Charles Péguy

1873 - 1914

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Charles Péguy - Portrait par Pierre Laurens. ©Harlingue-Viollet

 

Heureux ceux qui sont morts pour la terre charnelle,

Mais pourvu que ce soit pour une juste guerre.

Heureux ceux qui sont morts pour quatre coins de terre.

Heureux ceux qui sont morts d'une mort solennelle »

Charles Péguy, Prière pour nous autres charnels.

 

Charles Péguy naît le 7 janvier 1873 à Orléans au sein d'une famille de condition modeste.

Son père, menuisier, décède l'année même de sa naissance et l'enfant est alors élevé par sa mère, rempailleuse de chaises.

Bon élève, Charles Péguy bénéficie d'une bourse d'enseignement qui lui offre la possibilité d'effectuer de brillantes études au delà de l'école communale. Après avoir accompli son service militaire au 131e RI d'Orléans en 1892, il quitte donc le lycée et entre en 1894 à l'École Normale Supérieure où il a pour maître des professeurs prestigieux comme le médiéviste Joseph Bédier, l'écrivain Romain Rolland ou le philosophe Henri Bergson qui aura d'ailleurs une grande influence sur la maturation intellectuelle du jeune homme.

Licencié ès lettres en 1896, Charles Péguy démissionne de l'institution en 1897 après avoir échoué à l'agrégation de philosophie. Il abandonne alors toute pratique religieuse et s'engage avec conviction dans la cause dreyfusiste après avoir fait la connaissance de Bernard Lazare.

En 1897, Péguy collabore à la Revue Blanche et achève en juin sa première oeuvre, Jeanne d'Arc, suivie, l'année suivante, de Marcel, premier dialogue de la cité harmonieuse.

En 1898, Péguy se marie civilement avec Charlotte Baudouin, la soeur de son plus intime ami, récemment décédé. Le couple, qui demeure au 7, rue de l'Estrapade à Paris, aura quatre enfants : Marcel en 1898, Germaine en 1901, Pierre en 1903 et enfin Charles-Pierre en 1915.

Marcel Baudouin l'ayant orienté vers les idées socialistes, Charles Péguy s'engage dans l'action politique aux côtés de Jean Jaurès, Lucien Herr et Charles Andler et collabore activement à la Revue Socialiste. Il investit également dans une librairie, ouverte en compagnie de Georges Bellais, qui devient rapidement un foyer de résistance au socialisme marxiste prônée par Jules Guesde ainsi qu'à l'influence de Jean Jaurès sur la vie de la gauche parlementaire. Mais, l'affaire périclite à la suite de nombreuses difficultés financières, ce qui éloigne de manière définitive Péguy de ses amitiés de gauche.

En 1905, l'incident de Tanger lui révèle la menace allemande et l'ampleur du "mal universel". Péguy s'élève alors contre le pacifisme et l'internationalisme de la gauche. Au mois d'octobre, il publie ainsi Notre Patrie, un écrit polémiste et patriotique. Dans les années qui suivent, l'écrivain dénonce également le scientisme du "parti intellectuel", autrement dit ses anciens professeurs de l'enseignement supérieur. L'année 1908 est marquée par son retour à la foi. Il en fait la confidence à son ami Joseph Lotte. De 1912 à 1914, Charles Péguy effectue ainsi plusieurs pèlerinages à Notre-Dame de Chartres. L'écrivain fustige à présent le socialisme officiel, auquel il reproche sa démagogie et son sectarisme anticlérical, après la séparation de l'Église et de l'État. L'écrivain se fait mystique dans des essais philosophiques comme Clio, Dialogue de l'Histoire et de l'Âme païenne, publié entre 1909 et 1912, ou Victor-Marie, comte Hugo, en 1910. Son style personnel et intemporel trouve à s'exprimer dans de vastes poèmes oratoires aux rythmes lancinants : Le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc, en 1910 . Le Porche du Mystère de la deuxième Vertu, l'année suivante . Le Mystère des Saints Innocents et La Tapisserie de sainte Geneviève et de Jeanne d'Arc, en 1912 . La Tapisserie de Notre-Dame, en 1913. Dans ces dernières oeuvres, Charles Péguy reprend les thèmes de la confrontation entre la mystique et la politique, la vie intérieure des citoyens qui avaient marqué le début de son oeuvre. Enfin, avec Ève en 1913, un vaste poème symphonique de quelque 3 000 quatrains, l'écrivain patriotique célèbre de nouveau les morts "pour la terre charnelle", celle des ancêtres.

 

Au mois de janvier 1900, Charles Péguy fonde les Cahiers de la Quinzaine, une maison d'édition indépendante qui publie chaque mois sa propre revue littéraire. Installée au 8 rue de la Sorbonne, il en assume personnellement la direction. Celle-ci connaîtra 229 livraisons entre le 5 janvier 1900 et le mois de juillet 1914, permettront à Péguy de publier ses oeuvres, ainsi que celles de ses amis tels André Suarès, Anatole France, Georges Sorel ou Julien Benda. Péguy rédige également des textes sur l'actualité, comme la séparation de l'Église et de l'État, la crise de l'enseignement...

 

Le 2 août 1914, la mobilisation générale contraint Péguy à interrompre sa Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne, un plaidoyer pour la défense de Bergson. Le 4 août, il prend le commandement d'une unité de réservistes à Colommiers et gagne la Lorraine. Après une courte campagne devant Metz, son régiment, le 276e R.I. se replie sur l'Aisne où l'armée française fait retraite.

Le 5 septembre 1914 à Villeroy, près de Meaux, lors des premiers combats de la bataille de la Marne, l'unité du lieutenant Péguy entre en contact de l'ennemi qui avance alors sur Paris. Alors qu'il commande le tir, l'officier est tué d'une balle en plein front. Son corps est inhumé parmi ceux de ses compagnons d'armes dans le cimetière national de Chauconin-Neufmontiers.


Heureux les grands vainqueurs.

Paix aux hommes de guerre.

