Mustapha Kemal Atatürk

1881-1938

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Mustapha Kemal Atatürk Source : Licence Creative Commons. Photo libre de droit.

Mustapha Kemal est né à Salonique, en Macédoine, le 19 mai 1881.

Après des études à l'École de guerre et à l'Académie militaire d'Istanbul, capitaine d'état-major en 1905, il est affecté à Damas, en Syrie, où il sert au sein de la 5e armée en lutte contre les Druzes. Dans le même temps, il forme un petit groupe d'opposition, Vatan ve Hürriyet (Patrie et Liberté). À l'automne 1907, il est nommé à l'état-major de la 3e armée, à Salonique, où il côtoie le Comité Union et Progrès et les Jeunes-Turc, opposants au régime qui obtiennent le rétablissement de la Constitution de 1876. En avril 1909, il est chef d'état-major du général Mahmoud Chevket, commandant de l'armée mise en place par des officiers constitutionnalistes pour combattre le soulèvement, à Istanbul, des défenseurs de l'absolutisme.

Il s'illustre en décembre 1911 en Libye, durant la guerre italo-turque, en remportant la bataille de Tobrouk avant de prendre le commandement militaire de Derna, en mars de l'année suivante. Cependant, le Monténégro ayant déclaré la guerre à la Turquie en octobre, il rentre afin de participer à la première guerre balkanique qui oppose la Turquie au Monténégro, à la Serbie, à la Bulgarie et à la Grèce. Chef d'état-major à Gallipoli, il repousse les offensives bulgares. Il devient attaché militaire à Sofia en 1913.

En novembre 1914, la Turquie entre en guerre aux côtés de l'Allemagne. Lieutenant-colonel, Mustapha Kemal est chargé de former la 19e division d'infanterie et se distingue lors de la contre-offensive germano-turque visant à faire échouer le débarquement franco-anglais dans le détroit des Dardanelles. Repoussant les assauts alliés, il remporte une victoire majeure sur le front d'Anafarta, en août 1915. Promu général, il prend, en 1916, le commandement du 16e corps d'armée dans le Caucase puis celui de la 2e armée à Diyarbakir. Affrontant les troupes russes, il reprend Mus et Bitlis. Rappelé en Syrie, où il sert sous les ordres du général allemand Erich von Falkenhayn, il prend le commandement de la 7e armée. De retour à Istanbul à l'automne 1917, il accompagne à la fin de l'année le prince héritier Vahidettin dans un voyage officiel en Allemagne. Il rejoint à nouveau la Syrie en août 1918 où il reprend le commandement de la 7e armée contre les Britanniques jusqu'à la signature de l'armistice de Moudros, le 30 octobre 1918.

Après l'armistice, opposé à l'occupation et au démembrement de la Turquie, il organise la résistance nationale.

Nommé inspecteur général des armées du Nord et du Nord-Est en mai 1919, il est chargé d'assurer la sécurité de la région de Samsun, où populations turques, grecques et arméniennes s'affrontent, et lance ses forces contre les troupes grecques débarquées à Smyrne.

En désaccord avec la politique du sultan, il appelle, de la ville d'Amasya, le 22 juin 1919, à la création d'une représentation nationale indépendante puis convoque les congrès d'Erzurum et de Sivas en juillet et en septembre. Enfin, la réunion de la Grande Assemblée nationale à Ankara, le 23 avril 1920, aboutit à la formation d'un gouvernement national à la tête duquel Mustapha Kemal, président de l'Assemblée, est élu.

Obtenant le retrait de la France en Cilicie et la restitution par l'Arménie des régions occupées, il parvient en outre à repousser les Grecs d'Anatolie, menant et remportant notamment la bataille de Doumlupinar (30 août 1922), et signe avec eux, le 11 octobre 1922, l'armistice de Moudanya.

Entre-temps, le sultan a accepté, le 10 août 1920, le traité de Sèvres qui réduit considérablement l'Empire turc. Mustapha Kemal parvient à obtenir des Alliés sa révision. Le 24 juillet 1923, le traité de Lausanne met un terme aux revendications arméniennes et grecques et reconnaît la souveraineté turque sur tout le territoire national.

Cette étape franchie, il s'emploie, par de profondes réformes politiques, économiques et sociales, à faire de la Turquie un pays moderne. Le sultanat est abolit (1er novembre 1922) et la République proclamée (29 octobre 1923). Élu président, il installe la capitale à Ankara, inscrit la laïcité dans la Constitution et engage son pays dans la voie du développement économique. Conformément à la loi de 1934 imposant aux citoyens turcs de prendre un nom de famille, il prend celui d'Atatürk, "Père de tous les Turcs".

Il décède le 10 novembre 1938 à Istanbul.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Charles Nungesser

1892-1927

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Charles Nungesser. ©SHD/Air

 

En mai 1927, L’oiseau blanc, l’avion de Charles Nungesser et de François Coli, disparaît au-dessus de l’Atlantique. Cet accident met un terme à la vie d’un des "as des as" de la Grande Guerre.

Charles Nungesser naît à Paris le 15 mars 1892. Dès son enfance, il fait preuve d’un caractère audacieux qui l’amène à se passionner pour la mécanique et le pilotage de voitures de course et d’avions.

En 1907, après l’école des Arts et Métiers, Charles Nungesser entreprend un voyage en Amérique du Sud. Employé comme mécanicien à Buenos Aires chez un importateur de moteurs, il prend part en 1909 à l’un des
premiers raids automobiles de la Cordillère des Andes. Il s’introduit dans le monde de l’aviation et ses talents de pilote se révèlent à l’occasion d’un meeting aérien et de nombreux vols au-dessus de l’Uruguay et de l’Argentine.

Quand éclate la Grande Guerre, Nungesser regagne la France et est incorporé dans un régiment de cavalerie. Il participe à la bataille des frontières mais se retrouve encerclé. Il parvient à regagner les lignes françaises le 3 septembre 1914 après avoir intercepté une voiture d’état-major allemande, tué les quatre officiers qui l’occupaient et traversé à vive allure, au volant du véhicule, toute la région occupée par les Allemands. Cette action d’éclat lui vaut la Médaille militaire.

Mais Nungesser, qui rêve d’aviation, demande à y être incorporé. Le 22 janvier 1915, il commence une formation et obtient  le 8  avril son brevet de pilote. Affecté à l’escadrille de bombardement 106, basée à Saint-Pol, près de Dunkerque, il effectue le 11 avril sa première mission au-dessus de la Flandre occupée à bord d’un Voisin 3.

Le 26, Nungesser engage son premier duel aérien contre un Albatros allemand. À quatre reprises, le Voisin est touché, mais l’avion est ramené à bon port. Une citation vient couronner ces premiers exploits.

Nommé adjudant le 5 juillet, Nungesser se rend à Nancy avec son escadre. Il abat son premier avion ennemi dans la nuit du 30 au 31 juillet.

Blessé, il regagne le front pour reprendre ses missions

Après un stage de perfectionnement pour des missions de chasse, Charles Nungesser rejoint en novembre l’escadrille de chasse N65 de Nancy. C’est à cette époque qu’il fait peindre sur la carlingue de son Nieuport, un blason qui va devenir légendaire : un cœur noir frappé de la tête de mort et des tibias croisés argent, au-dessus d’un cercueil flanqué de flambeaux allumés.

Au cours de la bataille de la Somme, en septembre 1916, Nungesser réussit l’exploit d’abattre trois appareils ennemis le même jour. En décembre, il remporte sa vingtième victoire, ce qui lui vaut une citation à l’ordre de l’armée et la Military Cross.

Blessé, réformé, il obtient cependant l’autorisation de continuer à voler et abat deux avions ennemis le 1er mai 1917. Le 16 août, il remporte sa trentième victoire. Pourtant, conséquence de ses blessures, sa santé se dégrade d’autant qu’il est grièvement blessé dans un accident de voiture dans lequel Pochon,
son mécanicien, est tué. Malgré tout, le lieutenant Nungesser est de retour sur le front en décembre.

Quand, le 5 juin 1918, il abat son trente-sixième avion, il reçoit, outre une nouvelle citation, la Légion d’honneur et déclare : "Après ça, on peut mourir !".

Après un nouveau séjour à l’hôpital, Nungesser revient sur le front le 14 août.

Le 15, il remporte sa quarante-cinquième et dernière victoire.

La guerre finie, Charles Nungesser accepte de créer une école de pilotage qui s’installe à Orly. Cependant, ce grand sportif, amateur de défis et d’exploits, réfléchit à un projet de traversée de l’Atlantique en avion.

Le 8 mai 1927, L’oiseau blanc, l’avion de Nungesser et de Coli, un camarade de guerre, décolle du Bourget en direction du continent américain. On ne le reverra jamais.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Paul Nizan

1905-1940

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Portrait de Paul Nizan. Source : bibliothèque des lettres de l'ENS - Fonds photographique
© ENS - droits réservés

 

J'avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c'est le plus bel âge de la vie. Ces mots sont écrits par un jeune homme de 26 ans nommé Paul Nizan. Ils inaugurent son premier livre publié en 1931 "Aden Arabie", un pamphlet résolument provocateur contre le colonialisme, qui donne le ton de l'œuvre à venir : à vif, polémique et activement désespéré. Sur les cimes de la révolte et le fil rouge du communisme, Paul Nizan n'a de cesse, tout au long de sa trop brève carrière, de pourfendre l'ordre établi, débusquer les travers de la société bourgeoise et guetter les signes précurseurs de l'Histoire.

Né le 7 février 1905 à Tours, ce fils de petite bourgeoisie et "d'ouvrier devenu bourgeois", intègre, à dix-neuf ans, l'Ecole Normale Supérieure. Ses condisciples de promotion en 1924 ont pour nom Raymond Aron et Jean-Paul Sartre. A la lecture d'"Aden Arabie", Sartre, l'ami inséparable avec lequel on le confond toujours (question de strabisme divergent chez l'un, convergent chez l'autre), le revoit à l'époque "absorbé dans la contemplation de ses ongles et lâchant ses violences avec une sournoise et trompeuse sérénité". Mais cette froideur apparente, cette vitrine brillante de dandy charmeur dont les costumes lilas et les formules lapidaires du genre "Morale, c'est trou de balles" font courir un frisson d'excitation dans les rangs des Normaliens, dissimule mal une blessure secrète.

Ma seule originalité est de traverser périodiquement des phases de dépression, confie-t-il en badinant à celle qui deviendra sa femme, Henriette Alphen. "Je ne suis pas joyeux, je ne suis pas désespéré, mais j'affirme au rôti que la vie n'a aucun sens, et au dessert que personne n'aura lieu de s'étonner si j'entre un jour dans les ordres réguliers." Nizan s'enfonce ainsi des jours entiers dans un mutisme total, quand il ne fugue pas subitement pour resurgir hagard quelques nuits plus tard, cherche sa voie entre l'extrême droite et le communisme, se découvre une passion pour le cinéma. Rongé par un mal de vivre qui ne lui laisse aucun répit, obsédé par la mort, dégoûté de "l'exercice officiel de la philosophie", il part pour Aden, au Yémen, comme précepteur dans une famille anglaise. Aden "ce comprimé d'Europe" sera l'occasion de sa prise de conscience politique. Il en revient un an après et opte pour le marxisme, seule solution concrète à sa révolte. Fin 1927, il adhère au parti communiste français. Il a presque 23 ans, une femme, bientôt deux enfants et l'agrégation de philosophie.

Militant fervent, il est candidat du Parti aux élections législatives de 1932 à Bourg-en-Bresse, où il enseigne un an la philosophie. Il choisit ensuite la littérature et le journalisme et devient tour à tour rédacteur en chef de la revue d'avant-garde "BIFUR" qui révèle Michaux, Sartre et Joyce, chroniqueur littéraire à l'Humanité (1935) où il soutient Céline, Breton et Lacan, et chargé de politique étrangère à "Ce Soir" dirigé alors par Aragon. De Moscou, où il séjourne pour préparer le Congrès International des Écrivains, à Brest, cadre de sanglantes émeutes en pleine montée du Front Populaire, en passant par l'Angleterre et l'Espagne quelques mois avant la guerre civile, il est toujours en première ligne. Grand reporter passionné, il n'en mène pas moins en parallèle sa carrière d'écrivain et publie presque coup sur coup des essais (Les Chiens de garde, Les Matérialistes de l'Antiquité) et des romans (Antoine Bloyé, Le Cheval de Troie), tous salués par la critique. En 1938, La Conspiration obtient le prix Interallié. Paradoxalement, seul le P.C.F. reste toujours réservé, sinon très critique de son œuvre littéraire tant il est vrai que ses écrits ne sont guère orthodoxes et ne s'intègrent pas dans l'étroite grille de lecture du PCF d'alors.

