Louis Franchet d'Espèrey

1856-1942

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Portrait de Louis Franchet d'Espèrey.
Source : l'album de la guerre 1914-1919. © L'illustration

 

Fils d'un officier de cavalerie des chasseurs d'Afrique, Louis, Félix, Marie, François Franchet d'Espèrey est né à Mostaganem le 25 mai 1856.

Sorti de Saint Cyr en 1876, il sert en Afrique du Nord dans le premier régiment de tirailleurs algériens.

Il est admis à suivre les cours de l'École supérieure de guerre en 1881, mais il n'y entrera qu'avec la promotion suivante, afin de participer à l'expédition de Tunisie contre les Kroumirs.

À sa sortie de l'école, il rejoint le Tonkin pour deux ans et participe aux combats de Lang-Son et de Lao-Qay.

À son retour en France, en 1886, il est à l'état-major de l'armée puis au Cabinet de Freycinet, ministre de la guerre, avant de commander un bataillon à Toul puis le 18e bataillon de chasseurs à pied de Nancy. En 1900, commandant de la zone française de Pékin, il participe à l'expédition de Chine contre les Boxers.

Revenu en France, il commande successivement le 69e régiment d'infanterie à Nancy puis la 77e brigade d'infanterie à Toul. Promu colonel en 1903, il commande le 60e régiment d'infanterie à Besançon.

En 1912, le général de division Franchet d'Espèrey sert près de Lyautey, comme commandant des troupes d'occupation du Maroc occidental et participe à diverses opérations de pacification dans les secteurs de Tadla, de la Chaouïa, du Grand Atlas.

À la déclaration de guerre, il commande le 1er corps d'armée à Lille. Durant la bataille des frontières, il est à Charleroi, en Belgique, puis mène, à Guise, sur l'Oise, une contre-attaque victorieuse contre les troupes allemandes. Le 3 septembre, Joffre lui confie la 5e armée qui constitue un élément déterminant dans la victoire de la Marne. Il commande les groupes d'armées de l'Est en 1916, puis du Nord en 1917. En juin 1918, il remplace le général Guillaumat à la tête des armées alliées d'Orient qu'il mène à la victoire finale. Son offensive victorieuse de la Moglena, dans les Balkans, marquée par la prise de Dobro Polje, contraint les Bulgares à signer l'armistice en septembre 1918. C'est ensuite, en quelques semaines, l'effondrement de la Turquie et de l'Autriche-Hongrie puis la demande d'armistice allemande.

À l'issue du conflit, commandant les troupes d'occupation à Constantinople jusqu'en 1920, il dirige les opérations d'Ukraine, de Bessarabie.

En 1921, le général Franchet d'Espèrey est élevé à la dignité de maréchal de France.

Devenu inspecteur général des troupes d'Afrique du Nord, il consacre son temps et son talent à l'Armée d'Afrique. Il entreprend également la réalisation des voies transsahariennes et est gravement blessé à Gabès, le 19 mars 1933, dans un accident d'automobile alors qu'il allait étudier une liaison Tunisie-Maroc par le Sud. Durant cette période, représentant de la France lors de cérémonies officielles ou chargé de missions en Europe centrale et en Afrique, il entame la rédaction de ses Mémoires et publie diverses études.

Élu à l'académie française en 1934, il fonde "les Amitiés africaines", oeuvre sociale à l'origine des "Dar el Askri" (maisons du combattant) qui regroupe les anciens combattants musulmans et leur vient en aide.

En 1940, il se retire dans le Tarn, à Saint-Amancet, où il décède le 8 juillet 1942. Il est inhumé le 24 octobre 1947 dans la crypte de l'église Saint-Louis-des-Invalides, à Paris.

Il était Grand-Croix de la Légion d'honneur et titulaire de la Médaille militaire et de la Croix de guerre 1914-1918.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

 

John Pershing

1860-1948

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Portrait de John Joseph Pershing.
Source : l'album de la guerre 1914-1919. © L'illustration

 

John Joseph Pershing est né le 13 septembre 1860 à Linn Country, un village du Missouri. Sa famille était d'origine alsacienne - un de ses ancêtres avait émigré en Amérique au milieu du XVIIIe siècle. A 22 ans, après avoir été instituteur, il entre à l'Académie militaire de West Point. Il en sort en 1886 et suit alors une carrière militaire classique : sous-lieutenant en Arizona, professeur de science militaire et de tactique à l'Université du Nebraska (1891) où il étudie également le droit, 10e Régiment de cavalerie du Montana. Lieutenant à Washington (1897), il participe à la guerre de Cuba, puis à la répression de l'insurrection des Moros aux Philippines.

En 1901, le capitaine Pershing est attaché militaire à Tokyo et suit de près la guerre russo-japonaise. En 1906, il est nommé général de brigade et remplit une nouvelle mission aux Philippines avant de faire un séjour en Europe où il étudie le français et, en 1914, il reçoit le commandement de la Division de l'Ouest, à San Francisco. Il participe à la répression de la révolte de Pancho Villa au Mexique. En août 1915, sa femme et trois de ses enfants périssent dans un incendie à San Francisco.

Le 10 mai 1917, le président Wilson le charge de commander le Corps expéditionnaire américain en Europe. Le 13 juin 1917, le général Pershing arrive à Paris.

Treize jours plus tard, les premières troupes américaines débarquent à Saint-Nazaire. Jusqu'au 11 novembre 1918, le général Pershing n'aura de cesse de créer sur le front français une grande armée américaine autonome.

Le général Pershing quitte la France le 1er septembre 1919 . le 29 septembre, le Congrès américain déclare qu'il a bien mérité de la patrie.

Au lendemain de la guerre, Pershing est nommé Commandant en chef de l'état-major des armées américaines (1921). Il accède au cadre de réserve en 1924. Dès lors il se retire de la vie publique, n'intervenant de façon officielle que dans les cérémonies commémoratives auxquelles il participe chaque année en qualité de président fondateur de 1"American Battle Monuments Commission", l'organisme qui gère les nécropoles et les mémoriaux américains en Europe. Il participe ainsi en 1937 à l'inauguration de sa propre statue à Versailles. Il se rend en France pour la dernière fois en mai 1939. Il publie "Mes souvenirs de la guerre" en 1931, ouvrage qui sera couronné par le Prix Pulitzer l'année suivante (publié en France à la librairie Pion).

