du député Jean Galmot, quatorze Guyanais sont traduits devant la Cour d'assises de Nantes. Avec Fourny, Zevaes, et Henri Torres, Monnerville assure leur défense. Sa plaidoirie produit un effet considérable sur les jurés qui se prononcent pour l'acquittement.

Ce procès retentissant marque ses débuts en politique. Il se présente en Guyane, contre le député sortant, Eugène Lautier, et est élu au premier tour de scrutin, en 1932 - il sera réélu en 1936, après avoir été élu maire de Cayenne en 1935.

Deux fois sous-secrétaire d'État aux Colonies, en 1937 et 1938, sa connaissance des questions internationales et d'Outre-Mer le font choisir comme membre de la délégation française à la Conférence du Pacifique, dite "Conférence des Neuf Nations" qui a lieu à Bruxelles, en 1937, lors de l'agression du Japon contre la Chine. En 1939, Gaston Monnerville est parlementaire âgé de plus de quarante ans. Aux termes de la loi sur la Nation en temps de guerre, il n'est pas mobilisable. Avec quatre de ses collègues, il fait prendre un décret-loi, signé Daladier, qui prévoit une exception et, aussitôt, il s'engage dans la Marine. Il sert comme "officier de justice", sur le cuirassé "La Provence", expérience qu'il consignera dans un journal de bord.

Monnerville est démobilisé une semaine après le vote à Vichy des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, le 10 juillet 1940. Le 17 juillet 1940, il se rend à Vichy pour protester contre l'Armistice et la situation faite aux originaires d'Outre-Mer par le gouvernement Pétain. Dès l'hiver 1940-1941, il milite dans le mouvement de résistance "Combat" et assure la défense des personnes emprisonnées pour délit d'opinion ou origine ethnique. Sous le pseudonyme de "Commandant Saint-Just", il fait partie des maquis d'Auvergne (groupe du commandant Cheval), d'octobre 1942 à octobre 1944. Il administre de juin à août 1944 l'hôpital de Cheylade, réquisitionné par les FFI et prend part, du 7 au 10 septembre 1944, à l'opération "Bec d'Allier".

La Croix de Guerre 1939-1945, la Rosette de la Résistance et la Légion d'Honneur à titre militaire, témoignent de son courage et de son patriotisme.

 

Désigné par la Résistance métropolitaine, en novembre 1944, pour siéger à l'Assemblée consultative provisoire, il y préside la "Commission de la France d'Outre-Mer" et a l'honneur, au nom des populations de l'Union française, de célébrer, dans la séance solennelle du 12 mai 1945, la victoire des Alliés. Il prononce également, durant cette séance, un discours en hommage aux combattants de l'Outre-Mer.

En 1945, le Gouvernement provisoire de la République appelle le président Monnerville à la tête de la commission chargée de préparer le futur statut politique des territoires d'Outre-Mer. Cette commission élabore le cadre constitutionnel de l'Union française.

Élu pour la troisième fois député de la Guyane à l'Assemblée Constituante, le 21 octobre 1945, son mandat est renouvelé le 2 juin suivant, à la deuxième Assemblée nationale Constituante.

Le 15 décembre 1946, il est désigné comme vice-président de cette assemblée de Guyane. En mars 1947, il est élu président du Conseil de la République et réélu en janvier 1948. En novembre 1948, il est élu sénateur du Lot, maire de Saint-Céré (Lot) de 1964 à 1971, puis président du Conseil de la République définitif, remplacé par le Sénat, dont il assurera la présidence pendant vingt-deux ans. De mars 1974 à mars 1983, il siège au Conseil Constitutionnel.

Gaston Monnerville, grand serviteur de l'État à l'étranger, après avoir été délégué de la France en 1937 à la Conférence du Pacifique, puis en janvier 1946 à l'Assemblée des Nations Unies, représente la France en Amérique latine en 1957, en Haïti, en 1980, à l'occasion du bicentenaire de sa capitale, Port-au-Prince.

Homme de lettres, Gaston Monnerville publie en mai 1968 un ouvrage sur Georges Clemenceau, puis se consacre à la rédaction de ses mémoires, Témoignages, De la France équinoxiale au Palais du Luxembourg (1975), et Vingt-deux ans de présidence (1980).

 

Sources : Dictionnaire des parlementaires, Paris, La Documentation française - www.senat.fr

Léon Gambetta

1838-1882

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Portrait de Léon Gambetta. Sources : SHD

 

Léon Gambetta naît à Cahors le 2 avril 1838, ville d'adoption de Joseph, un génois, et de Marie Madeleine Orasie Massabie, fille d'un pharmacien de Molières, cité du Tarn-et-Garonne. Très jeune, Léon se fait remarquer par son intelligence et sa prodigieuse mémoire. Il devient interne au petit séminaire de Montfaucon avant de poursuivre sa scolarité au lycée de Cahors. Candidat au Concours général, il décroche le prix de dissertation française puis le baccalauréat ès-lettres en 1856, à 17 ans.

Au grand dam de son père qui aurait voulu le voir lui succéder dans les affaires, le jeune homme, orateur talentueux, part pour Paris en janvier 1857 et s'inscrit à l'École de droit afin d'embrasser la carrière d'avocat. Il demande la nationalité française le 29 octobre 1859 et l'obtient. Il soutient sa thèse de licence en droit le 19 janvier de l'année suivante et prête serment le 8 juin 1861.

Ses premières plaidoiries le mettent en rapport avec les groupes parlementaires d'opposition de "gauche" (les Républicains). L'affaire de la souscription Baudin (1851) le révèle en 1868. Ce procès est intenté par le gouvernement impérial contre les journaux favorables à une souscription en vue d'édifier un monument à la mémoire de cet élu tué sur les barricades, faubourg Saint-Antoine, aux côtés du peuple de Paris, le 3 décembre.

Le jeune avocat prononce pour l'occasion un réquisitoire contre le régime de Louis Napoléon Bonaparte.

En janvier 1870, député de la circonscription de Marseille, il s'oppose au gouvernement d'Emile Ollivier dont le ralliement à Napoléon III est perçu comme une traîtrise par les républicains. Gambetta appelle cependant à l'union nationale et vote les crédits militaires à la veille de la guerre. Dans la nuit du 3 au 4 septembre, Léon Gambetta, après avoir vainement tenté d'apaiser la situation insurrectionnelle née de l'annonce de la capitulation de Sedan, proclame la déchéance de l'Empire, dans un Palais Bourbon envahi par la foule. À l'Hôtel de Ville, il assiste à la proclamation du Gouvernement de Défense nationale auquel il est associé aux côtés de Jules Simon et Ernest Picard. Il s'installe de son propre chef au ministère de l'Intérieur et ordonne la destitution des préfets de l'Empire. Il organise en même temps la défense de la capitale.