En 1939, son dernier ouvrage Chronique de Septembre démonte les mécanismes des négociations entre Hitler, Daladier, Chamberlain et Mussolini, qui aboutissent aux Accords de Munich et au démantèlement de la Tchécoslovaquie. Le pacte germano-soviétique entre Staline et Hitler le surprend en vacances à Ajaccio.

Il rentre aussitôt à Paris, impatient de connaître la position du Parti, qui approuve le pacte. Fidèle à lui-même et à ses convictions anti-fascistes, Nizan démissionne publiquement du PCF en septembre 1939.

Mobilisé, il continue de militer sur le front, discutant fougueusement sa position avec ses camarades.

Affecté à Lille comme interprète de l'armée anglaise, il est tué le 23 mai 1940 lors de l'attaque des Allemands sur Dunkerque. Il est inhumé dans la nécropole nationale La Targette, à Neuville-Saint-Vaast.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Pierre Clostermann

1921 - 2006

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Pierre Clostermann.
Source : Wikipedia - libre de droit

Héros de la France Libre

Auteur du livre à succès "Le Grand Cirque", Pierre Clostermann est décédé le mercredi 22 mars 2006 à Montesquieu-des-Albères. Il était âgé de 85 ans.

Né le 28 février 1921 à Curitiba (Brésil), fils de diplomate, Pierre Clostermann rejoint la France Libre en Angleterre le 18 mars 1942, et sert dans le groupe de chasse "Alsace".

Capitaine à la fin de la guerre, il totalise plus de 2000 heures de vol, près de 600 de vol de guerre, 33 victoires aériennes homologuées et 5 probables, ainsi que de nombreuses destructions matérielles : 225 camions, 72 locomotives, 5 tanks, 2 vedettes lance-torpilles.

Compagnon de la Libération le 21 janvier 1946, il commence une carrière politique. Il sera réélu 8 fois, notamment dans le Bas-Rhin : en 1951, il est élu député de la Marne, puis député de la Seine (1956-1958), député de Seine-et-Oise (1962-1967) et des Yvelines (1967-1969).

Promu commandant, Clostermann sert alors en Algérie où il gagne ses galons de lieutenant-colonel de l'Armée de l'Air (1956-1957). Il assure la vice-présidence de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées de l'Assemblée nationale entre 1963 et 1969.

En parallèle à sa carrière d'ingénieur, il entame une carrière d'auteur à succès, relatant notamment son expérience pendant la seconde guerre mondiale dans Le Grand Cirque, en 1948, ouvrage qui sera vendu à plus de 3 000 000.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Blaise Pagan

1604 - 1665

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Blaise François, comte de Pagan. Auteur : Jacques Lubin. Source : Wikimedia Commons - domaine public

(Saint-Rémy-en-Provence, 1604 - Paris, 1665)

 

Ingénieur militaire français, maître de Vauban, Blaise François Pagan, forme avec Errard de Bar-le-Duc et Antoine Deville la première école française dans l'art de la fortification. Il est l'auteur de l'Art de la fortification où il incorpore le bastion dans le tracé de la fortification.

Blaise François, comte de Pagan, est né à Saint-Rémy-en-Provence, près d'Avignon. Sa famille est d'origine napolitaine, une branche de la maison de Luynes. Il entre très tôt au service de Louis XIII en tant qu'ingénieur militaire. Il se distingue dès 1620 lors du siège de Caen, au combat des Ponts-de-Cé, participe aux sièges de Saint-Jean-d'Angély et de Clérac en 1621, ainsi qu'à la prise de Navarreins, et à celui de Montauban en 1622 où il perd son oeil gauche. En 1623, il officie comme ingénieur pendant le siège de Nancy. Il acquiert sa renommé au cours du siège de Suse en 1629 lorsqu'il franchit à la tête des troupes françaises les barricades qui entourent la ville. La Guerre de Trente ans le conduit à travailler avec Deville lors des sièges de Corbie, Landrecies et Hesdin. Il participe aux sièges de La Rochelle, sert en Italie, en Picardie et en Flandre.

Devenu aveugle en 1642, il est promu Maréchal de camp, abandonne sa carrière militaire et consacre sa retraite à l'étude des mathématiques, de l'histoire et de la géographie, de l'astronomie, et à l'art de la fortification.

Pagan rédige un traité, Le Traité des fortifications (1645), où il expose les principes de la fortification. En particulier : commencer le tracé d'une place par les saillants de bastions les plus exposés pour s'adapter le mieux au terrain, la construction d'ouvrages extérieurs à l'enceinte permettant un bon échelonnement de la défense en profondeur et retardant l'attaque du corps de place. Les flancs de bastions sont perpendiculaires à la ligne de défense pour obtenir un flanquement réciproque parfait. Il se distingue en ce sens de Deville pour qui les bastions ne sont que des ouvrages avancés ajoutés et isolés, reliés ultérieurement à la place. La défense est assurée par une forte artillerie : il prévoit jusqu'à trente canons par bastion, répartis sur trois niveaux. Les dehors comportent un chemin couvert avec une petite place d'armes sur la contrescarpe (principe de défense active). Il prévoit d'utiliser l'espace entre le couvre-faces et l'enceinte principale pour le campement de villageois alentours. Ses principes resteront théoriques, mais seront repris par Vauban dans son premier système de défense.

Il est aussi astronome et conçoit une théorie des planètes. Il présente ses travaux dans : Théorèmes des planètes (1657), les Tables astronomiques (1658) et l'Astrologie naturelle (1659). Le mathématicien compose les Théorèmes géométriques en 1651. Ses autres écrits se rencontrent dans la Relation de la rivière des Amazones (1658) et dans les oeuvres posthumes (1669).

 

Sources : Dictionnaire des architectes, Paris, Encyclopaedia Universalis-Albin Michel, 1999, p. 494 - André Corvisier, dir., Histoire militaire de la France, Paris, Presses universitaires de France, 1992, tome 1

Henri Giraud

1879-1949

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Portrait du général Giraud. 1934-1936. Source : ECPAD

(18 janvier 1879 : Paris - 11 mars 1949 : Dijon)

 

Issu d'une modeste famille alsacienne installée à Paris - son père était marchand de charbon - Henri Giraud, jeune homme au tempérament aventureux, suit de brillantes études classiques aux lycées Stanislas, Bossuet et Louis-le-Grand, et rejoint les rangs de l'armée française en 1900, à sa sortie de l'école militaire de Saint-Cyr.

Il est affecté au 4e Zouave, en Afrique du Nord, unité avec laquelle il est envoyé au front en 1914. Blessé, il est fait prisonnier le 30 août, à la bataille de Guise, lors de la contre-attaque du général Lanrezac contre la IIe armée allemande de von Bulow.

Il parvient à s'échapper avec la complicité du réseau du docteur Frère, à la fin du mois de septembre et rencontre l'attaché militaire français à La Haye qui l'évacue vers le Royaume-Uni d'où il embarque pour rejoindre la France. Il s'illustre à nouveau à l'automne 1917 lorsque le 3e bataillon du 4e Zouave reprend le fort de La Malmaison, au Chemin des Dames puis, lors des offensives programmées par Pétain après la crise du printemps 1917. Après la guerre, il rejoint les troupes du général Franchet d'Esperey à Constantinople, pour retourner au Maroc, à la demande de Lyautey, avec les galons de colonel, combattre les mouvements insurrectionnels berbères. Il contribue ainsi à la reddition d'Abd-el-Krim (27 mai 1926) pendant la guerre du Rif, fait d'arme qui lui vaut de recevoir la légion d'honneur.

Promu commandant militaire de la place de Metz, il rencontre les colonels Charles de Gaulle et Jean de Lattre de Tassigny. Général en 1936, commandant la 7e armée, membre du Conseil supérieur de la guerre, Giraud, qui ne croit pas à l'efficacité de l'arme blindée, désavoue la tactique préconisée par de Gaulle lorsqu'éclate la Seconde Guerre mondiale.

Le 10 mai 1940, ses unités, envoyées aux Pays-Bas, retardent l'avancée allemande, notamment à Breda le 13 mai. Il est fait prisonnier le 19 mai à Wassigny alors qu'il tente de s'opposer aux divisions de panzer dans les Ardennes avec la 9e armée française. Il est emprisonné en Silésie, au château de Koenigstein près de Dresdes. Le 17 avril 1942, Giraud s'en évade avec l'aide de fidèles, les généraux Mesny, Mast, Baurès, et des services secrets britanniques qui lui facilitent la fuite à partir de Schandau. Il gagne ensuite l'Alsace puis Vichy.

Son aventure, rapidement connue de tous et qu'il relate dans Mes évasions, irrite le gouvernement allemand qui souhaite son retour en prison mais il échappe à cette sanction en signant une lettre au maréchal Pétain exprimant sa volonté de ne pas s'opposer à son régime. Vivant en résidence surveillée, Giraud ne tarde pas à être contacté par les Alliés, désireux de tenir le général de Gaulle à l'écart de la préparation de l'opération Torch. Exfiltré en novembre 1942 via Gibraltar, il rencontre Eisenhower de qui il obtient de conserver le commandement des troupes françaises. Sur place, la situation dégénère en une guerre civile, les hommes de l'amiral Darlan refusant de reconnaître son autorité. L'assassinat de Darlan, le 24 décembre, mettra fin à ce conflit.

Giraud se pose alors comme son successeur, maintient les institutions ainsi que le statut d'exception des juifs et fait interner dans les camps sud sahariens quelques résistants qui avaient aidé au débarquement. Présent à la conférence de Casablanca, il est contraint de libérer ces résistants et de conférer à son gouvernement une teneur plus démocratique. Il entre ensuite au directoire du Comité français de Libération nationale (CFLN), le " duel Giraud-de Gaulle " est alors à son comble. Mais, rapidement débordé par les actions de ralliement au général de Gaulle, il doit céder la place. Son soutien indéfectible à Pierre Pucheu finit de le discréditer auprès de ses partisans. Cet ancien ministre de l'Intérieur de Pétain avait en effet gagné le Maroc pour servir les couleurs de la France Libre, mais sa démarche était considérée comme tardive pour quelqu'un accusé de collaboration avec l'ennemi et de participation à l'arrestation d'otages.

Le 13 septembre 1943, il envoie des troupes françaises soutenir les résistants corses par un débarquement sur l'île. C'est un succès militaire mais Giraud subit de nombreuses critiques du général de Gaulle pour avoir armé la résistance communiste corse, donnant une tonalité politique aux opérations de libération de l'Europe et fragilisant le travail d'unification de la résistance. Il perd définitivement son siège au CFLN. En avril 1944, Giraud organise la participation française à la campagne d'Italie mais, considéré comme trop impliqué dans le système répressif de Vichy, il est destitué de son poste de commandant en chef et amené à se retirer des instances militaires de la France Libre.

Il fera part de son expérience de ces années troubles dans son ouvrage : Un seul but : la Victoire, Alger, 1942-1944. Il survit à un attentat à Mostaganem le 28 août 1944. En 1946, Giraud se présente à la députation en Lorraine pour la seconde Assemblée nationale constituante sur la liste du parti républicain de la liberté et des indépendants agraires. Elu le 2 juin, il rallie le groupe des républicains indépendants et contribue à la création de la Quatrième République, en dépit de son refus de voter pour la constitution. Il participe aux débats sur la situation des prisonniers de guerre non rapatriés (25 juillet 1946) et sur la politique générale du gouvernement en Algérie (22 août 1946). Il siège au conseil supérieur de la guerre jusqu'en décembre 1948 et reçoit, le 10 mars 1949, la médaille militaire pour son évasion exceptionnelle.

Il décède le lendemain et est inhumé aux Invalides.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Raoul Monclar

1892-1964

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Portrait de Raoul Monclar. Source : Ordre de la Libération

(7 février 1892 : Budapest, Hongrie - 3 juin 1964 : Val-de-Grâce, Paris)

 

Soldat dans l'âme, Raoul Magrin-Vernerey racontait volontiers qu'à l'âge de sept ans il avait voulu quitter sa famille pour s'engager chez les Boers...

Fils d'une institutrice française en poste à Vienne, Anne Magrin, Raoul Charles est pris en affection par un comte hongrois qui veille à son éducation intellectuelle et morale. Evoluant dans le milieu cosmopolite de la société austro-hongroise, le jeune homme conservera une grande facilité d'adaptation tout au long de sa vie. De retour en France, il est élevé par sa grand-mère à Avison dans la Doubs. Après des études au lycée Victor Hugo à Besançon puis au petit séminaire d'Ornans, taraudé par son envie de porter l'uniforme, il s'enfuit de chez lui à quinze ans pour s'engager dans la Légion étrangère. Trop jeune pour une pareille aventure, il retourne à ses études pour enfin embrasser la carrière militaire le 10 octobre 1912 lorsqu'il intègre l'Ecole militaire spéciale de Saint-Cyr.

