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Identifier les soldats disparus

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Les fouilles archéologiques permettent parfois de mettre au jour les restes de soldats disparus. L’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) participe à leur identification, comme l’expliquent Chantal Malaisé, responsable du pôle "état-civil militaire", et Marine Meucci, doctorante.

Texte

Avec quelle fréquence et dans quelles conditions des corps de soldats disparus sont-ils exhumés sur le sol français ?

Chantal Malaisé (CM) : La fréquence des découvertes varie d’un département à l’autre ou d’une région à l’autre, mais la majorité des découvertes se situe cependant en région Grand-Est et dans les Hauts-de-France. En moyenne, actuellement, une vingtaine d’individus, toutes nationalités confondues, sont découverts chaque année au niveau national. Ces découvertes sont souvent liées à des fouilles préventives déléguées par la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) lors de travaux, ou par l’Office national des forêts (ONF) sur des zones de travaux forestiers situés sur d’anciens champs de bataille.

Qui prend alors en charge leur identification et leur inhumation ?

Marine Meucci (MM) : Quel que soit le cadre de la découverte, la gendarmerie est le premier interlocuteur à prévenir par le découvreur. Elle préviendra alors le procureur de la République qui veillera à définir l’appartenance des restes mortels découverts (Code pénal), en lien avec le médecin légiste, l’archéologue… Lorsqu’il est établi, grâce à la plaque identitaire ou les artefacts présents, qu’il s’agit d’un soldat disparu pendant la Première ou la Seconde Guerre mondiale (voire plus rarement 1870/1871), l’ONACVG procède à la prise en charge du militaire et, le cas échéant, prévient ses homologues étrangers (Volksbund Deutsche Kriegsgräberfürsorge - VDK - notamment) ou l’attaché de défense du pays concerné. Ces derniers sont alors chargés de procéder à l’identification et l’inhumation du défunt.

S’agissant des militaires du Commonwealth, c’est la Commonwealth War Graves Commission (CWGC) qui intervient directement pour la poursuite des fouilles à réaliser, puis l’identification et l’inhumation des soldats. L’identification des corps des soldats français retrouvés était, jusqu’à récemment, établie par les archéologues présents sur le site de fouilles, à charge pour eux d’en aviser ensuite l’ONACVG pour lui permettre d’effectuer la recherche officielle des familles (code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre). Les soldats français sont alors, soit inhumés dans la nécropole nationale la plus proche du lieu de découverte, soit restitués à leurs descendants (accord ministériel).

Quels liens l’ONACVG entretient-il avec les services de science médico-légale, les archéologues de l’Inrap ou de la DRAC, particulièrement dans les régions qui ont été les plus affectées par les combats du XXe siècle ?

CM : Le statut juridique des militaires "morts pour la France" se situe au croisement de l’archéologie et de la médecine légale. Une procédure établie entre le ministère de la Culture et le ministère des Armées définit les droits et obligations des différents acteurs de la découverte. Depuis mai 2022, l’Office dispose d’une archéo-anthropologue qui, en lien avec les services de la DRAC et de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap), veille à l’analyse des restes humains et matériels retrouvés. Dans les régions les plus affectées par les combats, l’ONACVG et la DRAC s’informent mutuellement, soit des découvertes en cours, soit des fouilles programmées, et décident conjointement de la prise en charge des opérations d’identification.

Comment s’effectue la recherche des familles des défunts, notamment quand ceux-ci appartiennent à une armée étrangère ?

MM : La recherche des familles des soldats français est effectuée par l’ONACVG (Mission nationale État Civil Militaire), au vu des informations figurant sur la fiche "mémoire des hommes" et sur l’état signalétique du militaire. Les différentes communes de naissance, de domicile, de mariage… sont consultées, ainsi que les sites de généalogie.

Le directeur du service départemental de l’ONACVG intervient également en soutien avec l’aide d’historiens locaux, si besoin. L’ONACVG peut enfin, en cas de besoin, s’appuyer sur les attachés de défense auprès des ambassades. Pour ce qui est de l’Allemagne et du Commonwealth, ce sont le VDK et la CWGC qui effectuent à leur niveau la recherche des familles des défunts.


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