Le 7 septembre, dans Paris assiégée, Léon Gambetta apparaît comme l'homme providentiel. Face à un gouvernement débordé par la situation, il anime la Défense nationale en province. Gambetta incarne alors la résistance à l'occupant prussien. Il s'envole en ballon pour rejoindre la délégation de Tours, via Montdidier, Amiens et Rouen, ajoute le département de la guerre à son portefeuille, met sur pied des armées nouvelles, veille à l'encadrement et au ravitaillement des troupes, crée des manufactures, multiplie les déplacements, les instructions et les discours appelant à "prolonger la guerre jusqu'à l'extermination". Au même moment la capitale subit le siège des impériaux : la ville est bombardée, la population est affamée. Adolphe Thiers finit par mandater (22 janvier 1871) Jules Favre, chargé des affaires extérieures, auprès de Bismarck afin de convenir d'un armistice. Gambetta est écarté de la scène politique et des négociations en raison d'un décret qu'il a signé à Bordeaux rendant inéligibles les membres des assemblées de l'Empire. Il démissionne le 6 février.

Gambetta est élu sur neuf listes lors des élections générales du 8 février 1871 : dans l'Est, à Paris, à Marseille, en Algérie. Il choisit le Bas-Rhin. Il vote contre la paix et marque sa volonté de récupérer les provinces perdues. De retour de sa retraite à Saint-Sébastien, ayant perdu son siège de député le 2 juillet, il fait campagne dans les Bouches-du-Rhône et dans la Seine.

Député de la Seine, Gambetta forme un parti parlementaire d'extrême gauche, " l'Union républicaine", fonde un journal, La République française, multiplie les allocutions en province au cours desquelles il fustige la politique conservatrice de l'Assemblée nationale, et affiche un anticléricalisme militant. Dans la tumulte de la souveraineté républicaine restaurée, il participe aux débats qui donnent naissance aux lois constitutionnelles, et contribue à faire voter l'amendement Wallon le 28 janvier 1875.

Léon Gambetta s'applique ensuite à promouvoir le nouveau régime, lors de la campagne électorale pour le scrutin de janvier et de février 1876. À Bordeaux (13 février), il énonce les réformes nécessaires : séparation des Églises et de l'État, création d'un impôt sur le revenu, rétablissement de la liberté de réunion et d'association, mesure qu'il renvoie à des temps "opportuns" par crainte de heurter l'électorat rural, le plus nombreux démographiquement. Le vote du 20 février consacre son travail. Gambetta est élu dans plusieurs circonscriptions et opte pour Belleville. Le maréchal de Mac-Mahon cependant ne l'appelle pas dans son ministère. Il lui préfère des personnalités plus "à droite". Gambetta profite de la crise née de la constitution du ministère de Broglie pour fédérer le vote républicain et provoquer la dissolution de la Chambre - ce sera son unique victoire dans sa vaine tentative de rassembler les partis de gauche.

Tacticien et orateur de premier plan, Gambetta fait sienne la campagne électorale de l'été jusqu'à prononcer dans son discours de Lille (15 août), à l'adresse du Président de la République, la phrase "se soumettre ou se démettre", propos qui lui vaudront une condamnation de trois mois de prison, peine qu'il n'effectuera pas. Ayant accédé à la "sainteté républicaine", il préfère cependant le 3 septembre promouvoir Jules Grévy à la fonction de chef de l'État et demeurer au second plan.

Les crises politiques se succèdent . Gambetta s'oppose au maréchal de Mac-Mahon avec véhémence. Il finit par obtenir sa démission, ce dernier ayant refusé de signer le décret de mise en disponibilité des dix généraux de corps d'armée (20 janvier 1879). Refusant à nouveau de prendre la tête du régime, Gambetta laisse Jules Grévy succéder à Mac-Mahon et se contente de la présidence de la chambre (31 janvier 1879).

D'une fonction symbolique dont il s'acquitte élégamment, Gambetta, ne constituant plus un obstacle politique aux yeux du président Grévy, accède à la présidence du conseil le 10 novembre 1881. Il croit alors enfin pouvoir faire de la France un pays stable et pacifique réuni autour de l'idée républicaine. Le nouveau chef de l'État tente de mettre en place un grand ministère réunissant l'ensemble des grandes figures de "gauche". Jules Ferry, Léon Say, Henri Brisson, Charles de Freycinet, les chefs de mouvements déclinent l'offre. Son gouvernement à peine formé (14 janvier 1882) est renversé au bout de 74 jours à la suite d'une proposition de loi sur les modes de désignation des sénateurs et d'élection des représentants à la chambre. Freycinet lui succède entouré de ceux-là mêmes qui avaient refusé de lui apporter leur concours.

Léon Gambetta se désengage alors de la vie politique. Il s'installe dans la région de Nice, ne prend plus part aux débats si ce n'est le 18 juillet 1882 pour demander le maintien de la présence française en Egypte.

Replié aux Jardies (Ville-d'Avray), en compagnie de Léonie Léon, Gambetta est victime d'un accident d'arme à feu qui le contraint à garder le lit pendant le mois de novembre. Cette inactivité lui est fatale. Il succombe à la suite d'une infection intestinale et d'une appendicite non opérée, le 31 décembre 1882.

Héros républicain, "père" fondateur de la IIIe République, Léon Gambetta est une personnalité incontournable pour "arriver à comprendre qu'un régime initialement moderne et populaire, celui de Napoléon III, ait été remplacé par une république qui ajoutait, à ces mêmes mérites, celui d'un libéralisme profond" (M. Aghulon). Ses obsèques, nationales, sont organisées le 6 janvier 1883. Des monuments lui seront élevés dans toute la France : à Bordeaux (25 avril 1905), à Nice (25 avril 1909), etc. Celui installé dans le jardin des Tuileries disparaîtra sous l'occupation allemande.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

François Chabaud-Latour

1804-1885

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Portrait du Général François de Chabaud-Latour (1804-1885). Source : Société d'histoire du protestantisme français

 

Fils d'Antoine Georges François (15 mars 1769-19 juillet 1832) et de Julie Verdier de la Coste, François, Ernest Chabaud-Latour naît à Nîmes le 25 janvier 1804.

Il sort 7e de l'école Polytechnique en 1820 et choisit le Génie. En 1829, il participe brièvement aux côtés de l'armée russe au siège des places du Danube, appelé à Paris pour servir dans le ministère Polignac.

En 1830, il est volontaire pour l'expédition d'Alger, et est décoré à la suite du bombardement du Fort-1'Empereur et de l'occupation de Blida.