Le 4 août 1940, il adresse pour la dernière fois au peuple américain un message radiophonique dans lequel il prend position contre l'hitlérisme.

En 1944, il entre à l'hôpital Walter Reed à Washington . c'est là qu'il recevra le général de Gaulle en juillet de la même année.

John J. Pershing décède le 15 juillet 1948, et est inhumé au cimetière national d'Arlington en présence du président Harry S. Truman.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Woodrow Wilson

1856-1924

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Portrait de Woodrow Wilson. Source : domaine public

 

Woodrow Wilson est le vingt-huitième président des États-Unis. Il engage son pays dans la Première Guerre mondiale, en avril 1917, après trois ans de neutralité et, au sortir de la guerre, oeuvre à la réconciliation des pays européens, ce qui lui vaut le prix Nobel de la paix en 1919.

Woodrow Wilson est le fils d'un pasteur presbytérien qui l'élève dans la rigueur et l'attachement à ses valeurs. Après des études de droits à l'Université de Princeton, il devient avocat (Atlanta 1882-1883) et professeur de sciences politiques dans diverses institutions (1890-1910). Elu gouverneur démocrate de l'Etat du New Jersey en 1910, il est choisi par le Parti démocrate comme candidat à l'élection présidentielle du 5 novembre 1912 qu'il remporte grâce à la division de ses adversaires républicains, Théodore Roosevelt et William Taft.

Wilson est favorable à un pouvoir exécutif fort et met en place un ambitieux programme démocratique et économique. Il abaisse les droits de douane, réforme le système bancaire en créant une réserve fédérale facilitant le crédit et renforce la loi antitrust autorisant les grèves et le boycott par les ouvriers. Sur le terrain politique, il fait voter une loi interdisant le travail des enfants, instaure le droit de vote féminin, met en place l'impôt sur le revenu et un système de retraite pour les salariés fédéraux, et réduit la journée de travail à 8 heures.

En politique extérieure, Wilson n'est pas partisan de l'interventionnisme mais il développe néanmoins une diplomatie active et renforce la prédominance américaine sur le continent en tentant d'y imposer une démocratie à l'américaine. Mais il ne souhaite pas que les États-Unis s'engagent dans les conflits européens, au nom de la doctrine Monroe qui refuse que les États-Unis interviennent en Europe et se mêlent des problèmes internationaux.

Dès le 4 août 1914, il déclare la neutralité américaine dans le conflit en affirmant "cette guerre n'est pas la notre". Il sera d'ailleurs réélu pour un second mandat, en novembre 1916, notamment sur le thème "Il nous a préservé de la guerre" (He kept us out of war), indiquant néanmoins, dans son discours d'investiture, que cette position sera probablement très difficile à tenir. Ainsi, victime de la reprise de la guerre sous-marine à outrance menée par les Allemands - elle avait été suspendue après la mort d'une centaine de citoyens américains dans le torpillage du paquebot Lusitania, le 7 mai 1915 - et indigné par les manœuvres allemandes pour entraîner le Mexique dans une guerre contre les États-Unis - télégramme du secrétaire d'État allemand des affaires étrangères Zimmermann - le président Wilson demande au Congrès le droit d'entrer en guerre contre l'Allemagne, demande approuvée le 6 avril 1917. Un mois plus tard, le 18 mai, il rétablit le service militaire obligatoire qui était aboli depuis la fin de la guerre de Sécession (1865).
 

Wilson organise l'effort de guerre et fournit aux Alliés une aide matérielle, morale et militaire (En octobre 1918, près de deux millions de soldats américains sous le commandement du général Pershing auront débarqué pour combattre en France). Il cherche également à prendre la direction politique de la coalition et définit les buts de guerre des Alliés. Le 8 janvier 1918, dans un discours au Congrès, il formule un programme en quatorze points définissant les objectifs de paix. Ces Quatorze points prônent la fin du colonialisme, l'abandon des obstacles économiques entre les nations, la garantie de la liberté des mers, l'autodétermination des peuples et la création d'une Société des Nations en vue de fournir "des garanties mutuelles d'indépendance politique et d'intégrité territoriale aux grandes nations comme aux petites".

Certains points de son programme serviront de base au Traité de Versailles de 1919.

De retour aux États-Unis, Wilson présente lui-même le Traité de Versailles pour ratification par le Congrès mais il se heurte à un puissant courant isolationniste qui refuse de signer un traité les contraignant à intervenir dans un nouveau conflit.

Par deux fois, en novembre 1919 et en mars 1920, le Congrès rejette le Traité de Versailles et se prononce contre l'adhésion à la SDN. Désavoué par le Congrès et une majorité du peuple américain, Wilson connaît donc l'ultime ironie de voir son propre pays refuser de se joindre à la Société des Nations mais ses efforts de réconciliation des pays européens lui valent néanmoins le prix Nobel de la paix en 1919 (reçu en 1920).

Épuisé physiquement par l'effort qu'il a déployé pour l'établissement de la paix, il subit une attaque d'apoplexie qui le laisse pratiquement paralysé. Il restera cloîtré à la Maison Blanche jusqu'en 1921, après la victoire écrasante du candidat républicain conservateur, Warren Harding.

Il se retire alors dans sa demeure de Washington où il décède, le 3 février 1924.

Il est inhumé dans la cathédrale de Washington.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Dimitri Amilakvari

1906-1942

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Portrait de Dimitri Amilakvari. Source : Musée de la Légion Etrangère

 

 

Né dans la village de Bazorkino en Géorgie (région de Chida Kartlie), Dimitri Amilakvari est Prince de la Maison Zedguinidze et Grand Ecuyer de la Couronne de Géorgie.

Le traité de Brest-Litovsk et la Révolution sonnent le glas de la Russie tsariste et permettent à la nation kartvel de déclarer son indépendance le 26 mai 1918. La jeune république sociale-démocrate ne tarde pas à vaciller cependant, sous les pressions de Bolcheviks russes et de la menace turque sur la frontière sud-ouest (Erzurum). Le 25 février 1921, finalement, l'Armée Rouge investit la Transcaucasie, la Fédération transcaucasienne des Républiques socialistes soviétiques (Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie) est créée. Les élites tsaristes et républicaines sont pourchassées.