 

Qu'ils soient ensevelis dans un dernier silence.

Que Dieu mette avec eux la juste balance

Un peu de ce terreau d'ordure et de poussière.

 

Que Dieu mette avec eux dans le juste plateau

Ce qu'ils ont tant aimé, quelques grammes de terre.

Un peu de cette vigne, un peu de ce coteau,

Un peu de ce ravin sauvage et solitaire.

 

Mère voici vos fils qui se sont tant battus.

Vous les voyez couchés parmi les nations.

Que Dieu ménage un peu ces êtres débattus,

Ces coeurs pleins de tristesse et d'hésitations.

 

Et voici le gibier traqué dans les battues,

Les aigles abattus et les lièvres levés.

Que Dieu ménage ces coeurs tant éprouvés

Ces torses déviés, ces nuques rebattues.

 

Que Dieu ménage un peu de ces êtres combattus,

Qu'il rappelle sa grâce et sa miséricorde.

Qu'il considère un peu de ce sac et cette corde

Et ces poignets liés et ces reins courbatus.

 

Mère voici vos fils qui se sont tant battus.

Qu'ils ne soient pas pesés comme Dieu pèse un ange.

Que Dieu mette avec eux un peu de cette fange

Qu'ils étaient en principe et sont redevenus."

Extrait de l'œuvre poétique Eve, publiée dans le Quatorzième cahier de la quinzième série, le 28 décembre 1913.
 
MINDEF/SGA/DMPA et Marc Nadaux

 

Ferdinand Foch

1851-1929

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Le maréchal Foch. Source : SHD

 

Foch naît à Tarbes, en 1851, au sein d'une famille bourgeoise et pieuse.

Lycéen travailleur et brillant, il devient bachelier ès lettres puis ès sciences. Envoyé à Metz en 1869 pour y préparer l'Ecole polytechnique, il connaît l'occupation prussienne qui s'abat sur la Lorraine.

Épreuve déterminante ? À Polytechnique, il choisit la carrière des armes. Capitaine à 26 ans, ami de Gustave Doré, il se marie en 1883.

Élève à l'École de Guerre en 1885. il y professe de 1895 à 1901, avant d'en devenir le commandant en 1908. Déjà, deux ouvrages ont regroupé ses conceptions stratégiques. "La réalité du champ de bataille est qu'on n'y étudie pas . on fait simplement ce que l'on peut pour appliquer ce que l'on sait . dès lors, pour y pouvoir un peu, il faut savoir beaucoup et bien" (Foch. in "Principes de guerre").

Août 1914 : la guerre éclate.

Général depuis 1907, Foch commande alors le 20e corps d'armée à Nancy. Le 29 août, il prend la tête des unités qui vont former la 9e armée, se distinguant dans la bataille des marais de Saint-Gond, opération capitale dans la première bataille de la Marne. Il coordonne ensuite le groupe des armées alliées du Nord qui arrêtent les Allemands dans leur "course à la mer", puis dirige les offensives d'Artois en 1915 et celles de la Somme en 1916.

Mais l'impact du résultat de celles-ci, jugé insuffisant, s'ajoutant à des rivalités internes, entraîne une disgrâce provisoire du général. En 1917, la situation militaire des Alliés est inquiétante : échec du général Nivelle sur le Chemin des Dames, mutineries, effondrement de l'empire russe, déroute italienne... Foch est rappelé comme chef d'état-major général de l'Armée.

Désigné comme généralissime des troupes alliées, il bloque l'offensive allemande en avril 1918 et lance la contre-attaque décisive du 18 juillet. Le 11 novembre, il a le sentiment du devoir accompli. Mais il songe aussi aux millions de soldats morts - dont son fils et son gendre - et il sait qu'il faut aussi gagner la paix. "Je ne fais pas la guerre pour la guerre. Si j'obtiens par l'armistice les conditions que nous voulons imposer à l'Allemagne, je suis satisfait. Le but étant atteint, nul n'a le droit de faire répandre une goutte de sang de plus". (Mémoires du maréchal Foch, t. II. p. 285).

Les honneurs l'auréolent : il est maréchal de France, de Grande-Bretagne et de Pologne, académicien, titulaire de 37 décorations françaises et étrangères, Président du Conseil supérieur de la guerre. Conseiller lors de la conférence qui s'ouvre le 18 janvier 1919, il ne réussit pas à imposer sa conception d'une paix exigeant le Rhin comme frontière de l'Allemagne plutôt que fondée sur d'hypothétiques promesses.

Déçu par les clauses du traité, il veut faire entendre sa voix en se présentant aux élections présidentielles de 1920. Son échec lui fait renoncer à la politique. Il voyage, écrit ses mémoires, ne cessant de défendre sa conviction : une nation moralement forte, puissamment armée, est nécessaire pour éviter que ne recommence la guerre. L'isolement de la France, le marasme économique qui se profile, la déliquescence des traités de paix, assombrissent d'autant ses dernières années.

Le 20 mars 1929 s'achève une vie placée sous la devise : "Que soit vaincu celui qui ne veut vaincre". Le nom de Foch est lié à la victoire de 1918, et c'est symboliquement que de très nombreuses municipalités en ont baptisé une rue, une place, un boulevard : le maréchal Foch est incontestablement l'un des personnages historiques les plus évoqués dans les villes de France.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA/SDACE

Charles Mangin

1866 - 1925

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Le général Mangin. Photo SHAT

 

Né à Sarrebourg (Moselle), Charles Mangin (1866-1925), participa, à la tête des tirailleurs sénégalais, à la mission Congo-Nil en 1898-1900 sous les ordres de Marchand. Colonel au Maroc avec Lyautey, il prit Marrakech.

Général, il commande en 1914-15 une brigade d'infanterie puis une division, la 5e D.I. de Rouen, lors de la bataille des frontières, sur la Marne, en Artois. Le 22 mai 1916, il attaque en vain le fort de Douaumont (Meuse) puis, toujours à Verdun, il dirige les offensives de reconquête aux côtés de Nivelle.

