Marie-Pierre Koenig

1898-1970

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Portrait de Marie-Pierre Koenig. Source : SHD

 

Un homme d'exception, un militaire sorti du rang qui "appartient à l'histoire, et à jamais" (Michel Debré) ...

 

Issu d'une ancienne famille alsacienne, fils d'un facteur d'orgue, Pierre Koenig naît le 10 octobre 1898 à Caen (Calvados). Il effectue sa scolarité chez les frères des Ecoles chrétiennes. Il se porte volontaire, baccalauréat en poche, pour servir sa patrie et il est incorporé le 17 avril 1917 dans le 36e régiment d'infanterie (RI). Aspirant en février 1918, il prend part à la bataille des Flandres en mai, à la bataille du Matz en juin-juillet puis à l'offensive de l'Oise en août-septembre et aux combats de l'Ailette le mois suivant. Combattant exemplaire, il est cité à l'ordre de l'armée le 26 septembre 1918 et reçoit la médaille militaire.

La guerre terminée, Pierre Koenig décide d'embrasser la carrière des armes. Il rejoint le 15e bataillon de chasseurs alpins, sert en Haute-Silésie et dans la Ruhr (1919 à 1922) et gagne ses galons de lieutenant en 1920, avant d'être affecté dans les Alpes (1922-1923). Il officie ensuite en qualité d'officier de renseignement à l'état-major des 40e et 43e division d'infanterie des troupes d'occupation en Allemagne jusqu'en 1929. Après deux ans au 5e RI à Paris, il est envoyé au Maroc comme commandant de compagnie au 4e Régiment étranger (1931-1934) pour mener les opérations de pacification du protectorat. Détaché auprès du général Catroux à Marrakech, le capitaine Koenig conduit différentes opérations dans l'arrière pays lorsque la guerre éclate en septembre 1939.

En février 1940, il participe avec les unités détaché d'Afrique du Nord de la 13e brigade de la Légion étrangère (DBLE) au corps expéditionnaire de Norvège où il s'illustre lors des combats de Namsos. De retour en France, il assiste le 15 juin 1940 à l'entrée de la Wehrmacht à Brest. N'acceptant pas la reddition de l'armée française, il décide de rejoindre Londres avec quelques compagnons de la 13e. Il s'embarque le 19 juin à Saint-Jacut de la Mer et aborde les côtes britanniques le 21.

Chef de bataillon le 1er juillet, il participe avec ses compagnons de la 13e DBLE à l'infructueuse expédition de Dakar, puis à l'opération "Menace", reprenant le Gabon aux fidèles du gouvernement de Vichy, au mois de novembre, avant d'être nommé commandant du Cameroun en décembre 1940.

"Mutin" de son nom de guerre, rejoint les FFL au Soudan anglophone le mois suivant avant de gagner les territoires du Levant au début de l'année 1941. Lieutenant-colonel, il est le chef d'état-major du général Legentilhomme pendant la campagne de Syrie et est désigné délégué pour la France Libre à la Commission d'Armistice de Saint-Jean d'Acre à la suite de la capitulation du général Dentz. Général de brigade à titre temporaire, il oeuvre à la réorganisation des troupes françaises libres du Levant.

Commandant de la 1re division légère des FFL (ou 1re BFL), il rejoint la 8e armée britannique, combat en Libye, à Halfaya (décembre 1941 et janvier 1942), à Méchili (février 1942) et Bir-Hakeim (février-juin 1942). Il s'acquitte de sa mission "tenir coûte que coûte, jusqu'à ce que notre victoire soit définitive" (message de Koenig à ses troupes au matin du 3 juin) face à l'Afrika Korps de Rommel, et ce pendant 14 jours, du 27 mai au 10 juin 1942, permettant à l'armée anglaise de se réorganiser à Alexandrie : "en arrêtant l'avance allemande, ils [Pierre Koenig et ses hommes] permirent de gagner du temps, d'amener des troupes de Palestine et de couvrir l'Egypte" reconnaîtra Winston Churchill. Le général de Gaulle lui remet la Croix de la Libération pour ce haut fait de guerre.

Précédé par sa réputation, Koenig participe à la victoire sur les troupes de l'Axe à El-Alamein en octobre 1942. Puis, appuyant le général de Larminat, il mène ses troupes à la conquête de la Libye et de la Tunisie.

Au début du mois d'août 1943, il exerce les fonctions de chef d'état-major adjoint de l'armée à Alger. Il a pour mission d'y opérer la fusion et d'atténuer les tensions entre les troupes d'Afrique du Nord et celles de la France Libre.

À partir de mars 1944, le général Koenig entre sur la scène politique et diplomatique : il est nommé délégué du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) auprès du général Eisenhower, commandant supérieur des Forces françaises en Grande-Bretagne et commandant des Forces françaises de l'intérieur (FFI).

Il obtient notamment des Alliés le parachutage d'armes aux FFI en préparation du débarquement de Normandie, contribuant ainsi à coordonner les troupes régulières et les actions de guérilla de la Résistance.

Nommé général de corps d'armée le 28 juin 1944, il devient le premier Gouverneur militaire de Paris de la France libérée le 25 août.

Commandant des Forces françaises en Allemagne (juillet 1945 à août 1949), il reçoit ses étoiles de général d'armée le 20 mai 1946 puis est élevé à la dignité de Grand-Croix de la Légion d'Honneur. Inspecteur des forces terrestres, maritimes et aériennes de l'Afrique du Nord et vice-président du Conseil supérieur de la Guerre, il est élu à l'Académie des sciences morales et politiques et membre de l'Assemblée consultative européenne en 1951.

Désireux de participer à l'activité républicaine, Pierre Koenig se fait élire député du Bas-Rhin en 1951 (il sera réélu en 1956), et accepte la présidence de la Commission de la Défense nationale de l'Assemblée nationale (août 1951 à juin 1954). Il entre alors dans le gouvernement Mendès-France pour lequel il prend en charge le portefeuille du ministère de la défense, de juin à août 1954, poste qu'il occupe à nouveau au sein du cabinet Edgar Faure (février - octobre 1955). Il quitte la vie politique en 1958.

Pierre Koenig décède le 2 septembre 1970, à l'Hôpital Américain de Neuilly-sur-Seine. Il est inhumé dans le cimetière parisien de Montmartre après des obsèques officielles en l'Eglise Saint-Louis des Invalides.