Diplômé en 1914, promotion Montmirail, il est propulsé dans la tourmente de la guerre au 60e régiment d'infanterie (RI) : la plaine d'Alsace, Morte-Fontaine (Oise), les combats de l'Ourcq, de l'Aisne, volontaire dans l'offensive d'Aumetzwiller (Moselle), la contre-attaque du bois d'Haumont (Bois des Caures), l'offensive de la Somme, Ypres, la butte de Tahure en pays rémois.

D'un héroïsme hors du commun, il est gazé, six fois blessé et onze fois cité, dont sept à l'ordre de l'armée. Réformé à 90%, il est promu capitaine le 24 juin 1916 au 260e RI, et reçoit la Légion d'Honneur.

La paix revenue, il est envoyé sur les théâtres d'opérations extérieures, à Odessa (1919), en Syrie-Palestine (1920) où sa bravoure lui vaut une nouvelle citation et la croix d'officier de la Légion d'Honneur, en Algérie et au Maroc puis au Tonkin au sein du 5e régiment étranger d'infanterie. Ces missions lui permettent de réaliser son rêve : rejoindre la Légion étrangère, et ce dès 1924.

Le 23 février 1940, il quitte le commandement du 4e REI au Maroc pour prendre la direction de deux bataillons de marche de la 13e demi-brigade de la Légion étrangère, contingent de l'expédition de Norvège. Le 5 mai il débarque à Ballangen, enlève Bjervik et Narvik, libère 60 prisonniers alliés et capture 590 Allemands. L'expédition tourne court et Magrin-Vernerey rejoint Brest le 15 juin. A l'annonce de l'armistice, avec le capitaine Koenig et 500 compagnons, il quitte la France pour aller se placer sous l'autorité du général de Gaulle. Promu colonel, il devient Monclar (nom d'une localité du Tarn-et-Garonne, berceau de sa famille) pour la France Libre. En décembre 1940, sa 13e demi-brigade entame son périple africain : Dakar, Freetown, le Cameroun où il rédige un petit traité sur sa conception du combat, Catéchisme du combat. Elle débarque au Soudan anglo-égyptien, prend part à la campagne d'Erythrée aux côtés du bataillon Garbay, enlevant la capitale, Massaouah, et capturant l'amiral et le général commandants en chef des forces italiennes. En Syrie (juin 1941) cependant, de même qu'il a refusé de participer à la campagne de ralliement du Gabon, il ne veut pas s'engager, ne pouvant supporter l'idée d'une lutte fratricide dans l'armée française. Nommé général de brigade en 1941, il exerce divers commandements en Grande Bretagne puis au Levant. Il est fait Compagnon de la libération.

Après diverses missions en Algérie, au Pakistan, en Indochine, il est nommé inspecteur de la Légion étrangère le 25 juin 1948.

Général de corps d'armée le 20 février 1950, bientôt atteint par la limite d'âge, Monclar reprend fictivement ses galons de lieutenant-colonel le 19 octobre et se porte volontaire pour prendre la tête du bataillon français de Corée qu'il dirige jusqu'en 1951 contre les troupes communistes en Corée du Nord.

Retiré à Neuilly, le 21 octobre 1962, légende militaire vivante auréolé de dix-sept décorations nationales et de vingt-et-une internationales, il succède au général Kienst au rang de Gouverneur des Invalides.

Il occupe cette charge jusqu'à sa mort en 1964.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Sir Winston Leonard Spencer Churchill

1874-1965

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Winston Churchill faisant le célèbre signe "V" signifiant " Victoire ", le 5 juin 1943. Source : Imperial War Museum Collections. Libre de droit

Blenheim, le 30 novembre 1874 - Londres, le 24 janvier 1965

 

Winston Churchill est un homme politique britannique descendant d'une des plus grandes familles de l'aristocratie anglaise, celle des ducs de Marlborough.

Né le 30 novembre 1874, Winston Churchill suit une scolarité assez médiocre avant d'être admis au concours de l'école militaire de Sandhurst en 1893. Il en sort 20e sur 130 en 1896.

Il combat à Cuba contre les Espagnols, en Inde, au Soudan où il s'engage en 1898 aux cotés du général Kitchener. En 1899, lors de la seconde guerre des Boers en Afrique du Sud, il est fait prisonnier mais parvient à s'échapper, épisode rocambolesque qui est salué par la presse nationale et internationale. Dès lors, mi-officier, mi-journaliste, il rédige des articles très vivants et expressifs qui sont appréciés et lui ouvrent en 1900 les portes de la Chambre des communes.

Élu du parti conservateur au Parlement en 1900, il le quitte pour rejoindre les Libéraux en 1904 avec lesquels il commence une brillante carrière politique : il est nommé sous-secrétaire d'État aux colonies en 1905, ministre du commerce en 1908 et ministre de l'Intérieur en 1910.

En 1908, il rencontre et épouse Clémentine Hozier avec laquelle il aura cinq enfants.

En 1911, à trente-sept ans, il devient Premier lord de l'Amirauté (ministre de la Marine). Il est toujours à ce poste lorsqu'éclate la Première Guerre mondiale.

En 1915, il prépare une expédition navale franco-britannique contre la Turquie, alliée de l'Allemagne, pour occuper le détroit des Dardanelles et rétablir des communications avec la Russie. Mais le débarquement de Gallipoli, au printemps 1915, est un véritable désastre qui lui vaut son départ du gouvernement et manque de briser définitivement sa carrière. Il sert alors brièvement sur le front français, en tant que commandant du 6e Bataillon du Royal Scots Fusiliers, mais Lloyd George le rappelle de nouveau au gouvernement et lui confie le portefeuille de l'Armement (1917), puis ceux de la Guerre et de l'Air (1918-1921).

À la suite de suite de l'échec du parti libéral, en 1922, Churchill perd son siège de député. Il réintègre alors le parti conservateur, qui l'accueille sans rancune en 1924 au poste de chancelier de l'Échiquier (ministre chargé des finances et du trésor).

Dans les années 30, il multiplie en vain les avertissements face à la menace de l'Allemagne hitlérienne.

Ainsi, lorsque Chamberlain signe les Accords de Munich en 1938, il lui déclare : " Vous aviez à choisir entre la guerre et le déshonneur . vous avez choisi le déshonneur et vous aurez la guerre ".

En septembre 1939, Churchill est de nouveau nommé Premier Lord de l'Amirauté. Après la démission de Neville Chamberlain, le 10 mai 1940, il devient Premier ministre du Royaume-Uni. Il se révèle alors un véritable chef de guerre, fermement décidé à conduire son pays à la victoire, et proclame lors de son discours d'investiture devant la Chambre des communes qui annonce les jours sombres de la bataille d'Angleterre : "Je n'ai rien d'autre à offrir que du sang, du labeur, de la sueur et des larmes".

À 66 ans, Churchill parvient donc pour la première fois au sommet du pouvoir, et il y demeurera jusqu'à la fin du conflit. Son rôle est crucial pour soutenir le moral des Anglais. L'homme aux discours incisifs, au cigare et au V de la victoire devint le symbole de la résistance anglaise au nazisme. Il organise l'évacuation de la poche de Dunkerque, autorise de Gaulle à lancer son fameux appel du 18 juin, exalte la ténacité du peuple britannique durant la bataille d'Angleterre et le blitz ("Jamais dans l'histoire des guerres un si grand nombre d'hommes ont dû autant à un si petit nombre", Discours aux Communes, le 20 août 1940), et fait de la victoire une nécessité non négociable.

Adepte depuis toujours d'une coopération avec la France, même si ses relations avec le chef de la France Libre seront souvent tumultueuses malgré un respect mutuel des deux hommes, il n'hésite cependant pas à faire couler la flotte de cette dernière à Mers el-Kébir pour éviter avant tout qu'elle ne tombe aux mains de l'Axe. De même, fervent anti-communiste, il tend la main à Staline lorsque l'URSS est attaquée par l'Allemagne le 22 juin 1941 mais signe parallèlement avec Roosevelt la charte de l'Atlantique en août 1941.

Toute sa politique est orientée vers un seul objectif : résister au nazisme et battre Hitler, ce qui en fait sans conteste un des principaux artisans de la victoire alliée.

À la fin de la guerre, Churchill tente d'amener Roosevelt à une attitude plus ferme envers l'URSS, mais il ne peut empêcher, à la conférence de Yalta (Ukraine), le partage de l'Europe entre Soviétiques et Américains.

 

En 1945, le parti travailliste l'emporte aux élections. Churchill devient alors chef de l'opposition conservatrice, dénonçant dès 1946 le rideau de fer et insistant sur l'importance du Commonwealth et des relations privilégiées avec les États-Unis.

De retour au poste de Premier ministre en 1951, il cède sa place à Anthony Eden en avril 1955 et consacre les dernières années de sa vie à la peinture et à la littérature.

Prix Nobel de littérature en 1953, Sir Winston Churchill est l'auteur de nombreux ouvrages dont Mémoires de guerre (1948-1954), précieux témoignage sur son extraordinaire ténacité dans une des périodes les plus sombres de la Grande-Bretagne et du monde libre.

Il s'éteint le 24 janvier 1965 d'une congestion cérébrale à Londres, à l'âge de quatre-vingt-dix ans.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Georges Catroux

1877-1969

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Portrait du général Catroux : Source SHD

(29 janvier 1877 : Limoges - 21 décembre 1969 : Paris)

 

Fils d'un militaire qui s'est illustré pendant les campagnes du Second Empire en Afrique du Nord et en Asie et d'une mère génoise, Georges Catroux hérite du sens du service et du goût pour les contrées lointaines. Après avoir fréquenté les écoles de Limoges, Angers et Rennes au gré des garnisons de son père, il entre au Prytanée national militaire de La Flèche puis à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr en 1896, promotion "randes manoeuvres" et choisit à sa sortie le corps des Chasseurs à pied (Grenoble).

Jeune lieutenant à la Légion étrangère en 1900, il est envoyé en mission de pacification dans le Sahara. Trois ans plus tard, il est en Indochine pour seconder le gouverneur général Paul Beau, avant de repartir en Afrique du Nord, en Algérie d'abord où il rencontre Lyautey (il écrira quelques années plus tard un Lyautey le Marocain), puis au Maroc où, jusqu'en 1911, il accomplit les opérations préparatoires d'occupation du territoire, avant de revenir à Alger auprès du gouverneur général Lutaud.

Au début de la Première Guerre mondiale, il commande le 2e régiment de tirailleurs algériens. Blessé près d'Arras en octobre 1915, il est fait prisonnier et rencontre Charles de Gaulle au Fort IX d'Ingolstadt.

Membre de la mission militaire française en Arabie en 1919-1920, il est ensuite nommé gouverneur de l'Etat de Damas où il pose les bases de l'administration et de la gouvernance de la Syrie, avant d'exercer les fonctions d'attaché militaire à Constantinople - il fera part de son expérience levantine dans Deux missions au Moyen-Orient, 1919-1922. Lyautey le rappelle au Maroc, de juin à octobre 1925, lors de la guerre du Rif. Nommé auprès d'Henri de Jouvenel, Haut commissaire au Levant, Catroux défend la thèse de l'indépendance de la Syrie et du Liban. Ne trouvant pas d'écho favorable, il demande à être relevé de ses fonctions et retourne dans le désert, en 1927, pour diriger le 6e régiment de tirailleurs algériens à Tlemcen. Colonel puis général, il commande à Marrakech, de 1931 à1934, à Mulhouse ensuite, puis le 19e corps d'armée à Alger de 1936 à 1939.

À la déclaration de guerre en septembre 1939, Catroux est gouverneur général d'Indochine depuis trois mois : passé au cadre de réserve, il a été rappelé par Mandel le 21 août pour occuper cette fonction. A l'armistice il doit composer avec un gouvernement qui refuse la présence de troupes étrangères sur ce territoire et encourage les relations avec la Chine et les Japonais, pressés de s'installer sur le continent pour en découdre avec Pékin. Le gouvernement de Vichy le révoque le 26 juillet 1940. Il refuse alors de revenir en France et choisit de rallier la France Libre via Singapour et Le Caire. Arrivé à Londres le 17 septembre 1940, il reçoit du général de Gaulle la mission de préparer le ralliement des Etats du Levant en qualité de représentant de la France Libre dans cette région. Membre du Conseil de Défense de l'Empire, commandant en chef et délégué général de la France Libre au Moyen Orient, en juin 1941, il proclame l'indépendance de la Syrie et du Liban. Il est nommé Haut-commissaire de la France Libre au Levant le 19 juillet par décret du général Wilson, commandant en chef des troupes britanniques dans cette zone. Il participe aux pourparlers succédant au débarquement en Afrique du Nord et, nommé commandant des forces françaises le 25 novembre 1942, il s'attèle à réunir sous son autorité les territoires d'outre-mer, tout en jouant un rôle d'intermédiaire entre de Gaulle et Giraud. Commissaire d'Etat au Comité français de Libération nationale en 1943, il est chargé au mois de mai de la coordination des affaires musulmanes et rédige l'ordonnance du 7 mars 1944 qui accorde la nationalité française à certaines catégories de musulmans et la possibilité de l'obtenir pour d'autres. Gouverneur général de l'Algérie en juin 1944, Compagnon de la Libération, il est nommé ministre d'Etat chargé de l'Afrique du Nord du Gouvernement provisoire de la République française le 9 septembre suivant.

