Jean Degoutte

1866-1938

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Portrait du Général d'Infanterie Degoutte. Photo DMPA

 

 

Jean-Marie Degoutte s'engage le 7 mars 1887 au 31e régiment d'artillerie et entre à Saint-Cyr en octobre 1888 avec la promotion du "Grand Triomphe". Il en sort 9e sur 435. Ayant choisi les zouaves, il sert pendant quatre ans en Tunisie.

 

Un acteur de l'aventure coloniale française

Il demande à faire partie de l'expédition de Madagascar en 1895. Contournant le refus de sa hiérarchie, il demande un congé de trois mois et rejoint une mission jésuite à bord d'un paquebot civil. Sur place lors du débarquement du corps expéditionnaire français, il offre ses services au général Dechesnes, lequel le met aux arrêts pendant trente jours. Le jeune officier Degoutte doit alors son salut au colonel Bailloud, directeur des étapes de l'expédition, qui convainc sa hiérarchie de l'utilité de ses connaissances de la langue malgache.

Il retourne en Tunisie en mars 1896 pendant trois ans. En 1899 il est admis à l'Ecole supérieure de Guerre dont il sort breveté. En 1900, Baillaud l'intègre au corps expéditionnaire de Chine. Il est cité deux fois à l'ordre du corps. A nouveau en Afrique du Nord, il est officier d'ordonnance du général commandant la division d'Alger en janvier 1905, puis auprès du général commandant le 20e corps l'année suivante.

Fin 1906, il revient aux zouave en tant que chef de bataillon avant de rejoindre l'état-major de division d'Alger trois ans plus tard. De février 1911 à décembre 1912 il prend part aux opérations du Maroc occidental en tant que directeur des étapes.

Le héros de 14-18

A son retour en France, promu lieutenant-colonel, il suit les cours du Centre des Hautes Etudes Militaires. Sous-chef puis chef d'état-major du 4e corps de février à mars 1914, il s'illustre au cours des combats et est nommé colonel le 1er novembre de la même année avant d'être Officier de la Légion d'Honneur le 10 avril 1915.

Désigné comme chef d'état-major après les attaques de septembre 1915 en Champagne. Général de brigade le 25 mars 1916, il prend en août le commandement des troupes marocaines. Le corps s'illustre dans la Somme, en Champagne et à Verdun, actes qui lui valent deux citations et la cravate de Commandeur de la Légion d'Honneur.

Général de division en septembre 1917, il dirige le 21e corps de la 6e armée du général Maistre. Il participe à l'offensive de la Malmaison qui aboutit à la chute du Chemin des Dames, ce qui lui vaut une nouvelle citation à l'Ordre de l'Armée.

Le 10 juin 1918, dirigeant la 6e armée, il enraye l'avancée allemande sur la Marne, et entreprend avec le général Mangin, le 15 juillet 1918, l'attaque qui marque le début de la campagne de France. Il libère Château-Thierry, refoule les Allemands sur La Marne sur l'Ourcq et à La Vesle.

En septembre, il est désigné comme major général auprès du roi des Belges. Il conduit alors l'offensive des Flandres, enlèvant la crête de Passchendaele et reprenant le sud de la Belgique avec des troupes belges, britanniques et françaises.

La guerre terminée, promu Grand Officier de la Légion d'Honneur, il est chargé de rédiger, sous la direction de Foch, les clauses du Traité de Versailles.

L'homme incontournable du Conseil de Guerre

Nommé commandant de l'armée du Rhin en octobre 1919, il entre en janvier 1920 au Conseil supérieur de Guerre.

Il procède en 1923 à l'occupation de la Ruhr jusqu'à l'évacuation totale en 1925. Ses mérites le font accéder au rang de Grand Croix de la Légion d'Honneur en 1923. Il reçoit la médaille militaire en 1928.

Laissé en activité, il influence les choix stratégiques de défense du territoire au Conseil supérieur de Guerre.

L'organisation de la ligne de défense des Alpes occupe ses dernières années.

 

Source : Mindef/SGA/DMPA

Charlotte Delbo

1913-1985

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Portrait de Charlotte Delbo. Source : Photo collection privée

O vous qui savez

Saviez-vous que la faim fait briller les yeux que la soif les ternit

O vous qui savez

Saviez-vous qu'on peut voir sa mère morte et rester sans larmes

O vous qui savez

Saviez-vous que le matin on veut mourir que le soir on a peur

O vous qui savez

Saviez-vous qu'un jour est plus qu'une année une minute plus qu'une vie

O vous qui savez

Saviez-vous que les jambes sont plus vulnérables que les yeux les nerfs plus durs que les os le coeur plus solide que l'acier

Saviez-vous que les pierres du chemin ne pleurent pas qu'il n'y a qu'un mot pour l'épouvante qu'un mot pour l'angoisse

Saviez-vous que la souffrance n'a pas de limite l'horreur pas de frontière

Le saviez-vous

Vous qui savez

 

Charlotte Delbo, in. Aucun de nous ne reviendra, Editions Gonthier, 1965

 

Charlotte Delbo est née le 10 août 1913 à Vigneux-sur-Seine, en Seine-et-Oise, de Charles Delbo, charpentier en fer, et Erménie Morero. Elle est l'aînée de quatre enfants.

Après son baccalauréat, elle commence des études de philosophie à la Sorbonne et adhère aux jeunesses communistes, où elle rencontre Georges Dudach qu'elle épouse le 17 mars 1936. Elle interrompt ses études en 1937, et devient en 1939 la secrétaire du comédien et metteur en scène Louis Jouvet. En mai 1941, elle accompagne la troupe de Jouvet en tournée en Amérique du Sud. Son mari, resté en France, rejoint la résistance communiste.

En septembre 1941, à Buenos-Aires, Charlotte apprend l'exécution d'un de ses amis, Jacques Woog, pour " propagande communiste ". Révoltée, elle revient en France. A Paris, le couple entre dans la vie clandestine. Charlotte recopie les communiqués de Radio-Londres et Radio-Moscou et travaille pour Les Lettres françaises fondées par Jacques Decour.

Le 2 mars 1942, cinq policiers français des Brigades spéciales arrêtent Charlotte et son mari. Elle est internée à la prison de la Santé, où elle apprend, le 23 mai, l'exécution de Georges au Mont Valérien. Le 17 août, elle est transférée au Fort de Romainville, où elle retrouve de nombreuses femmes, souvent communistes, puis à Fresnes une semaine plus tard.

Elle est une des 230 femmes, qui quittent Compiègne pour Auschwitz le 24 janvier 1943. Le 27 janvier, ces femmes entrent à Auschwitz en chantant la Marseillaise. D'abord assignées au block 14 du camp des femmes de Birkenau, en quarantaine, ces femmes sont ensuite astreintes à de durs travaux, notamment dans les marais. Nombre d'entre elles meurent du typhus. Le 3 août, seules 57 d'entre elles ont survécu. Elles sont mises alors en quarantaine. Le 7 janvier 1944, Charlotte Delbo, avec sept autres compagnes de déportation, part pour Ravensbrück. Elle est affectée à Furstenberg, dans l'un des kommandos du camp principal.

La plupart des survivantes de son convoi sont transférées à Ravensbrück au cours de l'été 1944. Grâce à l'action de la Croix-Rouge, elle fait partie des femmes qui quittent le camp le 23 avril 1945 pour la Suède et rentre en France en juin 1945. Des 230 femmes du convoi du 24 janvier 1943, 49 ont survécu.

Alors qu'elle se rétablit en Suisse, elle rédige Aucun de nous ne reviendra, premier ouvrage de son oeuvre littéraire sur la déportation et les convois partis de France vers Auschwitz. Il ne sera publié qu'en 1965 aux Editions Gonthier.

Après la guerre, elle travaille à l'ONU, puis au Centre National de la Recherche Scientifique.

Elle meurt en mars 1985, ayant publié de nombreux ouvrages tirés de son expérience concentrationnaire dont le convoi du 24 janvier (1965), une connaissance inutile (1970), mesure de nos jours (1971, Editions de Minuit) et qui rapportera ses paroles (1974, Edition P.J. Oswald).

 

Source : Mindef/SGA/DMPA

 

Georges Dudach :
Fiche mémoire des hommes Les fusillés du Mont-Valérien 1939−1945

 

Nom : Dudach.

Surnom.

Prénoms : Georges Paul.

Date de naissance : 18-09-1914.

Commune de naissance : Saint Maur des Fossés.

Département de naissance : Seine.

Pays de naissance : France.

Profession : journaliste.

Commune de résidence : Paris 16ème.

Département de résidence : Seine.

Pays de résidence : France.

Lieu d'incarcération.

Motif : otage.

Date du procès.

Lieu d'exécution : Mont Valérien.

Date d'exécution : 23-05-1942.

Lieu d'incinération

Lieu de première inhumation

Date de première inhumation

Date de la restitution du corps

Lieu de l'inhumation finale

Sépulture

Grade

 

Origine des données Anciens Combattants, Archives de la préfecture de Police, Archives Nationales

 

Alain-Fournier

1886-1914

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Portrait d'Alain-Fournier

Henri-Alban Fournier, dit Alain-Fournier

 

"Comment rattraper sur la route terrible où elle nous a fuis, au-delà du spécieux tournant de la mort, cette âme qui ne fut jamais tout entière avec nous, qui nous a passé entre les mains comme une ombre rêveuse et téméraire ? "Je ne suis peut-être pas tout à fait un être réel."

Cette confidence de Benjamin Constant, le jour où il la découvrit, Alain-Fournier en fut profondément bouleversé . tout de suite il s'appliqua la phrase à lui-même et il nous recommanda solennellement, je me rappelle, de ne jamais l'oublier, quand nous aurions, en son absence, à nous expliquer quelque chose de lui. Je vois bien ce qui était dans sa pensée : "Il manque quelque chose à tout ce que je fais, pour être sérieux, évident, indiscutable. Mais aussi le plan sur lequel je circule n'est pas tout à fait le même que le vôtre . il me permet peut-être de passer là où vous voyez un abîme : il n'y a peut-être pas pour moi la même discontinuité que pour vous entre ce monde et l'autre".

Extrait de la préface de Jacques Rivière à l'ouvrage posthume Miracles (1924), recueil de divers poèmes et textes en prose d'Alain-Fournier.

Henri-Alban Fournier naît le 3 octobre 1886 à la Chapelle-d'Angillon, dans le Cher. Son père, instituteur, est nommé à l'école d'Epineuil-le-Fleuriel en 1891 et Henri en sera son élève jusqu'en 1898, avant d'entrer en sixième au lycée Voltaire à Paris.

En 1901, Henri-Alban Fournier, qui songe alors à devenir marin, poursuit ses études de seconde au lycée de Brest dans le but d'entrer à l'École Navale. Mais, il renonce rapidement à ce projet et rejoint finalement, à la fin de l'année 1902, le lycée de Bourges afin d'y passer son baccalauréat qu'il obtiendra six mois plus tard.

À la rentrée 1903, l'adolescent s'inscrit au lycée Lakanal de Sceaux afin de préparer le concours d'entrée à l'École Normale Supérieure. Il y fait la rencontre de Jacques Rivière, qui deviendra son meilleur ami (leurs correspondances, l'une des plus belles de la littérature française, seront publiées entre 1926 et 1928) puis son beau-frère lorsqu'en 1909 il épousera Isabelle Fournier, la soeur cadette d'Henri-Alban.

En 1906, Fournier échoue dans ses projets scolaires. Il tente alors, l'année suivante, une ultime année de Khâgne, au lycée Louis Le Grand mais encore une fois, il échoue au concours d'entrée à l'École Normale Supérieure.

C'est durant cette vie de lycéen que se déroule un événement qui sera déterminant dans la vie sentimentale et littéraire d'Alain Fournier . en effet, le 1er juin 1905, en sortant du Grand Palais, il croise une jeune fille d'une grande beauté qu'il suit à distance jusqu'à son domicile, boulevard Saint Germain. Revenu sur les lieux, le 11 juin suivant, il l'accoste cette fois-ci dans la rue et lui murmure : "Vous êtes belle". Yvonne de Quiévrecourt ne répond pas à ses avances et s'en va vers l'église de Saint-Germain des Près, où elle assiste à la messe. Après la cérémonie, les deux jeunes gens ont enfin une longue conversation au terme de laquelle Yvonne lui avoue qu'elle est fiancée et que son destin est maintenant tracé. Yvonne de Quiévrecourt qui deviendra Yvonne de Galais dans le Grand Meaulnes se marie en 1907.

L'année suivante, Henri-Alban Fournier effectue son service militaire. Après avoir suivi le peloton des élèves-officiers à Laval, il est affecté au 88e R.I., à Mirande, dans le Gers, avec le grade de sous-lieutenant. Hanté par le souvenir d'Yvonne, il rédige alors quelques poèmes et essais, ses premiers pas dans la littérature, qui seront publiés à titre posthume par son ami Jacques Rivière sous le titre Miracles (1924). Son service militaire achevé, Henri-Alban Fournier trouve à s'employer au mois d'avril 1910 en tant que journaliste à Paris-Journal et y rédige de façon régulière un " courrier littéraire ". Au même moment commence une liaison avec Jeanne Bruneau, une modiste de la rue Chanoinesse rencontrée autrefois à Bourges, qui durera jusqu'en avril 1912. Celle-ci inspirera vraisemblablement le rôle de Valentine dans le Grand Meaulnes.

C'est durant cette période que Fournier, installé rue Cassini, entreprend la rédaction d'un roman autobiographique, Le Grand Meaulnes. En 1912, il quitte la rédaction du quotidien parisien pour entrer, grâce à Charles Péguy, au service de Claude Casimir-Perier, fils d'un ancien Président de la République. Le jeune homme entame alors une liaison orageuse avec l'épouse de l'homme politique, l'actrice Pauline Benda, plus connue dans les milieux artistiques de la capitale sous le pseudonyme de Madame Simone.

En février 1913, Henri-Alban Fournier obtient pour la dernière fois une entrevue avec Yvonne de Quiévrecourt (mariée Vaugrigneuse), son amour de jeunesse, maintenant mère de deux enfants. De juillet à novembre 1913, La Nouvelle Revue française commence la publication de son oeuvre romanesque, Le Grand Meaulnes, achevée au début de l'année. Elle paraît ensuite en volume (1913) chez l'éditeur Émile-Paul, l'écrivain ayant pris à cette occasion le nom d'Alain-Fournier. Sélectionné pour le prix Goncourt, Le Grand Meaulnes manque de peu le prestigieux prix littéraire, l'honneur revenant à Marc Elder et au Peuple de la Mer.

Au début de l'année 1914, Alain-Fournier entame l'écriture d'une pièce de théâtre, la Maison dans la forêt, et d'un nouveau roman, Colombe Blanchet. Ces deux dernières oeuvres demeureront inachevées.

En effet, l'écrivain est mobilisé dès la déclaration de guerre, au mois d'août 1914. Il rejoint alors le front comme lieutenant d'infanterie avec le régiment de réserve de Mirande, le 288e R.I. Le 22 septembre suivant, après quelques semaines de combat, Alain-Fournier est tué au sud de Verdun, dans les Hauts de Meuse. Porté disparu avec vingt de ses compagnons d'armes, son corps est découvert en 1991 dans une fosse commune où les soldats allemands l'avaient enterré. En 1992, les 21 corps de fantassins du 288e RI exhumés du bois de Saint-Rémy dont celui de l'écrivain Alain-Fournier sont regroupés. Henri-Alban Fournier est maintenant inhumé dans la nécropole nationale de Saint-Remy-la-Calonne, dans la Meuse.

 

Source : Mindef/SGA/DMPA - Vincent Konsler

 

Voici la dernière lettre (une carte en réalité) écrite par Alain-Fournier à sa soeur Isabelle, le 11 septembre 1914 


"Je reçois bien tes lettres, ma chère petite Isabelle. Certaines me sont même parvenues au milieu du combat. Je suis en excellente santé. J'espère me rapprocher de Jacques avant peu. Je suis maintenant attaché à l'état-major à cheval. J'ai grande confiance dans l'issue de la guerre. Priez Dieu pour nous tous. Et ayez confiance aussi. Longuement, tendrement, je te serre avec ta Jacqueline dans mes Bras. Ton frère, Henri"

 

Hubert Lyautey

1854-1934

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Portrait du maréchal Lyautey, photo collection DMPA

 

Né à Nancy le 17 novembre 1854, Louis Hubert Gonzalve Lyautey, bachelier en juillet 1872, entre à Saint-Cyr en 1873 puis à l'École d'application d'état-major en 1876.

Lieutenant en décembre 1877, il est affecté au 20e régiment de chasseurs à cheval à Rambouillet puis muté sur sa demande à Châteaudun. Versé dans la cavalerie, au 2e régiment de hussards, il rejoint en août 1880 son régiment à Sézanne, lequel embarque deux mois plus tard pour l'Algérie.

En poste à Orléansville puis à Alger, il se passionne pour la civilisation arabe, apprend la langue et se familiarise avec les questions coloniales, l'administration et la politique françaises en Algérie. À une politique d'assimilation totale à la France, d'administration directe, il préfère la solution de l'autonomie, du protectorat. L'action de la France ne peut s'inscrire que dans le respect des civilisations et des cultures qu'elle rencontre et en association avec les élites locales.

Après quelques mois passés à Teniet-el-Haad, poste avancé du sud algérien, le capitaine Lyautey est affecté au 4e régiment de chasseurs à Bruyères, dans les Vosges, en 1882. Il devient en octobre de l'année suivante aide de camp du général L'Hotte, inspecteur général de la cavalerie, qu'il suit dans ses affectations à Commercy puis à Tours.

Le 19 novembre 1887, il prend le commandement du 1er escadron du 4e régiment de chasseurs à cheval de Saint-Germain-en-Laye.

À ce poste, il s'emploie à améliorer les conditions de vie de ses hommes, tant sur le plan matériel que culturel, ainsi que leur formation, mettant en pratique ses principes réformistes concernant la mission sociale de l'officier. L'occasion lui est donnée d'exposer ses théories novatrices dans un article au fort retentissement intitulé "Du rôle social de l'officier dans le service militaire universel", publié dans La Revue des Deux Mondes du 15 mars 1891.

Affecté au 12e régiment de hussards à Gray, puis chef d'état-major de la 7e division de cavalerie à Meaux en 1893, le commandant Lyautey est nommé en Indochine en 1894.

Chef d'état-major du colonel Gallieni, commandant du territoire militaire de la frontière de Chine (territoire de Lang Son), il prend part aux expéditions du haut Tonkin contre les pirates chinois pillant la région. Aux côtés de Gallieni, attaché à l'idée qu'il faut montrer aux populations la force de l'armée française pour éviter d'avoir ensuite à s'en servir, il met en place les structures nécessaires à la mise en valeur de la région : reconstruction des villages, aménagement des voies de communication, reprise et développement des cultures et du commerce. Sous-chef puis chef d'état-major du corps d'occupation, il est ensuite directeur du cabinet militaire d'Armand Rousseau, gouverneur général de l'Indochine. Approfondissant ses connaissances sur les questions politiques, administratives et financières de l'Indochine, il poursuit son action sur tout le territoire.

En mars 1897, il retrouve Gallieni, devenu quelques mois auparavant gouverneur général de Madagascar. Celui-ci le charge de la pacification du nord-ouest et de l'ouest de l'île puis de l'organisation du sud. L'occupation des territoires s'accompagne de grands travaux d'aménagement destinés à permettre l'essor économique et commercial du pays.

Promu colonel en 1900, il rentre en France en 1902 pour prendre le commandement du 14e régiment de hussards à Alençon avant d'être appelé dans le Sud-Oranais en 1903 par Charles Jonnart, gouverneur général de l'Algérie. Général de brigade, il prend le commandement de la subdivision d'Aïn Sefra en octobre puis de la division d'Oran à la fin de l'année 1906. Nommé divisionnaire en 1907, il devient l'année suivante haut-commissaire du gouvernement pour la zone marocaine occupée de la région d'Oudjda.

Il commence par revoir l'aménagement de la zone frontalière algéro-marocaine, foyer d'agitation permanente, en installant de nouveaux postes destinés tant à assurer la sécurité de la région régulièrement menacée par les incursions des tribus hostiles à l'implantation française qu'à ouvrir la voie vers le Maroc. Il établit ainsi une ligne de postes partant au sud de Béchar, rebaptisé Colomb, occupé en octobre 1903, pour aboutir au nord à Berguent, dans l'oasis de Ras el Aïn, en juin 1904. Les mois suivants sont consacrés au renforcement et à l'extension vers l'ouest du dispositif. Diplomate tout autant que militaire, Lyautey multiplie parallèlement les contacts avec les différents chefs locaux afin de susciter leur adhésion à la politique française. Après la pacification de la région frontalière algéro-marocaine, il revient en France en 1910 prendre la tête du 10e corps d'armée de Rennes.

En mars 1912, la convention de Fès établit le protectorat français sur le Maroc, le nord du pays demeurant sous influence espagnole. Lyautey en devient commissaire résident général le 28 avril suivant. Au Maroc, le protectorat n'est cependant pas unanimement accepté. Les opposants au traité et au sultan qui l'a signé sont nombreux. La situation n'a cessé de se dégrader. Arrivé à Casablanca à la mi-mai, Lyautey se porte sur Fès, assiégée par les forces des chefs berbères. C'est le début d'une campagne difficile. Le pays est totalement désorganisé et, administrativement et économiquement, le protectorat est entièrement à construire. Au terme de violents combats, la paix est finalement ramenée dans Fès et sa région. Au cours de l'été, un nouveau sultan est nommé. Lyautey s'emploie à rétablir l'autorité religieuse et politique de ce nouveau souverain sur l'ensemble du pays. La pacification du territoire s'accomplit peu à peu. En mai 1914, Taza, ville clé de l'accès à l'Algérie, est occupée. Les plaines et les villes côtières sont désormais sous contrôle français.

Parallèlement aux opérations militaires, il entreprend les grands travaux de modernisation économique et sociale préalables à l'essor du pays. De grandes réformes administratives, judiciaires et économiques sont engagées. Mise en place des cadres administratifs, développement des ports, de l'agriculture, de la recherche et de l'exploitation minières, aménagement des villes, des voies de communication, création de lycées et d'écoles, construction d'hôpitaux, de dispensaires et ouverture de postes sanitaires fixes ou mobiles... la tâche est vaste.

Pendant la Première Guerre mondiale, il devient brièvement, de décembre 1916 à mars 1917, ministre de la Guerre dans le cabinet Briand. Il regagne ensuite le Maroc. En dépit de moyens réduits, il parvient non seulement à maintenir la présence française mais à accroître son emprise durant tout le conflit.

À son retour et pendant huit ans encore, travaillant sans relâche, il va faire montre d'une intense activité politique et économique propice à l'expansion du pays. Couronnement de sa carrière, en 1921, il est élevé à la dignité de maréchal de France.

Dans le Rif, cependant, la situation est préoccupante. Le soulèvement mené par Abd el-Krim contre les Espagnols se développe, menaçant le Maroc français. Au printemps 1925, Abd el-Krim passe à l'attaque, menaçant les secteurs de Taza et Fès. Lyautey, qui a vu ces dernières années ses forces progressivement réduites, organise immédiatement un barrage défensif en attendant des renforts. Opposé au gouvernement français dans la conduite des opérations, désavoué par celui-ci, il rentre définitivement en France en octobre et se retire à Thorey, en Lorraine. De 1927 à 1931, il remplit une dernière mission, l'organisation de l'exposition coloniale internationale de Vincennes.

Le maréchal Lyautey s'éteint le 27 juillet 1934. Enterrée initialement à Rabat, sa dépouille est rapatriée en France en 1961 pour être inhumée aux Invalides.

Hubert Lyautey était Grand-Croix de la Légion d'honneur et titulaire de la Médaille militaire, de la Médaille coloniale Tonkin et Maroc, de la Médaille du Maroc agrafes "Casablanca" -"Oudjda" - "Haut-Guir", ainsi que de nombreuses décorations étrangères.

Élu à l'Académie française dès le 31 octobre 1912, il était également l'auteur de plusieurs études et ouvrages dont notamment "Du rôle social de l'officier dans le service militaire universel", publié dans La Revue des Deux Mondes, 1891, Du rôle colonial de l'armée, 1900, Dans le sud de Madagascar, pénétration militaire, situation politique et économique, 1903, Lettres du Tonkin et de Madagascar : 1894-1899, 1920, Paroles d'action : 1900-1926, 1927, Lettres de jeunesse : 1883-1893, 1931.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Raymond Poincaré

1860-1934

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Portrait de Raymond Poincaré. Source : photo de "the University of Texas at Austin"

 

Raymond, Nicolas, Landry Poincaré, de vieille souche lorraine, est né le 20 avril 1860, à Bar-le-Duc. Après des études secondaires à Bar-le-Duc et à Paris, licencié en droit ainsi qu'en lettres, il s'inscrit comme avocat au barreau de Paris en 1880, obtient son doctorat en droit et devient chroniqueur judiciaire au Voltaire, quotidien radical dirigé par Jules Laffitte.

En 1886, à 26 ans, il fait ses débuts dans le monde politique comme chef de cabinet de Jules Develle, ministre de l'Agriculture, et est élu conseiller général de la Meuse puis, l'année suivante, député de ce département. Se spécialisant dans les questions financières, il est rapporteur général du budget en 1890 et accepte, en 1893, le portefeuille de l'Instruction publique et des Beaux-Arts dans le ministère Dupuy, son premier ministère.

En 1894, il devient ministre des Finances puis reprend, pour une courte période, le portefeuille de l'Instruction publique et des Beaux-Arts avec, cette fois-ci, la direction des Cultes, dans le cabinet Ribot, en 1895. Après la chute de ce dernier, il décline l'offre de Jules Méline lui proposant les Finances dans le nouveau gouvernement. Tout en constituant un cabinet juridique rapidement renommé, il poursuit ses activités parlementaires et devient vice-président de la Chambre.

Sénateur de la Meuse de 1903 à 1913, il accepte, en 1906, le portefeuille des Finances dans le cabinet Sarrien. Il est élu à l'Académie française en 1909.

Président du Conseil et ministre des Affaires étrangères en janvier 1912, après l'affaire d'Agadir opposant l'Allemagne et la France au Maroc, il est partisan d'une restauration du pouvoir exécutif face à l'Assemblée, d'un État libéral mais fort et s'attache à régler les problèmes de politique extérieure. Le 30 mars, il signe avec le sultan du Maroc le traité de protectorat. Son souhait est par ailleurs de resserrer les liens de la France avec la Grande-Bretagne et la Russie. À cet effet, un accord d'assistance navale est négocié avec la Grande-Bretagne tandis qu'il se rend en Russie ranimer l'alliance en août.

 

 

"Républicain laïque", homme d'ordre, il est élu Président de la République le 17 janvier 1913. Face à une guerre qui semble se profiler, il fait voter la loi militaire des trois ans en août et, sur le plan extérieur, renforce les alliances, entreprenant un second voyage en Russie en juillet 1914. Le conflit déclaré, sa tâche essentielle est de gagner la guerre. Pour cela, il faut mobiliser toutes les énergies, rassembler toutes les bonnes volontés, qu'elles soient de gauche ou de droite, en un mot faire "l'Union sacrée". Successivement, le gouvernement sera dirigé par Viviani, Briand, Ribot, Painlevé, sans que le succès des armes puisse cependant s'affirmer. Les difficultés militaires et politiques se multiplient : défaite française au Chemin des Dames, mutineries sur le front, réveil des tensions sociales et fin de l'Union sacrée. Faisant taire ses sentiments personnels, Poincaré fait appel à son ennemi politique, Clemenceau, qui devient Président du Conseil le 16 novembre 1917. En 1918, c'est la victoire et le retour de l'Alsace-Lorraine à la France.

 

Redevenu sénateur de la Meuse après l'achèvement de son septennat, il est président de la commission des réparations de février à mai 1920 puis est à nouveau nommé Président du Conseil et ministre des Affaires étrangères en 1922. Partisan de l'exécution intégrale du traité de Versailles, il fait, malgré la réticence des Alliés, occuper la Ruhr par les troupes du général Degoutte, le 11 janvier 1923, l'Allemagne tardant dans le paiement des réparations. Le résultat des élections législatives, donnant la majorité au "Cartel des gauches", l'oblige à donner sa démission en juin 1924.

Rappelé le 23 juillet 1926 pour tenter de redresser une situation financière catastrophique, il rétablit immédiatement la confiance et réussit à stabiliser le franc. Absorbé par les problèmes monétaires, il laisse le domaine des Affaires étrangères à Briand qui choisit une autre politique, celle de l'accommodement avec l'Allemagne.

Malade, Poincaré démissionne en juillet 1929 et se consacre à la poursuite de la rédaction de ses Mémoires, Au service de la France (1926-1933).

Il s'éteint le 15 octobre 1934. Après des obsèques nationales célébrées à Paris, il est inhumé à Nubécourt.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Aristide Briand

1862-1932

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Portrait d'Aristide Briand. Photo archives du ministère des affaires étrangères

Aristide Briand est né à Nantes le 28 mars 1862, d'une famille de cafetiers d'origine paysanne. Après des études de droit, il s'inscrit au barreau de Saint-Nazaire avant de s'installer à Paris où il travaille à la Lanterne, journal populiste et anticlérical d'Eugène Mayer. Aux côtés de Jean Jaurès, il s'efforce de maintenir unis les courants qui s'affrontent au sein du mouvement socialiste.

Élu député en 1902, il multiplie dès lors les postes politiques. Brillant orateur, il est nommé rapporteur sur le projet de loi de séparation des Églises et de l'État, votée en 1905. En 1906, il obtient son premier portefeuille ministériel, celui de l'instruction publique et des cultes. Succédant à Georges Clemenceau à la présidence du Conseil en 1909, il fait adopter, notamment, la loi sur les retraites ouvrières et paysannes (avril 1910).

À la veille de la Première Guerre mondiale, Aristide Briand, tout en soutenant l'allongement de la durée du service militaire, s'efforce de faire valoir les solutions pacifiques. La guerre déclarée, cependant, il entre dans un cabinet "d'union sacrée" en qualité de garde des Sceaux, vice-président du conseil et apporte son soutien au commandement lors de la bataille de la Marne.

Chef du gouvernement et ministre des affaires étrangères de 1915 à 1917, il joue un rôle important, notamment en organisant l'expédition de Salonique et en coordonnant l'action militaire et économique avec les Alliés.

Quatre années de guerre laissent l'Europe exsangue. Les anciens belligérants, qui se sont endettés pour assurer leur ravitaillement, sortent du conflit économiquement très affaiblis. En France, les régions les plus riches et les plus industrialisées sont dévastées. Avec près d'un million et demi de morts et plus d'un million d'invalides, le pays est profondément atteint dans ses forces vives. Les pensions de guerre, la reconstruction accroissent les charges de l'État. Le traité de paix, signé avec l'Allemagne, le 28 juin 1919 à Versailles, impose à cette dernière la réparation des dommages de guerre. L'épineuse question du règlement des réparations est l'un des principaux facteurs qui président aux relations franco-allemandes pendant quelque dix ans et est source de divergences entre les Alliés eux-mêmes.

l'issue de la guerre, partisan d'une stricte application du traité de Versailles, Aristide Briand est de ceux qui entendent obliger l'Allemagne à payer les réparations de guerre. Il abandonne toutefois rapidement cette politique de fermeté pour une politique de paix dans le cadre de la Société des Nations (SDN) et oeuvre dès lors pour le rapprochement avec l'Allemagne. Lors de la conférence de Cannes, en janvier 1922, il est ouvert à la proposition d'aménagement de la dette allemande en contrepartie d'une garantie des frontières françaises. Désavoué par Alexandre Millerand, président de la République, il démissionne.

Délégué de la France à la Société des Nations en 1924, il s'efforce de faire prévaloir une politique de conciliation, conscient que le rapprochement franco-allemand ne peut se faire qu'au prix de certaines concessions. Cette politique s'exprime en ces termes : "Paix intérieure, paix politique et sociale, je crois qu'elle est ardemment désirée par le pays tout entier... Vouloir la paix, c'est, dans un pays qui, comme la France, a tant souffert de la guerre et, depuis l'armistice, a été soumis à un régime de défis et de provocations qui justifieraient l'impatience -c'est se montrer patient".

De nouveau ministre des affaires étrangères en 1925, Aristide Briand poursuit sa politique de réconciliation avec l'Allemagne, seul moyen d'assurer une paix durable en Europe. Il se rapproche de son homologue allemand, Gustav Stresemann, également partisan d'une politique conciliatrice. Lors de la conférence de Locarno, qui réunit les délégués de l'Allemagne, de la Belgique, de l'Italie, de la France et de la Grande-Bretagne, il signe, le 16 octobre 1925, le traité qui garantit les frontières de la France et de la Belgique avec l'Allemagne et établit un pacte d'assistance mutuelle. Après Locarno, il soutient la candidature de l'Allemagne à la SDN où elle est admise l'année suivante. Il obtient en décembre 1926, ainsi que Gustav Stresemann, le prix Nobel de la Paix.

Début d'une ère nouvelle annonçant la fin de l'antagonisme franco-allemand pour certains, les accords de Locarno et l'admission de l'Allemagne à la SDN ne sont toutefois pour Aristide Briand qu'un premier jalon. L'absence des États-Unis à la Société des Nations en affaiblit la portée. En 1927, il s'emploie donc à faire renoncer les États-Unis à leur isolationnisme. En appelant "à la nation américaine", il rencontre le soutien de ses puissantes associations pacifistes. Le 27 août 1928, le "Pacte Briand-Kellogg", du nom du secrétaire d'État américain qui l'a négocié avec lui, met la guerre "hors-la-loi" :

"Article 1er : Les Hautes Parties contractantes déclarent solennellement au nom de leurs peuples respectifs qu'elles condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles.

Article 2 : Les Hautes Parties contractantes reconnaissent que le règlement ou la solution de tous les différends ou conflits, de quelque nature ou de quelque origine qu'ils puissent être, qui pourront surgir entre elles, ne devra jamais être recherché que par des moyens pacifiques."

Bien qu'approuvé par cinquante-sept pays, dont notamment l'Allemagne, le Japon et l'Union Soviétique, ce pacte n'a cependant qu'une valeur morale, laissant en suspens la question des sanctions applicables en cas de non-respect de ses dispositions. Les États-Unis, qui connaissent alors une période de prospérité économique, sont en effet réticents à un engagement dans un éventuel conflit européen.

Aristide Briand s'engage alors dans une politique nouvelle, résolument européenne. En septembre 1929, lors d'un discours à Genève, reprenant une idée émise notamment par le comte Coudenhove-Kalergi, diplomate autrichien fondateur du mouvement Pan-Europa, il suggère la création d'une union régionale, une "fédération européenne" dont la compétence s'exercerait principalement en matière économique et qui ne porterait pas atteinte à la souveraineté nationale. Cette proposition rencontre un vif succès et les délégués des vingt-sept états européens le chargent de rédiger un mémorandum à ce sujet.

Ce mémorandum leur est adressé en mai 1930. Aristide Briand y développe son projet. S'inscrivant dans le cadre de la Société des Nations, cette institution serait composée d'une Conférence d'Union européenne, organe représentatif groupant les représentants de tous les gouvernements européens membres de la SDN, d'un Comité politique permanent, organe exécutif présidé à tour de rôle par les états membres et d'un secrétariat. L'un des principaux objectifs serait "l'établissement d'un marché commun pour l'élévation au maximum du niveau de bien-être humain sur l'ensemble des territoires de la communauté européenne".

Le mémorandum ne reçoit pas le même accueil que ses propos à la Société des Nations. En France comme dans le monde, l'action d'Aristide Briand se heurte à des résistances de plus en plus fortes. L'obstacle le plus important est la persistance des différents nationalismes. Si le principe d'une coopération n'est pas remis en cause, celui d'une union européenne pleine et entière, tant au plan politique qu'économique, effraie. L'aspect politique du projet, notamment, en évoquant des "liens fédéraux", réveille les méfiances. Une commission d'études est créée le 23 septembre 1930. Aristide Briand en est élu président. Chargée d'étudier les modalités d'une éventuelle collaboration au sein de l'Europe, elle ne peut cependant aboutir à aucun résultat.

Surnommé le "pèlerin de la paix", Aristide Briand n'a cessé tout au long de sa carrière diplomatique de multiplier les occasions d'établir la paix en Europe. Son projet d'union européenne ne résiste malheureusement pas à la crise économique et à la montée des dictatures.

Aristide Briand s'éteint le 7 mars 1932.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Wilhelm Keitel

1882 - 1946

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Wilhelm Keitel. Photo collection DMPA

 

Entré dans l'armée en 1901, Wilhelm Keitel occupe principalement divers postes d'officiers d'état-major durant la Première Guerre Mondiale. Après la capitulation de l'Allemagne en 1918, il poursuit sa carrière militaire au sein de la nouvelle armée allemande, la Reichswehr, telle qu'elle est autorisée par le traité de Versailles.

Lorsque Adolf Hitler arrive au pouvoir, en 1933, et entreprend de reconstituer les forces armées, la carrière de Wilhelm Keitel progresse très rapidement. Nommé général de brigade en 1934, il devient chef de cabinet du ministre de la guerre et directeur du Wehrmachtsamt, chargé de la coordination des forces armées, l'année suivante.

En 1938, Wilhelm Keitel est nommé chef de l'Oberkommando der Wehrmacht (OKW : commandement suprême de la Wehrmacht) nouvellement crée.

Le 22 juin 1940, il signe l'armistice franco-allemand à Rethondes. Nommé maréchal en juillet 1940, cet exécuteur zélé des ordres d'Adolf Hitler couvre de son autorité toutes ses décisions militaires ainsi que les mesures de terreur adoptées dans les territoires conquis, portant notamment sur l'exécution des commissaires politiques de l'Armée rouge, l'exécution des otages et les prisonniers NN. En dépit de plusieurs tentatives visant à un changement de personne au sommet de la hiérarchie militaire de la part de cercles dirigeants de l'armée et de l'état-major, il conserve son poste jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Le 9 mai 1945, il signe la capitulation sans conditions de la Wehrmacht, sur ordre du chancelier-amiral Dönitz. En 1946, le tribunal international de Nuremberg le condamne à mort pour crime contre la paix, crimes de guerre et crime contre l'humanité.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Félix Eboué

1884-1944

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Félix Eboué. Photo DMPA

Adolphe Félix Eboué naît le 26 décembre 1884 à Cayenne (Guyane), quatrième d'une famille noire de cinq enfants. Son père, d'abord orpailleur, tiendra avec son épouse, après 1898, une épicerie.

En 1901 il obtient une demi-bourse pour poursuivre sa scolarité à Bordeaux. Bachelier en 1905, il gagne Paris et l'école coloniale dont il sort diplômé en 1908. Très tôt, il est attiré par l'Afrique noire et ses civilisations auxquelles se rattache sa condition de créole. Il s'oriente donc vers l'administration des colonies africaines, et obtient son affectation comme administrateur en chef en 1909 dans l'Oubangui-Chari (aujourd'hui la République Centrafricaine) où la pénétration occidentale n'est pas encore partout assurée. Il va demeurer en poste jusqu'en 1933, revenant régulièrement en Guyane pour ses congés. Il y épouse Eugénie Tell en 1921.

En Afrique noire, Félix Eboué élabore sa propre conception de la politique coloniale, tentant de concilier la modernisation de la vie matérielle et le maintien de la culture africaine. C'est ainsi qu'il favorise les productions nouvelles comme le coton, développe l'infrastructure routière ferroviaire. Parallèlement, il pousse à sauvegarder les cultures vivrières, s'initie aux langues locales, étend ses recherches sur les traditions...

Partisan de l'association - et non de l'assimilation - des peuples colonisés, il se heurte souvent à ses supérieurs hiérarchiques qui ont peu apprécié son adhésion, en 1928, à la Ligue des droits de l'homme. Félix Eboué veut en effet assumer le pari délicat d'être à la fois un administrateur colonial rigoureux et un humaniste intransigeant.

En 1934, il part pour le Soudan français (aujourd'hui le Mali). S'appuyant sur les élites noires, il entreprend la mise en valeur des rives du Soudan, la sédentarisation des nomades pour cultiver les terres. Entre-temps, en 1932 et 1933, il fut secrétaire général en Martinique, où il a cherché à développer l'île, à améliorer la condition des plus démunis, à atténuer les antagonismes entre Blancs, Métis et Noirs.

Rappelé du Soudan, il est chargé, en septembre 1936, d'appliquer la politique du Front Populaire en Guadeloupe. Trouvant sur cette île morcelée une situation de crise, il ouvre des négociations, engage un plan d'aide au crédit, de formation professionnelle, de construction de cités, et assainit les finances publiques.

Le 4 janvier 1939, il est nommé gouverneur du Tchad, nouvelle colonie tout juste pacifiée. Conscient de l'importance stratégique du pays, alors que la menace italienne se précise dans la région, il lance de grands travaux d'infrastructures.

Le 6 juin 1940, la nouvelle de la défaite des armées françaises et de l'armistice parviennent à Fort-Lamy. L'appel du général de Gaulle est aussi appris quelques jours plus tard. A Brazzaville, après avoir hésité, Boisson, gouverneur général de FA.E.F, fait allégeance au maréchal Pétain. Le 29 juin. Eboué, qui juge que cet armistice prive sa patrie des valeurs qu'il a toujours défendues, câble sa détermination de ne pas en appliquer les clauses. Bien que son isolement géographique le place dans une position inconfortable, le Tchad reste en état de guerre. Le 16 juillet, un télégramme du général de Gaulle lui apporte l'appui du chef de la France Libre dont les émissaires arrivent le 24 août. Le 26, une proclamation annonce le ralliement du Tchad à la France Libre. Le Cameroun, le Congo, suivent l'exemple : Eboué a donné le signal de la dissidence africaine, apportant à la cause de la France combattante un point d'appui exceptionnel.

Relevé de ses fonctions et condamné à mort par contumace par le Gouvernement de Vichy, Félix Eboué est nommé, le 13 novembre, gouverneur général de l'Afrique équatoriale française par le général de Gaulle, et siège au Conseil de défense de l'empire. Le Tchad devient la base arrière des Français qui reprennent le combat : c'est de là que Leclerc lance en mars 1942 son raid légendaire sur Koufra, et que les F.F.L. attaquent les Italiens au Fezzan puis en Tripolitaine.

En même temps qu'il assure l'approvisionnement de ces troupes, organise une économie de guerre, rétablit les circuits commerciaux, Eboué cherche à ramener la paix civile en A.E.F., atténuant les tensions nées en 1940 entre gaullistes et pétainistes.

Parallèlement, il est convaincu que l'autorité française ne peut se maintenir durablement en Afrique noire sans une profonde réforme de la politique coloniale.

Dans cet esprit, sa circulaire du 8 novembre 1941 prévoit ainsi le respect du droit coutumier, l'association des conseils africains à l'administration, la formation de cadres indigènes, l'extension de contrats de travail, etc. En juillet 1942, le général de Gaulle signe trois décrets allant dans le même sens.

Le 30 janvier 1944, le chef de la France Libre ouvre à Brazzaville une conférence sur l'avenir des territoires français d'Afrique. Reprenant des thèmes chers à Eboué, comme la participation indigène à l'administration ou à la redistribution des régions en fonction des appartenances ethniques, les recommandations de la conférence le laissent insatisfait puisqu'elles rejettent toute autonomie à terme, tout en préconisant une représentation élue des territoires africains. Fatigué, Eboué prend un congé et part en février 1944 avec sa famille - qui, de France, l'a rejoint en 1942 - en Egypte. Il trouve l'occasion d'oeuvrer aux relations diplomatiques entre ce pays et le gouvernement provisoire de la République française.

Le 17 mai 1944, il meurt des suites d'une congestion pulmonaire.

Le 19 mai 1949, les cendres de Félix Eboué sont transférées au Panthéon à Paris. A cette occasion, Gaston Monnerville, président du Sénat, rappelle que "c'est (un) message d'humanité qui a guidé Félix Eboué, et nous tous, Résistants d'outre-mer, à l'heure où le fanatisme bestial menaçait d'éteindre les lumières de l'esprit et où, avec la France, risquait de sombrer la liberté".

La mémoire de Félix Eboué est aujourd'hui rappelée à travers plusieurs monuments et plaques commémoratifs.

À Paris, son nom, joint à celui de Daumesnil, se retrouve dans une station du métropolitain.

 
Source : MINDEF/SGA/DMPA

Charles Péguy

1873 - 1914

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Charles Péguy - Portrait par Pierre Laurens. ©Harlingue-Viollet

 

Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle,

Mais pourvu que ce soit pour une juste guerre.

Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre.

Heureux ceux qui sont morts d'une mort solennelle »

Charles Péguy, Prière pour nous autres charnels.

 

Charles Péguy naît le 7 janvier 1873 à Orléans au sein d'une famille de condition modeste.

Son père, menuisier, décède l'année même de sa naissance et l'enfant est alors élevé par sa mère, rempailleuse de chaises.

Bon élève, Charles Péguy bénéficie d'une bourse d'enseignement qui lui offre la possibilité d'effectuer de brillantes études au delà de l'école communale. Après avoir accompli son service militaire au 131e RI d'Orléans en 1892, il quitte donc le lycée et entre en 1894 à l'École Normale Supérieure où il a pour maître des professeurs prestigieux comme le médiéviste Joseph Bédier, l'écrivain Romain Rolland ou le philosophe Henri Bergson qui aura d'ailleurs une grande influence sur la maturation intellectuelle du jeune homme.

Licencié ès lettres en 1896, Charles Péguy démissionne de l'institution en 1897 après avoir échoué à l'agrégation de philosophie. Il abandonne alors toute pratique religieuse et s'engage avec conviction dans la cause dreyfusiste après avoir fait la connaissance de Bernard Lazare.

En 1897, Péguy collabore à la Revue Blanche et achève en juin sa première oeuvre, Jeanne d'Arc, suivie, l'année suivante, de Marcel, premier dialogue de la cité harmonieuse.

En 1898, Péguy se marie civilement avec Charlotte Baudouin, la soeur de son plus intime ami, récemment décédé. Le couple, qui demeure au 7, rue de l'Estrapade à Paris, aura quatre enfants : Marcel en 1898, Germaine en 1901, Pierre en 1903 et enfin Charles-Pierre en 1915.

Marcel Baudouin l'ayant orienté vers les idées socialistes, Charles Péguy s'engage dans l'action politique aux côtés de Jean Jaurès, Lucien Herr et Charles Andler et collabore activement à la Revue Socialiste. Il investit également dans une librairie, ouverte en compagnie de Georges Bellais, qui devient rapidement un foyer de résistance au socialisme marxiste prônée par Jules Guesde ainsi qu'à l'influence de Jean Jaurès sur la vie de la gauche parlementaire. Mais, l'affaire périclite à la suite de nombreuses difficultés financières, ce qui éloigne de manière définitive Péguy de ses amitiés de gauche.

En 1905, l'incident de Tanger lui révèle la menace allemande et l'ampleur du "mal universel". Péguy s'élève alors contre le pacifisme et l'internationalisme de la gauche. Au mois d'octobre, il publie ainsi Notre Patrie, un écrit polémiste et patriotique. Dans les années qui suivent, l'écrivain dénonce également le scientisme du "parti intellectuel", autrement dit ses anciens professeurs de l'enseignement supérieur. L'année 1908 est marquée par son retour à la foi. Il en fait la confidence à son ami Joseph Lotte. De 1912 à 1914, Charles Péguy effectue ainsi plusieurs pèlerinages à Notre-Dame de Chartres. L'écrivain fustige à présent le socialisme officiel, auquel il reproche sa démagogie et son sectarisme anticlérical, après la séparation de l'Église et de l'État. L'écrivain se fait mystique dans des essais philosophiques comme Clio, Dialogue de l'Histoire et de l'Âme païenne, publié entre 1909 et 1912, ou Victor-Marie, comte Hugo, en 1910. Son style personnel et intemporel trouve à s'exprimer dans de vastes poèmes oratoires aux rythmes lancinants : Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc, en 1910 . Le Porche du Mystère de la deuxième Vertu, l'année suivante . Le Mystère des Saints Innocents et La Tapisserie de sainte Geneviève et de Jeanne d'Arc, en 1912 . La Tapisserie de Notre-Dame, en 1913. Dans ces dernières oeuvres, Charles Péguy reprend les thèmes de la confrontation entre la mystique et la politique, la vie intérieure des citoyens qui avaient marqué le début de son oeuvre. Enfin, avec Ève en 1913, un vaste poème symphonique de quelque 3 000 quatrains, l'écrivain patriotique célèbre de nouveau les morts "pour la terre charnelle", celle des ancêtres.

 

Au mois de janvier 1900, Charles Péguy fonde les Cahiers de la Quinzaine, une maison d'édition indépendante qui publie chaque mois sa propre revue littéraire. Installée au 8 rue de la Sorbonne, il en assume personnellement la direction. Celle-ci connaîtra 229 livraisons entre le 5 janvier 1900 et le mois de juillet 1914, permettront à Péguy de publier ses oeuvres, ainsi que celles de ses amis tels André Suarès, Anatole France, Georges Sorel ou Julien Benda. Péguy rédige également des textes sur l'actualité, comme la séparation de l'Église et de l'État, la crise de l'enseignement...

 

Le 2 août 1914, la mobilisation générale contraint Péguy à interrompre sa Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne, un plaidoyer pour la défense de Bergson. Le 4 août, il prend le commandement d'une unité de réservistes à Colommiers et gagne la Lorraine. Après une courte campagne devant Metz, son régiment, le 276e R.I. se replie sur l'Aisne où l'armée française fait retraite.

Le 5 septembre 1914 à Villeroy, près de Meaux, lors des premiers combats de la bataille de la Marne, l'unité du lieutenant Péguy entre en contact de l'ennemi qui avance alors sur Paris. Alors qu'il commande le tir, l'officier est tué d'une balle en plein front. Son corps est inhumé parmi ceux de ses compagnons d'armes dans le cimetière national de Chauconin-Neufmontiers.


Heureux les grands vainqueurs.

Paix aux hommes de guerre.

 

Qu'ils soient ensevelis dans un dernier silence.

Que Dieu mette avec eux la juste balance

Un peu de ce terreau d'ordure et de poussière.

 

Que Dieu mette avec eux dans le juste plateau

Ce qu'ils ont tant aimé, quelques grammes de terre.

Un peu de cette vigne, un peu de ce coteau,

Un peu de ce ravin sauvage et solitaire.

 

Mère voici vos fils qui se sont tant battus.

Vous les voyez couchés parmi les nations.

Que Dieu ménage un peu ces êtres débattus,

Ces coeurs pleins de tristesse et d'hésitations.

 

Et voici le gibier traqué dans les battues,

Les aigles abattus et les lièvres levés.

Que Dieu ménage ces coeurs tant éprouvés

Ces torses déviés, ces nuques rebattues.

 

Que Dieu ménage un peu de ces êtres combattus,

Qu'il rappelle sa grâce et sa miséricorde.

Qu'il considère un peu de ce sac et cette corde

Et ces poignets liés et ces reins courbatus.

 

Mère voici vos fils qui se sont tant battus.

Qu'ils ne soient pas pesés comme Dieu pèse un ange.

Que Dieu mette avec eux un peu de cette fange

Qu'ils étaient en principe et sont redevenus."

Extrait de l'œuvre poétique Eve, publiée dans le Quatorzième cahier de la quinzième série, le 28 décembre 1913.
 
MINDEF/SGA/DMPA et Marc Nadaux

 

Anna Marly

1917-2006

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Anna Marly

 

Née à Saint-Pétersbourg le 30 octobre pendant la Révolution de 1917 au cours de laquelle son père fut fusillé, Anna Bétoulinsky quitte la Russie pour la France au début des années vingt. Réfugiée avec sa mère, sa soeur aînée et leur fidèle nounou dans la communauté russe de Menton, elle vécut des années difficiles dont elle garde néanmoins un souvenir heureux.

A l'âge de treize ans on lui offre une guitare. Ce cadeau dont elle ne se séparera jamais va bouleverser sa vie. "C'est à cette période que j'ai découvert la magie des sons, influencée par Charles Trénet."

En 1934, Anna rejoint Paris et débute une carrière artistique sous le pseudonyme d'Anna Marly, patronyme qu'elle choisit dans l'annuaire. Elle danse tout d'abord dans les Ballets russes de Paris qui l'entraînent en tournée à travers l'Europe, puis ce sont les Ballets Wronska qui l'engagent comme danseuse étoile.

Pour autant, Anna n'en oublie pas la musique. Après un passage au conservatoire de Paris pour travailler sa voix, elle se produit dès 1935, avec sa guitare et un petit répertoire qu'elle s'est créé, au Shéhérazade, le cabaret parisien de la jeunesse dorée, puis au théâtre des Variétés à Bruxelles et au Savoy Club de La Haye. C'est d'ailleurs lors de son séjour en Hollande qu'elle rencontre celui qui deviendra en avril 1939 son mari, le baron van Doorn.

La même année, Anna connaît une grande satisfaction professionnelle en devenant la benjamine de la SACEM (Société des Auteurs Compositeurs et des Éditeurs de Musique).

Le 13 juin 1940, Paris est déclarée ville ouverte. Anna et son mari quittent la capitale et prennent le chemin de l'exode. Après avoir transité par l'Espagne et le Portugal, ils s'installent à Londres en 1941 où Anna s'engage comme volontaire à la cantine des Forces Françaises Libres. Elle chante aussi quelquefois au café. Se séparant bientôt de son mari, elle devient alors projectionniste, puis s'enrôle au théâtre aux Armées et chante au micro de la BBC dans l'émission "Les Français parlent aux Français".

De cette époque datent les chansons les plus célèbres d'Anna Marly, notamment "Le Chant des partisans". Un jour, fin 1942, ayant lu dans les journaux britanniques le récit de la bataille de Smolensk, son âme russe se réveille. Un mot lui revient à l'esprit, ce mot de "partisans". "Bouleversée, je prends ma guitare, je joue une mélodie rythmée, et sortent tout droit de mon coeur ces vers en russe : Nous irons là-bas où le corbeau ne vole pas/Et la bête ne peut se frayer un passage. Aucune force ni personne/Ne nous fera reculer." Appelée initialement "La Marche des partisans", cette chanson sera interprétée en russe par son auteur jusqu'à ce que Joseph Kessel s'exclame en l'entendant pour la première fois "Voilà ce qu'il faut pour la France !" et qu'il en écrive la version française avec son neveu Maurice Druon. Sifflé comme indicatif de l'émission de la BBC "Honneur et Patrie" puis comme signe de reconnaissance dans les maquis, "Le Chant des partisans" (intitulé "Guérilla song" dans sa version anglaise) s'impose rapidement comme l'hymne de la Résistance.

La Complainte du partisan est écrite dans la même période. "En pensant à la France occupée, je me suis mise à jouer une mélopée lancinante, mais sans paroles." C'est Emmanuel d'Astier de la Vigerie, chef du mouvement Libération-Sud, qui signe les paroles de cette chanson reprise plus tard par Joan Baez et Léonard Cohen.

A son retour en France en 1945, Anna Marly connaît la gloire. Toutefois, elle décide de s'installer en Amérique du sud où elle devient l'ambassadrice de la chanson française. C'est au Brésil, en 1947 qu'Anna rencontre son second mari, le russe Yuri Smiernow. Elle continue à beaucoup voyager et sillonne l'Afrique, toujours accompagnée de sa guitare. Aujourd'hui, elle vit aux Etats-Unis où elle se consacre à l'écriture de fables, de poèmes tissés de souvenirs. Comme pour ses mémoires récemment publiées (Anna Marly, Troubadour de la Résistance. Tallandier-Historia), elle souhaite que le présent ouvrage serve de témoignage aux jeunes générations, à tous ceux qui n'ont pas vécu ces moments tourmentés de l'Histoire afin qu'ils portent et transmettent à leur tour le flambeau du souvenir.

Anna Marly, que l'on surnomma le "Troubadour de la Résistance" et dont le Général de Gaulle écrivit qu'"elle fit de son talent une arme pour la France", a composé plus de trois cents chansons (dont "Une chanson à trois temps" pour Edith Piaf). Certaines d'entre elles se sont élevées au rang de patrimoine national. L'enseignement obligatoire dans les années soixante du "Chant des partisans" avec "la Marseillaise" et "Le Chant du départ" n'en est pas la moindre preuve. Ecrites dans le contexte de la guerre, les chansons d'Anna Marly constituent un témoignage vivant de l'Histoire de France et c'est à ce titre qu'elle fut décorée de l'ordre national du Mérite en 1965 et de la Légion d'honneur en 1985.

Elle participa à un hommage à Jean Moulin en 2000, à l'occasion du 60e anniversaire du 18 juin, où elle chanta avec les choeurs de l'armée française le "Chant des partisans".

Anna Marly s'est éteinte le 17 février 2006, en Alaska, à l'âge de 88 ans.

 

Source : AERI (Association pour des Études sur la Résistance Intérieure)