Nommé officier d'ordonnance du duc d'Orléans, fonction qu'il occupera jusqu'à la mort du Prince en 1842, il se retrouve engagé dans la campagne de Belgique et à la prise d'Anvers. Chabaud-Latour suit également le duc d'Orléans pendant les campagnes d'Algérie (1837, 1839, 1840) et participe aux engagements de Sig, Habra, Mascara, puis, en 1839, à la bataille des Portes de Fer qui lui vaut d'être élevé à la dignité de croix d'officier de la Légion d'honneur et, en 1840, aux combats de Médéah, d'El-Affroun, du col de Mouzaïa et du bois des Oliviers.

En 1840, lorsque se pose la question des fortifications de Paris, il préconise dans son avant-projet la construction d'une enceinte continue fortifiée et d'une ceinture de forts avancés destinés à éviter à la population les rigueurs d'un siège.

Sa charge de député du Gard (de 1837 à 1848, favorable au ministère Guizot), lui permet de défendre son projet au Parlement.

Chef du génie, il s'occupe personnellement du secteur Est de l'enceinte de Paris - il supervise les travaux jusqu'en 1846.

Promu lieutenant-colonel en 1842, il devient l'aide de camp du comte de Paris à la mort du duc d'Orléans. Colonel en 1846, il part commander le 3e régiment du génie, à Arras. Lors des journées de février 1848, il reste fidèle aux Orléans allant jusqu'à offrir sa démission à la suite de l'abdication du roi. Mis en disponibilité quelques semaines, il est appelé à la direction du génie d'Amiens, puis, suite au coup d'État du 2 décembre 1851, il réintègre ses fonctions à Grenoble.

Commandant supérieur du génie en Algérie en 1852, il demeure cinq ans dans la colonie, prenant part aux expéditions des Babors en 1853, des Beni-Iuya en 1854, des Guetchoula en 1855 et de la Grande-Kabylie en 1857. Planificateur talentueux , il réalise en seize jours la route de Tizi-Ouzou à Souk-el-Arba, et, en quatre mois, il fait construire Fort-Napoléon, au centre de la tribu des Béni Raten. Il s'occupe également de construction de barrages sur les rivières et de la création de plusieurs villages.

Général de brigade au 30 avril 1853, Chabaud-Latour est promu général de division après les campagnes de 1857 et 1858, date de son retour à Paris, appelé au comité des fortifications, à l'inspection générale des places fortes, des régiments du génie et de l'École polytechnique, et au comité consultatif des affaires algériennes. Lors de la guerre d'Italie, il commande le corps du génie posté en observation sur la frontière de l'Est. Grand officier de la Légion d'honneur en 1861, président du comité des fortifications en 1864, il passe au cadre de réserve le 25 janvier 1869.

Rappelé à l'activité en 1870, Chabaud-Latour est mis à la tête du génie de la défense de Paris et reprend la présidence du comité des fortifications, mettant en état de défense le camp retranché de la capitale de sorte qu'elle ne put être bombardée sur sa rive gauche qu'à partir des redoutes inachevées de Châtillon et de Montretout.

Son fils, Arthur Henri Alphonse (1839-1910), issu de son mariage avec Hélène Mathilde Périer, saint-cyrien, s'illustre lors des combats de l'armée de la Loire, recevra la Légion d'honneur pour sa conduite exemplaire. Lissagaray, le "Michelet de la Commune", écrira à ce propos "Ce Paris pour qui Hoche, Marceau, Kléber n'eussent été ni trop jeunes, ni trop croyants, ni trop purs, avait comme généraux les plus mauvais résidus de l'Empire et de l'Orléanisme, Vinoy de Décembre, Ducrot, Suzanne, Leflô. Tel prétentieux fossile comme Chabaud-Latour commandait en chef le génie."

L'enceinte ainsi réalisée, appelée communément l'enceinte de Thiers ou "les fortif'" mesure 35 kilomètres de long (son tracé correspond à celui du l'actuel périphérique) assurée par 94 bastions et pourvue de 17 portes et de 8 poternes. L'assise par endroit atteint 40 centimètres d'épaisseur de béton, le pavement extérieur, comme les murs de profil, est en meulière et formé d'une succession de moellons bruts lié par du mortier hydraulique. Nommé grand croix de la Légion d'honneur pour cela, il est maintenu en activité sans limite d'âge.

 

Élu député du Gard, en février 1871 à l'Assemblée nationale - y siégeant au centre droit - il y préside la commission de l'armée chargé de la rédaction de la loi militaire de 1872, il est aussi le rapporteur du projet de loi sur les nouveaux forts à construire autour de Paris et occupe, à plusieurs reprises, la fonction de vice-président de l'Assemblée. Membre du comité de défense, Chabaud-Latour met tout son talent dans l'organisation de la nouvelle frontière de l'Est.

Personnage éminent de l'État, il est désigné pour juger, en 1873, le maréchal Bazaine, accusé d'avoir contribué à la défaite française lors de la guerre franco-allemande de 1870.

Appelé le 20 juillet 1874 par le maréchal de Mac-Mahon aux fonctions de ministre de l'Intérieur, et ce jusqu'au 10 mars 1875, il s'inscrit dans la ligne du duc de Broglie, en plein débat sur le septennat. Il échoue aux élections sénatoriales du 30 janvier 1876 mais est nommé sénateur inamovible le 10 novembre de l'année suivante.

Il décède à Paris le 10 juin 1885 des suites d'une chute dans l'escalier de la Compagnie des chemins de fer de l'Ouest dont il était l'administrateur.

 

Sources : R. d'Amat et R. Limouzin-Lamothe, Dictionnaire de biographie française, Paris, Letouzey, 1965, tome 6, col. 113-115 . F. Guizot, Mémoires pour servir à l'histoire de mont temps, Paris, Lévy, 1864
Sources complémentaires : P.-O. Lissagaray, Histoire de la Commune, Paris, Dentu, 1896, pp. 58-59 . B. Yvert, Dictionnaire des ministres (1789-1989), Paris, Perrin, 1990, pp. 400-401

Émile Gilioli

1911-1977

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Portrait d'Emile Gilioli

Gilioli est l'un des chefs de file de l'abstraction lyrique dans la sculpture française des années 50 aux côtés de Brancusi et de Arp. Il a conçu le mémorial de la résistance du plateau des Glières (Haute-Savoie).

Émile Gilioli naît le 10 juin 1911, à Paris, dans une famille de cordonniers italiens installée au bord du canal Saint-Martin. Il apprend l'art de la forge dès l'enfance pendant les vacances dans sa famille paternelle dans les environs de Mantoue.