La famille Amilakvari prend alors le chemin de l'exil : Constantinople puis la France . Dimitri n'est alors âgé que d'une dizaine d'années. En digne descendant de la noblesse d'épée géorgienne (son grand-père, Ivane est général et son père, le prince Giorgi est colonel de l'armée de la République démocratique de Géorgie), Dimitri Amilakvari se fait admettre à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr en 1924.

Il en sort deux ans plus tard et intègre la Légion Étrangère : un premier poste au 1er RE à Sidi-Bel-Abès puis le 4e RE à Marrakech en 1929 au sein duquel il prend part à la campagne du haut-Atlas et se distingue en mai 1932 lors des combats d'Aït-Atto. Il est cité à nouveau l'année suivante lors des combats du Djebel Baddou.

Capitaine au 1er RE de Sidi-Bel-Abès en 1939 puis au 2e bataillon de groupement de haute montagne en février 1940, il reçoit alors la nationalité française. C'est avec la 13e Demi-brigade de Légion étrangère qu'il est engagé dans la Seconde Guerre mondiale. Il prend part aux opérations du corps expéditionnaire en Norvège, en qualité de commandant de la compagnie d'accompagnement du 2e Bataillon. Valeureux combattant, Dimitri Amilakvari gagne trois citations supplémentaires qui lui valent d'être élevé à la dignité de Chevalier de la Légion d'Honneur.

Homme d'honneur et de convictions, "Bazorka", comme il aime se faire appeler en hommage à son village natal, décide en juin 1940 de poursuivre le combat aux côtés du général de Gaulle. Trois jours après son retour sur les côtes bretonnes, il s'embarque le 19 juin de Saint-Jacut de la Mer avec quelques hommes de la 13e, et rejoint l'Angleterre le 21, via l'île de Jersey.

Légionnaire FFL, Dimitri Amilakvari rejoint Dakar au mois de septembre 1940 pour participer à l'opération "Menace", avant de partir à la conquête de l'AOF pétainiste (Gabon, Cameroun), de rallier l'Erythrée puis les territoires du Levant. "Bazorka" est incorporé à la Brigade d'Orient au début de 1941 et prend part, à la tête de la compagnie d'accompagnement du 1er Bataillon de Légion étrangère à la victoire de Keren (mars 1941) et à la prise de Massaouah (8 avril). Il s'illustre à nouveau pendant la campagne de Syrie en juin 1941 et décroche ses galons de chef de bataillon. Le 16 septembre suivant, il prend le commandement de la 13e DBLE et est promu lieutenant-colonel une semaine plus tard. Combattant de valeur, meneur d'hommes, il réorganise ses troupes qu'il entraîne à la guerre dans le désert, conduite qui lui vaudra de recevoir des mains du général Catroux le drapeau de la 13e, le 19 octobre 1941, à Homs.

Engagé dès le début de la campagne de Libye, "Bazorka" commande une Jock column : groupement tactique constitué d'éléments d'infanterie motorisée, d'une batterie d'artillerie tractée, d'un peloton d'automitrailleuses, d'une section de canons antichars de 75 mm et d'éléments légers de DCA, du génie et de transmissions radio. Il fait preuve d'audace et de bravoure aux côtés du général Koenig (1ère BFL) pendant la bataille de Bir-Hakeim (26 mai - 11 juin 1942). Le général de Gaulle lui remet alors en personne la Croix de la Libération au camp de El Tahag (Egypte) le 10 août 1942.

Début octobre 1942, le lieutenant-colonel Amilakvari et ses deux bataillons font face aux divisions de l'Afrika Korps de Rommel dans le secteur d'El Alamein, en Egypte. Ils sont envoyés en tête à l'assaut du piton de l'Himeimat, de 80 mètres de haut. Cette mission est accomplie au matin du 24 octobre lorsque les panzers allemands mènent une contre-offensive. Ses unités battent en retraite au milieu des champs de mines et des tirs ennemis.

"Bazorka", mitrailleuse au bras, est atteint à la tête par un obus.

À El Alamein, au lieu même de son trépas une croix blanche rappelle le courage et le sacrifice de ce Prince franco-géorgien, figure mythique de la Légion Etrangère et parrain de la 143e promotion de St-Cyriens. A l'occasion du 100ème anniversaire de sa naissance, Géorgiens et Français ont inauguré, le dimanche 19 novembre 2006, une rue Amilakvari dans la métropole provinciale de Gori ainsi qu'une salle au musée ethnographique local.

 

Sources : Ordre de la Libération et MINDEF/SGA/DMPA

Marie-Pierre Koenig

1898-1970

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Portrait de Marie-Pierre Koenig. Source : SHD

 

Un homme d'exception, un militaire sorti du rang qui "appartient à l'histoire, et à jamais" (Michel Debré) ...

 

Issu d'une ancienne famille alsacienne, fils d'un facteur d'orgue, Pierre Koenig naît le 10 octobre 1898 à Caen (Calvados). Il effectue sa scolarité chez les frères des Ecoles chrétiennes. Il se porte volontaire, baccalauréat en poche, pour servir sa patrie et il est incorporé le 17 avril 1917 dans le 36e régiment d'infanterie (RI). Aspirant en février 1918, il prend part à la bataille des Flandres en mai, à la bataille du Matz en juin-juillet puis à l'offensive de l'Oise en août-septembre et aux combats de l'Ailette le mois suivant. Combattant exemplaire, il est cité à l'ordre de l'armée le 26 septembre 1918 et reçoit la médaille militaire.