Ambassadeur de France en Union soviétique de 1945 à 1948, expérience dont il fera le sujet de J'ai vu tomber le rideau de fer, il sert comme conseiller diplomatique auprès du gouvernement à son retour, puis est élevé à la dignité de Grand Chancelier de la Légion d'honneur en 1954. Alors qu'une commission est chargée de rechercher les responsabilités dans la défaite de Dien Bien Phu, il s'exprimera sur cette guerre dans Deux actes du drame indochinois. En 1955, désigné pour résoudre les troubles au Maroc, il joue un rôle prépondérant dans les négociations pour le retour du sultan Mohammed V, exilé à Madagascar. L'année suivante il exerce les fonctions de ministre résident en Algérie mais démissionne en raison des manifestations hostiles aux Européens. En 1961, Catroux est membre du tribunal militaire chargé de juger les généraux putschistes (Challe, Zeller) et leurs complices.

Placé hors des cadres d'active en 1969, Compagnon de la Libération, Georges Catroux décède le 21 décembre, à l'hôpital du Val-de-grâce. Il est inhumé au cimetière de Thiais (Val-de-Marne).

 
Source : MINDEF/SGA/DMPA

Edmond Marin la Meslée

1912-1945

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Le commandant Marin la Meslée. Source : SHD

(5 février 1912 : Valenciennes - 4 février 1945 : Dessenheim)

 

Enfant du siècle de la conquête de l'air, le jeune Edmond hérite de son père, ingénieur des Arts et Métiers, la passion des avions. Ils construisent ensemble des planeurs et créent des aéro-clubs. Bachelier latin-sciences à l'âge de 16 ans, il se lance dans de brèves études de droit. Au bout de quelques semaines, il demande une bourse de pilotage et entre à l'école d'aviation Morane. Breveté pilote le 1er août 1931, il termine sa formation à Istres, le 20 avril 1932, et prépare le concours d'entrée à l'École des Officiers de Réserve. Sous-lieutenant le 20 septembre suivant, il se résigne à abandonner ses galons afin de contourner le règlement qui interdit de voler aux réservistes. Il s'engage alors avec le grade de sergent dans l'aviation de chasse, pour intégrer l'école de l'Air en 1936 et en sortir en octobre 1937 à nouveau sous-lieutenant avec le brevet d'observateur.

Il rejoint alors la 5e escadre aérienne à Reims et sert sous les ordres du capitaine Accard dans la première escadrille de chasse "Champagne", héritière de la prestigieuse Spa-67 de Navarre. Promu lieutenant au début de la Seconde Guerre mondiale, son groupe, équipé de Curtis H-75, hiverne sur le terrain de Suippes ponctuant la monotonie quotidienne par de longues missions d'alerte en altitude.

Le 11 janvier 1940 enfin, Marin la Meslée, " Marina " pour la radio, connaît l'ivresse des premiers combats. En patrouille avec le lieutenant Rey, les deux pilotes mettent un terme à la mission de reconnaissance d'un Dormier-17 dans le ciel de Verdun. Mais c'est au mois de mai, face à l'irrésistible machine de guerre allemande qu'il acquiert ses titres de gloire et entre dans la légende de l'aviation de chasse. Le 12, il abat deux Stukas Junkers-87 et le lendemain, des chasseurs Messerschmidt-109. Les semaines suivantes, c'est au tour d'un bombardier Heinkel, de deux Henschel-126 et d'un Heinkel-111 de plier sous ses tirs.

Le 1er juin, avec 16 appareils à son tableau de chasse, il est nommé chef d'escadrille Cigogne en remplacement du capitaine Accard, grièvement blessé. Au moment de l'armistice, il totalise 106 sorties, quinze victoires en France, cinq au-dessus de l'Allemagne et dix citations à l'Ordre de l'Armée. Le palmarès est sans égal.

En novembre 1942, l'escadrille basée en Afrique du Nord, aux ordres de Vichy, renoue avec son désir de reprendre la lutte. A la faveur du débarquement anglo-américain, les " Cigognes " volent pour la France Libre dans le ciel de Tunisie, même s'il ne s'agit que de simples missions de reconnaissance. Le lieutenant effectue 105 sorties à bord d'un " Airacobra P-39 " et remporte quatre victoires au large des côtes africaines. Commandant en juin 1944, il revient sur le terrain de Salon-en-Provence aux commandes d'un P-47 " Thunderbolt ", le 20 septembre, un mois après le débarquement de Provence. Son groupe est alors attaché à la 1re armée française.

 

Début 1945, les combats pour la reconquête de l'Alsace font rage. L'aviation alliée s'emploie à détruire les obstacles à l'avancée de l'infanterie, au moyen de périlleux piqués si nécessaire. Le 4 février, le commandant Edmond Marin la Meslée exécute un second passage au-dessus des lignes allemandes. Son appareil, touché par un tir de DCA, vient s'écraser et explose à deux kilomètre du village de Rustenhardt.

Ses ailes se sont définitivement repliées à l'aube de sa trente-troisième année :

"Pur visage de l'aviation de chasse, dont il était l'incarnation

il restera par ses vertus et par sa gloire,

une des figures les plus éclatantes de l'Armée de l'Air

et un des héros les plus nobles de la Nation"

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Antoine Béthouart

1889-1982

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Le général Béthouard, commandant le Corps Expéditionnaire Français à Narvik. Source : SHD

(17 décembre 1889 : Dôle, Jura - 17 octobre 1982 : Fréjus, Var)

 

Issu d'une famille picarde de Marquenterre, Antoine Béthouart prépare son baccalauréat à Sainte-Geneviève de Versailles et entre à Saint-Cyr en 1909, promotion " Fez ", où il y rencontre Alphonse Juin et Charles de Gaulle. Sous-lieutenant en octobre 1912, il est affecté dans les Vosges au 152e régiment d'infanterie et sert dans diverses unités avant de rejoindre le 158e RI au sein duquel il s'illustre pendant la Première Guerre mondiale en Alsace, à Verdun, dans la Somme, au Chemin des Dames et à l'assaut du Mont Kemel. Blessé à trois reprises, il décroche autant de citations et termine la guerre avec le grade de capitaine.

En 1919-1920, il est missionné auprès de l'armée finlandaise, à Viborg, avant d'être admis à l'Ecole de guerre et de servir, entre 1922 et 1924, à l'état-major du 12e corps d'armée et au 6e bataillon de chasseurs alpins. Chef de bataillon en mars 1928, il commande le 24e bataillon de chasseurs alpins à Villefranche. Nommé adjoint de l'attaché militaire français en Yougoslavie en 1931, puis, devenu lieutenant-colonel en 1934, il exerce pleinement cette fonction diplomatique jusqu'en 1938.

En septembre 1939, le colonel Béthouart, à la tête de la 5e demi-brigade de chasseurs alpins (Chambéry), garde la frontière des Alpes puis rejoint la ligne Maginot sur le secteur mosellan de Bitche. En février 1940, il forme la brigade de Haute-montagne en vue des opérations en Scandinavie. Le corps de troupe embarque le 12 avril. Son fondateur gagne alors ses étoiles de général de brigade. Après Bjervik, ses hommes enlèvent Narvik le 28 mai et repoussent à la frontière les bataillons allemands du général Dietl, un exploit qui lui vaudra d'être élevé à la dignité de commandeur de la Légion d'honneur. Le corps expéditionnaire français de Norvège est évacué pour partie vers le Royaume-Uni après l'armistice. Béthouart reste fidèle à son unité et suit ceux de ses hommes qui désirent revenir en France. Il est finalement rapatrié au Maroc où il assure successivement le commandement de la subdivision de Rabat, la présidence de la commission française d'armistice au Maroc, puis le commandement de la division de Casablanca en janvier 1942, position stratégique lorsqu'il organise l'aide aux Alliés pendant le débarquement de novembre. Il est mis aux arrêts par le résident général Noguès et traduit en cour martiale le 10 novembre, à Meknès, où il est condamné à mort. Libéré quelques jours plus tard, il est promu général de division et désigné par le général Giraud, en décembre 1942, comme chef de la Mission militaire à Washington pour négocier avec le gouvernement américain son aide matérielle à l'armée française. Chef d'état-major de la Défense nationale à Alger, il œuvre au rapprochement entre les FFL et l'armée d'Afrique, accompagne le général de Gaulle à Rome, Londres et Bayeux. Commandant du 1er corps d'armée en août 1944, il prend part au sein de la 1re armée à la trouée de Belfort (14 novembre), prend Héricourt, Montbéliard, Delle et atteint Mulhouse . il est cité à l'ordre de l'armée. Le 29 janvier 1945, lors des opérations de réduction de la Poche de Colmar, il met à mal les défenses du front sud du réduit allemand et réalise la jonction avec les éléments de la 1re armée venant du nord. Il aborde les rives du Rhin le 9 février . il est alors élevé à la dignité de Grand Officier de la Légion d'honneur. Pendant la campagne d'Allemagne, il enlève Constance, Ulm, Friedrichshafen, Bregenz, pour achever son périple au col de l'Arlberg (Autriche), le 6 mai 1945. Compagnon de la Libération, le général Béthouart est nommé haut-commissaire de la République française en Autriche, le 8 juillet 1945, et occupe cette fonction jusqu'au 30 septembre 1950, ayant quitté le service actif avec le rang de général d'armée le 12 janvier 1949.

De retour en France, il assure la présidence du Comité de la Flamme sous l'Arc de Triomphe et celle de la Fédération Européenne des Associations de Combattants, et continue de servir la France par le biais de la députation. Il représente, en 1955, les Français du Maroc, puis les Français établis hors de France au Sénat à partir de 1959, étant aussi nommé membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Les 2 et 3 juin 1958, il vote pour les pleins pouvoirs au général de Gaulle et pour la révision constitutionnelle. En 1960, il vote pour la loi autorisant le gouvernement à prendre des mesures relatives au maintien de l'ordre en Algérie. L'année suivante, il prend part à la discussion sur l'aide aux rapatriés d'Afrique du Nord. De 1963 à 1971, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi de finances pour les crédits du ministère des Affaires étrangères, il fait des observations sur de nombreux sujets dont la coopération technique, la situation des ressortissants français à l'étranger (1963), l'indemnisation des agriculteurs spoliés au Maroc (1964), les rapatriés (1966), les crédits d'aide militaire aux pays d'Afrique du Nord, le personnel et les postes diplomatiques (1967), les crédits pour l'action culturelle, le fonctionnement du Conseil supérieur des Français de l'étranger, l'affectation des appelés du contingent (1969), l'Alliance française, l'aide militaire apportée à l'Algérie et la situation du Cambodge (1970). En juin 1970, il est membre de la commission spéciale chargée de l'examen du projet de loi relatif à l'indemnisation des Français rapatriés. Vice-président de la délégation française à la conférence des parlementaires de l'OTAN en 1965 et en 1968, Béthouart intervient au Sénat en séance publique, en 1966 et en 1967, sur la question des relations entre la France et l'Alliance atlantique. Il se charge aussi des questions relatives à la réforme de l'armée française, prend part au débat sur le service national en 1965, sur le service de santé des armées en 1968 et, en 1970, sur la loi de programme relative aux équipements militaires pour la période 1971-1975.

Il prend sa retraite en 1971 et poursuit sa carrière d'écrivain commencée avec La Bataille pour l'Autriche (1966) et Cinq années d'espérance (1968). Il publie Des hécatombes glorieuses aux désastres (mémoires) en 1972, puis Le Prince Eugène de Savoie (1975) et Metternich et l'Europe (1978), à côté d'une collaboration régulière avec Le Figaro.

Décédé le 17 octobre 1982 à Fréjus, le général Antoine Béthouart est inhumé à Rue, dans la Somme.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Auguste Spinner

1864-1939

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Portrait d'Auguste Spinner posant en uniforme - 1915. Source : Libre de droits

(Wissembourg, le 14 juin 1864 - Strasbourg, le 1er avril 1939)

 

Aujourd'hui presque tombé dans l'oubli, Auguste Spinner a pourtant été l'un des personnages marquants de l'Alsace de la première moitié du XXe siècle, à la fois peintre, décorateur, architecte, espion, journaliste, militaire, puis fonctionnaire français.

