Libérer la France

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Entraînement des fusiliers marins commandos français en Écosse en 1943
Entraînement des fusiliers marins commandos français en Écosse en 1943 - © Mémorial de Caen

Sommaire

    Cartes
    Organisation des troupes terrestres allemandes à la veille du débarquement du 6 juin 1944.
    Opération Overlord.
    Le débarquement et la percée des Alliés sur le secteur de Sword Beach le 6 juin 1944.
    Le débarquement et la bataille de Provence.
    Les maquis en France.
    Lieu, date et nombre de victimes de massacres perpétrés par les troupes allemandes.
    L'offensive alliée en Alsace (Novembre-Décembre 1944).
    La libération du territoire.

    En résumé

    DATE : 11 mai 1945

    LIEU : France

    OBJET : Reddition des troupes allemandes repliées sur Saint-Nazaire

    ISSUE : Fin de l’occupation allemande sur l’ensemble du territoire

    FORCES EN PRÉSENCE : France, Alliés, Allemagne

    Les Alliés qui débarquent en France occupée le 6 juin puis le 15 août 1944 concourent indéniablement à la libération du territoire, au soulèvement des populations et à la mobilisation des résistants. Pour autant, ils n’opèrent pas seuls. Les forces armées françaises se sont elles aussi engagées, des plages de Normandie à la libération de l’Alsace.

    Pour des raisons essentiellement politiques, l’ordre de bataille de l’opération Overlord n’a pas pris en compte les grandes unités françaises. Cependant, parmi les 156 000 combattants engagés en Normandie figure une poignée de Français : 177 fusiliers marins commandos aux ordres de Philippe Kieffer. Débarqués les premiers sur Sword Beach, ils ont pour mission de faire tomber la position fortifiée de l’ancien casino de Ouistreham. L’objectif est réalisé en milieu de matinée, mais au soir du 6 juin, alors qu’il a pris position à l’est de l’Orne, le Commando Kieffer a déjà perdu un quart de ses effectifs.

    Au large des plages du Débarquement, les forces navales françaises sont également présentes : douze bâtiments parmi 6 000 navires alliés, chargés d’assurer la sécurité des convois. Les corvettes Aconit et Renoncule devant Utah, les frégates Escarmouche, L’Aventure et la corvette Roselys sur Omaha, la frégate La Surprise et les corvettes La Découverte et Commandant-d’Estienne-d’Orves sur Gold. Les croiseurs Montcalm et Georges-Leygues sont chargés de pilonner devant Omaha la batterie de Longues-sur-mer, tandis que le torpilleur La Combattante, en place devant Juno Beach, protège le flanc droit des Canadiens. Enfin, le cuirassé Courbet a traversé la Manche pour sa dernière mission : se saborder le 9 juin au large de Sword Beach afin de servir de brise-lames.

    Parmi les 11 600 avions engagés enfin, une centaine d’appareils de chasse ou de bombardement appartenant aux groupes Cigognes, Île-de-France, Alsace-Lorraine, Berry, Guyenne et Tunisie participent aux missions aériennes précédant et suivant le Jour J. Le 6 juin, le Squadron 342 (groupe Lorraine) reçoit la délicate mission de larguer un écran de fumée devant les plages américaines pour masquer l’approche de l’armada. Lors de l’assaut terrestre, les groupes Cigognes, Île-de-France et Alsace sont employés à la protection des secteurs anglo-canadiens du débarquement.

    Les paras français sautent sur la Bretagne

    Mais avant même le déclenchement de l’assaut, d’autres troupes spéciales françaises sont entrées en scène dans le cadre de l’opération Overlord, cette fois-ci en Bretagne. Afin de consolider la tête de pont de Normandie, les Alliés ont en effet concentré leur attention sur la résistance bretonne qui pouvait fixer les 150 000 Allemands stationnés dans la région. Des parachutistes français du 4e SAS du commandant Bourgoin sont alors déployés sur la Bretagne pour encadrer les maquisards et les Forces françaises de l'intérieur (FFI) mobilisés sur le terrain.