La guerre terminée, Pierre Koenig décide d'embrasser la carrière des armes. Il rejoint le 15e bataillon de chasseurs alpins, sert en Haute-Silésie et dans la Ruhr (1919 à 1922) et gagne ses galons de lieutenant en 1920, avant d'être affecté dans les Alpes (1922-1923). Il officie ensuite en qualité d'officier de renseignement à l'état-major des 40e et 43e division d'infanterie des troupes d'occupation en Allemagne jusqu'en 1929. Après deux ans au 5e RI à Paris, il est envoyé au Maroc comme commandant de compagnie au 4e Régiment étranger (1931-1934) pour mener les opérations de pacification du protectorat. Détaché auprès du général Catroux à Marrakech, le capitaine Koenig conduit différentes opérations dans l'arrière pays lorsque la guerre éclate en septembre 1939.

En février 1940, il participe avec les unités détaché d'Afrique du Nord de la 13e brigade de la Légion étrangère (DBLE) au corps expéditionnaire de Norvège où il s'illustre lors des combats de Namsos. De retour en France, il assiste le 15 juin 1940 à l'entrée de la Wehrmacht à Brest. N'acceptant pas la reddition de l'armée française, il décide de rejoindre Londres avec quelques compagnons de la 13e. Il s'embarque le 19 juin à Saint-Jacut de la Mer et aborde les côtes britanniques le 21.

Chef de bataillon le 1er juillet, il participe avec ses compagnons de la 13e DBLE à l'infructueuse expédition de Dakar, puis à l'opération "Menace", reprenant le Gabon aux fidèles du gouvernement de Vichy, au mois de novembre, avant d'être nommé commandant du Cameroun en décembre 1940.

"Mutin" de son nom de guerre, rejoint les FFL au Soudan anglophone le mois suivant avant de gagner les territoires du Levant au début de l'année 1941. Lieutenant-colonel, il est le chef d'état-major du général Legentilhomme pendant la campagne de Syrie et est désigné délégué pour la France Libre à la Commission d'Armistice de Saint-Jean d'Acre à la suite de la capitulation du général Dentz. Général de brigade à titre temporaire, il oeuvre à la réorganisation des troupes françaises libres du Levant.

Commandant de la 1re division légère des FFL (ou 1re BFL), il rejoint la 8e armée britannique, combat en Libye, à Halfaya (décembre 1941 et janvier 1942), à Méchili (février 1942) et Bir-Hakeim (février-juin 1942). Il s'acquitte de sa mission "tenir coûte que coûte, jusqu'à ce que notre victoire soit définitive" (message de Koenig à ses troupes au matin du 3 juin) face à l'Afrika Korps de Rommel, et ce pendant 14 jours, du 27 mai au 10 juin 1942, permettant à l'armée anglaise de se réorganiser à Alexandrie : "en arrêtant l'avance allemande, ils [Pierre Koenig et ses hommes] permirent de gagner du temps, d'amener des troupes de Palestine et de couvrir l'Egypte" reconnaîtra Winston Churchill. Le général de Gaulle lui remet la Croix de la Libération pour ce haut fait de guerre.

Précédé par sa réputation, Koenig participe à la victoire sur les troupes de l'Axe à El-Alamein en octobre 1942. Puis, appuyant le général de Larminat, il mène ses troupes à la conquête de la Libye et de la Tunisie.

Au début du mois d'août 1943, il exerce les fonctions de chef d'état-major adjoint de l'armée à Alger. Il a pour mission d'y opérer la fusion et d'atténuer les tensions entre les troupes d'Afrique du Nord et celles de la France Libre.

À partir de mars 1944, le général Koenig entre sur la scène politique et diplomatique : il est nommé délégué du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) auprès du général Eisenhower, commandant supérieur des Forces françaises en Grande-Bretagne et commandant des Forces françaises de l'intérieur (FFI).

Il obtient notamment des Alliés le parachutage d'armes aux FFI en préparation du débarquement de Normandie, contribuant ainsi à coordonner les troupes régulières et les actions de guérilla de la Résistance.

Nommé général de corps d'armée le 28 juin 1944, il devient le premier Gouverneur militaire de Paris de la France libérée le 25 août.

Commandant des Forces françaises en Allemagne (juillet 1945 à août 1949), il reçoit ses étoiles de général d'armée le 20 mai 1946 puis est élevé à la dignité de Grand-Croix de la Légion d'Honneur. Inspecteur des forces terrestres, maritimes et aériennes de l'Afrique du Nord et vice-président du Conseil supérieur de la Guerre, il est élu à l'Académie des sciences morales et politiques et membre de l'Assemblée consultative européenne en 1951.

Désireux de participer à l'activité républicaine, Pierre Koenig se fait élire député du Bas-Rhin en 1951 (il sera réélu en 1956), et accepte la présidence de la Commission de la Défense nationale de l'Assemblée nationale (août 1951 à juin 1954). Il entre alors dans le gouvernement Mendès-France pour lequel il prend en charge le portefeuille du ministère de la défense, de juin à août 1954, poste qu'il occupe à nouveau au sein du cabinet Edgar Faure (février - octobre 1955). Il quitte la vie politique en 1958.

Pierre Koenig décède le 2 septembre 1970, à l'Hôpital Américain de Neuilly-sur-Seine. Il est inhumé dans le cimetière parisien de Montmartre après des obsèques officielles en l'Eglise Saint-Louis des Invalides.

Homme d'exception, membre du conseil de l'Ordre de la Libération, Pierre Koenig est élevé à la dignité de Maréchal de France à titre posthume par décret du 6 juin 1984.

 

Sources : Ordre de la Libération et MINDEF/SGA/DMPA

Henri Fertet

1926-1943

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Portrait d'Henri Fertet. Source : Musée de l'Ordre de la Libération

 

Lycéen en classe de Seconde au Lycée Victor-Hugo à Besançon, Henri Fertet est arrêté par les Allemands le 3 juillet 1943, condamné à mort par le tribunal militaire de la Feldkommandantur 560 pour faits de résistance, est exécuté le 26 septembre 1943.

Henri Fertet naît le 27 octobre 1926 à Seloncourt dans le Doubs dans une famille d'instituteurs.

Ses études primaires terminées, il quitte sa ville natale pour entrer en 1937 au Lycée Victor Hugo à Besançon. Elève doué et travailleur, il s'intéresse à l'archéologie et à l'histoire. Vivant sous le joug nazi depuis l'armistice de juin 1940, Henri Fertet, inspiré par l'exemple des ses augustes sujets d'étude, rejoint à l'été 1942 le groupe de Marcel Simon, secrétaire de la Jeunesse agricole chrétienne à Larnod.