Homme d'exception, membre du conseil de l'Ordre de la Libération, Pierre Koenig est élevé à la dignité de Maréchal de France à titre posthume par décret du 6 juin 1984.

 

Sources : Ordre de la Libération et MINDEF/SGA/DMPA

Henri Fertet

1926-1943

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Portrait d'Henri Fertet. Source : Musée de l'Ordre de la Libération

 

Lycéen en classe de Seconde au Lycée Victor-Hugo à Besançon, Henri Fertet est arrêté par les Allemands le 3 juillet 1943, condamné à mort par le tribunal militaire de la Feldkommandantur 560 pour faits de résistance, est exécuté le 26 septembre 1943.

Henri Fertet naît le 27 octobre 1926 à Seloncourt dans le Doubs dans une famille d'instituteurs.

Ses études primaires terminées, il quitte sa ville natale pour entrer en 1937 au Lycée Victor Hugo à Besançon. Elève doué et travailleur, il s'intéresse à l'archéologie et à l'histoire. Vivant sous le joug nazi depuis l'armistice de juin 1940, Henri Fertet, inspiré par l'exemple des ses augustes sujets d'étude, rejoint à l'été 1942 le groupe de Marcel Simon, secrétaire de la Jeunesse agricole chrétienne à Larnod.

En février 1943, le groupe Simon rejoint l'organisation des Franc-tireurs et Partisans et prend le nom de Groupe-franc "Guy Mocquet". Il mène alors des actions de lutte clandestine.

Henri Fertet (enregistré sous le matricule Émile - 702) participe comme chef d'équipe à trois opérations :

  • l'attaque du poste de garde du Fort de Montfaucon le 16 avril 1943 pour s'emparer d'un dépôt d'explosifs qui entraîne la mort d'une sentinelle allemande.
  • la destruction, le 7 mai, d'un pylône à haute-tension à Châteaufarine près de Besançon.
  • l'attaque, le 12 juin 1943 sur la route Besançon-Quingey, du commissaire des douanes allemand Rothe dans le but de lui prendre son arme, son uniforme et les papiers qu'il transporte.

Henri Fertet tire sur le commissaire, le blessant mortellement mais l'arrivée d'une moto les empêche de se saisir des documents. Dès lors activement recherchés, les membre du groupe sont successivement arrêtés à partir de juin 1943.

Henri Fertet est appréhendé par les forces allemandes le 3 juillet 1943 : il est trois heures du matin, le jeune homme se repose chez ses parents à l'Ecole de Besançon-Velotte. Le plus jeune des prévenus, il est alors à peine âgé de seize ans, Henri Fertet est incarcéré à la prison de la Butte (Besançon). Il comparait devant le tribunal militaire de la Feldkommandantur 560 et est condamné à mort le 18 septembre 1943. Après 87 jours de détention et de torture, ce "compagnon d'âme" de Guy Mocquet est exécuté le 26 septembre 1943 à la citadelle de Besançon.

À l'instar de ce dernier il adressera à ses parents sa dernière lettre :

"Chers Parents,

Ma lettre va vous causer une grande peine, mais je vous ai vus si pleins de courage que, je n'en doute pas, vous voudrez encore le garder, ne serait-ce que par amour pour moi.

Vous ne pouvez savoir ce que moralement j'ai souffert dans ma cellule, ce que j'ai souffert de ne plus vous voir, de ne plus sentir peser sur moi votre tendre sollicitude que de loin. Pendant ces 87 jours de cellule, votre amour m'a manqué plus que vos colis, et souvent je vous ai demandé de me pardonner le mal que je vous ai fait, tout le mal que je vous ai fait. Vous ne pouvez vous douter de ce que je vous aime aujourd'hui car, avant, je vous aimais plutôt par routine, mais maintenant je comprends tout ce que vous avez fait pour moi et je crois être arrivé à l'amour filial véritable, au vrai amour filial. Peut-être après la guerre, un camarade vous parlera-t-il de moi, de cet amour que je lui ai communiqué. J'espère qu'il ne faillira pas à cette mission sacrée.

Remerciez toutes les personnes qui se sont intéressées à moi, et particulièrement nos plus proches parents et amis. dites-leur ma confiance en la France éternelle. Embrassez très fort mes grands parents, mes oncles, tantes et cousins, Henriette. Donnez une bonne poignée de main chez M. Duvernet. dites un petit mot à chacun. Dites à M. le Curé que je pense aussi particulièrement à lui et aux siens. Je remercie Monseigneur du grand honneur qu'il m'a fait, honneur dont, je crois, je me suis montré digne. Je salue aussi en tombant, mes camarades de lycée. A ce propos, Hennemann me doit un paquet de cigarettes, Jacquin mon livre sur les hommes préhistoriques. Rendez " Le Comte de Monte-Cristo " à Emourgeon, 3 chemin Français, derrière la gare. Donnez à Maurice André, de la Maltournée, 40 grammes de tabac que je lui dois.

Je lègue ma petite bibliothèque à Pierre, mes livres de classe à mon petit papa, mes collections à ma chère petite maman, mais qu'elle se méfie de la hache préhistorique et du fourreau d'épée gaulois.

Je meurs pour ma Patrie. Je veux une France libre et des Français heureux. Non pas une France orgueilleuse, première nation du monde, mais une France travailleuse, laborieuse et honnête.

Que les français soient heureux, voila l'essentiel. Dans la vie, il faut savoir cueillir le bonheur.

Pour moi, ne vous faites pas de soucis. Je garde mon courage et ma belle humeur jusqu'au bout, et je chanterai " Sambre et Meuse " parce que c'est toi, ma chère petite maman, qui me l'as apprise.

Avec Pierre, soyez sévères et tendres. Vérifiez son travail et forcez-le à travailler. N'admettez pas de négligence. Il doit se montrer digne de moi. Sur trois enfants, il en reste un. Il doit réussir.

Les soldats viennent me chercher. Je hâte le pas. Mon écriture est peut-être tremblée. mais c'est parce que j'ai un petit crayon. Je n'ai pas peur de la mort. j'ai la conscience tellement tranquille.