À la fin de la Première Guerre mondiale, les Gilioli se rapprochent de l'Italie en s'installant à Nice. Le jeune Emile travaille dans l'affaire familiale et suit en parallèle des cours à l'école des arts décoratifs de la ville. En 1928, il entre au service d'un artisan sculpteur pour qui il travaille pendant deux ans avant d'intégrer en tant que boursier l'Ecole des Beaux Arts de Paris. Il fréquente alors l'atelier de Jean Boucher où, comme de nombreux artistes de sa génération, il est influencé par le travail de Charles Malfray.

Mobilisé en 1939, il est envoyé à Grenoble et y reste jusqu'à la Libération. Sur place il se lie d'amitié avec Andry-Fracy, conservateur du musée de 1919 à 1949, qui lui transmet son intérêt pour le cubisme et le présente au peintre Closon, pionnier de l'abstraction française. C'est dans la cité grenobloise qu'il réalise sa première exposition personnelle à la galerie Laforge en 1945.

De retour à Paris, il anime la jeune école abstraite de Paris avec Poliakoff et Deyrolle, et expose ses oeuvres à la galerie Breteau en 1946. Il participe alors à la plupart des manifestations artistiques françaises et étrangères : le Salon des Réalités nouvelles en 1947, expose fréquemment au Salon de Mai, et au Salon de la Jeune Sculpture. Le musée Galliera lui consacre une exposition en 1968. Il expose la même année sa conception de l'art dans La Sculpture (édition Robert Morel).

La simplicité de son art où la forme et la matière se conditionnent réciproquement, inspiré à la fois de la Grèce archaïque, de la statuaire de l'ancienne Egypte, et du Cubisme, lui vaut d'honorer nombres de commandes publiques, notamment dans le département de l'Isère où il réalise le Mémorial de Voreppe en 1946, le monument aux morts des Déportés de Grenoble en 1950, le monument de la Chapelle-en-Vercors en 1951, le Gisant de Vassieux-en-Vercors en 1952, le Mémorial de la Résistance au plateau des Glières en 1973.

 

Insatiable travailleur, Gilioli signe Prière et Force, sculpture de béton à laquelle il se consacre de 1959 à 1963, La Mendiante (1962), Apparition de la Vierge à Bernadette (1964), une Fontaine pour l'Hôtel de Ville de Grenoble (1968). Parmi ses oeuvres de bronzier figurent ses Composition et Formes, un Cadran Solaire, des Soleil sur la montagne, ses Histoire crétoise, une Divinité, une Tête siennoise. Travaillant le marbre, il sculpte des Abstraction, L'Homme oiseau, Chloe, Tabernacle, et Forme Abstraite.

Ses gouaches et aquarelles révèlent une Composition pour le monument des Glières, des Compositions. A noter encore : une Composition bleu, rouge et noir (collage), une Vitesse (acier), une Composition transparente (résille), un Portrait de femme (fusain).

Les oeuvres d'Émile Gilioli sont exposées dans le monde entier, notamment : Musée National d'Art Moderne de Paris, Tate Gallery de Londres, Musée de Sculpture de Plaen Air de Middelheim d'Anvers, Museo de Arte Moderna de Sao-Paulo, Museum of Modern Art de New York, Musée Bezabel de Jerusalem, Musée de Peinture et de Sculpture de Grenoble, Musée des Beaux-Arts d'Ostende, Musée National d'Histoire et d'Art de Luxembourg, Centre Georges-Pompidou à Paris, Musée de Sculpture de la Ville de Paris, Museo de Bellas Artes de Caracas, Musée des Beaux-Arts de Dunkerque, Musée des Beaux-Arts de Rouen, Museo dei Bozzetti Pietrasanta, Kunsthaus de Zurich, Musée Fabre Montpellier.

Un de ses ateliers, "son grenier", aménagé dans une bâtisse acquise par la municipalité de Saint Martin de la Cluze en 1997, resté intact depuis sa disparition, est aujourd'hui ouvert au public.

 

Sources : Benezit E., Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, t. 6, 1999 - Ragon M., dans : Nouveau dictionnaire de la sculpture moderne, Paris, Hazan, 1970.
 

 

 

Dominique Larrey

1766 - 1842

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Le baron Jean-Dominique Larrey. Portrait. 1804. Par Anne-Louis Girodet de Roussy-Trioson. Source : Insecula.com

Jean-Dominique Larrey (8 juillet 1766 : Baudéan - 25 juillet 1842 : Lyon)

Dominique Larrey est une figure incontournable de l'histoire de la médecine militaire. "Providence des soldats", il est le chirurgien aux 800 opérations lors de la bataille d'Eylau , le créateur des ambulances mobiles.

Né à Baudéan, près de Bagnère-sur-Bigorre, en 1766, dans une famille pyrénéenne protestante, Dominique Larrey est la figure de proue des champs de bataille napoléoniens. Il étudie la médecine à l'Hôpital Lagrave de Toulouse, auprès de son oncle, Alexis Larrey, correspondant de l'Académie Royale de Chirurgie. Il soutient à vingt-ans une thèse sur la carie de l'os puis part pour Paris où son oncle l'a recommandé à Desault, chirurgien de l'Hôtel-Dieu. Il intègre l'École de chirurgie navale de Brest, y apprenant les rudiments de la chirurgie précoce qu'il appliquera sur la frégate La Vigilante."

En 1791, préparant le concours de chirurgien gagnant-maîtrise, il travaille à l'Hôtel national des Invalides sous la protection de Sabatier.

En 1792, il est engagé dans l'armée du Rhin et la suit dans sa campagne d'Allemagne. La bataille de Spire, en septembre 1792, lui permet d'appliquer les principes de la chirurgie navale. Il brave l'interdiction interdisant aux officiers de santé, sur terre, de se tenir à moins d'une lieue des combats et à attendre leur fin pour secourir les blessés.

Il décide alors de remédier à la mauvaise organisation du service de la Santé en créant à Mayence, en 1793, un cours de perfectionnement destiné à ses collègues. À l'Armée du Rhin, le baron chirurgien François Percy crée des ambulances légères, petits caissons sur roues permettant de transporter non seulement des infirmiers mais aussi des civières démontables et pliables.

De retour à Paris, Larrey, son second, imagine d'autres "ambulances volantes", caisses suspendues destinées au transport des blessés, qui permettraient d'enlever les soldats invalides du champ de bataille afin "d'opérer dans les vingt-quatre heures". Jusque-là, les blessés sont abandonnés plusieurs jours sur le champ de bataille, parmi les cadavres, et finalement ramassés par les paysans.