Né à Wissembourg en 1864, Auguste Spinner a été profondément marqué par la bataille du 4 août 1870 qui toucha sa ville natale, il grandit ainsi dans le souvenir de la France, l'Alsace étant alors annexée au Reich wilhelmien. Après des études réalisées à l'Ecole des Beaux Arts de Karlsruhe, il reprend, dans les années 1890, l'entreprise de peinture et de décoration familiale. On lui doit notamment les fresques qui ornent l'intérieur du Musée historique de Haguenau.

Passionné par l'Histoire, il participe à la fondation, en 1905, de la Verein zur Erhaltung der Altertümer in Weissenburg und Umgegend ou Société pour la conservation des antiquités de Wissembourg et des ses environs, dont il devient le trésorier. Auguste Spinner se fait également remarquer à cette époque, comme l'un des principaux collectionneurs d'armes et d'uniformes d'Alsace et comme l'un des meilleurs historiens de la guerre de 1870 dans le Nord de l'Alsace.

Il publie d'ailleurs en 1908, l'une des premières études détaillées sur les aventures du comte von Zeppelin lors de l'affaire de Schirlenhofe, qui fit les deux premières victimes de la guerre franco-allemande.

À partir de 1906, il entreprend de faire ériger à Wissembourg, au Geisberg, un monument commémoratif consacré aux soldats français tombés au champ d'honneur sous les ordres du maréchal de Villars (1705-1706), du maréchal Coigny (1744), du général Hoche (1793) et du général Abel Douay (1870). Rapidement secondé par Paul Bourson, puis par tous les leaders alsaciens francophiles de l'époque, son projet voit le jour en 1909, après d'âpres négociations avec le gouvernement impérial allemand.

L'inauguration du monument, qui a lieu le 17 octobre 1909, se transforme en une fantastique manifestation pro-française, lors de laquelle plus de 50 000 Alsaciens-Lorrains entonnent une vibrante Marseillaise jouée par la musique municipale de Reichshoffen, devant les autorités allemandes médusées.

Nommé délégué général du Souvenir Français en Alsace, Spinner poursuit dès lors son action en faveur de la France en encourageant la création de nouvelles sections du Souvenir et en fédérant en associations les anciens combattants français vétérans de Crimée, d'Italie, du Mexique et de 1870. En 1910, il intervient même au côté de Joseph Sansboeuf, président des anciens combattants français, et de Maurice Barrès afin que l'Assemblée Nationale française crée la médaille commémorative de la guerre de 1870-1871.

Loin de tout fanatisme et chauvinisme, il organise le 24 juillet 1910, à l'occasion du quarantième anniversaire de l'escarmouche de Schirlenhofe, l'une des premières cérémonies de réconciliation franco-allemande de l'Histoire en réunissant sur les tombes des deux premières victimes du conflit de 1870 une partie des anciens protagonistes de ce fait d'arme.

Cependant, face à la multiplication des procès politiques et des arrestations dans le milieu francophile, qui touchent parmi ses proches notamment l'abbé Wetterlé, Hansi, Zislin... Auguste Spinner se sent menacé et préfère s'exiler à Nancy, au mois de septembre 1912, tout en restant très actif en Alsace-Lorraine annexée. Il participe ainsi à la fondation du musée Westercamp à Wissembourg en 1912 à qui il lègue ses collections et devient vice-président du Souvenir Alsacien-Lorrain, qui est dissout par les autorités impériales en 1913. Hansi lui dédit alors de manière implicite son album intitulé Mon village - Ceux qui n'oublient pas, publié à Noël 1913, dans lequel le père d'Auguste Spinner, Laurent, resté à Wissembourg, figure sous les traits du veilleur de nuit.

Spinner devient à cette période, agent spécial du lieutenant-colonel Albert Carré qui est chargé, en 1913 par le Haut Commandement français, d'organiser à Besançon un centre de ralliement pour les Alsaciens qui déserteraient l'armée allemande en cas de conflit. Engagé volontaire dans l'armée française le 28 juillet 1914, Spinner est appelé à l'état-major de l'armée, en tant qu'officier interprète, avant même le début des hostilités. Suite à une lettre ouverte de Maurice Barrès au ministre de la Guerre , le 22 août 1914, il est chargé du triage des Alsaciens-Lorrains parmi les prisonniers de guerre allemands. Décoré de la Légion d'Honneur en 1915, il est affecté, à partir de 1916, au Service des Renseignements du GQG.

Nommé administrateur adjoint de la ville de Wissembourg, il est le premier soldat français à entrer dans la ville redevenue française le 24 novembre 1918. Démobilisé en 1920, il devient alors Directeur de l'Entrepôt des tabacs fabriqués de Strasbourg et occupe des fonctions importantes au sein du Souvenir Français du Bas Rhin, de la Fédération des Engagés Volontaires et de diverses autres associations patriotiques. Il termine sa carrière militaire en 1935 avec le grade de commandant interprète et la rosette d'officier de la Légion d'Honneur.

Collaborateur occasionnel de la revue L'Alsace Française, il organise, en 1934-1935, une importante cérémonie à l'occasion du 25e anniversaire du monument de Wissembourg. Celle-ci, présidée par le général Gamelin, réunit, le 28 juillet 1935, plus de 75 généraux d'origine alsacienne et plusieurs milliers de spectateurs dont son ami Hansi.

Victime d'une attaque à la fin du mois de mars 1939, Auguste Spinner meurt le 1er avril 1939. Des funérailles imposantes sont alors organisées et, suivant en cela ses dernières volontés, son cercueil est enveloppé dans un drapeau tricolore ayant flotté lors de la cérémonie d'inauguration de 1909. Un an plus tard, "son" monument est dynamité par les autorités nazies et sa famille contrainte à l'exil. A la libération, son fils Georges, devenu architecte des Bâtiments de France, récupère quelques blocs de grès du monument détruit afin de réaliser la stèle funéraire de son père à Wissembourg. Un nouveau monument est par la suite reconstruit et inauguré au Geisberg le 13 novembre 1960.

 

Source : Philippe Tomasetti, professeur d'histoire

Edgard de Larminat

1895-1962

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Portrait de Edgard de Larminat. Source : SHD

(29 novembre 1895 : Alès, Gard - 1er juillet 1962 : Paris)

Admissible à Saint-Cyr en 1914, promotion "Grande Revanche", Edgard de Larminat, dont le père était officier des Eaux et Forêts, perpétue la tradition familiale, remontant au XVIIème siècle, de vie au service de l'Etat.

Élevé chez les Jésuites à Montfré et aux Postes, il a fréquenté les lycées de Gap, de Troyes et s'engage à l'âge de 19 ans comme simple soldat au 27e régiment d'infanterie. Affecté au 134e, il suit les cours spéciaux des élèves de Saint-Cyr puis rejoint successivement les 321e et 121e régiments d'infanterie. Promu capitaine en septembre 1917, il termine la guerre avec quatre citations à l'ordre du jour, trois blessures dont une par les gaz (mars 1918), en ayant fait preuve d'un courage exemplaire devant le fort de Vaux où il a été blessé par un éclat d'obus en juin 1916. A ce titre, il sera distingué par la Légion d'honneur.

Doté d'un caractère indépendant et curieux des horizons lointains, il rejoint les troupes de marines (armée coloniale) en 1919, sa formation de saint-cyrien achevée. Envoyé au Maroc pour mettre en oeuvre la politique du maréchal Lyautey, il montre toute sa mesure à commander le 13e bataillon de tirailleurs sénégalais d'Ouezzane, qualité qui lui vaut une nouvelle citation.

Son commandement du cercle de Kiffa en Mauritanie, de 1923 à 1926, laisse une empreinte durable, de même que sa mission en Indochine de 1928 à 1931.

Chef de bataillon en 1929, il suit les cours de l'Ecole supérieure de Guerre, de 1933 à 1935, se faisant remarquer par l'étendue de sa culture et ses capacités à appréhender les questions militaires. Lieutenant-colonel, il est affecté au Levant en janvier 1936 pour exercer les fonctions de chef d'état-major du général commandant en chef le théâtre d'opérations du Moyen-Orient.

Colonel en mars 1940, De Larminat refuse de rendre les armes : alors que le général Mittelhauser décide de suivre les ordres du gouvernement de Bordeaux, il prépare le passage en Palestine des troupes voulant continuer la lutte. Mis aux arrêts et emprisonné, il s'échappe et gagne Damas le 1er juillet puis la France Libre qu'il sert avec une ardeur sans relâche. En Egypte, il regroupe les contingents français de Syrie puis va seconder le général Legentilhomme à Djibouti. Apprenant au cours d'un séjour à Londres la situation insurrectionnelle au Tchad, au Cameroun et en Afrique Equatoriale française, il se rend à Léopoldville d'où il prépare la reddition de la garnison de Brazzaville le 28 août, déposant le gouverneur général et commandant des troupes et prenant le commandement civil et militaire des territoires ralliés.

Promu général de brigade, il exerce les fonctions de commandant supérieur et gouverneur général, puis Haut-commissaire jusqu'en juillet 1941, date à laquelle, nommé général de division, il retourne en Syrie auprès du général Catroux. En décembre commence son aventure en Afrique du Nord. Commandant les Forces françaises en Libye, il prend part à la campagne du Western Desert, s'illustrant aux batailles de Gazalla (mai 1942) et d'El-Alamein (octobre-novembre 1942) face à Rommel.
Il organise la 1re Division Française Libre à la tête de laquelle il représente brillamment la patrie pendant les dernières opérations de la campagne de Tunisie, à Takroune et au Djebel Garci, en mai 1943, gagnant ainsi ses étoiles de général de corps d'armée.

De chef d'État-Major général des Forces Françaises Libres auprès du Comité français de la Libération nationale en juin-juillet, il prend le commandement du 2e corps d'armée en août 1943 avec lequel il mène la campagne d'Italie en mai-juin 1944 comme adjoint du commandant du Corps Expéditionnaire Français en Italie. A sa tête, du 10 juin au 4 juillet, il signe les pages les plus glorieuses de cette opération entre Viterbo et Sienne, en Toscane, décrochant une nouvelle citation et la cravate de commandeur de la Légion d'honneur. Le 16 août, De Larminat débarque en Provence avec le 2e corps d'armée, combat devant Marseille, libère Toulon, ouvrant la voie à la reconquête du territoire national.

D'octobre 1944 à juin 1945, il dirige le Détachement d'Armée de l'Atlantique au Commandement des Forces de l'Ouest et joue un rôle décisif dans la réduction des poches de résistance allemandes de Lorient, La Rochelle, Rochefort et la Pointe de Grave. Durant l'hiver 1944-1945, il procède également à la transformation en unités régulières des unités des Forces Française de l'Intérieur, issues du maquis. L'armée, la résistance et la Nation lui fourniront la matière de trois ouvrages : L'Armée dans la Nation . Bertie Albrecht, Pierre Arrighi, général Brosset, D. Corticchiato, Jean Prévost, 5 parmi d'autres . Que sera la France de demain ?

Compagnon de la Libération, il exerce les fonctions d'Inspecteur Général des Forces d'Outre-Mer de novembre 1945 à juillet 1947, est nommé membre titulaire du Conseil supérieur de Guerre en 1950, préside le Comité militaire de la Communauté européenne de Défense (1951-1954) - sujet qu'il traite dans L'Armée européenne -, est promu au grade de général d'armée en 1953, officie en qualité d'Inspecteur des troupes coloniales en 1955, puis passe au cadre de réserve le 29 novembre 1956.

Rappelé en juin 1962, alors qu'il vient d'achever Chroniques irrévérencieuses (livre de souvenirs de ses débuts à la fin de la Seconde Guerre mondiale), De Larminat se voit confier la présidence de la Cour militaire de Justice chargée d'instruire le procès des instigateurs de la rébellion d'Alger d'avril 1961. Le procès doit s'ouvrir le 2 juillet sur fond de fin de guerre d'Algérie, d'une nation déchirée, d'un pouvoir contesté, de virulentes campagnes de presse. Patrie, Armée, fidélité au gaullisme ... le dilemme emporte De Larminat qui met fin à ses jours la veille de la première audience.

