Les blessés militaires français aux Invictus Games

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Capitaine Fabrice MARTIN, commandant le département Blessés militaires et sport à l’École interarmées des sports du Centre national des sports de la Défense.

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Invictus Games 2023. C’est historique, la France remporte une médaille d’argent en sport collectif. © SCH Hamilcaro / ministère des Armées.

Londres, 2014. Pour la première fois ont lieu les Invictus Games, un événement multisports qui réunit des militaires et anciens combattants blessés ou en situation de handicap. L’objectif n’est ici pas la performance, mais le dépassement de soi et la reconstruction par le sport. Témoignage du capitaine Fabrice Martin, du Centre national des sports de la Défense.

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Les Invictus Games sont une rencontre sportive internationale, mise en œuvre pour la première fois il y a tout juste dix ans. Depuis, les grands principes restent identiques mais le format évolue sensiblement pour se focaliser sur l’objectif premier : offrir aux blessés, militaires et vétérans, une opportunité de se reconstruire et de se relever de leurs blessures, qu’elles soient physiques ou psychiques.

Lorsque le Prince Harry, alors pilote d’hélicoptère au sein de l’Army Air Corps et de retour de son second engage- ment, assiste aux Warrior Games, une rencontre sportive de vétérans blessés de l’armée américaine, mise en place aux États-Unis en 2010, il décide de reproduire le concept à l’échelle internationale, convaincu que le sport peut avoir un impact décisif dans le retour à une vie « normale ». Il souhaite ainsi mettre en avant le patriotisme des militaires blessés au combat et témoigner du soutien de la nation à leur égard.

Le nom de l’événement, Invictus, fait référence au célèbre poème écrit par l’Anglais William Ernest Henley sur son lit d’hôpital, à la suite d’une amputation du pied en 1875.

Ce poème, illustration du stoïcisme face à la douleur, a été très popularisé dans la culture anglophone, notamment grâce à Nelson Mandela, que la puissance de ses mots a profondément touché, lui apportant le soutien nécessaire durant son incarcération à Robben Island.

Cette compétition sportive internationale et multidisciplinaire connaît un succès retentissant lors de sa première édition au Royaume Uni, en 2014, au sein du Queen Elizabeth Oympic Park. Elle regroupe alors près de 300 participants représentant 13 nations. Sa reconnaissance sur la scène internationale s’est confirmée en 2016 lors de l’édition d’Orlando, en Floride, grâce au soutien de Michelle Obama, qui a obtenu la participation, pour la cérémonie d’ouverture, de l’acteur Morgan Freeman et de l’ancien Président Georges W. Bush. 500 participants, représentant 13 nations, participaient cette fois-ci.

Les éditions se succèdent et le nombre d’athlètes se stabilise aujourd’hui à hauteur de 500, accompagnés d’une équipe d’entraîneurs et d’aidants, et surtout de la présence de deux proches de leur choix, leurs « Friends & Family ». Progressivement, le nombre de nations engagées a augmenté, entraînant mécaniquement la réduction du volume des délégations. Après Londres en 2014, Orlando en 2016, Toronto en 2017, Sydney en 2018, La Haye en 2022 (report et interruption liés à l’épidémie de COVID-19), puis Düsseldorf en 2023, la prochaine édition se déroulera à Vancouver en 2025.

Afin de permettre aux nations participantes de mettre en œuvre un processus de sélection et d’entraînement qui contribue pleinement à la reconstruction de leurs blessés, le rythme des sessions se stabilise à un rythme biennal. Un véritable partage d’expériences concernant les dispositifs de reconstruction des blessés par le sport se met en œuvre. De même, afin de conserver cet objectif et cet état d’esprit et de ne pas basculer dans la compétition visant uniquement la performance, la fondation Invictus Games a décidé de limiter à deux les participations d’un même blessé.

Pour la première fois à Vancouver en 2025, ces jeux vont s’ouvrir aux sports d’hiver. Le socle des sports collectifs est maintenu avec les tournois de volley assis, de rugby fauteuil et de basket fauteuil. La natation et le rameur sont aussi retenus comme disciplines socles et récurrentes. Mais, pour la première fois, un panel de sports d’hiver va donc être proposé. Pour les disciplines qui nécessitent un entraîne- ment spécifique, deux niveaux de compétition vont être mis en place : débutants (moins de 7 jours de pratique) et intermédiaires. Les disciplines sportives hivernales choisies sont le ski alpin, le snowboard, le ski de fond, le biathlon, le skeleton et le curling assis. Les activités sont adaptées pour une participation plus accessible, même pour les pays qui n’auraient que difficilement accès à la neige.

Chaque édition des Invictus place les participants dans un environnement grandiose, permettant à chacun de vivre une expérience extraordinaire avec ses proches et, souvent, devant les autorités de son pays. C’est, pour nos blessés, une occasion unique de représenter la France autrement, de repousser les limites liées à leurs blessures et de se prouver, ainsi qu’à leurs proches, qu’ils sont en mesure de se dépasser. Les sourires, les larmes, les moments forts de cohésion lors de l’événement sont de beaux indicateurs de la puissance de ces rencontres sportives.

Quelques mots de participants à l’édition 2023 :

Tim : « Je m’attendais à quelque chose de fou, (...) mais ça a été des émotions vraiment extraordinaires (…). »

Sébastian : « Nous, ce qui nous importe, ce sont les batailles que l’on a menées contre nos blessures, et ces victoires valent toutes les médailles du monde. »

Cet événement sportif est avant tout un formidable lieu de rencontres et d’échanges. Les organisateurs offrent un lieu unique, la « Nation Home », où chacun prend le temps de profiter de son expérience dans un univers confortable et sécurisant. Les rituels d’échanges de pin’s, bracelets et autres souvenirs permettent aussi de reprendre confiance en soi et d’apprendre à faire confiance aux autres.

« Puisse cette rencontre entre frères d’armes renforcer les liens qui unissent nos nations, et donner à voir à nos concitoyens des blessés dont nos forces armées sont légi- timement très fières. » général Paul SANZEY, officier général Commissaire aux sports militaires, commandant le Centre national des sports de la Défense.

« Ensemble, sur le chemin de la résilience, nous relèverons ce défi sportif, animés par les valeurs militaires et heureux de porter haut les couleurs de la France. » colonel Pierre LE BASTART DE VILLENEUVE, colonel adjoint du Centre national des sports de la Défense.

Ces mots des anciens participants et des chefs militaires du CNSD porteront la prochaine délégation française à Vancouver. Les 19 blessés sélectionnés ont d’ores et déjà entamé leur cycle de préparation. La cohésion du groupe et des équipes de sport collectif se construit, rassemblement après rassemblement, pour vivre au mieux ce rendez-vous en 2025.