Papa, je t'en supplie, prie. Songe que, si je meurs, c'est pour mon bien. Quelle mort sera plus honorable pour moi que celle-là ? Je meurs volontairement pour ma Patrie. Nous nous retrouverons tous les quatre, bientôt au Ciel.  Qu'est-ce que cent ans ?

Maman, rappelle-toi :

" Et ces vengeurs auront de nouveaux défenseurs qui, après leur mort, auront des successeurs."

Adieu, la mort m'appelle. Je ne veux ni bandeau, ni être attaché. Je vous embrasse tous. C'est dur quand même de mourir.

Mille baisers. Vive la France.

Un condamné à mort de 16 ans

H. Fertet

Excusez les fautes d'orthographe, pas le temps de relire.

Expéditeur : Henri Fertet Au Ciel, près de Dieu."

 

Sources : Ordre de la Libération - MINDEF/SGA/DMPA

Jean Vuillermoz

1906-1940

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Portrait de Jean Vuillermoz. Source : Collection Vuillermoz

 

Né à Monaco, le 29 décembre 1906, Jean Vuillermoz est initié à la musique dès sa plus tendre enfance par son père, le célèbre corniste Édouard Vuillermoz.

"Monté" à Paris à l'âge de 19 ans pour mener ses études au Conservatoire National, il est tout à la fois compositeur, chef d'orchestre et metteur en ondes à la Radiodiffusion française. Il signe aussi de superbes harmonisations de chansons folkloriques pour choeur mixte (deux chants du XVIe siècle) ou pour voix d'hommes (trois chants de la Renaissance, avec accompagnement d'orchestre).

Des oeuvres les plus significatives de son talent émergent un "Concerto pour cor et orchestre", un ballet "Veglione", une cantate pour choeurs et orchestre sur un poème d'Anatole France "Ode à la lumière", une suite d'orchestre "Le Tombeau d'Anna Favlova".

De ses divertissements pour orchestre, on peut retenir la "Promenade zoologique" (tableaux humoristiques évoquant la vie au zoo de Vincennes, près duquel demeurait le compositeur). Peu de choses de ce travail de composition ont été éditées, la plupart restant à l'état de manuscrits dont on peut admirer la calligraphie élégante et soignée datant des années précédant la Seconde Guerre mondiale.

Jean Vuillermoz était un artiste délicat, un enthousiaste qui se donnait tout entier sans rechercher la célébrité ou l'argent.

Tout particulièrement attaché à sa famille, sa femme et ses trois enfants étaient pour lui un bien sacré.

Soldat du 22e Régiment d'Infanterie de Forteresse, c'est en effectuant une patrouille aux abords de la Ligne Maginot qu'il est tué le 21 juin 1940, à Drachenbronn (Bas-Rhin).

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Gaston Monnerville

1897-1991

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Portrait de Gaston Monnerville.
Source : www.senat.fr

(2 janvier 1897 : Cayenne, Guyane française - 7 novembre 1991 : Paris)

 

Petit-fils d'esclave, Gaston Monnerville naît à Cayenne en 1897. Elève brillant, il est reçu, en 1912, au concours des bourses métropolitaines et vient à Toulouse pour y achever, au lycée Pierre de Fermat (Hôtel Bernuy), ses études secondaires comme boursier avant d'intégrer les Facultés de lettres et de droit de Toulouse.

En 1921 il devient docteur en droit après avoir soutenu une thèse sur "L'enrichissement sans cause" qui est honorée d'une souscription du ministère de l'instruction publique et primée. La même année, il est reçu au concours des secrétaires de la Conférence, il obtient la médaille d'or "Alexandre Fourtanier" qui récompense l'un des meilleurs secrétaires, puis quitte Toulouse et s'inscrit au Barreau de Paris. Il entre bientôt au cabinet d'un célèbre avocat et homme d'État, César Campinchi, dont il sera, pendant huit ans, le principal collaborateur.

En 1923, Gaston Monnerville est reçu au concours des secrétaires de la Conférence des Avocats, à la Cour d'appel de Paris. En 1927, il est élu président de l'Union des jeunes avocats et s'illustre dans plusieurs grands procès comme l'affaire "Galmot" en 1931. Inculpés après l'émeute provoquée en 1928 par la fraude électorale et par la mort suspecte du député Jean Galmot, quatorze Guyanais sont traduits devant la Cour d'assises de Nantes. Avec Fourny, Zevaes, et Henri Torres, Monnerville assure leur défense. Sa plaidoirie produit un effet considérable sur les jurés qui se prononcent pour l'acquittement.

Ce procès retentissant marque ses débuts en politique. Il se présente en Guyane, contre le député sortant, Eugène Lautier, et est élu au premier tour de scrutin, en 1932 - il sera réélu en 1936, après avoir été élu maire de Cayenne en 1935.

Deux fois sous-secrétaire d'État aux Colonies, en 1937 et 1938, sa connaissance des questions internationales et d'Outre-Mer le font choisir comme membre de la délégation française à la Conférence du Pacifique, dite "Conférence des Neuf Nations" qui a lieu à Bruxelles, en 1937, lors de l'agression du Japon contre la Chine. En 1939, Gaston Monnerville est parlementaire âgé de plus de quarante ans. Aux termes de la loi sur la Nation en temps de guerre, il n'est pas mobilisable. Avec quatre de ses collègues, il fait prendre un décret-loi, signé Daladier, qui prévoit une exception et, aussitôt, il s'engage dans la Marine. Il sert comme "officier de justice", sur le cuirassé "La Provence", expérience qu'il consignera dans un journal de bord.

Monnerville est démobilisé une semaine après le vote à Vichy des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, le 10 juillet 1940. Le 17 juillet 1940, il se rend à Vichy pour protester contre l'Armistice et la situation faite aux originaires d'Outre-Mer par le gouvernement Pétain. Dès l'hiver 1940-1941, il milite dans le mouvement de résistance "Combat" et assure la défense des personnes emprisonnées pour délit d'opinion ou origine ethnique. Sous le pseudonyme de "Commandant Saint-Just", il fait partie des maquis d'Auvergne (groupe du commandant Cheval), d'octobre 1942 à octobre 1944. Il administre de juin à août 1944 l'hôpital de Cheylade, réquisitionné par les FFI et prend part, du 7 au 10 septembre 1944, à l'opération "Bec d'Allier".