Le 6 juillet, le général Dio prononce son éloge funèbre dans la cour des Invalides et termine ainsi son panégyrique : "Que le Dieu des Armées, mon Général, vous ait en sa garde. Et que la terre de votre petit village du Jura vous soit douce. Vos anciens compagnons d'armes qui vous sont attachés par tant de souvenirs, garderont pieusement votre mémoire"

Le général Edgard de Larminat repose au cimetière de Montain, dans le Jura.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

 

Sur le suicide de De Larminat : www.larminat-jm.com Historia, n° 610, 615, 620, 632 Philippe Oulmont, dir., Larminat, un fidèle hors série, Fondation Charles de Gaulle/Éditions LBM. Diffusion Ouest France, 2008

Gustave, Auguste Ferrié

1868-1932

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Portrait de Gustave Ferrié. Source : l'album de la guerre 1914-1919. © L'illustration

(19 novembre 1868, Saint-Michel de Maurienne : Savoie - 16 février 1932 : Paris)

 

Né le 19 novembre 1868 de Pierre Ferrié, ingénieur pour les Chemins de Fer du Sud et d'Antoinette Manecy, Gustave Ferrié évolue dès son enfance au milieu des plans et des réalisations, si bien que, admis à l'École Polytechnique en 1887, il choisit l'arme du Génie. Ingénieur des transmissions radiophoniques en 1891, il est affecté à ce corps jusqu'en 1898. Ses travaux pendant cette période permettront notamment d'augmenter la portée de l'émetteur de la Tour Eiffel de 400 à 6000 km.

En 1899, il est conquis par la télégraphie sans fil après avoir assisté à un exposé de Marconi sur cette nouvelle technologie. Freycinet, ministre de la guerre, le nomme la même année au comité d'exploration du télégraphe sans fil entre la France et le Royaume-Uni afin de rendre un rapport sur les applications militaires de ce moyen de communication. Il oeuvre par ailleurs au développement des unités militaires mobiles de radiocommunication et améliore le système de radiodétection de Branly en mettant au point dès 1900 un détecteur électrolytique, appareil rendant possible la transmission du son, dont la dernière version (1910) sera utilisée par l'armée française lors de la Première Guerre mondiale.

Colonel en 1914, il reconnaît les propriétés du tube à électrons et augmente considérablement la portée des émetteurs-récepteurs de campagne qui équipent les troupes alliées dès 1916.

En 1917, Ferrié, grâce à ses appareils, permet d'intercepter les messages de Mata-Hari et de mettre fin aux agissements de l'espionne.

Promu général en 1919, il continue ses recherches et le développement de leurs applications militaires : construction de postes radio pour la marine, les colonies et l'aviation. Ces nouvelles liaisons rendues possibles, il affine les mesures des longitudes et des dimensions du globe terrestre. Ayant atteint la limite d'âge, il est maintenu en activité à titre exceptionnel. Oeuvrant au développement des techniques radioélectriques, il crée une section de radio à l'École supérieure d'Électricité.

La communauté scientifique reconnaît l'avancée majeure de ses découvertes pour le domaine des radio-télécommunications. Les honneurs se succèdent : en 1922, il est élu à l'Académie des Sciences et devient président de l'International Scientific Radio Union ainsi que de la commission internationale des longitudes par radio. Il est également vice-président de l'International Board of Scientific Unions, préside le comité de géodésie et de géophysique et reçoit la médaille d'honneur de l'Institute of Radio Engineers. Distingué par la Légion d'Honneur, Gustave Ferrié est élevé à la dignité de grand Croix en 1932.

Peu de temps après, hospitalisé à l'hôpital du Val-de-Grâce, il décède le 16 février.

Il repose au cimetière du Père-Lachaise (89e division) auprès de son épouse Pierrette Pernelle qu'il avait épousé en 1908.


À lire sur le sujet :
Amoudry (Michel), Le Général Ferrié et la naissance des transmissions et de la radiodiffusion, Presses Universitaires de Grenoble, 2000

Joseph de Goislard de Monsabert

1887-1981

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Le général de Goislard de Monsabert. Début février 1944. Source : ECPAD

(30 septembre 1887 : Libourne, Gironde - 18 juin 1981 : Dax, Landes)

 

Joseph de Goislard de Monsabert est issu d'une famille de militaire vivant dans le culte de l'honneur et du service de la patrie. Perpétuant les traditions, le jeune homme connaît rapidement l'appel des armes et prépare l'école spéciale militaire de Saint-Cyr, qu'il intègre en octobre 1907 (promotion Maroc) après avoir éprouvé le métier des armes une année durant au 50e régiment d'infanterie. Attiré par l'Afrique du Nord, il choisit de servir au Maroc où dès 1912 il rejoint le 3e régiment de tirailleurs.

Lieutenant lorsqu'éclate la Première Guerre mondiale, il est affecté au 1er régiment mixte de tirailleurs et zouaves de la 1re division marocaine. Capitaine en mai 1915, il s'illustre au 9e régiment de zouaves où il termine la guerre en tant que chef de bataillon à titre temporaire, auréolé de sept citations et de la Légion d'Honneur.

L'entre-deux guerres est l'occasion de suivre les cours de l'Ecole supérieure de guerre et d'approfondir sa connaissance du Maghreb dont il ne tarde pas à devenir un spécialiste.

Colonel depuis juin 1937, il commande le 9e RT à Miliana au début de la Seconde Guerre mondiale alors qu'il est promu commandant du groupement du sud tunisien (81e brigade d'infanterie) à Blida au mois de décembre.

Contraint d'accepter l'armistice, Monsabert ne se résout pas à abandonner la lutte. Général en août 1941, il veille au maintien de l'armée d'Afrique afin de servir aux côtés des Alliés au moment opportun, préparant l'arrivée du général Giraud à Blida après le débarquement d'Afrique du Nord, en novembre 1942. Mis au ban par le régime de Vichy, il prend la tête du Corps Franc d'Afrique puis du 19e corps d'armée pendant la campagne de Tunisie.

Général de division, il prend en mars 1943 le commandement de la 3e division d'infanterie algérienne qu'il entraîne pendant tout l'été à travers le désert de l'Ouest de l'Algérie, sachant se faire apprécier des cadres et de ses hommes. En décembre, il embarque à Bizerte pour Nisida.

Au sein du Corps expéditionnaire français en Italie (CEFI) du général Juin, les "Africains" prennent position dans les Abruzzes. Son unité, engagée dans la montagne, au nord de Venafro, doit faire face aux rigueurs de l'hiver et à l'acharnement de l'ennemi qui doit reculer sur les flancs du Monna Casale, à Acquafondata et de l'autre côté du Rapido. Il enlève notamment la crête du Belvédère, qui lui vaut sa première citation à l'ordre de l'armée.

Les troupes américaines ne pouvant résorber le réduit de Monte Cassino, acceptent le plan du général Juin d'une manoeuvre enveloppante par les troupes du CEFI. Le 12 mai, ses troupes enlèvent Castelforte et franchissent en quelques jours les monts Aurunci. Les Alliés entrent dans Rome le 5 juin. Les combats se poursuivent le long du lac de Bolsena et à travers l'Amiata, la 3e DIA prend Sienne le 3 juillet.

Après l'Italie, la France : ses hommes débarquent en Provence, dans le golfe de Saint-Tropez (Cogolin, 16 août), participent à la prise de Toulon (21 août) puis de Marseille (28 août). Monsabert est fait citoyen d'honneur de la cité phocéenne et est élevé par le général de Gaulle à la dignité de Grand Officier de la Légion d'Honneur.

Nommé général de corps d'armée, il prend le commandement du 2e CA et poursuit son travail de reconquête : Saint-Etienne, Lyon, Mâcon, Chalon, Autun et Dijon tombent.

Il se rend maître des campagnes vosgiennes et alsaciennes, prend part à la défense de Strasbourg face à la poche de résistance allemande, franchit la Lauter et le Rhin pour fêter la victoire à Stuttgart.

Commandant Supérieur des Troupes d'Occupation en Allemagne le 24 juillet 1945, Monsabert accède au rang de général d'Armée, il reçoit la Médaille Militaire et devient Grand Croix de la Légion d'Honneur.

Dégagé des cadres d'active en 1946, il se retire dans sa maison de Toureil à Hastingues (Landes) où il se consacre à la défense de l'armée française tant dans l'écriture : Il faut refaire l'Armée française (Paris, 1950), qu'en politique par son mandat de député des Basses-Pyrénées entre 1951 et 1955.

Le 8 juillet 1985, la ville de Bordeaux a rendu hommage à l'enfant du pays. Charles Hernu, alors ministre de la Défense, a inauguré un monument à la mémoire du général de Monsabert, Place des Martyrs de la Résistance.

 

Source : MinDef/SGA/DMPA

Diégo, Charles Brosset

1898-1944

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Portrait du général Diégo Brosset. Source : SHD

 

(3 octobre 1898 : Buenos-Aires, Argentine - 20 novembre 1944 : Champagney, Haute-Saône)

 

Né à Buenos Aires, en Argentine, d'une famille de magistrats lyonnais, Diego Brosset rentre en France à l'âge de deux ans et grandit au château de Rillieux-la-Pape. Ne pouvant supporter l'enfermement des collèges jésuites qu'il fréquente, il arrête ses études à quinze ans pour revenir dans la maison de famille. Lors de la Première Guerre mondiale, il s'engage le 7 septembre 1916 comme soldat de 2e classe au 28e bataillon de chasseurs à pied de Grenoble puis au 68e. En quatre engagements, il obtient autant de citations et est promu caporal, puis sergent.

Combattant distingué, il entre à l'école d'aspirants d'Issoudun et réussit le concours d'entrée à l'école militaire d'infanterie de Saint-Maixent dont il sort en 1921 avec le grade de sous-lieutenant. Il choisit l'infanterie coloniale et est affecté en Afrique occidentale française au 2e régiment de tirailleurs soudanais. Nommé au sein d'un peloton de méharistes en mars 1922, il sillonne le Soudan (Kati), la Mauritanie (Chinguetti, Atar, Agaraktem), le Sud algérien (Touat Gourara, Tindouf) et le Sud marocain (Lekdim) pendant une quinzaine d'années entrecoupées de brefs retours en France, à son grand regret.

Passionné de littérature, il met à profit son temps libre pour achever son roman semi-autobiographique, Il sera beaucoup pardonné, pour l'édition duquel il sollicite le parrainage de François Mauriac. En février 1928, élevé à la dignité de chevalier de la Légion d'Honneur, il est affecté au 23e régiment d'infanterie coloniale à Coulommiers. Au camp de Châlons, il y rencontre Jean Bruller (alias Vercors) et une longue amitié littéraire commence entre les deux hommes. Promu capitaine en 1930, il rentre en France et épouse Jacqueline, la fille du général Mangin, au mois d'août 1931. Il retrouve le Maroc en 1933 pour quatre ans durant lesquels il combat, à la tête du 29e goum, aux cotés du général Giraud. Ecrivain infatigable, il concoure plusieurs fois pour le grand prix de la littérature coloniale, sans succès. Il dépasse ces déceptions en préparant le concours d'entrée à l'Ecole supérieure de Guerre où il est admis en janvier 1937, après avoir obtenu un diplôme de Langues orientales. Breveté de la 59e promotion en août 1939, il est nommé à l'état-major des colonies.

Le 3 septembre, la diplomatie cède le pas aux canons. Brosset rejoint son unité sur le front de Lorraine. En décembre il accepte un poste au 2e bureau du corps d'armée colonial, obtient ses galons de commandant, puis postule pour participer à une mission militaire en Colombie. Sa candidature est retenue et les Brosset arrivent à Bogota au mois de mai 1940. La nouvelle de l'armistice atteint l'Amérique du Sud le 23 juin. En homme d'action, Diégo ne peut s'y résoudre. Il envoie le 27 juin une lettre au général de Gaulle lui exprimant son entière adhésion et se fait un "ambassadeur" de la France Libre dans ses écrits, par le biais de la mission en Colombie qui ne tarde pas à être supprimée. Brosset refuse d'exécuter les ordres du gouvernement de Vichy, qui le condamne à mort par contumace et signifie à sa hiérarchie sa décision de se mettre aux ordres du général de Gaulle.

Le 8 décembre, il peut enfin rallier Londres où il est promu lieutenant-colonel au 2e bureau avant de prendre part au périple colonial du général en qualité d'officier d'état-major : Freetown, Brazzaville, Fort-Lamy, Le Caire, l'Erythrée où il est momentanément le chef d'état-major du général Catroux : la Corne de l'Afrique est alors un enjeu stratégique important depuis l'arrivée de l'Afrika Korps en Tripolitaine. De juin 1941 à décembre 1942, il assiste à la lutte fratricide entre les troupes de la France Libre du général Legentilhomme et celles, restées fidèles à Pétain, du général Dentz dans les territoires de Syrie, situation qui ne sera réglée qu'avec la convention de Saint-Jean d'Acre.

Sa longue expérience du désert lui vaut d'être missionné dans l'Est syrien avant une nouvelle affectation, en janvier 1943, à la 2e brigade à Marsa Matrouh en Cyrénaïque. Brosset réorganise son unité, la conduit à travers le désert libyen vers Gambut (Tobrouk) et la mène à la victoire de Takrouna les 9 et 11 mai en enfonçant les lignes ennemies sur plus de trois kilomètres.