En 1917, il est au Chemin des Dames, chef de la 6e armée. L'attaque s'enlisant, il est limogé. Il revient en 1918 commander la 10e armée avec laquelle il effectue la célèbre contre-attaque du 18 juillet à Villers-Cotterêts où il brise l'ennemi. Vainqueur dans l'Aisne à l'automne, il rompt le front allemand, libère Soissons et Laon.

L'armistice annule son offensive prévue en Lorraine. Il entre à Metz le 19 novembre, atteint le Rhin à Mayence le 11 décembre, occupe la Rhénanie.

Convaincu de la valeur des troupes sénégalaises, c'était un partisan ardent d'une armée africaine ("la Force noire") plus nombreuse et plus puissante, au service de la France. Pour l'anecdote, rappelons que de 1906 à 1922, son fidèle ordonnance fut un Bambara de haute stature, Baba Koulibaly, qui veilla jour et nuit sur lui avec dévouement et une ostentation que le général appréciait, étant lui-même volontiers théâtral. Mangin tel qu'il était, adoré ou détesté, a vraiment incarné le type de l'officier colonial, infatigable, tempétueux, dominant les hommes et forçant les événements.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Georges Guynemer

1894 - 1917

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Georges Guynemer devant son Spad. ©SHDAI

 

 

 

 

Georges, Marie Guynemer naît à Paris le 24 novembre 1894.

À la déclaration de guerre, il tente de s'engager dans l'infanterie, puis dans la cavalerie, mais est à chaque fois refusé en raison de sa faible constitution physique. Il parvient à s'engager dans l'aviation et obtient son brevet de pilote en mars 1915. Au sein de l'escadrille des Cigognes, il se révèle rapidement un pilote de chasse d'une audace et d'une habileté extraordinaires. Il est plusieurs fois cité, plusieurs fois décoré.

Devenu un mythe vivant, le capitaine Georges Guynemer disparaît en mission (« en plein ciel de gloire », dira l'ultime citation qui lui a été accordée), au-dessus de Poelkapelle (Belgique), le 11 septembre 1917, aux commandes de son appareil, le Vieux Charles. Ses 53 victoires homologuées font de lui l'un des « As » de l'aviation française de la Première Guerre mondiale.

Sa devise, « Faire face », a été reprise par l'Armée de l'air.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA CEROd - ©SHDAI

 

 

 

 

 

 

John Mc Crae

1872-1918

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John Mc Crae. Photo MINDEF/SGA/DMPA

 

 

Si sur les tombes britanniques fleurissent de discrets coquelicots de papier, tressés parfois en couronne, que l'on peut trouver sur toutes les stèles et cénotaphes, comme au coeur de la cathédrale d'Ypres, c'est à John Mc Crae que l'on doit cette image. La France a choisi le bleuet, les britanniques la fragile fleur des champs, le « poppy », dès 1921. Pourtant la « fleur du souvenir », que l'on arbore au « Poppy day », ne rappelle pas la couleur des uniformes de parade mais la vision du champ de bataille de l'Essex Farm à Boezinge, près d'Ypres. Le poème "In Flanders Field" renvoie à tous les témoignages d'auteurs connus comme d'anonymes et est devenu bien vite le symbole de toute une génération fauchée dans la fleur de l'âge, à l'instar de Dorgelès ou de Genevoix.

Né au Canada en 1872, ce médecin et biologiste s'enrôle volontairement pour la guerre des Boers en Afrique du Sud puis fait de même pour intégrer le Corps Expéditionnaire canadien dès le début de la Grande guerre. Promu au grade de Lieutenant-Colonel du Corps médical canadien, il aurait écrit en mai 1915 ce poème au coeur de la mêlée des Flandres, à Boezinge.

Muté à Boulogne, il décède à la fin de janvier 1918 à l'Hôpital militaire britannique de Wimereux.

 

 

 

Terriblement évocateur, ce poème évoque en toute simplicité les champs de bataille de Flandre :

In Flanders Fields the poppies blow

Between the crosses, row on row,

That mark our place. and in the sky

The larks, still bravely singing, fly

Scarce heard amid the guns below.

 

We are the Dead. Short days ago

We lived, felt dawn, saw sunset glow,

Loved, and were loved, and now we lie

In Flanders fields.

 

Take up our quarrel with the foe:

To you from failing hands we throw

The torch, be yours to hold it high.

If ye break faith with us who die

We shall not sleep, though poppies grow

In Flanders fields

 

Les campagnes de Flandre, belge et Française, sont parsemées de ces champs de bataille, de vestiges et de lieux de souvenir. Aujourd'hui il est possible de visiter la position où Mc Crae rédigea ce poème à Boezinge, où les bunkers côtoyant l'Essex Farm se dressent encore, veillant toujours sur le canal le long du Diksmuideweg (le chemin de Dixmude)

 

Source : François Hanscotte

Jean-Baptiste Estienne

1860-1936

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Le général Estienne. Photo SHAT

 

Jean-Baptiste Estienne (1860-1936), natif de Condé-en-Barrois est le « père des Chars ». Reçu premier au concours général de mathématiques des lycées de France en 1880 et reçu la même année à Polytechnique, il embrasse la carrière des armes dans l'artillerie. Curieux, il s'intéresse à l'aéronautique en plein essor puisqu'il préconise l'usage des ballons captifs puis des avions pour effectuer des réglages de tir précis. On lui confie rapidement un service aéronautique où il a notamment le capitaine Ferber sous ses ordres, qui y est affecté comme instructeur. Les pilotes qui sortent brevetés de son service participent officiellement aux manoeuvres de 1910, conférant à l'aviation une existence réelle au sein de l'armée. Mais c'est surtout en sa qualité d'officier d'artillerie que l'on retient son action. En effet, il préconise dès août 1914 la création d'une « artillerie d'assaut » par la création d'engins motorisés pourvus d'une cuirasse puis de chenilles en raison de leur plus grande solidité et leur aptitude à se mouvoir sur des terrains très variés. Si les Britanniques le devancèrent dans la réalisation du projet en construisant les tanks, il finit par convaincre l'Etat-Major, d'utiliser cette artillerie mobile pour rompre le front.

