Les médailles commémoratives françaises

Sous-titre
Par le LCL M. Joussen

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Le second Empire : Crimée, Sainte Hélène, Baltique, Italie, Chine, Mexique et guerre 1870/1871.

Il semble naturel aujourd’hui que la participation à un conflit ou à une campagne soit marquée par le port d’une médaille commémorative. Pourtant, il s’agit d’une habitude relativement récente.

Corps 1

Sous l’Ancien Régime, les seules décorations existantes, telles que nous les connaissons aujourd’hui, furent les Croix de Saint Louis (créée par Louis XIV) puis du Mérite Militaire (créée par Louis XV), remises seulement aux officiers, et non spécifiques à une campagne, mais récompensant indifféremment les actes de bravoure ou les longs services.

Sous le Consulat puis l’Empire, c’est l’ordre de la Légion d’Honneur qui vient récompenser les faits d’armes des militaires de tous grades et il faut attendre le Second empire pour que soit créée la Médaille Militaire, plus spécifiquement destinées aux soldats et sous-officiers. C’est également sous le Second empire que naissent les médailles commémoratives liées à la participation à une campagne spécifique : la première médaille commémorative d’une campagne française est en fait... britannique ! L’armée britannique commémore depuis la fin du XVIIIe siècle par une médaille spécifique chacune de ses campagnes. Il est ainsi pour la guerre de Crimée, à laquelle participe un fort contingent français. En 1856, la médaille de Crimée, puis la médaille de la Baltique sont accordées par l’impératrice et reine Victoria à tous les soldats français ayant participé à ces opérations. Force est de reconnaître que le soldat français ne pouvant prétendre qu’aux seules Médaille Militaire ou Légion d’Honneur, et encore sous réserve de s’être particulièrement distingué au combat, n’arbore pas dans cette période de médailles, contrairement à ses homologues britanniques ou allemands.

 

Le second Empire : Crimée, Sainte Hélène, Baltique, Italie, Chine, Mexique et guerre 1870/1871. Collection de l’auteur

 

C’est sous le règne de Napoléon III que naissent les premières médailles commémoratives. La première spécifiquement dédiée aux anciens soldats des campagnes de la Révolution et de l’Empire (1792 – 1815) est instituée en 1857, et porte le nom de médaille de Sainte Hélène. Les campagnes d’Italie (1859), l’expédition de Chine (1860) puis celle du Mexique (1862-1867) bénéficient également de la création d’une médaille spécifique. La désastreuse guerre franco-allemande de 1870-1871 sera aussi marquée par la création d’une médaille commémorative... mais instituée en 1911 (40 ans après !).

 

Les campagnes coloniales : Tonkin, Madagascar, Dahomey, Chine, Maroc, Syrie-Cilicie, Corée, Indochine et Suez. Collection de l’auteur

 

Les campagnes militaires de la IIIe République sont essentiellement coloniales et font l’objet de médailles commémoratives : expéditions du Tonkin, d’Annam et de Chine (1883), de Madagascar (1885 et 1895), du Dahomey (1892), de Chine (1902), du Maroc (1909) puis de Syrie-Cilicie. La multiplication des campagnes coloniales amène, afin de ne créer des médailles commémoratives que pour les campagnes les plus marquantes, à la création de la médaille coloniale en 1893, qui (reprenant une habitude britannique, une fois encore !) permet le port d’agrafes géographiques sur la même médaille... Mais la médaille Coloniale est par essence une commémorative.

 

Les guerres du XXe siècle : 1914-1918 (commémorative de la Grande Guerre, médaille Interalliée, médailles d’Orient et des Dardanelles), 1939-1945 (commémorative de la guerre avec ses agrafes et médaille d’Italie) et médaille commémorative des opérations en Afrique du Nord. Collection de l’auteur

 

La Première Guerre mondiale voit la création d’une médaille commémorative française de la Grande guerre, des médailles spécifiques pour les combattants de l’armée d’Orient et du corps expéditionnaires des Dardanelles et d’une médaille commune à tous les alliés : la médaille interalliée.

Au titre de la Seconde Guerre mondiale naît en 1946 une médaille commémorative, pouvant arborer sur son ruban diverses agrafes. En 1953, les combattants d’Italie de 1944 se voient attribuer eux aussi une médaille spécifique (directement inspirée dans son graphisme et son ruban de celle instituée en 1859).

 

Les médailles actuelles : médaille commémorative française avec ses agrafeset médaille de la protection militaire du territoire (avec les agrafes des missions de l’armée de Terre actuelles, "Sentinelle" et "Harpie"). Collection de l’auteur

 

Les campagnes d’après-guerre n’échappent pas à la règle : guerre de Corée (1952), guerre d’Indochine (1953), opérations de sécurité et de maintien de l’ordre en Afrique du Nord (1956), opération de Suez (1957). Alors que la médaille coloniale, rebaptisée d’outre-mer en 1961, continue à commémorer les campagnes réalisées hors du territoire métropolitain, l’intervention des troupes françaises dans le cadre de l’ONU puis de l’OTAN en Europe (en Ex-Yougoslavie en particulier) voit la création d’une nouvelle médaille commémorative française reprenant le principe des agrafes géographiques portées sur son ruban.

Dernière venue, la médaille de la protection militaire du territoire. Créée en 2015, elle vient combler l’absence de médaille commémorative pour les opérations intérieures.

 
LCL M. Joussen-Anglade in "Soldats de France", n° 4/novembre 2017