Les combats d’Argonne, 1915
Situé entre la Champagne et Verdun, le massif forestier d’Argonne constitue un verrou entre ces deux zones majeures des combats de la Grande Guerre. Dans ce secteur coupé de multiples ravins et recouvert de profondes forêts, la guerre se fait dans de difficiles conditions et prend un caractère singulier. De septembre 1914 à l’automne 1918, les assauts français et allemands se transforment rapidement en de sanglantes et d'inutiles mêlées.
Au lendemain de la bataille de la Marne (6-12 septembre 1914), la Ve armée allemande se retranche dans la partie nord de la forêt d'Argonne pour stopper la 3e armée française. Le front se stabilise. Progressivement de profondes tranchées sont creusées. Dès octobre 1914, l'ennemi, pour déborder le camp retranché de Verdun, multiplie les assauts.
Au début de l'année 1915, l'armée française applique la dramatique stratégie de "grignotage" où la lutte pour un mur la conquête d’une ruine devient une victoire retentissante dans les communiqués officiels. Resté dans la mémoire des Poilus comme le "bois de la tuerie", le bois de la Gruerie est, depuis l'automne 1914, le théâtre d’une lutte terrible. Sergent au 272e régiment d’infanterie, Marc Bloch (historien et résistant fusillé en 1944) évoque dans ces notes de guerre le souvenir de ces combats entre ces tranchées séparées parfois que de quelques mètres. Les assauts se multiplient au bois de la Gruerie comme en d'autres secteurs de l'Argonne et permettent de gagner quelques centaines de mètres, bien vite perdus. Les pertes humaines sont importantes. En 1916, le front perd en intensité même si des opérations aux effets limités y sont conduites notamment sur la colline de Vauquois.
En septembre 1918, les troupes américaines du général Pershing et la 2e armée française doivent enlever ce massif forestier puis poursuivre les Allemands vers la Meuse. En octobre, cette opération s’intensifie et l’armée allemande se retire sur la rive droite de la Meuse. Les buttes de Vauquois et de Montfaucon sont ainsi libérées. Quelques jours plus tard l’armistice du 11 novembre est signé.
La mémoire des fusillés pour l’exemple
En août 1914, après avoir perdu contact avec son unité, le soldat Victor Schmitt est recueilli par le 147e régiment d’infanterie (RI). Jugé et condamné pour abandon de poste en présence de l’ennemi, il est fusillé pour l’exemple à Florent-en-Argonne à l’âge de 34 ans.
Au sein de la nécropole nationale, repose le corps de Louis-François Lepenant. Originaire de la Manche, il est affecté au sein du 25e RI au sein duquel il combat sur la Marne, puis en Artois. En juillet 1915, au cours d’un violent bombardement, il perd ses esprits et quitte les premières lignes. Considéré comme déserteur, il rejoint son régiment où il doit être jugé. A l’issue d’un conseil de guerre spécial, il est fusillé à Moiremont. Son corps repose sous la tombe 1758.
Dans le cimetière communal de Florent-en-Argonne sont inhumés trois fusillés pour l’exemple, les soldats Séverin Maurice mort le 24 octobre 1914, Benoît Louis mort le 4 octobre 1915 et dont le nom a été inscrit sur le monument aux morts de Salviac (46) en 2012, et Marcel Painsant mort le 21 décembre 1915.