En 1796, Larrey est nommé professeur de chirurgie à l'Hôpital d'Instruction du Val-de-Grâce récemment créé. Homme de terrain, il prend part aux campagnes de la Révolution, du Consulat et de l'Empire. Il fonde l'Ecole de Chirurgie du Caire.

Chirurgien en chef de la Garde consulaire (1800), docteur général du Service de la santé, chirurgien en chef de la Grande Armée, Larrey parcourt l'Europe : en Allemagne, en Espagne, en Autriche. Lors de la bataille d'Eylau (8 février 1807) il pratique huit cent opérations en trois jours. Napoléon Ier lui offre alors son épée, et ne tarde pas à le nommer Commandeur de la Légion d'Honneur. Il est fait baron après Wagram (1809).

Sa pratique de l'amputation a permis de sauver près de trois-quarts des blessés et a évité la propagation du tétanos. Sa présence continue sur les routes et les champs de batailles lui valurent le surnom de "Providence des soldats" lors de la retraite de Russie (1812). L'Empereur, qui écrira à son sujet que c'est "l'homme le plus vertueux que j'aie connu", lui lèguera 100.000 francs.

En 1813, à Lutzen-Bautzen, Dominique Larrey pratique la première expertise médico-légale.

Blessé et fait prisonnier à Waterloo, sur le point d'être fusillé, il est sauvé par un officier prussien, Blücher, dont il avait jadis soigné le fils.

Libéré à la paix, il est inquiété sous la Restauration, mais reçoit finalement confirmation de son titre de baron en 1815. Il est membre de la première promotion de l'Académie de Médecine en 1820, membre de l'Institut en 1829.

Dominique Larrey est mort à Lyon, au retour d'une inspection en Algérie, en 1842, âgé de 76 ans.

 

Sources : Médecine et Armées, 27/8, 1999 et perso.wanadoo.fr/claude.larronde/billet-Chirurgien.html

Aristide Maillol

1861 - 1944

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Portrait d'Aristide Maillol. Source : user.chollian.net

 

Maillol est né à Banyuls-sur-Mer, (Pyrénées-Orientales), dans le Roussillon, en 1861. Il étudie au lycée Saint-Louis de Gonzague de Perpignan avant de venir étudier à Paris en 1882 où il fréquente le cours de Jean-Léon Gérôme, et, à partir de 1885, l' École nationale supérieure des Beaux-Arts. Il y suit l'enseignement d'Antoine Bourdelle, qui l'accueille en 1889 alors qu'il est en proie à des difficultés financières.

Il rencontre Paul Gauguin en 1892 qui l'encourage à poursuivre ses études. La même année, visitant le musée de Cluny, il découvre les arts décoratifs, techniques et styles qui ne cesseront de l'influencer toute sa vie. En 1890, il se tourne vers la tapisserie et crée un atelier de tissage à Banyuls. En 1894, après un an passé en Italie, il s'oriente vers la sculpture.

Il se fait connaître en exposant ses premières oeuvres en 1897 à la société nationale des Beaux-Arts, ce qui lui permet de trouver un mécène deux ans plus tard en la personne de la princesse Bibesco.

Du 15 au 30 juin 1902, il organise sa première grande exposition à la galerie Vollard (Paris). La carrière de l'artiste débute alors : en 1905, La Méditerranée connaît un franc succès au salon d'automne de Paris - il en fera don à la ville de Perpignan. En 1908, il exécute le très contesté (en raison de la nudité du personnage) Monument d'Auguste Blanqui, pour le compte de la commune de Puget-Théniers - mais ce ne sera qu'en 1923 que Maillol honorera sa première commande d'Etat : une Méditerranée en marbre (Musée d'Orsay). L'année suivante, le Comte Harry Kessler, son plus important protecteur, lui commande Le Désir et Le Cycliste, pendant que le collectionneur russe Ivan Morozov lui demande Les Quatre saisons. La première exposition Maillol à l'étranger se déroule à Rotterdamer Kunstring (Pays-Bas) dès 1913, précédant de douze ans une exposition outre-Atlantique à Buffalo.

Éprouvé par la Première Guerre mondiale, il réalise gratuitement dans l'Entre-Deux-Guerres quatre monuments commémoratifs : à Elne en 1921, à Céret en 1922, à Port-Vendres en 1923 et à Banyuls-sur-Mer en 1933.

Bon représentant de l'école des Nabis, Maillol accorde toute la primauté au traitement esthétique au détriment du rapport à l'histoire. Sur le monument de Banyuls, il traite le sujet au moyen d'un triptyque : Guerrier mourant ou Immolation, L'épouse et la mère ou la Consolation, Les trois jeunes filles ou le Deuil. Ses figures, en relief, sont massives. Celle du soldat, disproportionnée par rapport au reste de la composition, est représentée grandeur nature afin de résister à l'épreuve du temps. Les deux autres tableaux sont organisées sur le modèle de la frise des Panathénées : les personnages tels des kouroi attiques, thorax de face et jambes de profil, se succèdent en se superposant les uns aux autres.

Le sculpteur rencontre Dina Vierny, fille d'un révolutionnaire ukrainien, en 1934, qui sera son modèle pendant dix ans. En hommage à Henri Barbusse, Maillol façonne La Rivière en 1939 , avant de se retirer à Banyuls-sur-Mer, au moment de la déclaration de guerre.

Victime d'un accident de voiture alors qu'il revient de rendre visite à Raoul Dufy à Vernet-les-Bains, il décède le 27 septembre 1944, laissant inachevée sa dernière oeuvre, Harmonie.

 

Source : Cahn I., L'ABCdaire de Maillol, Paris, Flammarion, 1999 - Les monuments aux morts de la Grande Guerre, Paris, M.P.C.I.H., 1991 - Lorquin B., Aristide Maillol, Paris, Editions du Seuil, 2005

Edgar Faure

1908-1988

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Portrait d'Edgar Faure. Source : www.edgarfaure.fr

Fils d'un médecin militaire, Edgar Faure naît le 18 août 1908 à Béziers et parcourt la France au gré des affectations de son père. Il étudie ainsi aux collèges de Verdun et Narbonne, aux lycées Janson de Sailly et Voltaire, à Paris. Bachelier à quinze ans, sa curiosité le conduit à s'intéresser à divers domaines. Il est agrégé des facultés de droit et diplômé de russe de l'Ecole des langues orientales. Il devient avocat à la Cour de Paris dès 1929 . il est alors le plus jeune avocat de France. Sa passion pour la politique le fait côtoyer un temps l'Action française avant de rejoindre la mouvance radical-socialiste. Il écrit et publie à la même époque plusieurs romans policiers sous le pseudonyme d'Edgar Sanday. En 1931 Edgar Faure épouse Lucie Meyer, fondatrice avec Raymond Aron de la revue La Nef.