La Croix de Guerre 1939-1945, la Rosette de la Résistance et la Légion d'Honneur à titre militaire, témoignent de son courage et de son patriotisme.

 

Désigné par la Résistance métropolitaine, en novembre 1944, pour siéger à l'Assemblée consultative provisoire, il y préside la "Commission de la France d'Outre-Mer" et a l'honneur, au nom des populations de l'Union française, de célébrer, dans la séance solennelle du 12 mai 1945, la victoire des Alliés. Il prononce également, durant cette séance, un discours en hommage aux combattants de l'Outre-Mer.

En 1945, le Gouvernement provisoire de la République appelle le président Monnerville à la tête de la commission chargée de préparer le futur statut politique des territoires d'Outre-Mer. Cette commission élabore le cadre constitutionnel de l'Union française.

Élu pour la troisième fois député de la Guyane à l'Assemblée Constituante, le 21 octobre 1945, son mandat est renouvelé le 2 juin suivant, à la deuxième Assemblée nationale Constituante.

Le 15 décembre 1946, il est désigné comme vice-président de cette assemblée de Guyane. En mars 1947, il est élu président du Conseil de la République et réélu en janvier 1948. En novembre 1948, il est élu sénateur du Lot, maire de Saint-Céré (Lot) de 1964 à 1971, puis président du Conseil de la République définitif, remplacé par le Sénat, dont il assurera la présidence pendant vingt-deux ans. De mars 1974 à mars 1983, il siège au Conseil Constitutionnel.

Gaston Monnerville, grand serviteur de l'État à l'étranger, après avoir été délégué de la France en 1937 à la Conférence du Pacifique, puis en janvier 1946 à l'Assemblée des Nations Unies, représente la France en Amérique latine en 1957, en Haïti, en 1980, à l'occasion du bicentenaire de sa capitale, Port-au-Prince.

Homme de lettres, Gaston Monnerville publie en mai 1968 un ouvrage sur Georges Clemenceau, puis se consacre à la rédaction de ses mémoires, Témoignages, De la France équinoxiale au Palais du Luxembourg (1975), et Vingt-deux ans de présidence (1980).

 

Sources : Dictionnaire des parlementaires, Paris, La Documentation française - www.senat.fr

Benjamin Fondane

1898-1944

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Benjamin Fondane en 1938. Source : www.fondane.org

(Jassy, Roumanie, 14 novembre 1898 - Auschwitz, 2 ou 3 octobre 1944)

 

Benjamin Wechsler (ou Vecsler) choisit le nom de B. Fundoianu pour faire son entrée en littérature. Ecrivain précoce, il laisse une oeuvre considérable en langue roumaine. Fondane appartient à cette lignée d'écrivains roumains qui se laissèrent séduire par le rayonnement de la littérature française. Il débarque à Paris en 1923 sous le nom de Fundoianu et devient Benjamin Fondane. Malgré les espoirs qu'il avait mis en lui, Fondane n'a jamais rallié le surréalisme. En 1928 il se rapproche du groupe "Discontinuité" et éprouve de la sympathie pour le "Grand Jeu" de René Daumal.

Mais c'est la rencontre de Léon Ghestov qui est déterminante pour Fondane, infléchissant sa vie et son oeuvre. Désormais, toute cette oeuvre sera écrite en français. En 1933 paraissent simultanément son poème Ulysse et son essai Rimbaud le voyou, fort remarqué : lecture existentielle de Rimbaud, s'inscrivant en faux contre l'interprétation de Breton et des surréalistes. Quant au Faux traité d'esthétique (1938), s'il contient une vive critique du surréalisme, il présente une poétique existentielle.

La poésie de Fondane, telle qu'on la découvre dès Ulysse (1933) et Titanic (1938), est une poésie âpre, prophétique, proche du cri. Tous ses poèmes réunis sous le titre Le mal des fantômes forment une sorte d'odyssée existentielle où domine la figure d'un poète errant qui incarne le destin de l'homme, du poète et du Juif. En 1936 paraît La conscience malheureuse, son premier livre philosophique, contenant des essais consacrés à Ghestov, à Kierkegaard, à Husserl, à Heidegger... Le théâtre a toujours passionné Fondane qui écrit plusieurs pièces : poèmes dramatiques, drames métaphysiques (Le festin de Balthazar, Philoctète). Il collabore aux Cahiers du Sud où il tient la rubrique de la "Philosophie vivante".

Ayant obtenu la nationalité française en 1938, Fondane est mobilisé en 1940. Fait prisonnier, il s'évade . repris, il est libéré pour raisons de santé. Il passe l'hiver 1942 à écrire Baudelaire et l'expérience du gouffre. En même temps il met en chantier L'Être et la connaissance, essais sur Lévy-Bruhl, Ghestov et Lupasco. Son dernier essai Le lundi existentiel et le dimanche de l'histoire constitue un testament philosophique. Il y expose sa philosophie de la liberté, du possible, éclatante victoire sur l'Histoire conçue comme nécessité.

Il est arrêté en mars 1944. Interné à Drancy, il est déporté à Auschwitz où il est assassiné dans une chambre à gaz le 2 (ou le 3) octobre 1944.

Une plaque a été apposée à Paris, au 6 rue Rollin, son domicile entre le 15 avril 1932 et le 7 mars 1944.

Le nom de Benjamin Vecsler est inscrit au Mémorial de la Shoah.

 

Sources : Jutrin (Monique), dans : Célébrations nationales 1998, Paris, Direction des Archives de France, 1998 - www.fondane.org

 

Éléments de bibliographie :
Rimbaud le voyou (1933) , Le lundi existentiel, Baudelaire et l'expérience du gouffre, Le Mal des fantômes, Le Voyageur n'a pas fini de voyager, Faux-traité d'esthétique, Essai sur Lupasco.

Guy Môquet

1924-1941

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Portrait de Guy Môquet. Source : SHD

Guy Môquet naît à Paris le 26 avril 1924. Étudiant au lycée Carnot, il se passionne très tôt pour la politique et choisi, dès l'arrestation de son père, le syndicaliste cheminot et député communiste Prosper Môquet, de suivre ses traces.

