Les étrangers dans les collections du musée de la Résistance nationale
Créé en 1985 par d’anciens résistants, le musée de la Résistance nationale est situé à Champigny-sur-Marne, à l'est de Paris, sur les bords de la Marne. Ce « musée de France » abrite une des collections les plus riches sur la Résistance française.
Depuis ses origines, l’histoire du musée de la Résistance nationale est intimement liée au thème de la participation des étrangers à la Résistance en France. À ses débuts, l’association pour la création d’un musée de la Résistance, fondée en 1965, recrute principalement dans un cercle proche des anciens Francs-tireurs et partisans (FTP) et parmi les combattants de la Main d’œuvre immigrée (FTP-MOI). Le noyau de la collection se constitue grâce à leurs donations. Le musée conserve ainsi les archives rassemblées par David Diamant, journaliste et mémorialiste des résistants de la MOI. La collecte d'archives et de documentation lui permet de concevoir, dès 1947, la première grande exposition consacrée aux FTP-MOI, Les juifs dans la Résistance.
Depuis, la collection s’est considérablement enrichie de nouveaux fonds témoignant de l’action des résistants étrangers dans de multiples réseaux et mouvements. Ces résistants viennent d’horizons divers : Italiens antifascistes, Juifs fuyant les persécutions en Europe, Espagnols antifranquistes, etc. Ils participent à toutes les formes de résistance : la presse clandestine (on trouve au musée une trentaine de titres de journaux en langue étrangère), le renseignement, les activités de faussaire et de sauvetage (comme Oscar Rosowsky au Chambon-sur-Lignon) ou encore le sabotage et la lutte armée (fonds Joseph Epstein). Le musée conserve également les archives de deux groupes d'antifascistes allemands et autrichiens exilés en France : le Travail (anti-)Allemand et le Comité Allemagne libre pour l'Ouest.
L’action des étrangers dans la Résistance se révèle aussi au travers des archives de la répression comme les fichiers de police des commissariats d’Ivry-Vitry comprenant des fiches de recherches de résistants étrangers. Acte ultime de la répression, les dernières lettres de résistants fusillés sont les pièces les plus emblématiques conservées au musée. Celles émanant de résistants étrangers révèlent leur attachement à la France et à ses valeurs universelles.
Au sein des armées alliées, on retrouve des étrangers d’environ 75 pays participant à la Libération. La collection du musée est riche de clichés pris lors des défilés de cette période : guérilleros espagnols du Sud-Ouest, antifascistes allemands en Corrèze et dans le Gard, combattants FTP-MOI arméniens de la compagnie Marat à Marseille, sujets de l’empire colonial français ou encore étrangers ayant rejoint la France libre. Dès l’automne 1944, le Comité d'action et de défense des immigrés (fonds Justin Godart), tente de faire valoir les droits de résistants étrangers. Cette action se poursuit plus tard, en lien avec les liquidateurs des mouvements et organisations de résistance (fonds de liquidation), pour l’obtention de cartes de combattant volontaire de la Résistance et de pensions. On note toutefois que la plupart des résistants étrangers ne revendiquent pas leur appartenance à une communauté nationale dans l’immédiat après-guerre. Il est donc souvent difficile de les identifier dans nos fonds autrement que par un patronyme aux consonances étrangères, souvent dissimulé derrière une fausse identité ou un pseudonyme.
Les expositions réalisées par le musée de la Résistance nationale rendent compte de cette histoire. En 1985, le musée ouvre ses portes avec l’exposition temporaire Les antifascistes allemands dans la Résistance. En 1998, l’exposition Les étrangers dans la Résistance, commandée par la présidence de l’Assemblée nationale, est un succès. Installée en 1999 dans le hall de la gare Auber du RER, elle touche 250 000 visiteurs et incite des associations à faire don de leurs archives au musée (anciens FTP-MOI du bataillon Carmagnole-Liberté, 35e brigade Marcel Langer à Toulouse).
Avec l’entrée de Missak Manouchian au Panthéon en février 2024, notre musée s’est une nouvelle fois inscrit dans cette mémoire en valorisant les archives FTPMOI de la région parisienne sous un angle inédit avec l’exposition itinérante Missak Manouchian : art, histoire, mémoire.
Articles de la revue
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Le dossier
Les étrangers dans la France libre
Durant la Seconde Guerre mondiale, la résistance au nazisme est l’œuvre d’hommes et de femmes de toutes conditions sociales et de toutes nationalités. Des étrangers, fuyant leur pays pour des raisons politiques ou économiques, se sont engagés dans ce combat, souvent jusqu’à la mort.
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L’évènement
Missak Manouchian, un résistant étranger au Panthéon
Sur la montagne Sainte-Geneviève à Paris se dresse le Panthéon,temple dédié aux grands hommes et grandes femmes de la Nation. Son administratrice, Barbara Wolffer, revient sur cet événement majeur qu’a constitué l’hommage rendu au résistant étranger Missak Manouchian,amoureux de la France et mort po...Lire la suite -
L’entretien
Entretien avec Denis Peschanski
Historien français spécialiste de la Seconde Guerre mondiale, directeur de recherche émérite au CNRS, président du conseil scientifique et d’orientation de la mission Libération, Denis Peschanski a publié de nombreux travaux sur le régime de Vichy, la propagande d’État et la Résistance en France. Il...Lire la suite