En 1942, craignant les mesures d'exclusion du régime de Vichy, il rejoint Louis Joxe et Pierre Mendès-France à Alger où il dirige les services législatifs de la présidence du Comité français de libération nationale puis le secrétariat général adjoint du Gouvernement provisoire à Alger en juin-juillet 1944. De retour à Paris il travaille auprès de Pierre Mendès-France au ministère de l'économie. Après la démission de ce dernier, Edgar Faure accepte de remplacer Paul Coste-Floret comme délégué adjoint du ministère public au Tribunal militaire international de Nuremberg en 1945.

En octobre 1945, Edgar Faure se lance dans une carrière politique : il est député radical-socialiste du Jura de 1946 à 1958, député du Doubs de 1967 à 1980 et sénateur du Doubs de 1981 jusqu'à sa mort en 1988, président de l'Assemblée nationale de 1973 à 1978, président du conseil de la région Franche-Comté de 1974 à 1981 et de 1982 à 1988, président du conseil général du Jura de 1949 à 1967, maire de Port-Lesney (Jura) de 1947 à 1970 et de 1983 à 1988, maire de Pontarlier de 1971 à 1977 et sénateur du Jura, de 1959 à 1966, président du Comité d'expansion économique de Franche-Comté et du territoire de Belfort (1951), puis de la Commission de développement économique régionale de Franche-Comté entre 1964 et 1973.

En parallèle à son activité parlementaire, littéraire et professorale, à la Faculté de droit de Dijon, Edgar Faure occupe de nombreux postes ministériels : il est à plusieurs reprises président du Conseil (1952, 1955-1956), ministre des Finances (1949-1951, 1953, 1958), de la Justice (1951), des Affaires étrangères (1955), de l'Agriculture (1966-1968), de l'Education nationale (1968-1969) et des Affaires sociales (1972-1973). Il est aussi représentant à l'Assemblée des communautés européennes de 1979 à 1984.

Son action au gouvernement se résume en trois points : la réforme de l'économie et le redressement des comptes publics, la construction européenne et le renforcement diplomatique de la France, la politique coloniale française en Afrique du Nord.

En matière budgétaire, Edgar Faure est à l'origine d'une proposition de résolution invitant le gouvernement à prévoir la possibilité d'octroi par la Banque de France d'avances sur délégation des titres de l'emprunt (15 janvier 1948), ainsi que de l'assainissement des finances publiques en adossant le budget de l'Etat de 1950 au plan de redressement Mayer. Aussi, lors de sa première législature, en 1952, il forme un gouvernement, qualifié par la presse d'"Ali Baba et de ses quarante voleurs", qui réforme les entreprises nationalisées, fait voter, le 28 février 1952, l'échelle mobile des salaires, avant de démissionner le lendemain en raison du refus de l'Assemblée d'augmenter les impôts. Ministre des Finances et des affaires économiques sous le gouvernement Laniel, il propose, le 4 février 1954, un plan d'expansion de dix-huit mois. Lors de sa seconde législature, il obtient, en mars 1955, les pouvoirs spéciaux en matière économique, ce qui lui permet de faire face à la contestation sociale des poujadistes.

Sur le plan international, Edgar Faure mène campagne en 1952 pour la communauté européenne de défense (C.E.D.) et parvient à se maintenir au gouvernement en dépit de l'hostilité de l'Assemblée quant à ses conceptions de la France et de l'Europe. Il règle en 1954 le dossier indochinois, et, alors que le projet d'une C.E.D. est abandonné, promeut, à Messine, l'idée d'une communauté européenne de l'atome et d'une communauté économique européenne. Témoin d'un monde bipolaire et d'une politique étrangère française indépendante, il est l'artisan de l'établissement de relations diplomatiques avec l'U.R.S.S. et la Chine.

La question de l'Afrique du Nord imprègne ses passages à la tête du gouvernement et fait ressortir l'ambiguïté et les contradictions du personnage. En 1952, afin de calmer la situation en Tunisie, il renforce la présence militaire dans le pays tout en parlant d'"autonomie interne", puis mandate François Mitterrand, alors ministre d'Etat, pour proposer un plan de réformes auxquelles les colons sont hostiles. En 1955, Edgar Faure résout partiellement le conflit en Afrique du Nord en établissant, en mai, les conventions franco-tunisiennes qui accordent l'autonomie interne à la Tunisie et en libérant Habib Bourguiba. Dans le même esprit, il forme au Maroc, suite à la conférence d'Aix-les-Bains, un Conseil du Trône présidé par Mohammed V, de retour d'exil en novembre 1955. A contrario, c'est aussi sous sa législature que le conflit algérien dégénère en guerre civile. Les massacres du Constantinois du 21 août 1955 accentuent l'antinomie entre les communautés. Edgar Faure y répond en envoyant des troupes supplémentaires et en déclarant l'état d'urgence.

Le serviteur de l'État est élu à l'Académie française , le 8 juin 1978, au fauteuil d'André François-Poncet et est reçu sous la coupole le 25 janvier 1979 par le duc de Castries. C'est l'homme de culture et de tradition républicaine qui est admis à siéger dans le cénacle des Immortels. Il est auteur notamment de Pascal, le procès des Provinciales (1931), Le Serpent et la Tortue (1957), La politique française du pétrole (1961), La disgrâce de Turgot (1961), Pour un nouveau contrat social (1973), La banqueroute de Law (1977), Mémoires (1983-1984). Porteur d'une vision de l'histoire, il présente, à la suite de la loi n°46-936 du 7 mai 1946 votée par l'Assemblée du Gouvernement provisoire, une proposition de loi (20 avril 1948) visant à commémorer à date fixe le 8 mai 1945 afin de répondre au souhait des associations de déportés et d'anciens combattants de voir la victoire célébrée à son jour anniversaire. Ministre de l'Éducation nationale après les événements de mai 1968, il répond aux revendications estudiantines par une loi d'orientation sur l'enseignement supérieur, dite "Loi Faure". Le texte qui parait au Journal Officiel le 13 novembre 1968, institue la participation de l'État dans l'Université.

 

Sources : Dictionnaire des parlementaires français 1940-1958, tome 4, Paris - La Documentation française, 2001, pp. 41-44 - Mourre, Michel, Dictionnaire encyclopédique d'histoire, Paris, Bordas, 1996 (1978), pp. 2106-2107

Émile Bourdelle

1861 - 1929

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Bourdelle modelant.
Source : Musée Bourdelle

Émile Antoine Bourdelle naît à Montauban, le 30 octobre 1861, d'Antoine Bourdelle, menuisier-huchier, qui l'initiera au travail des matériaux dès l'âge de treize ans, et d'une mère qui lui enseignera les valeurs essentielles d'une vie simple et rustique.