 

 

Prosper Môquet

 
Prosper Môquet, le père de Guy, était cheminot et député communiste, élu en 1936 dans le XVIIe arrondissement de Paris.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Fonds de la famille Môquet-Saffray

Ancien combattant de la Grande Guerre, Prosper Môquet (1897-1986) entre à la SNCF où il milite activement à la fédération unitaire des cheminots. Membre du PCF depuis 1926, il est élu député en 1936. Malgré la dissolution du PCF en 1939, il continue à suivre la ligne du Parti et ne dénonce pas le Pacte germano-soviétique, signé le 23 août 1939. Il participe à la constitution du Groupe ouvrier et paysan français. Arrêté avec 43 autres députés de ce groupe, en octobre 1939, il est déchu de son mandat, en janvier 1940, puis, comme ses camarades, condamné, en avril, à cinq ans de prison. Il est ensuite déporté, en mars 1941, avec d'autres députés communistes, au bagne de Maison-Carrée en Algérie. Libéré en février 1943 après l'arrivée du général De Gaulle à Alger, Prosper Môquet occupera d'autres postes de député après la guerre.

 

Après l'arrestation de Prosper, Guy, sa mère Juliette et son petit frère Serge s'étaient réfugiés à Bréhal, dans la Manche. Il revient à Paris, seul, et milite avec ferveur au sein des jeunesses communistes réorganisées clandestinement. Il distribue des tracts et colle des papillons proclamant la politique du Parti, y compris après l'entrée des Allemands dans Paris, le 14 juin 1940, et la proclamation de l'État Français, le 10 juillet suivant.

 

Guy Môquet et son frère Serge

 

Guy Môquet et son frère Serge à vélo, rue Baron dans le XVIIe arrondissement de Paris, en juillet 1939.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Fonds de la famille Môquet-Saffray

 

Dans le même temps, il entretient une correspondance avec son père dont il s'efforce d'obtenir la libération. En novembre, il adresse ainsi à Édouard Herriot, président de l'assemblée nationale, un long poème en alexandrins dont voici un extrait :

"Je suis jeune Français, et j'aime ma patrie

J'ai un coeur de Français, qui demande et supplie

Qu'on lui rende son père, lui qui a combattu

Pour notre belle France avec tant de vertu".

Le 13 octobre 1940, Guy Môquet, alors âgé de 16 ans, est arrêté Gare de l'Est par des policiers français qui recherchent les militants communistes. On l'interroge. On veut lui faire livrer les amis de son père.

Incarcéré à la prison de Fresnes, le jeune militant est inculpé, sous le même chef d'accusation que son père, "d'infraction au décret du 26 septembre 1939, portant dissolution des organisations communistes". Le 23 janvier 1941, il est acquitté par la 15e chambre correctionnelle de Paris, et doit être mis en liberté surveillée.

L'intérieur de camp de Choisel en juillet 1941. Source : Amicale de Châteaubriand - Vosves-Rouillé

 

Guy Môquet n'est pourtant pas relâché. Au contraire, il est transféré à la prison de la Santé, à Paris, le 10 février suivant. L'adolescent s'impatiente, écrit au procureur mais rien n'y fait. Il est transféré à la prison de Clairvaux, dans l'Aube, puis au camp de Choisel à Châteaubriant, en Loire-Inférieure (Loire-Atlantique actuelle), où sont détenus d'autres militants communistes généralement arrêtés entre l'automne 1939 et 1940.

Arrivé le 16 mai 1941, il est à la baraque 10, la baraque des jeunes où il lie de nombreuses amitiés. Le 20 octobre 1941, trois résistants communistes, Marcel Bourdarias, Gilbert Brustlein et Spartaco Guisco, abattent, à Nantes, le Feldkommandant Karl Hotz, commandant des troupes d'occupation de la Loire-inférieure. En guise de représailles, l'Occupant décide de fusiller 50 otages.

Lettre du sous-préfet de Châteaubriant dénonçant aux autorités allemandes les détenus communistes. Source : SHD

 

Le ministre de l'Intérieur du gouvernement de Vichy, Pierre Pucheu, propose une liste comprenant essentiellement des communistes dont 27 prisonniers du camp de Choisel, parmi lesquels, Charles Michels, secrétaire général des industries cuirs et peaux CGT, Jean-Pierre Timbaud, dirigeant de la métallurgie CGT et Guy Môquet, fils de député communiste. Parallèlement, vingt et une autres personnes sont fusillées à Nantes et à Paris.

La dernière photo de Charles Michels. À ses côtés, René Sentuc. Source : SHD

 

Jean-Pierre Timbaud. Source : SHD

 

Guy Môquet va mourir. Quelques minutes avant d'être conduit sur le lieu d'exécution, alors rassemblés avec ses camarades dans la baraque 6, il écrit une dernière lettre à sa famille, cette fameuse lettre qui commence par, "Je vais mourir !", et se termine par, "Je vous embrasse de tout mon coeur d'enfant".

Enfin, il griffonne un dernier petit mot pour une jeune communiste, Odette Leclan (aujourd'hui Odette Nilès), militante de l'Union des jeunes filles de France. Il a fait sa connaissance un mois plus tôt alors qu'elle vient d'être internée au camp de Choisel et multiplie les contacts à travers une palissade de bois surmontée d'un grillage, qui sépare le secteur des garçons et celui des filles. Tombés rapidement amoureux, le jeune Guy regrette, dans ses dernières lignes, le baiser qu'elle lui avait promis.

Dernière lettre de Guy Môquet adressée à sa famille et écrite au camp de Châteaubriant, le jour de son exécution. 22 octobre 1941.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Fonds de la famille Môquet-Saffray

 

Billet de Guy Môquet adressé à Odette Leclan, internée au camp de Choisel. 22 octobre 1941.
Source : Collection Musée de la résistance nationale à Champigny-sur-Marne - Donation Odette Niles

Ce 22 octobre 1941, les vingt-sept otages sont fusillés, en trois groupes, dans la carrière de la Sablière, à la sortie de Châteaubriant. Ils avaient refusé qu'on leur bande les yeux et, dans leur dernier souffle, crièrent "Vive la France".

Le lendemain, les Allemands dispersent dans plusieurs cimetières des environs les corps de ceux que le général de Gaulle qualifie, dès le 25 octobre suivant, dans un discours à la radio, de "martyrs" : "En fusillant nos martyrs, l'ennemi a cru qu'il fallait faire peur à la France. La France va lui montrer qu'elle n'a pas peur de lui."

Le 22 octobre 1944, premier anniversaire de la fusillade après la Libération.
Le parti communiste français organise la première cérémonie du souvenir à laquelle assiste l'ensemble des forces de la Résistance. Source : SHD

 

Le corps de Guy Môquet est par la suite transporté au cimetière parisien du Père Lachaise (carré 97) pour être inhumé aux côtés de son frère et de sa mère. A titre posthume, Guy Môquet est chevalier de la Légion d'honneur et est titulaire de la Croix de Guerre et de la Médaille de la Résistance.

Le 22 octobre 1963, commémoration en honneur des victimes de Châteaubriant. Source : SHD

 

Le 22 octobre 1963, commémoration en honneur des victimes de Châteaubriant. Source : SHD
 

Emile Muselier

1882-1965

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Portrait d'Emile Muselier. Source : SHD

 

Émile Henry Muselier, est né à Marseille le 17 avril 1882 et décédé à Toulon le 2 septembre 1965. Il est élève à l'École navale de 1899 à 1901. De cette date à 1939, il fait une brillante carrière où il alterne postes en unité (Extrême-Orient de 1902 à 1905, Yser en 1915...) et dans la haute fonction publique (membre des cabinets de Painlevé, de Jeanneney et de Clemenceau). Enseigne de 1re classe en 1902, il est promu lieutenant de vaisseau en 1912, capitaine de vaisseau en 1926, contre-amiral en 1933 et vice-amiral en 1939.

Mis à la retraite peu après sa dernière promotion, il rejoint le général de Gaulle à Londres le 30 juin 1940. Celui-ci lui confie la mission de créer les Forces navales françaises libres (FNFL) et les Forces aériennes françaises libres (FAFL). Il assure ses fonctions de chef des FNFL jusqu'au 30 avril 1942.

Devenu commissaire à la Marine au sein du Comité national, il dirige en décembre 1941 l'expédition qui aboutit au ralliement de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il démissionne du Comité national le 3 mars 1942.

Il rejoint le général Giraud à Alger en mai 1943 et est nommé adjoint au commandant en chef des Forces maritimes d'Afrique en juin.

Après la fusion des FNFL avec les Forces maritimes d'Afrique du Nord, il est relevé de ses fonctions en août 1943.

Il est nommé chef de la délégation navale à la mission militaire de la Défense nationale chargée des affaires allemandes en septembre 1944. Il quitte le service actif en juin 1946.

Jusqu'en 1960, il travaille en tant qu'ingénieur conseil à la maison Laignel. Il s'occupe également d'organisations d'anciens combattants, d'anciens fusiliers marins de la première guerre mondiale, et est nommé Président d'honneur de l'Union Franco Belge des Combattants de l'Yser et des Flandres, et Président de l'Association Nationale d'Entraide à la Vieillesse.

Le vice-amiral Muselier était Grand officier de la Légion d'honneur, Compagnon de la Libération et Compagnon de l'Ordre du Bain. Il était en outre titulaire de la Croix de guerre 1914-1918 et de la Croix de guerre théâtres d'opérations extérieures.

Parmi ses publications, on notera Marine et Résistance (1945) et De Gaulle contre de Gaulle (1946).

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

Robert Desnos

1900-1945

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Portrait de Robert Desnos. Source : http://perso.orange.fr/d-d.natanson/desnos.htm

 

Robert Desnos naît à Paris le 4 juillet 1900 et passe son enfance dans le quartier des Halles. Peu intéressé par l'école, il préfère l'univers des bandes dessinées et des romans d'aventures. A 16 ans, il devient commis dans une droguerie. En 1918, ses premiers écrits paraissent dans La Tribune des jeunes, et son recueil de poèmes Le Fard des argonautes est publié dans une revue d'avant-garde, Le Trait d'union, en 1919. L'année suivante, il découvre le mouvement Dada avec Benjamin Perret et André Breton, groupe qu'il rejoint après son service militaire effectué au Maroc.

Quand le surréalisme, qui marqua tant la littérature de l'entre-deux-guerres, remplaçe le dadaïsme, Desnos en devient un acteur primordial : l'écriture automatique, le rêve sous hypnose, engendrent d'étranges poésies et aphorismes : Prose Sélavy, L'Aumonyme, L'asile ami...

"La lame qui tranche l'affliction

des âmes dévoile-t-elle aux amis

la fiction de l'affection ?"

 

(Prose Sélavy)

 

 

Entre 1924 et 1929, il est rédacteur de La Révolution surréaliste, mais aussi comptable, caissier, journaliste à Paris-Soir puis au Soir, partageant peu à peu sa vie sentimentale entre la chanteuse Yvonne George - qui meurt en 1930 - et Youki Foujita. De cette époque datent La liberté ou l'amour, La mystérieuse, Siramour. En 1926, il s'installe dans le quartier Montparnasse, côtoyant les frères Prévert, Raymond Queneau, Joan Miro.

Savoir si l'esprit surréaliste est ou non compatible avec un engagement politique - le communisme - provoque la scission du groupe et oppose à coups d'injures Desnos, Prévert, Soupault et quelques autres, à Breton, Aragon, Eluard...

Dans les années trente, l'activité de Desnos évolue : il écrit moins, se lançant dans la radio - réalisateur d'émissions, rédacteur publicitaire - dans la chanson, le cinéma. Issu d'un milieu modeste, il veut que la culture imprègne la vie de tous.

 

"La lune, nid des vers luisants,

Dans le ciel continue sa route.

Elle sème sur les enfants,

Sur tous les beaux enfants dormants,

Rêve sur rêve, goutte à goutte."

 

(Chantefables et Chantefleurs)

 

Mais l'artiste qu'il est perçoit comme un danger pour la liberté les tensions internationales : il rejoint le Comité de Vigilance des Intellectuels Antifascistes, milite en faveur des républicains espagnols, endosse sans complexe l'uniforme en 1939.

Démobilisé après la défaite de juin 1940, il entre au journal Aujourd'hui. En 1942, il intègre le réseau de Résistance "Agir", participe à l'action de la presse clandestine et retrouve la littérature sous forme de pamphlets et de romans (Maréchal Duconno, Etat de veille...).

 

"Je suis le veilleur de la Porte Dorée

Autour ou donjon le bois de Vincennes

épaissi ! les ténèbres

J'ai entendu des cris

dans ta direction de Créteil

Et des trains roulent vers l'est

avec un sillage Je chants de révolte."

 

(Destinée arbitraire)

 

Le 22 février 1944, Desnos est arrêté et emmené à la prison de Fresnes. Le camp de Compiègne-Royallieu, où il est transféré le 20 mars, est la première étape de sa déportation. Le 12 mai, il doit partir pour Buchenwald.

Le 25 mai, il gagne le camp de Flossenburg puis, le 2 juin, le commando de Flohä. Lorsque les Alliés pénètrent en Allemagne, les Nazis font évacuer les camps, exécutant les déportés ou les lançant dans d'épouvantables marches jalonnées de morts.

Parti le 14 avril 1945, Desnos arrive ainsi à Theresienstadt (Terezin) en Tchécoslovaquie, ville délivrée par les Russes le 8 mai suivant. Atteint de typhus, il s'éteint le 8 juin 1945.

Ses restes mortels reposent à Paris, dans le cimetière du Montparnasse.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

 

Max Jacob

1876-1944

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Portrait de Max Jacob. Source : photo Carl van Vechten, Library of Congress

 

 

Le futur poète naît à Quimper (Finistère), le 12 juillet 1876, dans une famille juive originaire de Prusse. C'est en 1888 que celle-ci change son nom d'Alexandre en celui de Jacob.

Fils d'un tailleur, ses études au lycée de Quimper, son classement à la 8e place du concours général de philosophie et son entrée à l'école coloniale, ne semblent pas le prédisposer à la vie artistique qu'il débute en 1897 en "montant à Paris". Attiré par l'esprit des nouvelles tendances artistiques, il rencontre Picasso en 1901 et fréquente assidûment les artistes du "Bateau-Lavoir" où lui-même s'installe en 1911. En 1903, il publie Histoire de Kaboul 1er et du marmiton Gauvain.

Nombre de ses ouvrages vont être illustrés par ses amis : Derain pour les oeuvres burlesques et mystiques du frère Matorel, Pablo Picasso pour Le siège de Jérusalem, Juan Gris pour Ne coupez pas mademoiselle...

Converti au catholicisme en 1909, il est baptisé le 18 février 1915 au couvent de Sion à Paris, Picasso étant son parrain. Au cours des années 1916-1917 - ayant été réformé, il ne participe pas à la Première Guerre mondiale - il adopte le surréalisme d'où naît Le cornet à dés.

En 1921, il choisit de se retirer à Saint-Benoît-sur-Loire, habitant le monastère. Dans une poésie en prose ou en vers, Max Jacob continue de laisser filer son ironie, sa sensibilité, dans un choc d'images et de mots atteignant le burlesque.
 
 
 
 

"Les manèges déménagent,

Ah ! Vers quels mirages ?

Dites pour quels voyages

Les manèges déménagent."

(Pour les enfants et les raffinés)

Le Laboratoire central, La Couronne de Voltaire, Visions infernales paraissent entre 1921 et 1924. Mais en 1927, il regagne Paris, capitale d'une vie littéraire la plus riche peut-être du XXe siècle, et centre des batailles artistiques. Il y reste neuf ans avant de revenir dans le Loiret, écrivant, récitant ses poèmes, exposant ses gouaches dans la galerie que Christian Dior vient d'ouvrir.

La guerre, à laquelle il avait échappé vingt ans plus tôt, le rejoint sous la forme des mesures anti-juives. En 1943, son frère Gaston est déporté. Puis c'est le tour de sa soeur, Mirthé-Léa, au début de 1944. Le 24 février 1944, Max Jacob est arrêté et conduit à la prison d'Orléans. Transféré le 28 février au camp de Drancy, il y meurt le 5 mars d'une pneumonie. Enterré au cimetière d'Ivry, son corps est ré-inhumé le 5 mars 1949 à Saint-Benoît-sur-Loire.

"Le Paradis est la ligne de craie

sur le tableau noir de ta vie V

as-lu l'effacer avec les diables

de ce temps ?"

(Folklore)

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA

 

 

Léon Gambetta

1838-1882

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Portrait de Léon Gambetta. Sources : SHD

 

Léon Gambetta naît à Cahors le 2 avril 1838, ville d'adoption de Joseph, un génois, et de Marie Madeleine Orasie Massabie, fille d'un pharmacien de Molières, cité du Tarn-et-Garonne. Très jeune, Léon se fait remarquer par son intelligence et sa prodigieuse mémoire. Il devient interne au petit séminaire de Montfaucon avant de poursuivre sa scolarité au lycée de Cahors. Candidat au Concours général, il décroche le prix de dissertation française puis le baccalauréat ès-lettres en 1856, à 17 ans.

Au grand dam de son père qui aurait voulu le voir lui succéder dans les affaires, le jeune homme, orateur talentueux, part pour Paris en janvier 1857 et s'inscrit à l'École de droit afin d'embrasser la carrière d'avocat. Il demande la nationalité française le 29 octobre 1859 et l'obtient. Il soutient sa thèse de licence en droit le 19 janvier de l'année suivante et prête serment le 8 juin 1861.

Ses premières plaidoiries le mettent en rapport avec les groupes parlementaires d'opposition de "gauche" (les Républicains). L'affaire de la souscription Baudin (1851) le révèle en 1868. Ce procès est intenté par le gouvernement impérial contre les journaux favorables à une souscription en vue d'édifier un monument à la mémoire de cet élu tué sur les barricades, faubourg Saint-Antoine, aux côtés du peuple de Paris, le 3 décembre.

Le jeune avocat prononce pour l'occasion un réquisitoire contre le régime de Louis Napoléon Bonaparte.

En janvier 1870, député de la circonscription de Marseille, il s'oppose au gouvernement d'Emile Ollivier dont le ralliement à Napoléon III est perçu comme une traîtrise par les républicains. Gambetta appelle cependant à l'union nationale et vote les crédits militaires à la veille de la guerre. Dans la nuit du 3 au 4 septembre, Léon Gambetta, après avoir vainement tenté d'apaiser la situation insurrectionnelle née de l'annonce de la capitulation de Sedan, proclame la déchéance de l'Empire, dans un Palais Bourbon envahi par la foule. À l'Hôtel de Ville, il assiste à la proclamation du Gouvernement de Défense nationale auquel il est associé aux côtés de Jules Simon et Ernest Picard. Il s'installe de son propre chef au ministère de l'Intérieur et ordonne la destitution des préfets de l'Empire. Il organise en même temps la défense de la capitale.