Nommé inspecteur général de l'artillerie d'assaut, il fut aussi à l'origine de la diversification des régiments blindés, selon les modes d'utilisation possibles : chars légers, chars lourds et blindés de liaison. Ses idées sur le char d'assaut, et de son utilisation, ont fortement inspiré les Allemands, et au premier titre Heinz Guderian, au sujet de la stratégie générale de la guerre de mouvement, l'arme blindée devenant une arme autonome et non plus le seul support de l'infanterie.

 

Source : François Hanscotte

Charles Delestraint

1879-1945

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Charles Delestraint. Source : Collection DMPA

Historique

Charles Delestraint est né le 12 mars 1879, à Biache-Saint-Vaast. Bachelier en 1896, il est reçu à Saint-Cyr en 1897. À sa sortie, il choisit les chasseurs à pieds et rejoint le 16e bataillon à Lille. Promu lieutenant en 1902, il est détaché à l'état-major du 1er corps d'armée de Lille de novembre 1906 à octobre 1907. Promu capitaine en 1913, il est reçu à l'École supérieure de guerre en mars 1914. Rappelé en juillet, il prend le commandement de la 9e compagnie du 58e bataillon de chasseurs à pied, unité de réserve.

 

Charles Delestraint saint-cyrien, 1897. Source : Collection particulière

 

Le 3 août 1914, l'Allemagne déclare la guerre à la France. Le 58e bataillon est envoyé dans les Ardennes où il prend part aux premiers combats de l’armée française. À Haybes, notamment, la 9e compagnie repousse au cours d'une mission de reconnaissance un détachement allemand qui franchissait la Meuse, l'empêchant de s'infiltrer dans les lignes françaises. Le 30 août 1914, le capitaine Delestraint est fait prisonnier avec ses hommes lors de l’attaque du Chesnoy-Auboncourt. Il est interné durant quatre ans au camp de Plessemburg.

Libéré en décembre 1918, il est détaché en avril 1919 au grand quartier général de l'Est à Chantilly et promu chef de bataillon le 25 juin. Il suit les cours de l'École de guerre puis, breveté d'état-major, il est affecté au 2e bureau de l'état-major de l'armée, section des armées étrangères, jusqu'en 1923. Il effectue ensuite deux ans dans l'armée d'occupation en Allemagne, au sein du 517e régiment de chars de combat à Duren, avant de rejoindre la section technique des chars de combat de Versailles. Acquis aux théories du général Estienne, le créateur des chars d'assaut français, convaincu de l'importance des chars dans un éventuel nouveau conflit, il se consacre dès lors au développement de l'arme blindée. En 1927, il devient commandant en second de l’École des chars de combats de Versailles.

 

Le lieutenant-colonel Delestraint à l'École d'application des chars de combat de Versailles, 1928. Source : Collection particulière

 

Le colonel Delestraint et le 505e régiment de chars de combat, Vannes, 1934. Source : Archives départementales du Morbihan

 

Promu colonel en 1932, il commande le 505e régiment de chars de Vannes. Général de brigade en 1936, il prend la tête de la 3e brigade de chars de combat à Metz. Il y fait la connaissance l'année suivante du colonel Charles de Gaulle, venu prendre le commandement du 507e régiment de chars de combat, dont il partage les idées en matière de doctrine d'emploi des chars.

 

Le général Delestraint, 1938. Source : Collection particulière

 

Versé au cadre de réserve en mars 1939, il est rappelé à l’activité quelques mois plus tard, devant l’imminence de la guerre. En septembre, le général Delestraint reçoit le commandement des réserves de chars. Il s'emploie à activer la fabrication de nouveaux engins et la création de nouvelles divisions cuirassées. Le 10 mai 1940, l'Allemagne lance son offensive à l'Ouest. À la tête du groupement cuirassé des 2e et 4e divisions, il dirige l'attaque sur Abbeville des 3 et 4 juin, pour laquelle il est cité à l'ordre de l'armée. Face à l'avancée allemande, ses troupes sont contraintes de se replier, livrant des combats retardateurs. Le 22 juin, un armistice est signé avec l'Allemagne. En juillet, le général de division Delestraint est démobilisé et se retire à Bourg-en-Bresse.

 

Refusant l’armistice et l'asservissement de la France, résolument opposé au nazisme dont il condamne la doctrine, il ne peut accepter la politique de collaboration du maréchal Pétain et du gouvernement de Vichy. Sa décision est vite prise . il faut poursuivre la lutte. Rejoignant dans l'esprit le général de Gaulle, dont il a entendu l'appel à la radio de Londres le 18 juin, il choisit de rester en France où la résistance doit s'organiser. Il s'efforce alors de retrouver et de regrouper les anciens des chars, les exhortant à passer à l'action. Menant une intensive campagne de propagande, il multiplie les rencontres en zone non-occupée, participe à la rédaction du Bulletin de liaison entre ceux des chars de combat, dont le premier numéro paraît dès décembre 1940. Le message est clair : se tenir prêt à reprendre les armes. Partout, des associations se créent, foyers potentiels d'actions futures. Il consacre son temps à entretenir inlassablement la flamme. L'occasion de passer aux actes se présente enfin au général Delestraint à l'été 1942.

 

Le général Delestraint en 1942. À cette époque, il devient chef de l'Armée secrète. Source : Collection particulière

 

Revenu de Londres au début de l'année, Jean Moulin est chargé par le général de Gaulle d'organiser et de coordonner les actions des mouvements de résistance. Il est à la recherche d'un chef militaire susceptible de prendre la tête de l'organisation militaire constituée à partir de leurs groupes armés. L'objectif est de mettre sur pied une organisation capable d'intervenir efficacement en cas de débarquement allié. Contacté, le général Delestraint accepte le poste et rencontre Jean Moulin, à Lyon, le 28 août 1942. Il devient, sous le pseudonyme de Vidal, le chef de l’Armée secrète qui regroupe les éléments combattants des trois mouvements de la zone sud : Combat, Libération et Franc-Tireur. Entré dans la clandestinité, il s’installe à Lyon où il constitue son état-major. En fin d'année, les effectifs de l'Armée secrète sont estimés à quelque 30 000 hommes.

 

    

Lettre du général de Gaulle au général Delestraint lui confiant le commandement de l'Armée secrète. Source : Collection particulière

 

En février 1943, il se rend à Londres avec Jean Moulin afin de coordonner l’action de l’Armée secrète avec celle du commandement des Alliés. Le général Vidal voit ses attributions s'étendre désormais à l'ensemble du territoire mais apprend également que le débarquement ne s'effectuera pas avant le printemps 1944. Quoi qu'il en soit, il convient de mettre à profit ces mois d'attente pour organiser, équiper et former ses hommes en vue de ce jour. De retour en France, il développe les maquis, en particulier celui du Vercors, veille à leur approvisionnement en vivres, en armes et en matériel. Il travaille sans relâche à l'unification et à la cohésion opérationnelle de ses troupes. Privilégiant les actions mûrement préparées présentant une réelle utilité, il veut éviter tout geste prématuré qui compromettrait le dessein final. En quelques mois, les effectifs passent de quelque 100 000 hommes à plus de 200 000. Si la tâche accomplie est importante, la situation devient de plus en plus préoccupante. Le chef de l'Armée secrète n'est pas sans savoir que le temps lui est peut-être compté.

Le 15 mars 1943, en effet, durant son séjour à Londres, plusieurs membres de son état-major ont été arrêtés. Des documents importants ont été saisis à cette occasion. La surveillance allemande s'intensifie et les arrestations se multiplient. Delestraint-Vidal est appréhendé le 9 juin 1943, à Paris, où il devait rencontrer les chefs militaires des mouvements de la zone nord, ainsi que le commandant Gastaldo, son chef d'état-major et chef du 2e bureau, et le lieutenant Jean-Louis Théobald, collaborateur de Jean Moulin. Interrogé par la Gestapo, il ne donne aucune information puis, transféré à Fresnes, il s'efforce de dégager la responsabilité des autres inculpés et d'obtenir leur relaxe en prenant tout à sa charge.

 

Photos anthropométriques du général Delestraint prises quatre mois après son arrestation. Source : Collection particulière

 

Après neuf mois d’instruction, l'affaire est renvoyée devant le tribunal de Breslau. En attendant sa comparution, le général Delestraint est interné, le 10 mars 1944, au camp de concentration de Natzwiller-Struthof sous le statut de Nacht und Nebel. Devant l'avance des Alliés, le camp est évacué et les prisonniers emmenés à Dachau en septembre . le général y est exécuté le 19 avril 1945, quelques jours avant la libération du camp par les Américains.

Charles Delestraint était Officier de la Légion d'honneur et titulaire de la Croix de guerre 1914-1918. Il est fait Compagnon de la Libération à titre posthume le 17 novembre 1945.

 

Source MINDEF/SGA/DMPA

Entrée du nom du général Delestraint au Panthéon, cérémonie du 10 novembre 1989. Source : Collection particulière

 

Plaque commémorative apposée Chaussée de La Muette, à Paris, lieu de l'arrestation du général Delestraint. Source : Collection particulière

 

Pour en savoir plus :
Guillin François-Yves, Le général Delestraint - Premier chef de l'Armée secrète, 1995.
Perrette Jean-François, Le général Delestraint, 1972.

Charles de Gaulle

1890-1970

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Portrait de Charles de Gaulle. Source : Photo SHD

Général et homme politique français (1890-1970), Charles de Gaulle est le premier à avoir prôné la nécessité pour la France de disposer d'un corps de bataille de blindés.

Animateur de la Résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale, il est le père fondateur de la Vème république, celle-ci se caractérisant notamment par l'élection du président au suffrage universel direct (1962).

Charles de Gaulle est né à Lille le 22 novembre 1890 dans une famille catholique et patriote. Il passe son enfance à Paris, fait ses études chez les Jésuites et opte très tôt pour la carrière des armes. Il est reçu en 1908 à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr. Après quatre années d'études il est nommé à Arras en 1912 comme sous-lieutenant.

Durant la Première Guerre mondiale, il est blessé trois fois au combat et est laissé pour mort lors de la bataille de Douaumont (1916). Fait prisonnier par les Allemands il tente à cinq reprises de s'évader, mais il est chaque fois repris. Il ne sera libéré qu'à l'Armistice, le 11 novembre 1918.

Poursuivant sa carrière militaire, le capitaine de Gaulle est envoyé en mission dans plusieurs pays (Pologne, Liban).

Durant l'entre-deux-guerres, il publie plusieurs ouvrages dans lesquels il critique la politique française de Défense : il soutient en particulier que l'armée doit être soumise aux décisions des hommes politiques et qu'il est nécessaire, pour la défense de la France, de constituer un corps de blindés susceptibles de faire face à la puissance mécanisée allemande (Le fil de l'Epée publié en 1932 et Vers l'armée de métier publié en 1934).

Parallèlement il commence à s'initier aux affaires de l'Etat : en 1931 il est en effet affecté au secrétariat général de la Défense nationale à Paris. Colonel en 1937, de Gaulle se voit confier le commandement du 507e régiment de chars à Metz.

Lors de la déclaration de guerre de la France et de l'Angleterre à l'Allemagne le 3 septembre 1939, il est nommé commandant par intérim des chars de la 5e Armée. Au moment de l'invasion allemande de Gaulle s'illustre à plusieurs reprises à la tête de son unité, arrêtant notamment les Allemands à Abbeville (27-30 mai 1940). Nommé général le 1er juin 1940, de Gaulle devient quelques jours plus tard sous-secrétaire d'État à la Défense nationale et à la Guerre, dans le gouvernement de Paul Reynaud.

Le 17 juin de Gaulle part pour Londres afin de poursuivre la guerre ; il lance un appel à la résistance sur les ondes de la BBC, le 18 juin. Général rebelle, il est condamné à mort par contumace en août. Reconnu par Churchill " chef des Français libres ", de Gaulle organise des forces armées qui deviendront les Forces françaises libres (FFL). Par ailleurs, il dote la France libre d'un gouvernement, le Comité national français, qui deviendra le Comité français de la Libération nationale (CFLN) le 3 juin 1943, après son arrivée à Alger.

À partir de 1942, de Gaulle charge Jean Moulin d'organiser en France le Comité national de la Résistance (CNR) dans lequel toutes les tendances des partis politiques, des syndicats et des mouvements de résistance doivent être représentées, afin de coordonner la lutte. Après le débarquement en Normandie, le 6 juin 1944, de Gaulle insiste auprès du général Eisenhower, commandant en chef des armées alliées, pour que Paris soit libéré rapidement, alors que la stratégie prévoyait d'aller directement vers l'est sans passer par la capitale. Finalement la 2e DB du général Leclerc libère Paris le 25 août.

 

Une fois les combats terminés, de Gaulle entreprend, à la tête du gouvernement provisoire (GPRF), de reconstruire le pays. Il prend plusieurs mesures importantes (nationalisations des secteurs clés de l'économie, création de la Sécurité sociale). Mais, le 20 janvier 1946, il quitte le pouvoir, car il est en désaccord avec les orientations constitutionnels prises par la IVe République naissante. De fait, la Constitution adoptée en octobre 1946 le mécontente profondément. Il la critique à plusieurs reprises (discours de Bayeux, juin 1946), lui reprochant la faiblesse du pouvoir exécutif. Dès lors, de Gaulle entre dans l'opposition. En 1947, il lance un mouvement, le Rassemblement du peuple français (RPF), qui malgré de nombreuses adhésions et des succès nombreux lors des élections municipales  de 1947 décline dès les législatives de 1951. Commence alors, pour plusieurs années, « la traversée du désert » : de Gaulle se retire à Colombey-les-Deux-Églises, rédige ses mémoires et voyage.

La France est confrontée depuis 1954 à une guerre de décolonisation en Algérie. Le 13 mai 1958, les Français d'Algérie lancent une insurrection à Alger pour affirmer leurs positions. Ils appellent de Gaulle au pouvoir.

Le président de la République française, René Coty, craint que cette crise dégénère en guerre civile. Sous la pression des événements, il propose à de Gaulle de devenir président du Conseil. De Gaulle accepte de revenir au pouvoir d'avoir les mains libres pour modifier les institutions. Pendant l'été 1958, il inspire la rédaction d'une nouvelle Constitution : celle-ci est approuvée lors d'un référendum le 28 septembre 1958, par près de 80 % des suffrages. La Ve République est née. Le 21 décembre 1958, Charles de Gaulle est élu président de la République française au suffrage universel indirect.

La tâche la plus urgente concerne l'Algérie. De Gaulle propose en 1959 l'autodétermination aux Algériens et organise en 1961 un référendum sur ce thème : 75% des Français disent " oui " à l'autodétermination de l'Algérie. Les partisans de l'Algérie française, mécontents, tentent en avril 1961 à Alger un putsch qui échoue. Les négociations entre Français et Algériens finissent par aboutir aux accords d'Evian, signés le 22 mars 1962, acceptés par référendum en France et en Algérie.

L'année 1962 marque un véritable tournant, tout d'abord sur le plan institutionnel : le Général propose l'élection du chef de l'État au suffrage universel. Cette réforme suscite une vive opposition, mais le référendum sur la révision constitutionnelle, avec 62,2 % de « oui », est un succès. En 1965, l'élection présidentielle au suffrage universel direct est mise en pratique pour la première fois.

Mis en ballottage au premier tour (avec 43,7% des voix), de Gaulle est finalement élu au second tour face à Mitterrand, avec 54,8% des voix.

Vis-à-vis de l'extérieur, de Gaulle mène une politique d'indépendance nationale, en dotant la France de ses propres moyens de défense : la première bombe atomique française éclate à Reggane, au Sahara, en février 1960. De Gaulle refuse la tutelle des Etats-Unis et retire en 1966 la France du commandement intégré de l'OTAN - mais la France reste membre de l'Alliance atlantique.

Dans le même temps, la France entre dans la Communauté économique européenne (CEE) le 1er janvier 1959.

Le pays est confronté à une crise très importante en mai 1968. Les étudiants organisent de vastes manifestations, rejoints par les ouvriers qui déclenchent une grève générale. De Gaulle réussit à apaiser la situation en accordant certains avantages aux ouvriers. Le 27 avril 1969, il soumet aux Français un projet sur la régionalisation et la réforme du sénat. Sa proposition est rejetée par référendum par 52,4% des voix. Désapprouvé par les Français, il estime n'avoir plus leur confiance et préfère démissionner.

Charles de Gaulle se retire à Colombey-les-Deux-Églises et poursuit l'écriture de ses Mémoires ; il meurt le 9 novembre 1970.

Conformément à son testament, de Gaulle ne reçoit pas de funérailles nationales. Il est enterré auprès de sa fille Anne, avec une simple inscription sur sa tombe : Charles de Gaulle 1890-1970.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA Photos Service historique de l'armée de terre

 

Joseph Joffre

1852-1931

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Le Maréchal Joffre Photo SHAT

 

Né à Rivesaltes, le 12 janvier 1852, Joseph Joffre s'avéra un élève brillant qui entra à l'École Polytechnique à 17 ans.

Embrassant la carrière militaire, il choisit l'arme du génie correspondant le mieux à ses capacités d'ingénieur. Après la guerre de 1870-71, il servit aux fortifications de Paris agrandies par le général Séré de Rivières d'où, en 1874, il partit " aux colonies ".

En 1885, il était capitaine en Indochine où il participa à la campagne du Tonkin, décoré de la Légion d'Honneur en septembre 85. Sapeur, il fortifia l'île de Formose, alors base de la flotte de l'amiral Courbet.

En 1892, il créait au Soudan français des voies ferrées puis, dans le cadre des opérations contre le sultan Samory, il conquit Tombouctou. Plus tard, colonel, sous le général Gallieni, il fortifia le port de Diego-Suarez, à Madagascar.

Devenu général de division, en 1905, il accéda au poste de directeur du génie au ministère de la Guerre . après d'autres importantes affectations telles que chef du 2e corps d'armée, il devenait membre du Conseil supérieur de la Guerre puis nommé en 1911 chef d'état-major de l'armée, futur générallissime en cas de conflit. Depuis ce poste suprême, il remania l'armée, réforma la doctrine, les règlements, le matériel, les effectifs, la mobilisation, etc, aucun aspect ne lui échappant.

Il renforçait la défense du pays, conscient d'une menace allemande de plus en plus pesante. Dans ce but, il fut un vif acteur de l'alliance militaire avec la Russie impériale qu'il raffermit en 1913. Les hostilités avec le II e Reich éclatèrent le 3 août 1914 lorsque l'Allemagne déclara la guerre à la France. Les opérations se déclenchèrent à l'Est comme à l'Ouest en un conflit généralisé rapidement mondial. Joffre lança son plan XVII de l'Alsace à la Belgique. Il essuya de durs revers lors des batailles dites "des Frontières ", ne reprit le dessus des opérations d'une manière offensive que lorsque les armées ennemies avaient atteint la grande banlieue parisienne, la Marne et au-delà, stoppées sur l'Ourcq, à Verdun et sur la ligne de front en avant de Nancy, Epinal, Belfort. Ses armées et ses généraux gagnèrent la bataille de la Marne du 5 au 12 septembre 14, avec l'appui de l'armée anglaise . bataille qu'il a conduite avec son grand-état-major, à l'initiative du général Gallieni, gouverneur de Paris.

Il dressa ensuite une barrière de troupes, après la " Course à la mer ", grâce au général Foch, qui aboutit à fermer la route de Calais, à Dixmude et sur l'Yser, aux côtés des Belges et des Britanniques. Le 26 novembre 14, Joffre était décorée de la Médaille Militaire. Stabilisée, la lutte s'enlisa sur 770 km de front, devint une guerre de siège qu'il dirigea depuis son G.Q.G. de Chantilly, affrontant aussi la crise des munitions, la crise du matériel, réussissant à doter ses troupes de meilleurs armes, uniformes, notamment du casque Adrian, du mortier de 58 mm de tranchée, de grenades à main, du masque à gaz, du fusil-mitrailleur Chauchat, du fusil Berthier, des chars lourds Schneider, Saint-Chamond, etc.

En 1916, il commandait l'ensemble des armées françaises et non plus le seul front du nord-est mais il coordonnait depuis des mois ses opérations offensives avec celles des alliés anglais, italiens, russes, persuadé de l'avantage d'imposer aux Centraux des actions décidées en commun. Il mena en 1916 une défense imperturbable à Verdun grâce aux généraux de Castelnau et Pétain, puis il passa à l'offensive sur la Somme avec Haig, Foch et Fayolle. Lançant à Verdun les offensives Nivelle-Mangin, il reprenait Fleury, Douaumont, Vaux, à l'automne.

Malgré tout, en décembre 16, le président du Conseil, Aristide Briand, le remplaça par le général Nivelle. Joffre était élevé à la dignité de maréchal de France.

 

Gardant sa renommée incontestée auprès des Alliés, Joffre fut utilisé en 1917 par le gouvernement français comme conseiller militaire auprès de la mission Viviani chargée d'intégrer les Américains activement dans le conflit, puis il fut nommé inspecteur général des troupes U.S. en France où il jugea de leurs progrès dans l'apprentissage du combat de tranchées, dans l'utilisation d'armes nouvelles.

Le 13 novembre 18, les États-Unis le décoraient de la Distinguished Service Medal.

La guerre gagnée, la paix signée, Joffre chevaucha en tête du défilé de la Victoire du 14 juillet 1919 à Paris.

Se consacrant ensuite à ses mémoires, à des voyages, élu à l'Académie française, il travailla jusqu'à s'éteindre en 1931, âgé de 79 ans.

Honoré d'obsèques nationaux, il fut inhumé dans sa propriété de Louveciennes ( Yvelines ) où il repose toujours actuellement.

 

Source MINDEF/SGA/DMPA Pierre Hervet

Adolphe Guillaumat

1863-1940

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Le général Guillaumat Photo SHAT

Guillaumat, Adolphe Marie Louis (Bourgneuf, Charente-Maritime : 4 janvier 1863 - Nantes, Loire-Atlantique : 18 mai 1940)

Fils de Louis Guillaumat, officier, et de Marie Noémie Fleury, il entre à Saint-Cyr en 1882, dont il sort major le 1er octobre 1884 choisissant de servir au 65e régiment d'infanterie (R.I.) à Nantes. Capitaine en 1893, il passe en avril 1895 au 2e régiment d'infanterie étranger et s'embarque pour le Tonkin en septembre 1897.

Guillaumat s'y fait remarquer par l'occupation de Kouang-Tchéou-Wan (Guangzhouwan), cédé à bail par le Chine à la France. À l'occasion d'une de ses missions dans l'Empire du milieu, lors de la guerre des Boxers, il prend part, sous les ordres du Général Voyron, à la marche sur Tien-Tsin (Tianjin) et au combat du 23 juin 1900 mené par la colonne internationale devant l'arsenal de la ville, ouvrant la route de Pékin qu'ils atteignent le 14 août. Commandant de la garnison française, il est blessé en défendant la place, héroïsme qui lui vaudra d'être promu Chef de bataillon en décembre 1900.