Sa statuette de faune ornant un bahut est remarquée par deux personnalités locales, Hyppolite Lacaze et Émile Pouvillon qui l'encouragent à suivre les cours de l'école municipale de dessin alors dirigée par Achille Bouis.

En 1876, Bourdelle obtient une bourse pour les Beaux-Arts de Toulouse. Il met à profit la solitude de ses années d'étude pour réaliser ses premiers chefs-d'oeuvre : les trois Têtes d'enfants, le portrait d'Achille Bouis ou celui d'Émile Pouvillon. En 1884, il gagne Paris où il entre dans l'atelier de Falguière, à l'Ecole des Beaux-Arts. Il s'installe en 1884 dans un modeste atelier de l'impasse du Maine.

En 1885 le jeune sculpteur envoie au Salon des Artistes Français la Première Victoire d'Hannibal, pour laquelle il obtient une mention honorable. Épuisé, le sculpteur est hospitalisé. Après une convalescence à Montauban, Bourdelle, convaincu de la vanité de l'enseignement et des prix qui le couronnent, s'éloigne de l'École pour la quitter en 1886, année où il crée l'Amour agonise.

1888 est l'année où apparaît un motif récurrent dans l'oeuvre de Bourdelle : le portrait de Beethoven.

En 1891 le sculpteur expose pour la première fois au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts. Bourdelle trouve de nouveaux maîtres, qui seront plutôt pour lui des compagnons : il fréquente l'atelier de Dalou, impasse du Maine, entame en 1893 une collaboration avec Rodin rencontré à l'atelier de Falguière. En 1897, la ville de Montauban lui commande le Monument aux Combattants de 1870.

Il fonde avec Rodin en 1900, l'institut Rodin, école libre pour l'enseignement de la sculpture. A la même époque, parmi un nombre grandissant de commandes, il réalise Les Nuées, relief destiné au dessus de scène du Musée Grévin.

Les oeuvres telles que Le Ménage Bourdelle, l'Ouragan, ou M. et Mme Bourdelle par temps d'orage, témoignent de sa vie de couple particulièrement tumultueuse. Félicien Champsaur, Marie Bermond, Jean Moréas, Elie Faure, ou encore Jules Dalou forment son cercle d'amis intimes.

L'année 1902 révèle l'artiste au public : il inaugure le Monument aux morts de Montauban . en 1905 a lieu la première exposition personnelle de Bourdelle à la galerie du fondeur Hébrard. La même année, il expose un Pallas en marbre à la Société Nationale des Beaux-Arts. Il fait de nombreux séjours à l'étranger qui témoignent de l'intérêt qu'il suscite en dehors de son pays : en 1907 il est à Berlin et Genève, en 1908 il est en Pologne comme membre d'un jury pour l'érection d'un monument à Chopin.

Commence alors la période de maturité du sculpteur, son chemin se sépare définitivement de celui de Rodin. Il commence à enseigner en 1909 : donne des cours à l'Académie de la Grande Chaumière - il comptera parmi ses élèves Giacometti et Germaine Richier. Ces années sont aussi celles de la production la plus intense du maître : il réalise en une nuit les projets pour la façade du Théâtre des Champs-Elysées, travaille en même temps au Centaure mourant, à la statue de Carpeaux, au Monument à Auguste Quercy.

 

Bourdelle réalise en 1910 son chef-d'oeuvre : l'Héraklès archer, qui est exposé à la Société Nationale des Beaux Arts, avec le Buste de Rodin. Un an plus tard, Bourdelle présente le plâtre de Pénélope, et termine la maquette du Monument à Mickiewicz. En 1913 s'achève le chantier du Théâtre des Champs-Élysées. Avec ces bas-reliefs et ces frises peintes aux sujets d'inspiration mythologique, Bourdelle réalise son idéal d'un art structural, dans lequel le décor est soumis aux lois de l'architecture. Ses recherches sur le monumental se poursuivent avec la commande du Monument à Alvear, la plus importante qu'il ait jamais reçue, puis en 1919 avec celles du Monument de Montceau-les-Mines et de la Vierge à l'offrande pour la colline de Niederbrück. Jusqu'à la fin de sa vie, Bourdelle élaborera encore de nombreux projets de monuments, mais qu'il n'aura pas le temps de réaliser (monument à Daumier, au Maréchal Foch...).

L'année 1914 est marquée par le succès à la Biennale de Venise et par la présentation du Centaure mourant à la Société Nationale des Beaux-Arts. Son succès est bientôt couronné : en 1919, le sculpteur est promu au rang d'officier de la Légion d'Honneur. Autour de Bourdelle, de nouveaux personnages prennent place : André Suarès, Anatole France, Krishnamurti, Henri Bergson.

Tout en continuant d'exposer à la Société Nationale des Beaux-Arts, Bourdelle fonde en 1920 le salon des Tuileries avec Besnard et Perret. Il expose la Naissance d'Aphrodite au salon des Tuileries, puis en 1925 à l'exposition internationale des Arts Décoratifs (Sapho, Masque de Bourdelle), au Japon, et aux États-Unis. Le bronze du Centaure mourant est présenté au Salon des Tuileries.

Les dernières années de la vie de Bourdelle sont marquées par ses expérimentations autour de la polychromie. Il réalise en 1926 ses premiers essais de sculptures polychromes, la Reine de Saba et Jeune fille de la Roche-Posay.

Alors que La France est présentée au Salon des Tuileries, le Monument à Alvear est inauguré à Buenos-Aires.

Un an avant sa mort, Bourdelle triomphe : la première rétrospective Bourdelle est proposée à l'occasion de l'inauguration du Palais des Beaux-Arts de Bruxelles (141 sculptures et 78 peintures et dessins), le 28 avril 1929, est inauguré, place de l'Alma, le Monument à Mickiewicz.

Le 1er octobre, Bourdelle meurt au Vésinet, chez son ami le fondeur Rudier.

Le talent d'Émile Bourdelle a contribué à pérenniser de nombreux lieux de mémoire :

  • à Montauban, l'artiste façonne le Monument aux Combattants et Défenseurs du Tarn-et-Garonne 1870-1871, puis le Monument à la mémoire des combattants de 1914-1918 .
  • la Victoire du Droit, à l'Assemblée nationale .
  • Héraklès archer dans le Temple du Sport à Toulouse .
  • le Monument de la Pointe de Grave, destiné à commémorer l'entrée en guerre des Etats-Unis en 1917 .
  • le Monument aux Morts de l'école de Saint-Cyr (Coëtquidan), bronze érigé initialement en 1935 à Alger .
  • le moule ayant servi à la réalisation du bronze du Monument des Forces françaises libres .
  • les Figures hurlantes du monument de Capoulet-Junac (Ariège) .
  • la stèle de Trôo (Loir-et-Cher) .
  • le monument de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire) dont une des faces s'intitule "Le retour du soldat".