Le 7 septembre, dans Paris assiégée, Léon Gambetta apparaît comme l'homme providentiel. Face à un gouvernement débordé par la situation, il anime la Défense nationale en province. Gambetta incarne alors la résistance à l'occupant prussien. Il s'envole en ballon pour rejoindre la délégation de Tours, via Montdidier, Amiens et Rouen, ajoute le département de la guerre à son portefeuille, met sur pied des armées nouvelles, veille à l'encadrement et au ravitaillement des troupes, crée des manufactures, multiplie les déplacements, les instructions et les discours appelant à "prolonger la guerre jusqu'à l'extermination". Au même moment la capitale subit le siège des impériaux : la ville est bombardée, la population est affamée. Adolphe Thiers finit par mandater (22 janvier 1871) Jules Favre, chargé des affaires extérieures, auprès de Bismarck afin de convenir d'un armistice. Gambetta est écarté de la scène politique et des négociations en raison d'un décret qu'il a signé à Bordeaux rendant inéligibles les membres des assemblées de l'Empire. Il démissionne le 6 février.

Gambetta est élu sur neuf listes lors des élections générales du 8 février 1871 : dans l'Est, à Paris, à Marseille, en Algérie. Il choisit le Bas-Rhin. Il vote contre la paix et marque sa volonté de récupérer les provinces perdues. De retour de sa retraite à Saint-Sébastien, ayant perdu son siège de député le 2 juillet, il fait campagne dans les Bouches-du-Rhône et dans la Seine.

Député de la Seine, Gambetta forme un parti parlementaire d'extrême gauche, " l'Union républicaine", fonde un journal, La République française, multiplie les allocutions en province au cours desquelles il fustige la politique conservatrice de l'Assemblée nationale, et affiche un anticléricalisme militant. Dans la tumulte de la souveraineté républicaine restaurée, il participe aux débats qui donnent naissance aux lois constitutionnelles, et contribue à faire voter l'amendement Wallon le 28 janvier 1875.

Léon Gambetta s'applique ensuite à promouvoir le nouveau régime, lors de la campagne électorale pour le scrutin de janvier et de février 1876. À Bordeaux (13 février), il énonce les réformes nécessaires : séparation des Églises et de l'État, création d'un impôt sur le revenu, rétablissement de la liberté de réunion et d'association, mesure qu'il renvoie à des temps "opportuns" par crainte de heurter l'électorat rural, le plus nombreux démographiquement. Le vote du 20 février consacre son travail. Gambetta est élu dans plusieurs circonscriptions et opte pour Belleville. Le maréchal de Mac-Mahon cependant ne l'appelle pas dans son ministère. Il lui préfère des personnalités plus "à droite". Gambetta profite de la crise née de la constitution du ministère de Broglie pour fédérer le vote républicain et provoquer la dissolution de la Chambre - ce sera son unique victoire dans sa vaine tentative de rassembler les partis de gauche.

Tacticien et orateur de premier plan, Gambetta fait sienne la campagne électorale de l'été jusqu'à prononcer dans son discours de Lille (15 août), à l'adresse du Président de la République, la phrase "se soumettre ou se démettre", propos qui lui vaudront une condamnation de trois mois de prison, peine qu'il n'effectuera pas. Ayant accédé à la "sainteté républicaine", il préfère cependant le 3 septembre promouvoir Jules Grévy à la fonction de chef de l'État et demeurer au second plan.

Les crises politiques se succèdent . Gambetta s'oppose au maréchal de Mac-Mahon avec véhémence. Il finit par obtenir sa démission, ce dernier ayant refusé de signer le décret de mise en disponibilité des dix généraux de corps d'armée (20 janvier 1879). Refusant à nouveau de prendre la tête du régime, Gambetta laisse Jules Grévy succéder à Mac-Mahon et se contente de la présidence de la chambre (31 janvier 1879).

D'une fonction symbolique dont il s'acquitte élégamment, Gambetta, ne constituant plus un obstacle politique aux yeux du président Grévy, accède à la présidence du conseil le 10 novembre 1881. Il croit alors enfin pouvoir faire de la France un pays stable et pacifique réuni autour de l'idée républicaine. Le nouveau chef de l'État tente de mettre en place un grand ministère réunissant l'ensemble des grandes figures de "gauche". Jules Ferry, Léon Say, Henri Brisson, Charles de Freycinet, les chefs de mouvements déclinent l'offre. Son gouvernement à peine formé (14 janvier 1882) est renversé au bout de 74 jours à la suite d'une proposition de loi sur les modes de désignation des sénateurs et d'élection des représentants à la chambre. Freycinet lui succède entouré de ceux-là mêmes qui avaient refusé de lui apporter leur concours.

Léon Gambetta se désengage alors de la vie politique. Il s'installe dans la région de Nice, ne prend plus part aux débats si ce n'est le 18 juillet 1882 pour demander le maintien de la présence française en Egypte.

Replié aux Jardies (Ville-d'Avray), en compagnie de Léonie Léon, Gambetta est victime d'un accident d'arme à feu qui le contraint à garder le lit pendant le mois de novembre. Cette inactivité lui est fatale. Il succombe à la suite d'une infection intestinale et d'une appendicite non opérée, le 31 décembre 1882.

Héros républicain, "père" fondateur de la IIIe République, Léon Gambetta est une personnalité incontournable pour "arriver à comprendre qu'un régime initialement moderne et populaire, celui de Napoléon III, ait été remplacé par une république qui ajoutait, à ces mêmes mérites, celui d'un libéralisme profond" (M. Aghulon). Ses obsèques, nationales, sont organisées le 6 janvier 1883. Des monuments lui seront élevés dans toute la France : à Bordeaux (25 avril 1905), à Nice (25 avril 1909), etc. Celui installé dans le jardin des Tuileries disparaîtra sous l'occupation allemande.

 

Source : MINDEF/SGA/DMPA