De retour en métropole, il enseigne en 1903 l'histoire militaire à Saint-Cyr et décroche en 1905 le brevet direct d'état-major avec la mention très bien avant d'intégrer l'École supérieure de guerre en 1906. Il épouse le 17 juillet de cette même année Louise Bibent.

Lieutenant-colonel en 1907, professeur de tactique d'infanterie, Guillaumat est nommé en septembre 1908 commandant du Prytanée militaire. Colonel le 28 septembre 1910, chef de corps du 5e R.I., il rejoint, en janvier 1913, la direction de l'infanterie au ministère de la Guerre. Général de brigade le 8 octobre 1913, il continue sa carrière au ministère de la guerre avant d'être nommé, le 14 juin 1914, chef du cabinet militaire du ministre de la Guerre Messimy.

La guerre déclarée, le Général rejoint la IVe armée en septembre, prenant le commandement de la 33e division d'infanterie (D.I.) avec laquelle il participe à la première bataille de la Marne (6 au 11 septembre 1914) et aux combats sanglants de Vitry-le-François avant de tenir un secteur en Champagne. Affecté à la 4e D.I., devenu général de division à titre temporaire en décembre 1914, il prend, le 25 février 1915, le commandement du Ier corps d'armée (C.A.) aussi appelé le "Groupement Guillaumat", qu'il mènera à la première bataille de Champagne, à celle de la Woëvre (en avril), et avec lequel il tiendra le secteur de Champagne. Son unité participe à la bataille de Verdun en février 1916, avant d'être envoyée en août 1916 renforcer la VIe armée française qui, au nord de la Somme, doit soutenir l'aile droite des armées anglaises. Le 15 décembre 1916, Guillaumat reçoit le commandement de la IIe armée et, à la tête de 650 000 hommes, retourne sur le front de Verdun, arrêtant les attaques allemandes au printemps de 1917. Il part, le 20 avril, à l'assaut des positions ennemies, portant les lignes françaises au nord de la Côte 304 et du Mort-Homme.

Guillaumat succède au Général Sarrail, le 14 décembre 1917, dans les Balkans et prend ainsi le commandement en chef des armées alliées d'Orient. Devant faire face à une situation militaire difficile, il réorganise les forces alliées, rétablissant la confiance et la discipline dans ses rangs. Mettant à profit le transfert de troupes ennemies sur le front de l'Ouest suite à la paix de Brest-Litovsk (3 mars 1918) et de Bucarest (5 mars 1918), Guillaumat lance les troupes françaises et helléniques, rompant ainsi avec la politique défensive du Conseil supérieur de la guerre aligné sur la stratégie anglo-américaine de maintient d'une ligne de front Stavros-Monastir. Il met en place un plan d'offensive générale devant servir de base aux opérations de Franchet d'Esperey, son successeur, et contraindre les armées bulgares à demander un armistice. Mais son principal mérite sur le front d'Orient est d'avoir fait du commandement des armées alliées, qui s'apparentait jusqu'à son arrivée à un état-major supérieur des forces françaises, un outil adapté au commandement d'une force multinationale, outil qui se révélera déterminant lors de l'ambitieuse offensive de septembre 1918.

La deuxième défaite du Chemin des Dames fin, mai 1918, porte les Allemands à 75 km de Paris et motive le retour de Guillaumat en France. Nommé gouverneur et commandant du camp retranché de Paris le 15 juin 1918, il fait accepter le plan d'offensive sur le front d'Orient. La capitale hors d'atteinte, Guillaumat est placé à la tête de la Ve armée, qu'il engage en octobre-novembre 1918 dans la seconde bataille de la Marne puis en Champagne, jusqu'à la Meuse.

Guillaumat est élevé la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur le 10 juillet 1918 et reçoit la médaille militaire le 3 octobre 1918.

Inspecteur général en juin 1919, membre du Conseil supérieur de la Guerre en 1920, il commande l'armée d'occupation du Rhin à partir du 11 octobre 1924 et exerce le commandement supérieur des forces alliées des territoires rhénans. Parallèlement, il préside les commissions de défense du territoire de 1922 à 1931 - la première, créée en 1922 par le ministre de la Guerre, André Maginot, dans le but d'élaborer une organisation défensive du territoire, est remplacée par une commission de défense des frontières, préfigurant la C.O.R.F. ( commission d'organisation des régions fortifiées ) et la "Ligne Maginot".

Ministre de la Guerre dans le cabinet Briand-Caillaux du 23 juin au 20 juillet 1926, il reprend son commandement jusqu'à l'évacuation de la Rhénanie le 30 juin 1930. Continuant à participer aux travaux du Conseil supérieur de la Guerre, il est mis hors-cadre sans emploi le 4 juin 1933. Partisan d'une politique de rigueur, Guillaumat ne cessera d'attirer l'attention de la classe politique sur les dangers d'un réarmement allemand et sur la nécessité pour la France de conduire une politique militaire : allongement du service national, construction d'ouvrages défensifs aux frontières, modernisation des armées.

Retiré à Nantes, où il décède en 1940, ses cendres rejoignent le caveau des gouverneurs (Hôtel national des Invalides) en novembre 1947.

 
Sources : R. d'Amat et R. Limouzin-Lamothe, Dictionnaire de biographie française, Paris, Letouzey, 1965, tome 16, col. 138-139
J.-P. Gomane, "L'expédition internationale contre les Boxers et le siège des légations (juin-août 1900)", Revue historique des armées, 230, 2003 (n°1), pp. 11-18. B. Hamard

Biographies associées :
- Noel Léon Un Chef, Le Général Guillaumat, éditions Alsatia, 1949
- Paul Guillaumat, Correspondance de guerre du Général Guillaumat, éditions L'harmattan, 2006
- "Les commandements français des Armées alliées d'Orient et la défense de la crédibilité du front balkanique (1917-1918), Revue historique des armées, 201, 1995 (n°4), pp. 108-117