Nommé général de brigade le 1er juin, il reçoit de mains du général de Gaulle la Croix de la Libération puis prend la tête de la 1re division française libre (DFL) au mois d'août, rebaptisée "division motorisée d'infanterie" (DMI). Il réarme et réorganise son corps de troupe avec l'énergie qui le caractérise. Le 11 avril 1944, enfin, la reconquête de l'Europe peut commencer : partis de Bône et de Bizerte, ses hommes débarquent en Italie. Brosset participe à la rupture des lignes Gustav, Dora et Hitler, à la bataille du Garigliano, marche sur Rome et, fin juin, libère la Toscane, avant d'ouvrir un nouveau front dans le sud de la France aux côtés du général de Lattre de Tassigny. Avec sa division, il débarque en Provence le 16 août 1944, reprend Toulon, enlève le mont Redon et Hyères (20-21 août), Le Touar et La Garde (22-23 août) et s'engage dans le pays lyonnais. Toujours dans l'action, le récent général de division marche en tête de la 1re DFL-DMI lors de la bataille des Vosges (20 septembre - 19 novembre 1944).

La ruée vers le Rhin peut commencer. Le lundi 20 novembre l'attaque est lancée sur Giromany. Le général Diégo Brosset, part à l'aube pour le front. Il presse son ordonnance, emprunte des trajets non assurés. Il visite quelques campements, saute de jeep en jeep. Se profile alors le pont du Rahin (Champagney, Haute-Saône). Il s'y engage, la voiture se renverse dans la rivière... Son corps, retrouvé le 23 novembre, sera inhumé dans la nécropole nationale de Rougemont (Doubs). "La France perdait en lui une force rayonnante qui était, ne voulait être et ne fut qu'à son service" (général Koenig).

 

Source : Mindef/SGA/DMPA

Maurice, Gustave Gamelin

1872-1958

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Portrait de Maurice Gamelin. Source : SHD

(20 septembre 1872 : Paris - 18 avril 1958 : Paris)

Fils d'un officier, contrôleur général des armées blessé à la bataille de Solférino en 1859, et d'une mère alsacienne, fille de l'intendant général Ulrich et nièce du Gouverneur militaire de Strasbourg en 1870, Maurice Gamelin présente dès son plus jeune âge des dispositions pour les arts et les questions militaires. Après avoir décroché le prix de philosophie au Concours général, il suit les cours de l'École du Louvre puis décide de préparer le concours d'entrée à Saint-Cyr. Admis en octobre 1891, il sort major de sa promotion en 1893 pour être affecté au 3e régiment de tirailleurs algériens puis à la Section topographique en Tunisie.

De 1896 à 1899, le jeune officier met à profit ses talents de dessinateur au Service géographique de l'Armée à Paris. Admis huitième au concours de l'École de Guerre, il est rapidement remarqué par ses professeurs tels Foch et Lanrezac. Promu capitaine en 1901, au 15e bataillon de chasseurs à pied, il rejoint le général Joffre à son état-major l'année suivante et publie, en 1906, une Etude philosophique sur l'art de la guerre, ouvrage qui le hausse au rang des penseurs militaires de son temps alors même qu'il est l'officier d'ordonnance du généralissime à la 6e division d'infanterie. Il demeure à ses côtés au 2e corps d'armée (1908) et au Conseil supérieur de la Guerre avant de prendre le commandement du 11e bataillon de chasseurs alpins (Annecy), en 1911, pour deux ans. Chef au 3e Bureau de l'État-Major général, il choisit de rejoindre à nouveau le général Joffre en mars 1914.

C'est en qualité de chef de son cabinet militaire que Gamelin participe aux opérations de la Grande Guerre. Confident du généralissime, tacticien éclairé, il conduit la 2e demi-brigade de chasseurs à pied sur le Linge (Alsace) et dans la Somme, rédige le brouillon de l'instruction n°2 à la base de la victoire de la Marne (25 août 1914) et écrit l'instruction n°6 qui en déclenche l'offensive. Général de brigade à titre temporaire en décembre 1916, il est affecté à la 16e division d'infanterie, avant d'être rappelé au G.Q.G. de Joffre au début de 1917. Au remplacement de Joffre par Nivelle, il demande un commandement. En avril-mai, il se voit confier la 9e division d'infanterie avec laquelle il se distingue sur l'Argonne, à Verdun, dans l'Aisne, autour de Noyon en mars 1918 et bloque l'avancée des troupes allemandes dans l'Oise. Promu général de brigade en septembre 1919, il est envoyé comme chef de la mission militaire française au Brésil et publie en 1921 "Trois étapes de l'avant-guerre" (Les oeuvres libres, n°13).

À son retour en France en 1925, jeune général de division, il reçoit le commandement des troupes françaises en Syrie en qualité d'adjoint au Haut Commissaire Jouvenel (septembre 1925 à février 1929), avec pour mission de réprimer l'insurrection du Djebel Druse aux côtés du général Sarrail, tâche dont il s'acquitte brillamment et qui lui vaut d'être élevé à la dignité d'officier de la Légion d'honneur (16 septembre 1926) et de gagner ses étoiles de général de corps d'armée (novembre 1927).

Affecté au 20e corps d'armée de Nancy, il devient le premier sous-chef d'état-major général de l'armée avant de remplacer Weygand au poste de chef d'État-Major général le 9 février 1931. Grand Croix de la Légion d'honneur le 14 juillet 1932, il assure la vice-présidence du Conseil supérieur de la Guerre (janvier 1935) et est décoré de la Médaille militaire (31 décembre 1935).

Chef d'état-major de la défense nationale (21 janvier 1938), il prend le commandement en chef des forces alliées en France au mois de septembre 1939. Ses conceptions tactiques sont cependant dépassées : il refuse d'employer massivement l'arme blindée et l'aviation, lui préférant une stratégie défensive appuyée sur la ligne Maginot, et montre une tendance à la délégation de commandement sur le front . l'armée française ne peut qu'opposer une vaine résistance - "nous sommes tous, à peu près inévitablement, les hommes d'un milieu et d'une époque, même quand nous essayons de réagir contre certains éléments de l'ambiance", écrira-t-il dans ses mémoires comme pour se justifier.

Le 19 mai 1940, le général Gamelin est relevé de son commandement et mis aux arrêts par le régime de Vichy le 6 septembre. Interné au fort du Portalet avec Blum, Daladier, Mandel et Reynaud, il est traduit le 19 février 1942 devant la Haute Cour à Riom, qu'il contraint à s'ajourner (11 avril) en refusant de participer aux débats - "le procès devint donc en fait celui de "l'impréparation"", notera-t-il dans ses mémoires.

À l'occupation de la Zone libre par la Wehrmacht, le généralissime est envoyé en captivité à Buchenwald en mars 1943, puis à Itter, au Tyrol autrichien, jusqu'à sa libération par les troupes américaines le 5 mai 1945.

Revenu à Paris, Maurice Gamelin se consacre à l'écriture de ses volumes de mémoires Servir, publiés en 1946, qu'il complète par le récit de son expérience de le Grande Guerre, Manoeuvre et victoire de la Marne, en 1954.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Maxime Weygand

1867-1965

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Portrait de Maxime Weygand. Source SHD

(21 janvier 1867 : Bruxelles - 28 janvier 1965 : Paris)

 

Maxime Weygand naît à Bruxelles de parents inconnus. Ses origines continuent d'intriguer les journalistes et les historiens : enfant naturel de la comtesse Kosakowska, fils illégitime de Léopold II de Belgique, fruit de l'union du colonel Van der Smissen et de l'impératrice Charlotte du Mexique ou de cette dernière avec un indien du Mexique ?

Le dossier reste ouvert.

 

Confié à l'âge de six ans à un négociant en peaux juif de Marseille, David Cohen de Léon, il prend le nom de la compagne de son tuteur et, après une scolarité exemplaire aux lycées de Vanves, Louis-le-Grand et Henri-IV, il entre en 1885 à Saint-Cyr au titre des étrangers sous le nom de Maxime de Nimal. Diplômé en 1887, il choisit la cavalerie et est formé à Saumur avant d'être envoyé au 4e régiment de Dragons. A vingt ans, il est officiellement adopté par le comptable de son tuteur, François Weygand, et obtient la nationalité française. Il enchaîne les villes de garnison (Chambéry, Saint-Étienne, Lunéville, Saumur, Niort, Nancy) et obtient ses épaulettes de capitaine en 1896. Sanctionné "pour avoir pris part à une souscription pouvant prendre un caractère politique" en faveur du colonel Henry, au moment de l'affaire Dreyfus, il se marie en 1900 et poursuit sa carrière d'officier au sein du 9e régiment de Dragons. Lieutenant-colonel en 1912, il se fait remarquer pour ses qualités d'instructeur à l'École de Cavalerie de Saumur et rejoint le Centre des hautes études militaires. Il est élevé à la dignité de Chevalier de la Légion d'honneur en 1913.

En 1914, il prend part, à la tête du 5e régiment de Hussard, à la bataille de Morhange. Le 28 août, promu colonel, il est affecté auprès de Foch, chef d'état-major. Général de brigade en 1916, il reste fidèle à Foch lors de sa mise à l'écart, pour mieux rebondir à ses côtés en 1917 après l'échec du plan Nivelle. A la conférence de Rapallo (6 et 7 novembre), il oeuvre à la constitution d'un commandement supérieur interallié, lequel devient effectif à partir de la rencontre de Doullens (26 mars 1918) avec la nomination de Foch à sa tête, et celle de Weygand au titre de major général. Les deux hommes négocient les termes de l'armistice au mois de novembre.

Général de corps d'armée en 1920, il effectue une mission en Pologne, en qualité de conseiller militaire du maréchal Pilsudski, dans sa lutte contre la Russie des Soviets. En 1923, il accède au rang de général d'armée et remplace Gouraud au Haut-commissariat en Syrie. De retour en France, il est nommé au Conseil supérieur de la Guerre puis à la direction du Centre de Hautes Etudes militaires et rédige les biographies de Foch (1929) et de Turenne (1930). En 1931, Weygand succède à Foch à l'Académie Française, publie un ouvrage sur Le 11 novembre (1932) et, retiré des cadres d'active en 1935, il se consacre à l'écriture de Histoire militaire de Méhémet-Ali et de ses fils (1936), Comment élever nos fils ? (1937), La France est-elle défendue ? (1937), Histoire de l'armée française (1938).

Le président Daladier le rappelle lorsqu'éclate la Seconde Guerre mondiale pour lui confier le commandement des troupes françaises du Moyen-Orient avec le titre de chef du théâtre d'opération de la Méditerranée orientale et la mission de coordonner l'action des effectifs du Levant et des Balkans. En mai 1940, Reynaud, Président du Conseil, le rappelle à Paris pour succéder au général Gamelin au commandement suprême de l'armée française en raison de la déroute de l'armée française dans l'Est. Il tente de mettre en place une contre-offensive avec les armées belges et britanniques mais le projet est abandonné à la suite de l'encerclement des troupes franco-britanniques à Dunkerque, le 24 mai.

Le lendemain, lors d'une conférence extraordinaire à l'Elysée, l'hypothèse d'un armistice est posée. Le 11 juin, au cours de la conférence de Briare et face à la décision de Churchill de ne pas programmer d'attaques massives de la Royal Air Force sur la ligne de front, les positions au sein de l'état-major français se dessinent : poursuivre la lutte dans l'Empire ou se résoudre à demander un armistice ? Weygand et Pétain considèrent que le gouvernement ne peut quitter le territoire national et qu'un armistice conserverait l'honneur militaire.

Les événements s'accélèrent, le flot des réfugiés grossi par l'armée battant en retraite ajoute au désarroi général. Le gouvernement déplacé à Bordeaux hésite encore sur la politique à mener. Le 17 juin, un consensus est trouvé autour du vice-président du Conseil, Camille Chautemps, et une demande d'armistice est déposée auprès de l'autorité allemande. Pétain remplace Reynaud et Weygand est nommé ministre de la Défense nationale. S'il prend soin toutefois de transférer les contrats d'armement de la France avec l'industrie américaine au profit de l'allié anglais et de rediriger les livraisons vers des ports britanniques, il réprouve l'attitude du général de Gaulle qu'il rétrograde au rang de colonel et fait condamner à mort par contumace.

 

Ministre puis délégué général en Afrique du gouvernement de Vichy, Weygand tente de préserver l'équilibre entre les Alliés, les exigences du Reich et sa fidélité au seul gouvernement qu'il juge légitime : il refuse de livrer les infrastructures d'Afrique du Nord à l'Allemagne (juillet 1940 et mai 1941), applique la législation de Vichy, négocie les conditions de ravitaillement avec l'américain Murphy (février 1941) et exige des soldats de l'armée d'Afrique qu'il prêtent serment au maréchal après la campagne de Syrie. Son comportement embarrasse Berlin et le gouvernement de Vichy le rappelle en métropole en novembre 1941.