En février 1943, le groupe Simon rejoint l'organisation des Franc-tireurs et Partisans et prend le nom de Groupe-franc "Guy Mocquet". Il mène alors des actions de lutte clandestine.

Henri Fertet (enregistré sous le matricule Émile - 702) participe comme chef d'équipe à trois opérations :

  • l'attaque du poste de garde du Fort de Montfaucon le 16 avril 1943 pour s'emparer d'un dépôt d'explosifs qui entraîne la mort d'une sentinelle allemande.
  • la destruction, le 7 mai, d'un pylône à haute-tension à Châteaufarine près de Besançon.
  • l'attaque, le 12 juin 1943 sur la route Besançon-Quingey, du commissaire des douanes allemand Rothe dans le but de lui prendre son arme, son uniforme et les papiers qu'il transporte.

Henri Fertet tire sur le commissaire, le blessant mortellement mais l'arrivée d'une moto les empêche de se saisir des documents. Dès lors activement recherchés, les membre du groupe sont successivement arrêtés à partir de juin 1943.

Henri Fertet est appréhendé par les forces allemandes le 3 juillet 1943 : il est trois heures du matin, le jeune homme se repose chez ses parents à l'Ecole de Besançon-Velotte. Le plus jeune des prévenus, il est alors à peine âgé de seize ans, Henri Fertet est incarcéré à la prison de la Butte (Besançon). Il comparait devant le tribunal militaire de la Feldkommandantur 560 et est condamné à mort le 18 septembre 1943. Après 87 jours de détention et de torture, ce "compagnon d'âme" de Guy Mocquet est exécuté le 26 septembre 1943 à la citadelle de Besançon.

À l'instar de ce dernier il adressera à ses parents sa dernière lettre :

"Chers Parents,

Ma lettre va vous causer une grande peine, mais je vous ai vus si pleins de courage que, je n'en doute pas, vous voudrez encore le garder, ne serait-ce que par amour pour moi.

Vous ne pouvez savoir ce que moralement j'ai souffert dans ma cellule, ce que j'ai souffert de ne plus vous voir, de ne plus sentir peser sur moi votre tendre sollicitude que de loin. Pendant ces 87 jours de cellule, votre amour m'a manqué plus que vos colis, et souvent je vous ai demandé de me pardonner le mal que je vous ai fait, tout le mal que je vous ai fait. Vous ne pouvez vous douter de ce que je vous aime aujourd'hui car, avant, je vous aimais plutôt par routine, mais maintenant je comprends tout ce que vous avez fait pour moi et je crois être arrivé à l'amour filial véritable, au vrai amour filial. Peut-être après la guerre, un camarade vous parlera-t-il de moi, de cet amour que je lui ai communiqué. J'espère qu'il ne faillira pas à cette mission sacrée.

Remerciez toutes les personnes qui se sont intéressées à moi, et particulièrement nos plus proches parents et amis. dites-leur ma confiance en la France éternelle. Embrassez très fort mes grands parents, mes oncles, tantes et cousins, Henriette. Donnez une bonne poignée de main chez M. Duvernet. dites un petit mot à chacun. Dites à M. le Curé que je pense aussi particulièrement à lui et aux siens. Je remercie Monseigneur du grand honneur qu'il m'a fait, honneur dont, je crois, je me suis montré digne. Je salue aussi en tombant, mes camarades de lycée. A ce propos, Hennemann me doit un paquet de cigarettes, Jacquin mon livre sur les hommes préhistoriques. Rendez " Le Comte de Monte-Cristo " à Emourgeon, 3 chemin Français, derrière la gare. Donnez à Maurice André, de la Maltournée, 40 grammes de tabac que je lui dois.

Je lègue ma petite bibliothèque à Pierre, mes livres de classe à mon petit papa, mes collections à ma chère petite maman, mais qu'elle se méfie de la hache préhistorique et du fourreau d'épée gaulois.

Je meurs pour ma Patrie. Je veux une France libre et des Français heureux. Non pas une France orgueilleuse, première nation du monde, mais une France travailleuse, laborieuse et honnête.

Que les français soient heureux, voila l'essentiel. Dans la vie, il faut savoir cueillir le bonheur.

Pour moi, ne vous faites pas de soucis. Je garde mon courage et ma belle humeur jusqu'au bout, et je chanterai " Sambre et Meuse " parce que c'est toi, ma chère petite maman, qui me l'as apprise.

Avec Pierre, soyez sévères et tendres. Vérifiez son travail et forcez-le à travailler. N'admettez pas de négligence. Il doit se montrer digne de moi. Sur trois enfants, il en reste un. Il doit réussir.

Les soldats viennent me chercher. Je hâte le pas. Mon écriture est peut-être tremblée. mais c'est parce que j'ai un petit crayon. Je n'ai pas peur de la mort. j'ai la conscience tellement tranquille.

Papa, je t'en supplie, prie. Songe que, si je meurs, c'est pour mon bien. Quelle mort sera plus honorable pour moi que celle-là ? Je meurs volontairement pour ma Patrie. Nous nous retrouverons tous les quatre, bientôt au Ciel.  Qu'est-ce que cent ans ?

Maman, rappelle-toi :

" Et ces vengeurs auront de nouveaux défenseurs qui, après leur mort, auront des successeurs."

Adieu, la mort m'appelle. Je ne veux ni bandeau, ni être attaché. Je vous embrasse tous. C'est dur quand même de mourir.

Mille baisers. Vive la France.

Un condamné à mort de 16 ans

H. Fertet

Excusez les fautes d'orthographe, pas le temps de relire.

Expéditeur : Henri Fertet Au Ciel, près de Dieu."

 

Sources : Ordre de la Libération - MINDEF/SGA/DMPA

Jean Vuillermoz

1906-1940

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Portrait de Jean Vuillermoz. Source : Collection Vuillermoz

 

Né à Monaco, le 29 décembre 1906, Jean Vuillermoz est initié à la musique dès sa plus tendre enfance par son père, le célèbre corniste Édouard Vuillermoz.

"Monté" à Paris à l'âge de 19 ans pour mener ses études au Conservatoire National, il est tout à la fois compositeur, chef d'orchestre et metteur en ondes à la Radiodiffusion française. Il signe aussi de superbes harmonisations de chansons folkloriques pour choeur mixte (deux chants du XVIe siècle) ou pour voix d'hommes (trois chants de la Renaissance, avec accompagnement d'orchestre).

Des oeuvres les plus significatives de son talent émergent un "Concerto pour cor et orchestre", un ballet "Veglione", une cantate pour choeurs et orchestre sur un poème d'Anatole France "Ode à la lumière", une suite d'orchestre "Le Tombeau d'Anna Favlova".

De ses divertissements pour orchestre, on peut retenir la "Promenade zoologique" (tableaux humoristiques évoquant la vie au zoo de Vincennes, près duquel demeurait le compositeur). Peu de choses de ce travail de composition ont été éditées, la plupart restant à l'état de manuscrits dont on peut admirer la calligraphie élégante et soignée datant des années précédant la Seconde Guerre mondiale.

Jean Vuillermoz était un artiste délicat, un enthousiaste qui se donnait tout entier sans rechercher la célébrité ou l'argent.

Tout particulièrement attaché à sa famille, sa femme et ses trois enfants étaient pour lui un bien sacré.

Soldat du 22e Régiment d'Infanterie de Forteresse, c'est en effectuant une patrouille aux abords de la Ligne Maginot qu'il est tué le 21 juin 1940, à Drachenbronn (Bas-Rhin).

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Gaston Monnerville

1897-1991

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Portrait de Gaston Monnerville.
Source : www.senat.fr

(2 janvier 1897 : Cayenne, Guyane française - 7 novembre 1991 : Paris)

 

Petit-fils d'esclave, Gaston Monnerville naît à Cayenne en 1897. Elève brillant, il est reçu, en 1912, au concours des bourses métropolitaines et vient à Toulouse pour y achever, au lycée Pierre de Fermat (Hôtel Bernuy), ses études secondaires comme boursier avant d'intégrer les Facultés de lettres et de droit de Toulouse.

En 1921 il devient docteur en droit après avoir soutenu une thèse sur "L'enrichissement sans cause" qui est honorée d'une souscription du ministère de l'instruction publique et primée. La même année, il est reçu au concours des secrétaires de la Conférence, il obtient la médaille d'or "Alexandre Fourtanier" qui récompense l'un des meilleurs secrétaires, puis quitte Toulouse et s'inscrit au Barreau de Paris. Il entre bientôt au cabinet d'un célèbre avocat et homme d'État, César Campinchi, dont il sera, pendant huit ans, le principal collaborateur.

En 1923, Gaston Monnerville est reçu au concours des secrétaires de la Conférence des Avocats, à la Cour d'appel de Paris. En 1927, il est élu président de l'Union des jeunes avocats et s'illustre dans plusieurs grands procès comme l'affaire "Galmot" en 1931. Inculpés après l'émeute provoquée en 1928 par la fraude électorale et par la mort suspecte du député Jean Galmot, quatorze Guyanais sont traduits devant la Cour d'assises de Nantes. Avec Fourny, Zevaes, et Henri Torres, Monnerville assure leur défense. Sa plaidoirie produit un effet considérable sur les jurés qui se prononcent pour l'acquittement.

Ce procès retentissant marque ses débuts en politique. Il se présente en Guyane, contre le député sortant, Eugène Lautier, et est élu au premier tour de scrutin, en 1932 - il sera réélu en 1936, après avoir été élu maire de Cayenne en 1935.

Deux fois sous-secrétaire d'État aux Colonies, en 1937 et 1938, sa connaissance des questions internationales et d'Outre-Mer le font choisir comme membre de la délégation française à la Conférence du Pacifique, dite "Conférence des Neuf Nations" qui a lieu à Bruxelles, en 1937, lors de l'agression du Japon contre la Chine. En 1939, Gaston Monnerville est parlementaire âgé de plus de quarante ans. Aux termes de la loi sur la Nation en temps de guerre, il n'est pas mobilisable. Avec quatre de ses collègues, il fait prendre un décret-loi, signé Daladier, qui prévoit une exception et, aussitôt, il s'engage dans la Marine. Il sert comme "officier de justice", sur le cuirassé "La Provence", expérience qu'il consignera dans un journal de bord.

Monnerville est démobilisé une semaine après le vote à Vichy des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, le 10 juillet 1940. Le 17 juillet 1940, il se rend à Vichy pour protester contre l'Armistice et la situation faite aux originaires d'Outre-Mer par le gouvernement Pétain. Dès l'hiver 1940-1941, il milite dans le mouvement de résistance "Combat" et assure la défense des personnes emprisonnées pour délit d'opinion ou origine ethnique. Sous le pseudonyme de "Commandant Saint-Just", il fait partie des maquis d'Auvergne (groupe du commandant Cheval), d'octobre 1942 à octobre 1944. Il administre de juin à août 1944 l'hôpital de Cheylade, réquisitionné par les FFI et prend part, du 7 au 10 septembre 1944, à l'opération "Bec d'Allier".

La Croix de Guerre 1939-1945, la Rosette de la Résistance et la Légion d'Honneur à titre militaire, témoignent de son courage et de son patriotisme.

 

Désigné par la Résistance métropolitaine, en novembre 1944, pour siéger à l'Assemblée consultative provisoire, il y préside la "Commission de la France d'Outre-Mer" et a l'honneur, au nom des populations de l'Union française, de célébrer, dans la séance solennelle du 12 mai 1945, la victoire des Alliés. Il prononce également, durant cette séance, un discours en hommage aux combattants de l'Outre-Mer.

En 1945, le Gouvernement provisoire de la République appelle le président Monnerville à la tête de la commission chargée de préparer le futur statut politique des territoires d'Outre-Mer. Cette commission élabore le cadre constitutionnel de l'Union française.

Élu pour la troisième fois député de la Guyane à l'Assemblée Constituante, le 21 octobre 1945, son mandat est renouvelé le 2 juin suivant, à la deuxième Assemblée nationale Constituante.

Le 15 décembre 1946, il est désigné comme vice-président de cette assemblée de Guyane. En mars 1947, il est élu président du Conseil de la République et réélu en janvier 1948. En novembre 1948, il est élu sénateur du Lot, maire de Saint-Céré (Lot) de 1964 à 1971, puis président du Conseil de la République définitif, remplacé par le Sénat, dont il assurera la présidence pendant vingt-deux ans. De mars 1974 à mars 1983, il siège au Conseil Constitutionnel.

Gaston Monnerville, grand serviteur de l'État à l'étranger, après avoir été délégué de la France en 1937 à la Conférence du Pacifique, puis en janvier 1946 à l'Assemblée des Nations Unies, représente la France en Amérique latine en 1957, en Haïti, en 1980, à l'occasion du bicentenaire de sa capitale, Port-au-Prince.

Homme de lettres, Gaston Monnerville publie en mai 1968 un ouvrage sur Georges Clemenceau, puis se consacre à la rédaction de ses mémoires, Témoignages, De la France équinoxiale au Palais du Luxembourg (1975), et Vingt-deux ans de présidence (1980).

 

Sources : Dictionnaire des parlementaires, Paris, La Documentation française - www.senat.fr

Benjamin Fondane

1898-1944

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Benjamin Fondane en 1938. Source : www.fondane.org

(Jassy, Roumanie, 14 novembre 1898 - Auschwitz, 2 ou 3 octobre 1944)

 

Benjamin Wechsler (ou Vecsler) choisit le nom de B. Fundoianu pour faire son entrée en littérature. Ecrivain précoce, il laisse une oeuvre considérable en langue roumaine. Fondane appartient à cette lignée d'écrivains roumains qui se laissèrent séduire par le rayonnement de la littérature française. Il débarque à Paris en 1923 sous le nom de Fundoianu et devient Benjamin Fondane. Malgré les espoirs qu'il avait mis en lui, Fondane n'a jamais rallié le surréalisme. En 1928 il se rapproche du groupe "Discontinuité" et éprouve de la sympathie pour le "Grand Jeu" de René Daumal.

Mais c'est la rencontre de Léon Ghestov qui est déterminante pour Fondane, infléchissant sa vie et son oeuvre. Désormais, toute cette oeuvre sera écrite en français. En 1933 paraissent simultanément son poème Ulysse et son essai Rimbaud le voyou, fort remarqué : lecture existentielle de Rimbaud, s'inscrivant en faux contre l'interprétation de Breton et des surréalistes. Quant au Faux traité d'esthétique (1938), s'il contient une vive critique du surréalisme, il présente une poétique existentielle.

La poésie de Fondane, telle qu'on la découvre dès Ulysse (1933) et Titanic (1938), est une poésie âpre, prophétique, proche du cri. Tous ses poèmes réunis sous le titre Le mal des fantômes forment une sorte d'odyssée existentielle où domine la figure d'un poète errant qui incarne le destin de l'homme, du poète et du Juif. En 1936 paraît La conscience malheureuse, son premier livre philosophique, contenant des essais consacrés à Ghestov, à Kierkegaard, à Husserl, à Heidegger... Le théâtre a toujours passionné Fondane qui écrit plusieurs pièces : poèmes dramatiques, drames métaphysiques (Le festin de Balthazar, Philoctète). Il collabore aux Cahiers du Sud où il tient la rubrique de la "Philosophie vivante".

Ayant obtenu la nationalité française en 1938, Fondane est mobilisé en 1940. Fait prisonnier, il s'évade . repris, il est libéré pour raisons de santé. Il passe l'hiver 1942 à écrire Baudelaire et l'expérience du gouffre. En même temps il met en chantier L'Être et la connaissance, essais sur Lévy-Bruhl, Ghestov et Lupasco. Son dernier essai Le lundi existentiel et le dimanche de l'histoire constitue un testament philosophique. Il y expose sa philosophie de la liberté, du possible, éclatante victoire sur l'Histoire conçue comme nécessité.

Il est arrêté en mars 1944. Interné à Drancy, il est déporté à Auschwitz où il est assassiné dans une chambre à gaz le 2 (ou le 3) octobre 1944.

Une plaque a été apposée à Paris, au 6 rue Rollin, son domicile entre le 15 avril 1932 et le 7 mars 1944.

Le nom de Benjamin Vecsler est inscrit au Mémorial de la Shoah.

 

Sources : Jutrin (Monique), dans : Célébrations nationales 1998, Paris, Direction des Archives de France, 1998 - www.fondane.org

 

Éléments de bibliographie :
Rimbaud le voyou (1933) , Le lundi existentiel, Baudelaire et l'expérience du gouffre, Le Mal des fantômes, Le Voyageur n'a pas fini de voyager, Faux-traité d'esthétique, Essai sur Lupasco.

Guy Môquet

1924-1941

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Portrait de Guy Môquet. Source : SHD

Guy Môquet naît à Paris le 26 avril 1924. Étudiant au lycée Carnot, il se passionne très tôt pour la politique et choisi, dès l'arrestation de son père, le syndicaliste cheminot et député communiste Prosper Môquet, de suivre ses traces.

 

 

Prosper Môquet

 
Prosper Môquet, le père de Guy, était cheminot et député communiste, élu en 1936 dans le XVIIe arrondissement de Paris.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Fonds de la famille Môquet-Saffray

Ancien combattant de la Grande Guerre, Prosper Môquet (1897-1986) entre à la SNCF où il milite activement à la fédération unitaire des cheminots. Membre du PCF depuis 1926, il est élu député en 1936. Malgré la dissolution du PCF en 1939, il continue à suivre la ligne du Parti et ne dénonce pas le Pacte germano-soviétique, signé le 23 août 1939. Il participe à la constitution du Groupe ouvrier et paysan français. Arrêté avec 43 autres députés de ce groupe, en octobre 1939, il est déchu de son mandat, en janvier 1940, puis, comme ses camarades, condamné, en avril, à cinq ans de prison. Il est ensuite déporté, en mars 1941, avec d'autres députés communistes, au bagne de Maison-Carrée en Algérie. Libéré en février 1943 après l'arrivée du général De Gaulle à Alger, Prosper Môquet occupera d'autres postes de député après la guerre.