     

    décrochage Saint-Marcel

    SAS et maquisards photographiés le 20 juin 1944 après le décrochage du maquis de Saint-Marcel (Morbihan) © OBL/Musée de la Résistance bretonne

     

    Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, les sticks des lieutenants Marienne et Déplante sont largués dans le Morbihan, entre Plumelec et Guehenno (mission Dingson). Dans les Côtes-du-Nord, les groupes Botella et Deschamps atterrissent près de la forêt de Duault (mission Samwest). Ils forment l’échelon précurseur d’une vaste opération aéroportée prévue deux jours plus tard et devant déployer 18 équipes de sabotage. Si cette opération se déroule sans incident, elle est plus délicate dans le Morbihan où le groupe Marienne atterrit à proximité d’un poste allemand. Rapidement cernés et à bout de munitions, les Français doivent décrocher. Parmi les prisonniers, le caporal-chef Émile Bouëtard, déjà blessé, est froidement abattu. Il est le premier Français à trouver la mort le 6 juin 1944.

    Attaquée par les Allemands dès le 12 juin, la base Samwest doit se disperser le 13 au soir. Dans le Morbihan, le maquis de Saint-Marcel est entré en action dès l’annonce du Débarquement, réceptionnant les SAS chargés de coordonner l’action des FFI et des Francs-tireurs et partisans (FTP) nombreux à affluer mais souvent privés d’armes. Des dizaines de parachutages permettent d’armer rapidement entre 3 et 4 000 hommes. Alertés par ces parachutages, les Allemands décident alors de passer à l’action.

    L’artillerie et les blindés allemands, appuyés par l’équivalent d’une division, s’élancent le 18 juin vers la base de Saint-Marcel défendue par 2 500 hommes dont 140 parachutistes. Les combats sont violents, les résistants se replient dans la soirée, laissant à terre une trentaine d’hommes. Pendant plusieurs jours, une terrible chasse à l’homme est organisée dans la région. 42 Français sont tués dont 6 parachutistes et des dizaines d’autres blessés, des villages incendiés. Le lieutenant Marienne est abattu le 2 juillet, avec 5 autres SAS.

    Le 4 août, l’ordre d’insurrection générale est finalement lancé alors que les Américains s’engouffrent en Bretagne. Malgré l’échec du maquis de Saint-Marcel, la résistance bretonne aidée par les SAS devait contribuer activement aux victoires américaines en Bretagne.

    Les Français dans la bataille de Normandie

    Sur le front des Britanniques, l’action du Commando Kieffer se poursuit au-delà du 6 juin. Pendant deux mois, à l’est de l’Orne, privés de renforts, les commandos mènent une guerre de position à quelques centaines de mètres des lignes allemandes. Seules des patrouilles de nuit permettent de maintenir le moral des troupes tout en donnant à l’ennemi l’impression d’un surnombre du côté allié. Le repli allemand du 15 août permet le retour à la guerre de mouvement. Les Français livrent le 20 août à l’Épine leurs derniers combats, se portent jusqu’à Pont-L’Évêque avant de regagner l’Angleterre le 8 septembre 1944. Ils laissent derrière eux 17 camarades tués dans les combats.

     

    Leclerc Normandie

    Débarquement du général Leclerc et de la 2e DB à Utah Beach en Normandie, 1er août 1944. © ECPAD-Défense

     

    Entre-temps, une autre unité française a pris pied en Normandie. Débarquée sur la plage de Saint-Martin-de-Varreville le 1er août, les 16 000 hommes de la division Leclerc sont venus renforcer la 3e armée américaine qui s’apprête à déferler au sud de la Normandie. La 2e DB gagne Avranches le 8 août, Le Mans le 9, avant de remonter vers le nord pour participer à la fermeture de la poche de Falaise.

    Après avoir enlevé Alençon le 12 août, Leclerc assiste au repli de l’ennemi et s’impatiente alors que Paris s’est soulevé depuis le 10 août. Le groupement du colonel de Langlade est engagé le 19 août près du Mont Ormel où combat la 1re DB polonaise qui vient de refermer la nasse sur ce qu’il reste de la 7e armée allemande. Trois jours plus tard, le commandement américain autorise enfin Leclerc à foncer sur Paris. La bataille de Normandie aura coûté 860 hommes dont 135 tués à la 2e DB.

    "En marche vers la capitale"

    L’arrivée de la 2e DB, la progression alliée, l’annonce du débarquement de Provence ont fortement encouragé le soulèvement du peuple parisien. Tout commence par une grève des cheminots le 10 août 1944, relayée par les policiers avant d’aboutir à une grève générale. Tandis que la mobilisation générale est décrétée le 18 août, les insurgés investissent les édifices publics tels la Préfecture de police et l’Hôtel de Ville. Après le rejet d’une trêve, les combats de rue entre FFI et Allemands reprennent avec intensité. Paris se couvre de barricades à partir du 22 à la suite de l’appel lancé aux Parisiens de descendre dans les rues. Comprenant que le peuple de Paris ne pourra tenir très longtemps, Eisenhower se laisse convaincre par le général de Gaulle d’y envoyer la division Leclerc. Devant être contourné par les Américains, Paris apparaît dès lors sur leur feuille de route.

    En marche vers la capitale le 23 août, Leclerc mène de sérieux combats autour de Longjumeau, la Croix-de-Berny et Fresnes. Alors qu’il espérait arriver dans Paris avant la nuit, ses chars les plus avancés stationnent le 24 août au pont de Sèvres et à Bourg-la-Reine. Impatient, il donne l’ordre au capitaine Dronne de gagner Paris pour annoncer l’arrivée de sa division pour le lendemain. Vers 21 h 30, le groupement Dronne atteint l’Hôtel de Ville à la grande surprise de la population venue acclamer les libérateurs. Le lendemain, dans une entrée triomphale, Leclerc se rend à la gare Montparnasse, y établit son PC, tandis que ses groupements tactiques investissent Paris. L’acte de capitulation signé dans l’après-midi par le général von Choltitz est accompagné d’une vingtaine de cessez-le-feu destinés à tous les points de résistance allemands. Certains, comme ceux du palais du Luxembourg ou de l’hôtel Crillon, ne se rendront qu’en fin de soirée.

    Victoire militaire et politique - Paris n’a pas été détruit et le général de Gaulle apparaît comme le chef incontesté - la libération de Paris a néanmoins un coût humain : 1 000 morts et 1 500 blessés chez les FFI, 600 morts et 2 000 blessés du côté des civils, 130 tués et 225 blessés dans les rangs de la 2e DB. Au moment même où Paris s’insurgeait, les Alliés débarquaient en Provence le 15 août 1944. L’objectif ? Porter un coup décisif à l’ennemi en établissant une tête de pont à Toulon, avant de s’emparer de Marseille puis de progresser vers Lyon pour faire la jonction avec les forces d’Overlord. Pour cette opération Dragoon, quatre divisions françaises ayant combattu en Italie et trois autres regroupées en Afrique du Nord, principalement nord-africaines, formaient l’armée B du général de Lattre, intégrée à la 7e armée américaine.

    Les Français du 15 août

    Les premiers Français à entrer en scène sont ceux du lieutenant-colonel Bouvet. Mis à terre le 14 août à minuit, 750 commandos d’Afrique détruisent les batteries du cap Nègre avant de protéger le flanc du débarquement. À l’autre extrémité du dispositif, 67 combattants français du groupe naval d’assaut corse doivent faire diversion sur Antibes et Nice. Mis à terre entre Théoule et le Trayas, piégés dans des champs de mines, ils laissent derrière eux 10 morts et 28 prisonniers. Les principales vagues de combattants français se regroupent le matin du 16 août autour de Cogolin et Grimaud après avoir débarqué sans encombre en baie de Cavalaire et dans le golfe de Saint-Tropez. Très en avance sur son planning, de Lattre préconise alors un coup d’audace : prendre Toulon par surprise en attaquant simultanément sur Marseille.

     

    débarquement Provence

    Débarquement des éléments de la 3e DIA (division d’infanterie algérienne) dans la région de Saint-Tropez, août 1944. © Auclaire/ECPAD/Défense

     

    Trois divisions françaises convergent vers Toulon : la 3e division d’infanterie algérienne (DIA) au nord, la 1re division motorisée au sud, la 9e division d’infanterie coloniale (DIC) à l’est. Après trois jours de combats, la jonction se réalise le 23 août dans le secteur de La Valette et du Mont Faron. Entrées les premières dans la ville, les unités de la 3e DIA atteignent le fort de Malbousquet, la gare et l’Arsenal. Sous les assauts des tirailleurs et des Chocs, la Poudrière Saint-Pierre tombe, tandis que la Tour Beaumont, la Croix Faron et le fort Saint Antoine sont libérés avec l’aide des FFI. Les forts Lamalgue, Malbousquet, Artigues et les ouvrages du Mourillon cèdent face aux tirailleurs de la 9e DIC. Le 26 août, la bataille de Toulon s’achève avec la libération de La Seyne et la capture de 25 000 Allemands. À Marseille, l’insurrection décrétée le 20 août a conduit les FFI, maîtres de la ville mais à court de moyens, à réclamer l’aide des troupes régulières. La 3e DIA investit rapidement le cœur de la cité, le 23 dans la matinée. Les combats font rage dans le quartier Saint-Charles et de Notre-Dame-de-la-Garde. Le 25 août, deux groupements sont envoyés contre les derniers nids de résistance de la zone portuaire, de l’Estaque et de Notre-Dame-de-la-Garde, tandis que les batteries toujours actives du Racati et du Cap Janet sont pilonnées. Le 26 au soir, le fort Saint-Nicolas et le sud de la ville sont définitivement nettoyés. Le 28 août, 7 000 Allemands déposent les armes, trente-six heures après la chute de Toulon.

    Remonter vers la Bourgogne

    Dans leur progression vers la Bourgogne et afin de couper la retraite allemande vers l’est et vers le Rhin, les Alliés lancent le 2e corps français sur l’axe Chalon-Dijon-Épinal-Strasbourg. La remontée est fulgurante. Saint-Étienne est libéré le 1er septembre. Lyon évacuée par les Allemands est investie le 3 septembre par la 1re DFL. Beaune est libérée le 8 septembre, Autun le 9 après de violents combats alors que Dijon abandonnée dans la nuit du 10 au 11 retrouve sa liberté à son tour. Rapidement investie et malgré de vives résistances à la citadelle, Langres est libérée le 13 septembre. La veille, le 1er régiment de fusiliers marins de la 1re DFL est entré en contact, à Châtillon-sur-Seine et Nod-sur-Seine, avec le régiment de spahis marocains de la division Leclerc. Overlord et Dragoon sont alors réunis avec quatre mois d’avance sur les prévisions. Le 15, de Lattre reçoit l’ordre de se regrouper face aux Vosges pour l’offensive sur l’Alsace.

     

    défilé Dijon

    Après la libération de Dijon, défilé des troupes de l'armée française et des FFI devant l’Hôtel de ville, 13 septembre 1944. © Auclaire/ECPAD/Défense

     

    La mobilisation des maquisards

    D’autres batailles sont menées par les forces clandestines opérant désormais au grand jour. En Normandie, à proximité de la zone du Débarquement, les maquis ont surtout fourni aux Alliés de précieuses informations dans la préparation des zones d’attaques d’Overlord. En Bretagne, le maquis de Saint-Marcel qui s’est immédiatement engagé n’a pas survécu à l’attaque du 18 juin. Loin du front normand, ce sont surtout les grands maquis mobilisateurs qui ont fixé l’attention de l’occupant.

     

    Maquis du Vercors col de la Croix haute

    Maquis du Vercors, col de la Croix haute, 11 juillet 1944. © coll. Maurice Bleicher

     

    À l’annonce du Débarquement, 4 000 maquisards ont rejoint le Vercors transformé en camp retranché. Confiants dans l’imminence des renforts, les FFI ont même proclamé la République du Vercors. La réaction de l’ennemi aux parachutages du 14 juillet ne se fait pas attendre. Le 21 juillet, 40 planeurs lancés sur les plateaux appuient les attaques de la 157e division d’infanterie allemande et de la Milice. Le plateau est nettoyé durant deux jours. Jusqu’au 27 juillet, de terribles représailles sont exercées sur les maquisards en repli et leurs blessés, exécutés dans la grotte de la Luire et dans les villages du plateau. L’absence de soutien aérien, un plan de mobilisation trop léger, l’insuffisance des moyens militaires sont autant de facteurs ayant conduit au drame du maquis du Vercors. Dans les réduits d’Auvergne, la levée en masse des FFI a rassemblé 5 500 combattants au mont Mouchet, et dans les massifs de la Truyère et du Lioran. Une première attaque est rejetée le 2 juin 1944 au sud du mont Mouchet où se sont regroupés 2 700 hommes. Galvanisés par le Débarquement, les maquisards essuient le 10 juin un deuxième assaut. Dans la nuit, la retraite vers le sud est ordonnée, laissant 160 morts. La troisième attaque sur le réduit de la Truyère est déclenchée le 20 juin 1944.

    Après avoir perdu 123 des leurs, les maquisards échappent à l’encerclement. Une fois de plus, l’engagement de la Résistance restait coûteux.

    Des FFI à l’armée régulière

    Evacué par les Allemands depuis la mi-août, le Sud de la France se libère souvent sous la seule action des FFI. Depuis Bordeaux, libéré le 28 août, 76 000 Allemands se replient vers Dijon. Fermant la marche, la colonne Elster (20 000 Allemands) est harcelée de toute part. Une colonne française rassemblant des FFI aux ordres du colonel Schneider doit couper son repli. Tandis que les troupes de tête parviennent à rallier Dijon, Elster doit se rendre le 10 septembre aux Américains puis aux maquisards le 11, à Issoudun. Dans le Pas-de-Calais, le Nord, l’Aisne, la Meuse, la Meurthe-et-Moselle et les Vosges, l’action des FFI permet dans le même temps la poussée alliée sur la Meuse et la Moselle. Le phénomène des FFI devient si important à la fin de l’été que leur intégration au sein de l’armée régulière s’impose. 105 000 hommes rejoignent ainsi la 1re armée en octobre 1944. 20 000 autres combattants seront incorporés à la nouvelle 27e division d’infanterie alpine sur le front des Alpes, tandis que sur le front atlantique, maquisards et FFI assureront le siège des zones fortifiées allemandes.

    Honorer le serment de Koufra

    Après plus d’un mois de combat, les unités françaises sont épuisées, affaiblies par des pertes et des difficultés logistiques importantes. Tenant solidement leurs positions, les Allemands empêchent les Alliés de déferler en Alsace. Déclenchée le 25 septembre, l’attaque française doit contourner Belfort entre Gérardmer et le Ballon d’Alsace. Après trois jours de combat, alors que les cols vosgiens sont en vue et que la percée est décidée, de Lattre doit renoncer pour faire face à l’allongement du front vers le nord. La 3e DIA va y livrer de sérieux combats tandis que la 1re DFL, au sud, maintient la pression. La poussée américaine vers la Bresse est telle que la ligne de front ennemie est brisée le 17 octobre. Mais l’exploitation ne peut avoir lieu, tant les troupes paraissent usées par les combats et la résistance allemande. Près de 4 000 hommes ont été mis hors de combat dont 800 tués. L’espoir de déboucher dans la plaine d’Alsace s’éloigne définitivement lorsque de Lattre décide de reporter l’effort de son armée dans le secteur du 1er corps.

     

    Leclerc Strasbourg

    Le général Leclerc salue les troupes rassemblées sur la place Kléber à Strasbourg le 26 novembre 1944 lors d'une cérémonie ayant lieu après la libération de la ville par sa division.
    © Castelli/ECPAD/Défense

     

    Pour exécuter leur grande offensive vers Strasbourg et l’Allemagne, les Alliés ont assuré aux troupes françaises un engagement très important en Alsace. Elles s’élancent le 14 novembre, libèrent Montbéliard le 17 puis Belfort le 25. Depuis le 19 novembre, la 1re armée est sur le Rhin tandis que Mulhouse est investie le 20. Le 24, le ballon d’Alsace est pris par la 1re DFL. La jonction entre les deux corps d’armée est alors réalisée, encerclant au passage près de 10 000 Allemands. Initialement réservée au 6e corps américain, la prise de Strasbourg a été confiée à la 2e DB plus en avance. Le groupement tactique Rouvillois pénètre le premier dans Strasbourg le 23 novembre. La ville est nettoyée durant deux jours jusqu’à la reddition allemande. En faisant hisser le drapeau tricolore sur la cathédrale, le général Leclerc fait alors respecter le serment tenu devant ses hommes à Koufra le 1er mars 1941 de "ne déposer les armes que lorsque le drapeau tricolore flotterait de même sur Metz et Strasbourg".

    Six mois après le Débarquement du 6 juin, l’impact psychologique de cette libération ne doit pas masquer la réalité militaire sur le terrain : la France est loin d’être libérée. Les efforts des Alliés, portés désormais sur l’entrée de leurs propres troupes en Allemagne, laissent les armées françaises face à d’importantes responsabilités : assurer l’effort principal pour défendre Strasbourg, réduire la poche de Colmar, libérer les réduits formés sur des fronts oubliés - les poches de l’Atlantique et la frontière des Alpes - où les Allemands résistent toujours. D’autres batailles à mener pour une libération totale du pays, qui deviendra effective avec la reddition de Saint-Nazaire, le 11 mai 1945.

    Auteur

    Stéphane Simonnet - Chercheur à l'université de Caen Normandie

    En savoir plus

    Nous, les Hommes du commando Kieffer, Stéphane Simonnet, Tallandier, 2019

    Les Français dans le Débarquement, Stéphane Simonnet, Orep Editions, 2019

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