En novembre 1942, après le débarquement anglo-américain en Afrique du Nord et l'occupation totale de la métropole par les troupes allemandes et italiennes, Weygand est arrêté par les Allemands et est conduit en résidence surveillée administrée par le camp de Dachau.

Libéré le 5 mai 1945, il est mis aux arrêts deux jours après. Détenu au Val-de-Grâce pour actes de collaboration jusqu'en mai 1946, il bénéficie d'un non-lieu en 1948.

Il consacre les dernières années de sa vie à œuvrer, président de l'association Jeanne d'Arc, pour la réhabilitation de la mémoire de Philippe Pétain, publie des tribunes libres dans Le Monde, et poursuit sa carrière d'écrivain, réglant à l'occasion ses comptes avec de Gaulle et Reynaud : Foch (1947), Le général Frère (1949), Mémoires, 1950-1957, Forces de la France (1951), Et que vive la France ! (1953), En lisant les mémoires du général de Gaulle (1955), L'Arc de Triomphe de l'Étoile (1960), Histoire de l'armée française (1961), Maxime Weygand, L'Armée à l'Académie (1962), Lettres inédites relatives aux testaments de Leurs Majestés le roi Louis XVI et la reine Marie-Antoinette (1965).

Maxime Weygand décède le 27 janvier 1965 des suites d'une fracture du fémur. Il est enterré au cimetière Saint-Charles de Morlaix, dans le Finistère.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Erwin Rommel

1891-1944

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Portrait du maréchal Erwin Rommel. Source : Deutsches Bundesarchiv (German Federal Archive

 

Erwin Johannes Eugen Rommel (15 novembre 1891 : Heidenheim - 14 octobre 1944 : Herrlingen)

 

Erwin Rommel est né à Heidenheim, le 15 novembre 1891. D'origine bourgeoise, il est fils et petit-fils de professeurs de mathématiques. Il rejoint l'armée en 1910. En 1914, au début de la Première Guerre mondiale, il n'a que 23 ans mais se révèle très vite un excellent soldat et un meneur d'hommes. Titulaire de la croix "Pour le Mérite", il devient après la guerre professeur à l'école de guerre de Potsdam, puis est nommé directeur de l'Ecole de Guerre de Wiener-Neustadt. Ses maîtres mots sont l'audace et la surprise.

Sympathisant du national-socialisme, il est nommé par Hitler, en 1938, chef d'état-major à son Quartier Général et mis, un an plus tard, à la tête de sa garde personnelle. Il est promu au rang de général de division le 1er août 1939.

Après la campagne de Pologne, il commande la 7e division blindée lors de l'invasion de la France, entre mai et juin 1940, bien qu'il n'ait aucune expérience pratique dans la guerre des blindés. Sa division progresse très rapidement vers Lille et prend ensuite à revers la Ligne Maginot qu'elle capture en partie. Elle fut nommée la "Division fantôme", car on ne savait jamais où elle était exactement, mais elle apparaissait toujours là où on l'attendait le moins, notamment au franchissement de la Meuse à Dinant, le 13 mai, qui fut un exploit tactique. Une prise massive d'amphétamines permettait à Rommel et à ses hommes de compenser le manque de sommeil et d'imprimer à leur marche en avant un rythme si soutenu qu'il fut rappelé à l'ordre par son commandant de corps d'armée, le général Hoth, soucieux de garantir à ses troupes un soutien logistique et des appuis qu'il n'était plus en mesure de leur garantir du fait de la rapidité de leur progression. Ses succès lors de la campagne de France sont largement relayés par la propagande nazie qui en fait un général "modèle" en dépit de son peu d'égards pour la vie de ses propres soldats.

Erwin Rommel est ensuite nommé commandant des forces militaires allemandes de l'Afrika Korps, pour venir en aide aux Italiens en difficulté en Libye face aux Britanniques.

Il réussit à retourner la situation en reprenant la Cyrénaïque, où il est surnommé le "Renard du désert" par ses amis et ennemis, car il improvise constamment et ruse pour faire balancer le sort des combats. Il se révèle cependant un officier difficilement contrôlable et entretient des relations pour le moins difficiles avec ses chefs italiens Gariboldi et Bastico.

Général d'armée le 30 janvier 1942, il conquiert Tobrouk le 21 juin suivant. Deux jours plus tard, il est élevé à la dignité de maréchal. Il a cinquante ans, c'est l'apogée de sa carrière.

Le 3 septembre 1942, Rommel tombe malade et retourne en Allemagne. Lorsqu'il revient en Afrique, la progression des Anglais est déjà considérable. Le général britannique Montgomery parvient à conquérir la ville d'El-Alamein et accule l'Afrika Korps et les Italiens à la retraite pour les prendre en tenaille avec les troupes anglo-américaines qui, depuis le 8 novembre, ont débarqué en Algérie et au Maroc. Rommel réussit à regrouper les forces allemandes sur une ligne de front dénommée Mareth, en Tunisie, mais l'opération est délicate car il manque d'hommes et de matériel.

Le 5 mars 1943, il est rappelé par Hitler et quitte l'Afrique. Ainsi, il n'assiste pas à la défaite définitive de l'Afrika Korps en Tunisie, le 13 mai 1943.

Il reçoit alors un commandement en Italie, puis il est chargé de l'inspection du Mur de l'Atlantique ainsi que du commandement du groupe d'armées B, situé en Normandie, sous les ordres du Feldmarschall von Runstedt avec qui les frictions sont permanentes. Sa tâche consiste à défendre les plages d'une invasion alliée. Lors d'une discussion avec le général Bayerlein, Rommel lui fit remarquer ceci : " Il ne s'agit plus de briser l'assaut de hordes fanatiques (les Russes) lancées en vague compactes sans égard à leurs pertes... nous devons faire face à un adversaire qui applique toute son intelligence à employer ses ressources techniques... ne recule devant aucune dépense de matériel. La fougue et la ténacité ne suffisent plus pour faire un soldat, il faut qu'il ait assez d'intelligence pour en tirer le meilleur parti, et c'est précisément ce que nos adversaires savent faire.... "(La guerre sans haine, carnets personnels de Rommel publiés en 1953 par l'historien anglais Liddell Hart, p 417).

 

Rommel est conscient que les premières heures de l'assaut allié seront très importantes. Cependant, le 6 juin 1944, il se trouve en Allemagne où il fête l'anniversaire de sa femme, les renseignements en sa possession indiquant clairement qu'il n'y aura pas de débarquement avant le 15. Dans la journée, il rentre à son poste de commandement à la Roche-Guyon et tente de repousser les forces débarquées à la mer, mais il sait qu'il est déjà trop tard. Le 17 juillet 1944, il est sérieusement blessé dans une attaque aérienne au dessus du village de Vimoutier.

Le 20 juillet 1944 a lieu l'attentat contre Hitler. Rommel, qui n'a pu y participer personnellement mais qui y était fortement impliqué, est limogé de son poste et Hitler ne lui laisse que le choix du suicide, en lui garantissant sous cette condition la sécurité pour sa famille.

Quatre jours après sa mort, le 14 octobre, l'Allemagne célèbre de grandioses funérailles en l'honneur d'un chef militaire très apprécié par le peuple, meneur d'hommes et tacticien hors pair, dont l'exécution aurait terni l'image de l'État et du parti.

Il est enterré à Herrlingen.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Joseph-Simon Gallieni

1849-1916

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Portrait du général Gallieni. Source : SHD

 

Fils du lieutenant Gallieni, italien engagé dans un régiment étranger en 1829 et naturalisé français en 1841, commandant alors la garnison du Val d'Aran, Joseph-Simon naît le 24 avril 1849 à Saint-Béat.

Élève au Prytanée militaire de La Flèche, il intègre ensuite le lycée militaire de Saint-Cyr en 1868. Sous-lieutenant en 1870, il est affecté au 3e régiment d'infanterie de marine, le 15 juillet, quatre jours avant le début de la guerre franco-prussienne. Le 30 août, il reçoit l'ordre de tenir les Hauts-de-Meuse entre Mouzon et Carignan. Fait prisonnier au mois de septembre et emprisonné pendant sept mois aux côtés des membres de son unité survivants de la bataille de Bazeilles, il est détenu à la prison d'Ingolstadt puis de Magdebourg et libéré le 12 mars 1871.

De retour de captivité, il est affecté à Paris puis à Rochefort, avant de s'embarquer pour l'île de la Réunion le 1er avril 1872, où il sert pendant trois ans en tant que lieutenant. En juin 1875, il regagne la métropole et rejoint le 1er régiment d'infanterie de marine en décembre 1876. Nommé sur l'île de Gorée, il devient ensuite commandant de Thiès où il se démarque par ses qualités de diplomate, de stratège et sa volonté de "pénétrer l'âme des peuples". Le général Brière de l'Isle, à l'État-major du Sénégal, lui confie des missions d'exploration sur les vallées du Sénégal et du Niger et au Soudan. Le 29 mars 1880, par le traité de Bafoulabe, il établit le protectorat français sur le Mali. Il négocie l'année suivante avec le sultan Ahmadou le traité de protectorat français sur le Niger.

En juin 1881, de retour au 3e régiment d'infanterie, il rentre à Paris avant de prendre ses fonctions de chef de bataillon à Toulon en mars 1882. Après trois ans passés en Martinique (1883-1886), le lieutenant-colonel Gallieni s'embarque pour le Soudan en mai 1886, où il est nommé commandant supérieur, le 20 décembre, afin de rétablir l'ordre dans la vallée supérieure du Sénégal.

Commandant du 4e régiment d'infanterie de marine à Toulon en juillet 1888, puis du 8e en avril 1890, breveté de l'École de guerre, il est promu colonel à l'état-major de l'infanterie de marine en mars 1891.

De septembre 1892 à août 1896, il participe aux campagnes de pacification du Tonkin à la tête du 3e régiment de tirailleurs tonkinois. Secondé par le commandant Lyautey, il poursuit les pirates en mer de Chine et pose les bases du système colonial français.

Général de brigade en 1896, Gallieni, à la demande du ministre des colonies André Lebon, est envoyé à Madagascar, dont il devient le gouverneur général au mois de septembre. Il contraint la reine Ravanalo III à abdiquer et met en oeuvre un programme de développement économique de l'île. Promu général de division en 1899, il rentre en mission à Paris puis regagne Madagascar en juin 1900. Gallieni est nommé commandant en chef des troupes du groupe de l'Afrique orientale en 1903, deux ans avant de revenir en France et de démissionner de son poste de gouverneur général.

Commandant du 13e corps d'armée à Clermont-Ferrand en février 1906, il est promu gouverneur militaire de Lyon au mois de juin et placé à la tête du 14e corps d'armée. Nommé au Conseil Supérieur de la Guerre et à la présidence du conseil facultatif de défense des colonies en 1908, il effectue des tournées d'inspection en Afrique du Nord. Élu au Conseil Supérieur de Défense nationale en 1911, il laisse à Joffre l'opportunité de devenir commandant en chef de l'armée française.

Atteint par la limite d'âge en avril 1914, le général est rappelé le 26 août par le gouvernement Viviani pour commander le camp retranché des armées de Paris. Il réorganise totalement la défense de la capitale et obtient les renforts de la 6e armée de Maunoury, de la 45e division algérienne et du 4e corps de la 3e armée. Le 2 septembre, il reçoit les pleins pouvoirs civils et militaires. Il donne une impulsion nouvelle à la défense nationale en faisant notamment réquisitionner tous les véhicules automobiles et hippomobiles ainsi que les taxis parisiens qui jouent un rôle décisif dans la contre-offensive qui libère Paris de la menace de l'armée du Reich.

Le 8 septembre, Maunoury repasse sous les ordres de Joffre. Gallieni conserve cependant son autorité sur Paris pendant le mois de novembre et dissout son cabinet civil le 7 décembre.

À son retour au gouvernement, Aristide Briand lui propose le portefeuille du ministère de la guerre, le 29 octobre 1915. La tâche est difficile : améliorer l'efficacité du haut commandement et réorganiser le fonctionnement de son administration. Le 2 décembre, le poste de commandement en chef de toutes les armées est créé et lui est confié. Désavoué par le président du Conseil à la suite de sa proposition de réforme du haut commandement, le 7 mars 1916, il démissionne trois jours plus tard pour raisons de santé.

Hospitalisé à Versailles en avril 1916, il décède dans la nuit du 27 au 28 mai. Après des obsèques nationales, le "Sauveur de Paris" est inhumé au cimetière de Saint-Raphaël.

Joseph Gallieni est fait maréchal de France à titre posthume le 6 mai 1921. Il était Grand-Croix de la Légion d'honneur et titulaire de la Médaille militaire.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA