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Un espace muséal au cimetière militaire français de Bitola

Cimetière français de Bitola. ©D.R.
Cimetière français de Bitola. ©D.R.

Après 3 ans de travaux, l’inauguration de l’espace muséal de Bitola est prévue au printemps 2018 par la secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Il entend rendre hommage, à l’occasion du centenaire de la fin de la Grande Guerre, aux soldats macédoniens qui ont pris part au conflit.

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Un lieu de combat et de mémoire partagée

C’est en 1923 que le cimetière de Bitola fut inauguré, au cours d'une cérémonie solennelle en présence du Maréchal Franchet d'Esperey venu remettre la Croix de Guerre 1914-1918 à la ville de Bitola, avec palme : « Vaillante cité qui, après avoir courageusement subi, de décembre 1915 à novembre 1916, les rigueurs de l’occupation ennemie, a été la première ville serbe reconquise par les Armées d’Orient. Se trouvant après sa délivrance et jusqu’à la fin de septembre 1918 à proximité des lignes ennemies, a supporté avec abnégations les multiples et violents bombardements dont elle a été l’objet. Malgré les pertes élevées que ces bombardements lui ont causées, sa population n’a cessé de faire preuve de la plus grande vaillance et d’une foi inébranlable dans la victoire finale. Signé MAGINOT à Paris, le 27 aout 1923 ».

 

Le cimetière français à Bitola. ©Ambassade de France en Macédoine.

 

Le cimetière militaire de Bitola (ex-Monastir) renferme plus de 6 200 tombes de soldats français et regroupe, dans un ossuaire, les restes de plusieurs milliers d’autres « Poilus d’Orient ». Ce cimetière, lieu de combat et de mémoire le plus emblématique du Front d’Orient sur le territoire de l’actuelle Ancienne République Yougoslave de Macédoine (ARYM), a fait l’objet entre 2013 et 2018 d’importants travaux et d’un projet de mémorial soutenus par le ministère des armées (Direction des patrimoines, de la mémoire et des archives-DPMA) et le conseil régional de Normandie.

Les commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale en ARYM seront ainsi l’occasion de rendre un hommage appuyé aux soldats français, d’achever l’inventaire et la mise en valeur des lieux historiques et de mémoire, tels que les tombes isolées ou les lieux de combats, notamment les tranchées, de sensibiliser et d’informer la population macédonienne et les descendants de ces soldats, enfin de promouvoir le tourisme de mémoire.

Enjeu mémoriel de l’espace muséal

La création d’un espace muséal au sein du cimetière de Bitola est symbolique, en ce qu’il permet de rendre hommage aux soldats macédoniens qui ont terriblement souffert dans cette guerre. Destiné aux familles des soldats, aux Macédoniens, notamment les élèves, les étudiants et les historiens, ainsi qu'aux touristes, l’espace muséal sera unique en son genre dans le pays, où cette période de l’histoire du pays est encore méconnue.  Le contenu de l’espace muséal a été présenté une première fois en 2014 à l’occasion d’une grande manifestation culturelle qui a constitué un temps fort des commémorations du Centenaire, avant d’être exposé dans les écoles, universités et musées du pays.

Le musée se présente extérieurement sous la forme d’un bloc rectangulaire en béton brut de décoffrage qui rappelle les casemates . sur sa façade est sobrement annoncé « Mémorial de Bitola ». L’intérieur est composé d’un vestibule allongé et d’une salle principale. La muséographie a été réalisée avec le soutien du Mémorial de Caen dont les responsables et spécialistes sont plusieurs fois venus sur place pour apporter leurs conseils.  Le vestibule présente l’historique du front d’orient en 4 langues (français, macédonien, albanais et anglais) et une série de photos d’époque réalisées pendant la guerre par les frères Manaki très connus dans les Balkans en général et à Bitola en particulier. Sur un des murs est projeté un film documentaire présentant le front d’orient. Des citations des soldats racontant la pénibilité de la vie quotidienne sur le front d’orient sont écrites sur les murs.

On trouve au centre de la pièce centrale, sous un gros projecteur, une carte en relief de la région des combats qui présente l’état du front en 1917. Ce plan en relief a été réalisé avec le soutien de la région de Normandie par un atelier de Caen. Autour de cette carte, le long des murs, un portrait et 13 silhouettes en plexiglass de taille réelle présentent des portraits de militaires qui ont combattu en Macédoine sous le drapeau français. Certains sont identifiés comme le lieutenant Roger Vercel connu pour ses romans inspirés de son expérience du front d’orient (Capitaine Conan et Léna, notamment). D’autres, le plus souvent les soldats venus des colonies, sont anonymes. Ils rappellent que l’on est venu de très loin (Afrique occidentale, Madagascar, Algérie, ..) combattre dans cette région. Aux 13 silhouettes sont associés, dans des vitrines murales, des objets et des effets ayant appartenu aux militaires de l’époque (gourdes, pistolets, etc). En sortant, il est possible de signer le livre d’or du mémorial. 

 

Carte extraite de la brochure « Front d’Orient » pour le Centenaire de la Première Guerre mondiale. © D.R.
(Disponible depuis ce lien : https://mk.ambafrance.org/Brochure-sur-le-Centenaire-de-la)

 

S’appuyant sur des cartes des zones de combat, une brochure en français et en macédonien a retracé les faits les plus marquants du Front d’Orient en ARYM et a dressé l’inventaire des principaux lieux de mémoire. Editée à 10 000 exemplaires, elle sera disponible à l’espace muséal et diffusée dans les écoles, universités, grands hôtels et offices de tourisme du pays.

La pédagogie à l’espace muséal de Bitola

Outre ces projets labellisés, des séminaires sur le Première Guerre mondiale seront organisés avec le soutien du fonds franco-allemand et en partenariat avec l’Association des professeurs d’histoire macédoniens, dans le but de mener une réflexion sur cette période de l’histoire du pays. Par ailleurs, deux stèles seront mises en place grâce à l’aide apportée par l’Union nationale des combattants, l’une à Skopje, où sont tombés près d’un millier de soldats français qui ont participé à la libération de la capitale, l’autre dans un village reculé où se trouvent les tombes isolées de spahis marocains. La région Basse-Normandie développera également ses propres projets en ARYM et apportera son concours à certaines initiatives menées localement.