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Jean Jaurès

1859 - 1914

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Portrait de Jean Jaurès. Source : site www.amis-musees-castres.asso.fr

Fils de la bourgeoisie de province, il est reçu premier à l'Ecole Normale Supérieure de la rue d'Ulm en 1878 puis troisième à l'agrégation de philosophie en 1881. Il enseigne tout d'abord à Albi, puis à Toulouse en 1882, pour exercer sa chaire de maître de conférences à la faculté des Lettres.

Il est élu député républicain à Castres, en 1885. C'est sa défaite aux mêmes élections quatre ans plus tard qui l'a conduit à se présenter à Toulouse, cette fois-ci sous la bannière socialiste, et sur la liste municipale.

L'opportunisme

Jaurès n'a pas toujours été socialiste, et encore moins marxiste.

Quand la République s'installe pour de bon, après une décennie de tergiversations au sujet du régime (en 1870 le Second Empire s'effondre, la République est proclamée mais les monarchistes, divisés, dominent à la Chambre des députés), Jaurès n'a que vingt ans. Il s'engage en politique en 1885, devenant député du Tarn à 25 ans. Il est le fils spirituel de Jules Ferry et siège parmi les « opportunistes », républicains socialement modérés. Il trouve alors les radicaux de Clemenceau trop agités et les socialistes violents et dangereux pour l'ordre républicain en construction.

Il ne s'en intéresse pas moins au sort de la classe ouvrière et met son éloquence devenue mythique au service des premières lois sociales du régime (liberté syndicale, protection des délégués, création des caisses de retraite ouvrière...). Fils de 1789, il croit au réformisme institutionnel et républicain, à l'alliance des ouvriers et de la bourgeoisie laborieuse pour le triomphe de la liberté, de l'égalité et de la fraternité.

En 1889, les Républicains gagnent les législatives mais lui, dans sa circonscription de Carmaux (Tarn), est battu. Le baron Reille et le marquis de Solages (tous les deux élus députés respectivement de Castres-Mazamet et de Carmaux), propriétaires des mines de Carmaux, ont employé tous les moyens et toutes les pressions pour battre ce Républicain qui prône le contrôle de l'État sur les entreprises. Il est professeur à Toulouse et soutient ses deux thèses, puis se présente aux municipales (1890).


La grande grève de Carmaux

Jaurès est à l'écart de la vie politique nationale quand, en 1892, éclate la grande grève des mines de Carmaux. Le maire élu, Calvignac, syndicaliste et socialiste, ouvrier mineur, est licencié par le marquis de Solages pour s'être absenté à plusieurs reprises afin de remplir ses obligations d'élu municipal. Les ouvriers se mettent en grève pour défendre ce maire dont ils sont fiers. La République envoie l'armée, 1500 soldats, au nom de la « liberté du travail ». La République semble prendre le parti du patronat monarchiste contre la légitime défense du suffrage universel du peuple carmausin.

En France, on est en plein scandale de Panama. Jaurès ne supporte plus cette République qui semble montrer son vrai visage, de députés et ministres capitalistes pour qui la finance et l'industrie priment sur le respect du droit républicain.

Il s'engage auprès des mineurs de Carmaux. Là, il fait l'apprentissage de la lutte des classes et du socialisme. Arrivé intellectuel bourgeois, républicain social, il sort de la grève de Carmaux apôtre du socialisme.

Sous la pression de Jaurès, le gouvernement arbitre le différent Solages-Calvignac au profit de Calvignac. Solages démissionne de son poste de député. Jaurès est tout naturellement désigné par les ouvriers du bassin pour les représenter à la Chambre. Il est élu malgré les votes ruraux de la circonscription qui ne veulent pas des « partageux ». Désormais Jaurès va se lancer dans l'incessante et résolue défense des ouvriers en lutte. À Albi il est à l'origine de la fameuse Verrerie ouvrière. Dans le Languedoc viticole il ira visiter les « vignerons libres de Maraussan » qui créent la première cave coopérative.

 

L'affaire Dreyfus

Il lutta aussi pour l'innocence d'Alfred Dreyfus. Il s'oppose alors aux marxistes orthodoxes, dont leur meneur, Jules Guesde pour qui Dreyfus est un officier bourgeois et donc, partant, coupable. Pour Jaurès, l'accablement de malheurs et d'injustice dont Dreyfus est la victime gomme les différences de classe. Dreyfus n'est plus un privilégié ou un exploiteur. Il est un homme qui souffre injustement.

Il fonda le journal L'Humanité en 1904 et fut, en 1905, l'un des acteurs majeurs de la fondation de la SFIO, unifiant les différents partis socialistes de France.

 

Le pacifisme

Ses prises de position pacifistes peu avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale le rendirent très impopulaire parmi les nationalistes et il fut assassiné au Café du Croissant, rue Montmartre à Paris, trois jours avant le déclenchement des hostilités. Cet assassinat atteint d'ailleurs son but car il facilita le ralliement de la gauche, y compris beaucoup de socialistes qui hésitaient, à l'« Union sacrée ».

À l'issue de la « Grande Guerre » et en réaction au massacre qu'elle occasionna, un grand nombre de communes françaises nommèrent des rues et des places en son honneur, en rappelant qu'il fut le plus fervent opposant à un tel conflit. Une station du métro parisien porte aussi son nom.

La chanson de Jacques Brel intitulée Jaurès (1977) rappelle à quel point l'homme politique était devenu une figure mythique des classes populaires. Le parti socialiste français a choisi de lui rendre hommage à travers sa fondation politique, la fondation Jean-Jaurès.

Son meurtrier, Raoul Villain, après cinquante six mois de détention préventive est acquitté le 29 mars 1919.


Quelques citations

  • « Le courage, c'est de chercher la vérité et de la dire, c'est de ne pas subir la loi du mensonge triomphant qui passe et de ne pas faire écho aux applaudissements imbéciles et aux huées fanatiques. » (1903)
  • « Je n'ai jamais séparé la République des idées de justice sociale, sans laquelle elle n'est qu'un mot ».(1887)
  • « Un peu d'internationalisme éloigne de la patrie. beaucoup y ramène ».
  • « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l'orage »

 

Source : http://histoireetgeographie.free.fr