 

Après l'arrestation de Prosper, Guy, sa mère Juliette et son petit frère Serge s'étaient réfugiés à Bréhal, dans la Manche. Il revient à Paris, seul, et milite avec ferveur au sein des jeunesses communistes réorganisées clandestinement. Il distribue des tracts et colle des papillons proclamant la politique du Parti, y compris après l'entrée des Allemands dans Paris, le 14 juin 1940, et la proclamation de l'État Français, le 10 juillet suivant.

 

Guy Môquet et son frère Serge

 

Guy Môquet et son frère Serge à vélo, rue Baron dans le XVIIe arrondissement de Paris, en juillet 1939.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Fonds de la famille Môquet-Saffray

 

Dans le même temps, il entretient une correspondance avec son père dont il s'efforce d'obtenir la libération. En novembre, il adresse ainsi à Édouard Herriot, président de l'assemblée nationale, un long poème en alexandrins dont voici un extrait :

"Je suis jeune Français, et j'aime ma patrie

J'ai un coeur de Français, qui demande et supplie

Qu'on lui rende son père, lui qui a combattu

Pour notre belle France avec tant de vertu".

Le 13 octobre 1940, Guy Môquet, alors âgé de 16 ans, est arrêté Gare de l'Est par des policiers français qui recherchent les militants communistes. On l'interroge. On veut lui faire livrer les amis de son père.

Incarcéré à la prison de Fresnes, le jeune militant est inculpé, sous le même chef d'accusation que son père, "d'infraction au décret du 26 septembre 1939, portant dissolution des organisations communistes". Le 23 janvier 1941, il est acquitté par la 15e chambre correctionnelle de Paris, et doit être mis en liberté surveillée.

L'intérieur de camp de Choisel en juillet 1941. Source : Amicale de Châteaubriand - Vosves-Rouillé

 

Guy Môquet n'est pourtant pas relâché. Au contraire, il est transféré à la prison de la Santé, à Paris, le 10 février suivant. L'adolescent s'impatiente, écrit au procureur mais rien n'y fait. Il est transféré à la prison de Clairvaux, dans l'Aube, puis au camp de Choisel à Châteaubriant, en Loire-Inférieure (Loire-Atlantique actuelle), où sont détenus d'autres militants communistes généralement arrêtés entre l'automne 1939 et 1940.

Arrivé le 16 mai 1941, il est à la baraque 10, la baraque des jeunes où il lie de nombreuses amitiés. Le 20 octobre 1941, trois résistants communistes, Marcel Bourdarias, Gilbert Brustlein et Spartaco Guisco, abattent, à Nantes, le Feldkommandant Karl Hotz, commandant des troupes d'occupation de la Loire-inférieure. En guise de représailles, l'Occupant décide de fusiller 50 otages.

Lettre du sous-préfet de Châteaubriant dénonçant aux autorités allemandes les détenus communistes. Source : SHD

 

Le ministre de l'Intérieur du gouvernement de Vichy, Pierre Pucheu, propose une liste comprenant essentiellement des communistes dont 27 prisonniers du camp de Choisel, parmi lesquels, Charles Michels, secrétaire général des industries cuirs et peaux CGT, Jean-Pierre Timbaud, dirigeant de la métallurgie CGT et Guy Môquet, fils de député communiste. Parallèlement, vingt et une autres personnes sont fusillées à Nantes et à Paris.

La dernière photo de Charles Michels. À ses côtés, René Sentuc. Source : SHD

 

Jean-Pierre Timbaud. Source : SHD

 

Guy Môquet va mourir. Quelques minutes avant d'être conduit sur le lieu d'exécution, alors rassemblés avec ses camarades dans la baraque 6, il écrit une dernière lettre à sa famille, cette fameuse lettre qui commence par, "Je vais mourir !", et se termine par, "Je vous embrasse de tout mon coeur d'enfant".

Enfin, il griffonne un dernier petit mot pour une jeune communiste, Odette Leclan (aujourd'hui Odette Nilès), militante de l'Union des jeunes filles de France. Il a fait sa connaissance un mois plus tôt alors qu'elle vient d'être internée au camp de Choisel et multiplie les contacts à travers une palissade de bois surmontée d'un grillage, qui sépare le secteur des garçons et celui des filles. Tombés rapidement amoureux, le jeune Guy regrette, dans ses dernières lignes, le baiser qu'elle lui avait promis.

Dernière lettre de Guy Môquet adressée à sa famille et écrite au camp de Châteaubriant, le jour de son exécution. 22 octobre 1941.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Fonds de la famille Môquet-Saffray

 

Billet de Guy Môquet adressé à Odette Leclan, internée au camp de Choisel. 22 octobre 1941.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Donation Odette Niles

Ce 22 octobre 1941, les vingt-sept otages sont fusillés, en trois groupes, dans la carrière de la Sablière, à la sortie de Châteaubriant. Ils avaient refusé qu'on leur bande les yeux et, dans leur dernier souffle, crièrent "Vive la France".

Le lendemain, les Allemands dispersent dans plusieurs cimetières des environs les corps de ceux que le général de Gaulle qualifie, dès le 25 octobre suivant, dans un discours à la radio, de "martyrs" : "En fusillant nos martyrs, l'ennemi a cru qu'il fallait faire peur à la France. La France va lui montrer qu'elle n'a pas peur de lui."

Le 22 octobre 1944, premier anniversaire de la fusillade après la Libération.
Le parti communiste français organise la première cérémonie du souvenir à laquelle assiste l'ensemble des forces de la Résistance. Source : SHD

 

Le corps de Guy Môquet est par la suite transporté au cimetière parisien du Père Lachaise (carré 97) pour être inhumé aux côtés de son frère et de sa mère. A titre posthume, Guy Môquet est chevalier de la Légion d'honneur et est titulaire de la Croix de Guerre et de la Médaille de la Résistance.

Le 22 octobre 1963, commémoration en honneur des victimes de Châteaubriant. Source : SHD

 

Le 22 octobre 1963, commémoration en honneur des victimes de Châteaubriant. Source : SHD